Ceux de mes silences

2 minutes de lecture

(A mes parents)

Ils se sont aimés
comme on s’accroche à une bouée
au milieu d’une mer trop agîtée.

Une guitare.
Une voix qui vibre jusque dans mes os.
Des chansons d’avant,
des souvenirs pas encore à moi
mais que j’ai appris par cœur.

Elle,
le rire fort,
les mains pleines de tâches à faire
le cœur aussi remplis.
Des enfants partout.
Des perles à trier.
Des petits bonheurs en morceaux de rien.

Lui,
debout puis tombé
puis debout quand même.
Un corps qui a dû tout réapprendre.
Des silences qui faisaient de l’écho.
Des marguerites.
Des bras de bois
et des doigts d’accords.

Ils ont commencé
dans un trou à courant d’air
où les bambous faisaient barrage.
Ils ont construit à coups de rien,
de tronçonneuse,
de rires fatigués
et de pain dur.

Parfois y’avait pas d’ampoule,
mais toujours une bougies.
Pas toujours d’électricité
mais toujours un feu ardent.
Pas toujours de pain,
mais jamais moins d’amour.

Ils n’étaient pas parfaits.
Et pourtant,
ils ont tout su faire.
Des murs, des repas, des câlins,
des miracles avec trois sous.

Il y avait les dimanches à chanter
et les soirs à attendre que ça passe.
Il y avait moi,
asthmatique,
fragile dans le chaos
mais jamais seule.

Quand lui s’est éteint
il ne restait plus rien à dire.
Il avait déjà tout dit
avec sa guitare,
avec ses mains,
avec son dos trop abîmé
et ses silences devenus des cris étouffés.

Elle l’a porté,
à bout de bras, à force d'amour.
jusqu’à ne plus pouvoir.
Son corps s’est mis à pleurer par tous les côtés.
Le cœur noyé.

Les poumons à bout de soufllent
Le rein trop seul.
Et la voix de mon père dans ses nuits.

Moi, je suis là.
Seule.
Mais pas seule.
Leurs présences partout.
Leurs absences encore plus.

Je les revois,
dans le vieux canapé,
lui qui râle,
elle qui sourit,
le chien dans les pattes,
la télé trop forte,
le monde dehors
et nous dedans.

Ce qu’on avait ?
Rien.
Mais c’était immense.
C’était eux.
Et c’était beau.

Je me souviens
de leurs défauts
comme d’une berceuse cassée
qu’on aime encore plus
parce qu’elle grince un peu.

Ils étaient
parfaitement imparfaits.
Et moi
je les aime encore comme ça.
Cassés.
Fatigués.

Remplis de leur rires

De leur amour

De mes souvenirs éternels.

Et J'essaie

J'essaie de ne pas me laisser engloutir

par le manque, le vide

le silence

la guitare muette

le bruit des perles dans l'assiette

disparus, envolés.

Il ne reste que moi

Moi et mes souvenirs.

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