Artisan du malheur (18)

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Il lui tend un bouquet d’ancolies blanches et de belles de nuit. Il les a cueillies lui-même. Elle sourit devant sa naïve timidité, mais n’en est pas moins touchée.

Tu m’offres des fleurs ?

Chez nous, les hommes en offrent aux dames de leurs pensées. Ça ou des bijoux. Mais je sais que c’est mal interprété chez vous.

Je vois que tu t’es renseigné, se moque-t-elle gentiment. Offrir un bijou à une demoiselle revient à lui dire que sa beauté seule ne suffit pas. Ceci dit, les fleurs sont en principe réservées aux époux et aux fiancés. Nous ne sommes ni l’un ni l’autre. Tu aurais dû te contenter d’un présent utile, comme une dague ou un ceinturon.

Son visage se décompose et il se met à lorgner ses orteils.

Navré, marmonne-t-il, je ne voulais pas commettre d’impair.

Elle glousse.

Je sais. Merci pour cette attention. Elles me plaisent beaucoup.

C’est vrai ? Mais tu sais, ça peut s’arranger.

Quoi donc ?

Nous pourrions nous marier. Et je pourrais t’offrir d’autres fleurs.

Elle reste sans voix. Il s’approche et glisse une main vers sa taille. Son premier réflexe est de s’esquiver. Mais il tient bon et la serre contre lui. Elle peut sentir son cœur battre contre sa poitrine. Ou peut-être est-ce son cœur à elle ?

Je suis sérieux, insiste-t-il. Je pourrais en parler à ton père, il m’apprécie. Et moi, je… je t’aime, Naïa.

Voyons, Saule…

Il plaque ses lèvres contre les siennes et le monde semble basculer.

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