Je me dirige vers le chenil, le coeur lourd. Tout mon corps refuse le moindre pas, je ne pense qu’à faire marche arrière. Mais mon cerveau me dicte d’avancer jusqu’au bout de cette petite allée. Raïka tire sur la laisse, elle sent bien le coup venir. Je prie la terre entière qu’au fond elle puisse comprendre que c’est pour son bien. J’attache la laisse avec beaucoup de difficulté. Les adieux sont horribles et me brisent ce qu’il reste de mon coeur.

C’est officiel, je viens de l’abandonner. Au bord d’une route délabrée. Je suis misérable. Il y a des jours où j’aimerais m’abandonner moi-même, faire une croix sur cette vie que je ne supporte plus. Je n’ai plus d’échappatoire. Même la nicotine ne me procure pas le même soulagement qu’avant. Je sens bien que je suis à un tournant de ma vie où une décision s’impose. Il devient vital et obligatoire pour moi, aujourd’hui, de prendre un virage. Mais lequel ?

La nuit ne m’a pas vraiment porté conseil. Il est encore rentré ivre mort. Pour une fois, Raïka n’a pas été son souffre douleur. J’ai fini par réussir à l’éloigner, mais j’en suis personnellement incapable. Et j’ai pris le double de d’habitude, je suis à nouveau défigurée.

La douleur m’a retardée mais je suis enfin arrivée au bord de cet éperon rocheux. Je me suis toujours dit que le jour où ça deviendrait intenable, je viendrais là. J’y suis. Aujourd’hui, sauter est le prix de ma liberté.