29 avril.

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Petit déjeuner vers midi. Comme chaque matin, Lias nous accueille dans la cuisine avec son traditionnel calimeeera ; mais celui-ci sonne un peu moins juste aujourd’hui, il semble avoir perdu son timbre allègre et spontané. C’est que Thomas n’est pas rentré de son night-club hier soir. Aurait-il découché ? La trompe-t-il dans les grandes largeurs ? Le fait de publier quotidiennement sur Facebook des photos de femmes à poil ne plaide aucunement pour lui. Thomas et Lias ont derrière eux plus de vingt ans de vie commune (ils se sont rencontrés au lycée). Aujourd’hui, que reste-t-il de la romance adolescente ? Une interminable dispute ; une exploitation familiale ; une fille. En début d’après-midi, Thomas rentre au domicile et le visage de Lias prend les couleurs de la colère. Éclats de voix, éclats d’obus, éclat du soleil au dehors, où Marie et moi nous éclipsons sans tarder… Les deux chiens font la sieste en dessous du fourgon. Les oies psalmodient leur éternelle cacophonie. Les minutes passent, et Lias finit par nous rejoindre avec sa bonne humeur en écharpe ; on ne dirait vraiment pas qu’elle vient d’engueuler son mari. Séance tenante, elle nous emmène voir son bétail dans le village voisin. Sociable, organisée, travailleuse et généreuse : Lias a tous les attributs de l’abeille ouvrière. Stakhanoviste, elle conduit les affaires du ménage, effectue la plupart des corvées d’entretien, nourrit quotidiennement les animaux, tire le lait de ses brebis, prend part à la culture maraîchère, ne rechigne pas devant les gros travaux des champs (l’habituel pré carré de Thomas), vend leur production fermière au marché, sans oublier sa farouche volonté de vivre et de s’amuser… Résultat des courses : elle ne dort que quatre ou cinq heures par nuit, ce qui ne l’empêche pas d’être fraîche et dispose en toutes circonstances. En témoignent sa bienveillance et la joie qu’elle diffuse auprès des bêtes au moment de leur donner des adventices et du foin. Elle aurait donné de la soupe à un sans-abri, c’était pareil.

Le soir, les deux époux s’ignorent. Fiers, indomptés, nerveux. Margarita nous apprend pendant le dîner que ce sera bientôt l’anniversaire de son père. Marie conclut qu’il est taureau, comment pouvait-il en être autrement ? Margarita s’empresse d’ajouter que sa mère est lion, ce qui fait déclencher des fusées de rire à table. Trop gros pour être vrai. Même les deux concernés ne peuvent contenir un léger sourire, et finissent par se regarder d’un air entendu… Leur caractère insoumis, bagarreur, est provisoirement jugulé pour laisser place à la tendre indulgence impliquée par le meilleur de leur relation. Respirations plus relâchées, esprits désentravés ; puis sérénité complètement retrouvée lors du dessert. Thomas et Lias, animaux d’arène et de grands espaces.

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