— On arrête nos chevaux-là et ensuite on descends la colline ? proposa la Cogne.

La chasseuse de prime sauta agilement de son mustang, et fit quelques pas en direction du campement de bandits avant de s'armer de son fusil.

Lancaster déjà en main ; et moins décidée à être raisonnable que son acolyte, la Gâchette, se porta à sa hauteur et rechigna à mettre pied à terre.

— Okay, fais-gaffe le gars à un ours. Tu t'en occupe ?

— Je m'en occupe, assura la Cogne.

— Je passe par derrière, annonça la Cogne.

La Gâchette cherchait déjà une caboche à exploser.

— Je vois l'ours, il est dans le coin du campement là-bas.

— Très bien.

La Cogne, n'avait nullement vue l'ursidé dans sa cage, mais décida tout de même de le traquer.

Loin de se préoccuper de ce détail, la Gâchette lança rageusement l'assaut contre les hors-la-lois. Lois, dont le seul alinéa qu'elle semblait avoir mémorisé était la mention « mort ou vif » des affiches de chasses aux primes.

En un instant ce fut le chaos total. La chasseuse de prime tirait en tout sens. On lui tirait dessus en tout sens. La Gâchette n'avait été guère attentive au debriefing, elle avait retenus que le type était Russe, qu'il était redoutable, qu'il avait un ours et trois chiens et qu'il buttait des gens. La Cogne était, elle, capable en plus de tout cela de réciter le passage où il devait finir sous les verrous pour la sécurité des citoyens.

Dans le chaos de la bataille, les deux compères se rejoignirent au centre du campement et, dos à dos, abattirent les derniers membres du gang.

— Ne tirez pas ! On sors !

Poussant devant lui un otage, le Russe fit enfin son apparition. Tout son gang avait été décimé, il ne restait plus qu'eux pour en découdre.

— S'il vous plais, supplia le US marshall en direction des chasseuse de prime.

La Cogne cherchait déjà un moyen de le sauver. La Gâchette tenait toujours sa lancaster chérie en main.

— Si je pars, il viens avec moi ! Menaça le hors-la-lois.

Vive comme l'éclair, et soucieuse de toucher une pleine prime, la Cogne visa la main du criminel pour le désarmer.

Deux déflagrations retentirent au même moment.

— Mais ! Tu l'a tué ? S'étonna la Cogne.

— Je visais la tête du marshall, se justifia sa complice.

Ignorant les remerciements de l'officier, elle entrepris prestement de faire les poches de sa nouvelle victime, puis en fit de même avec de plus anciennes.

— On nous tire dessus ! S'exclama la Cogne.

Ni une ni deux, sa complice se mit à répliquer face à leurs assaillants.

Ni une ni deux, la Cogne emporta le cadavre du Russe sur son cheval.

— On y vas ! Fonce !

Rechignant à abandonner le combat, la Gâchette siffla sa monture. Le pauvre animal hennissait de peur tandis que les balles sifflaient tout sens.

— Vite ! Vite ! Vite ! Hurla la Cogne.

Résignée, la Gâchette céda enfin et lança son cheval à la suite de sa complice.

— Et le marshall, il nous suis ?

— Aucune idée, avoua la Gâchette.

Sa lancaster adorée en main, il était clair qu'il ne fallait pas la faire chier pendant sa mission d'escorte. Ce cadavre arriverait sain et sauf chez le shérif. Et son acolyte aussi !

Fière d'elles, mais un peu déçut d'avoir échoué à leur mission, la Cogne stoppa son mustang devant le bureau du shérif et déposa le corps aux pieds de ce dernier. Il jeta un regard au macchabée, l'identifia malgré le trou de balle de fusil qui ornait son front et accepta de payer les deux chasseuses de primes. Un peu moins que prévus, la justice ayant été délivrée plus tôt qu'espéré.

— Encore une chasse aux primes et je pourrais m'acheter un arc, annonça la Cogne.

Cherchant du regard quelques bestioles à tirer avec son fusil d'amour qu'elle aimait trop, La Gâchette n'écoutait guère plus que la promesse d'une prochaine chasse aux primes et beaucoup de fun.