C'est une place dans le centre historique de Fréjus. On apprend que dans les années de Jésus, la ville s’appelait Forum Julii, la place publique de Jules (sous-entendu Cesar). A l’ombre des platanes, on savoure une blonde en se laissant aller à la rêvasserie qui nous tient tête, pieds en savates et cœur léger. Ici comme ailleurs, les pérégrins ne s’aventurent pas dans les ruelles ombragées qui, à cette heure de marienne, sont désertes et muettes. Sûr qu’ils sont tous en bas, à se faire grâler entre deux immersions dans la grande bleue (qui ne l’est vraiment que dans les clapots des criques). Alentour de notre bock, la serveuse va et vient entre la terrasse et la taverne. Visage las mais souriant de celle qui, d’un coup d’œil, sait son monde, globe-trotter ou gars d’ici, celui qu’est fin connaisseur de la poutargue ou celui, fade et anonyme, qui habite au-delà de la ligne qui fait le sud, là où les paysages gras et fastueux du Nord laissent la place à ceux, plus hiératiques, de la Provence : collines arasées, arbres rabougris, terres aux couleurs de Sienne, le ciel plus grand que la terre. Elle va et vient la serveuse, l’œil sur le porche de Saint-Léonce et l’autre sur celui de l’hôtel de ville. Je repense à François Léotard, à cette droite dans ses bottes. Et puis cette pensée qui fait tâche : ici, la droite extrême, c’est 52,91 % des suffrages.