La recette

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La foule s’agitait après un long moment d’attente sur la place Poivron. Les portes de la ville qui étaient fermées depuis plus d’une semaine s’entrouvraient peu à peu. Cela ne pouvait signifier qu’une seule chose… Ils étaient de retour ! Plus d’une trentaine de guerriers regagnait la tribu, fière de les accueillir. Les premiers hommes à franchir l’entrée tenaient encore fermement leurs armes recouvertes de sangs séchés. Leurs visages portaient les marques d’une traque éreintante de plusieurs jours, mais le sourire qu’ils abordaient était quant à lui signe de réussite. Onze hommes suivirent, tractant avec force le gibier fraîchement chassé. Derrière eux, le reste de la troupe portait sur leur dos des paniers d’osier tressés contenant bon nombre de fruits et de légumes. Composé d’un amas rocheux définissant ses bords et s’étendant sur plus de neuf cents mètres de haut, le village de Karott était à l’abri de tous les regards. Pas moins de trois cents personnes y habitaient et chacune contribuait à sa prospection. Quatre classes étaient au pouvoir avec tout d’abord les chasseurs, constitués des hommes et femmes les plus forts. Vinrent ensuite les goûteurs. Leur rôle était, comme leur nom l’indique, de goûter en petite quantité les aliments préparés par la classe des cuisiniers. Cette fonction était essentielle dans le village, car elle permettait d’éviter aux chasseurs de tomber malades après avoir ingurgité des produits de mauvaise qualité. Les cuisiniers préparaient les repas dans une énorme cuve située au sommet du village. Les artisans, en dernière position dans la hiérarchie du village, s’occupaient de la confection de toutes sortes d’objets résultant des restes des animaux. Les peaux de bête servaient d’équipements aux chasseurs. Après avoir réceptionné le gibier et les différents légumes, les cuisiniers se mirent à l’ouvrage. Tout d’abord, ils firent dorer les oignons, l’ail et la viande. Ils ajoutèrent ensuite de la farine pour enrober la viande. Une fois ceci fait, ils placèrent les pommes de terre, le navet et les carottes dans la cuve. Après avoir assaisonné le tout de sel et de poivre, il ne restait plus qu’à laisser le mélange mijoter durant plusieurs heures.

Au même moment, à quelques mètres du village, dans la ville de Naples, Laura posa son regard sur la montagne qui dégageait une fumée intense. Ce spectacle était assez fréquent et ne l’impressionnait pas. Cependant, un détail attira son attention. La fumée se faisait plus dense que d’habitude. Elle avertit ses parents pour leur faire part de sa découverte. Peu de temps après, un signal d’alerte résonnait dans toute la ville.

Un éboulement eut lieu dans le village de Karott, faisant tomber les cuisiniers présents au sommet. Les échelles reliant le village à la cuve s’écroulèrent ne laissant plus aucune chance aux villageois de l’atteindre. Elle était à présent livrée à elle-même. Le feu continuait de chauffer le récipient et la température ne mit pas longtemps à dépasser sa limite autorisée. Le contenu atteignit rapidement son point d’ébullition et se déversa en dehors du réceptacle. Le plat était définitivement raté et l’effort de toute une tribu s’échappait avec lui.

Les habitants de Naples, quant à eux, assistaient avec impuissance au spectacle funèbre qui se déroulait sous leurs yeux. Le volcan en éruption n’allait rien laisser sur son passage. Ils savaient, l’air abattu, qu’ils étaient en train de vivre leurs derniers instants.

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