Terre

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 Le portail est ouvert et un énorme véhicule blindé entre dans ce hangar de transit. Il admire les roues de l'engin qui font deux fois sa taille, puis il tente de regarder dehors. La lumière est trop forte, mais rien ne peut le faire changer d'avis. Après tout, il n'a plus rien à perdre, il va pour se lever, mais dans son mouvement, il fait vaciller l'une des caisses, qui finalement ne tombe pas. Cet incident est vite remarqué par les robots. Pas d'autre choix, il doit se battre pour sortir.

 Il court alors avec rage avant de rencontrer sur son passage un robot, puis deux. Ils sont de plus en plus nombreux. Il commence à frapper. Il lutte et se bat contre ces choses qui tentent de le traîner à l'opposé de la sortie. Il se débat, saisit l'un d'eux par la nuque, tire un coup sec et voilà que, comme désactivée, cette chose s'étale au sol, inanimée, les yeux noirs et éteints. C'est la clé.

 Le portail se referme, il doit faire vite. Il débranche alors tous ceux qu'il peut, s'extirpe de cette masse de robots et entame sa course vers la sortie, une sortie qui est de plus en plus étroite. Un autre robot est sur son chemin, mais pas d'hésitation ; il se jette sur lui et lui arrache la colonne vertébrale qui lui sert de carte mère. Il avance lentement vers la liberté, laissant derrière lui un amas de fibre de carbone que forment tous ces cadavres de robots. Il avance, la lumière face à lui, aveuglé, mais déterminé. Un blanc puissant perce à travers ses paupières.

 Le portail se referme derrière lui. Il continue d'avancer. Lentement.

 Quelle sensation agréable que de sentir l'air sur sa peau, sur son corps peu vêtu. Ses yeux s’adaptent peu à peu à la lumière. Il sourit, puis éclate de rire. Ensuite, ce sont les sanglots qui le gagnent. Des sanglots de joie. À genoux, il pose ses mains au sol. Puis s'allonge sur le dos. Il se calme, respire, se repose là sur ce sol noir.

 Son sourire est vite effacé par l'incompréhension. Il penche la tête sur le côté, regarde sa main empoigner la matière sur laquelle il repose. Il se tourne et constate qu'il n'y a plus rien. C'est un désert dont les dunes ne sont que des cendres. Sa peau le démange et des plaques rouges se répandent progressivement sur son corps. Il s’essouffle. Il fait horriblement chaud. L'air est étouffant. Sa bouche s'assèche et sa peau se craque lentement.

 Soudain, il repense à tout ce qui vient de se passer. Les informations radiophoniques et télévisées qui ont été diffusées en boucle il y a peu, ce robot qui l'a traqué, poursuivi, puis séquestré dans un fourgon blindé et dans ce cube de verre. Puis il se rappelle le regard de ce robot dans la pièce lugubre du bâtiment, ce regard qu'il lui a porté avant de l'endormir. Il se rappelle son épaule qui a été remboîtée, le plateau-repas et cette immense étendue de vie artificielle. Le projet Vivari-Homme. « Un paradis recréé pour vous ».

 Depuis le début, ces robots ne lui voulaient qu'une chose, lui comme à tous les hommes, comme à tout ce qui vit sur Terre. Ils n'avaient qu'une mission : tout sauver au plus vite de cette catastrophe planétaire ; l'éruption solaire.

 Il se rend compte de ce qu'il vient de manquer. Il a manqué l’opportunité de vivre, de survivre à cela. Il pleure. Hurle de rage, mais aussi de douleur. Il est en train de mourir lentement, brûlant sous ce soleil bien trop chaud. Sa peau craquée laisse apparaître les chairs qui sèchent de suite et explosent en de multiples cloques. Ses poumons asphyxiés provoquent un souffle d'agonie. Il est trop faible pour bouger, il ferme les yeux, relâche ses muscles et se laisse partir. Son corps se morcelle, ses cris s'estompent, sa chair se consume. Rapidement, les premières flammes gagnent sa tenue de fortune, calcinant ce qui reste de ses chaires.

 Bientôt, il ne reste que des cendres de son corps. Des cendres parmi des cendres, dans ce désert de braises, là, à quelques mètres d'un paradis recréé pour lui.

Fin

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