Fantasmagories
J'ai les crocs, j'ai les veines en prose, témoin de la tragédie des siècles, je suis jais, je suis marbre.
J'ai l'air accroc, j'ai toujours en main le toucher de ses joues cuproses, cartésien de mélodies espiègles, je veux aller prier à la Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre.
Je t'aimais trop, Leyla.
Ma terre est faible, mon sang est trop épais. J'ai des devoirs lourds, contractés auprès de la galaxie, des secrets qui hantent mes envies passionnelles. Je suis un crime contre l'autorité, je soutiens le syndicat des fées. Mes temps sont comptés.
J'ai des visions de territoires oubliés, je suis un ancien des pyramides, un laboureur de tombeau, un donneur de vie.
Le divin me déchire, me libère, <<m'eccentrise>>.
أنا خائف من نفسي
Je peins des tableaux remontants des abysses de ma folie, cette adresse ne m'appartient pas. J'ai des parties uniques isolées qui se touchent, j'ai la maladie de Da Vinci. Je suis un collectionneur de chats et de corbeaux, de bateaux et de fers de chevaux.
Le temps est venu pour moi d'ouvrir mon œil aux cieux.
Je vois une ligne, courbe.
Ensuite, Delaunay.
Puis, Klimt m'aveugle de beuglements d'or.
Et bigle, Schiele, orfèvre du graphite me noircit, me noircit, d'algèbres des profondeurs, de topologies supérieures, de pornographies au crayon rouspéteur.
Ils ne me comprennent pas, la dame de catéchèse m'interdit de poser des questions, le professeur de philosophie me donne des notes immondes. Ils me mettent dans un coin, me pointent du doigt.
Leur orgueil me regarde droit dans les yeux et leur cœur regarde vers le bas, je vois mon frère.
Je suis épais de fables, je dois faire revivre Kacou Ananzè.
Je suis épais de failles, je dois faire revivre le surréalisme.
Ma passion réside dans le détour de pensées par le cœur, comme l'attrape-coeurs de J.D. Salinger, j'ai sur les femmes, les gens, le roman, la prose des effets que n'aurais jamais imaginé. Ce n'est pas ce que je voulais.
Mes racines sont des veines de lumières, mon feuillage est un exceptionnel courant de vents, mes fruits sont amers et durs au croquer comme ceux du cyprès et tendre à la chair comme la couleur rose-yaourt. Je suis le roi noir, le poète toujours habillé en noir.
Je viens de six-pieds sous terre pour être enterré au soleil, je suis un misérable.
Écrire est plus farouche qu'exister. Écrire, c'est douter de la réalité avec un ton de sobriété. J'ai des totems, le serpent, le crocodile, l'attiéké. Non, je blague, mais la dame me connaît pour mes arriérés.
Consigner nos états vitreux, faire sortir et confesser nos miroirs, c'est exorciser la feuille, c'est faire noir de blanc. Je suis maudit. Aucun homme bien portant n'est sain. Plus clair cela semble, plus noir est la chair.
L'on cambriole la créativité, l'on dévisage le néant, l'on supervise le chaos tout en dansant comme un derviche les outils en main, la débauche nous attrapant par le pied.
J'entends les dieux, ce sont les sensations sur ma peau. Je connais les adresses de tous les oiseaux.
Les voix, les voix...
Elles m'empêchent de dormir, elles me récitent tant de versets du Necronomicon, elles me révèlent dans mes insomnies des pays cachés, voilés. Les voix me torturent, m'épuisent la santé.
Et ce n'est que lorsque je prends la feuille qu'elles s'affaiblissent. J'ai horreur des poèmes qu'on nous lit à l'école, j'ai un dédain pour toutes ces règles inutiles.
Je me sens "Justin Hurwitz, Planetarium", j'ai les mains en papier, flottant gré saugrenu du vent, comme les voiliers.
Suis-je doué ou suis-je maudit ?
أنا أشعر بالملل
Quand j'écris je pleure des vents, quand j'écris je suis surhumain.
Je veux être bon, mais je me sens nul. J'écrirai encore la nuit venue, le sommeil sabordant mon imagination et je verrai Maupassant dans sa gloire.
Des trois d'Alexandre Dumas, Je suis l'homme au masque de fer. Je suis aussi la véritable histoire du horla.
Leyla me manque.
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