Les hommes de pierres

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Je traverse la rue afin de rentrer chez moi, comme chaque jour de la semaine, mais quelque chose ne va pas. Je suis seule, personne à l'horizon, ce qui ne me semble pas habituel. Un peu anxieuse, je me retourne sans cesse. J'accélère le pas afin de quitter cette rue tant angoissante, j'ai l'impression d'être suivie.

Soudain, je distingue une silhouette dans la pénombre du coucher de soleil, face à moi, tout au bout du passage. Je m'arrête, un peu effrayée par cet homme à la carrure imposante, qui me fait face sans bouger. Suis-je trop anxieuse ou m'attend-t-il vraiment ? J'ai une irrépressible envie de faire demi-tour, mais je constate qu'un deuxième homme à la silhouette et au comportement identique au premier, se tient à plusieurs mètres derrière moi. Une petite voix dans ma tête me hurle que ces deux hommes n'en ont rien à faire de ma petite personne et que je deviens vraiment paranoïaque, une autre, de m'enfuir à toutes jambes avant qu'il ne m'arrive quelque chose. Je souffle un bon coup, je n'ai jamais eu de problème avec qui que ce soit, pourquoi est ce qu'on m'attaquerait sans raison aujourd'hui ? Je me détends légèrement et décide de continuer mon chemin, je contournerai cet homme à une distance raisonnable, tout va bien se passer. Je fais un pas en avant et constate que l'inconnu fait de même. Un deuxième pas en avant, l'homme s'exécute à son tour. Juste pour être sûre, je fais un pas de côté, l'homme fait pareil. Mon cœur se met à accélérer, c'est certain maintenant, c'est après moi qu'il en a. Je me retourne et constate que l'inconnu numéro deux a fait exactement la même chose. Un frisson me parcourt la colonne vertébrale. J'inspire et j'expire afin de ne pas céder à la panique. Ce n'est peut-être que des déséquilibrés qui veulent me faire peur, rien de plus. Mais l'angoisse et la peur me gagnent, je n'ai qu'une envie : fuir. Je me mets à courir pour sortir de cette rue. Vu leurs carrures, il y a peut-être une chance que je cours plus vite. Alors que je passe à quelques mètres de l'inconnu, je distingue rapidement son visage. Il n'est pas recouvert de peau, mais de pierres, son visage a l'air aussi dur que de la roche : il n'a ni yeux, ni nez, et sa bouche n'est qu'un trou énorme. J'arrive à éviter son bras voulant m'attraper qu'à quelques centimètres. Prise de panique, je me mis à courir plus vite. Arrivée au bout de la rue, je les entends crier, leurs voix était inhumaines, on aurait dit qu'il y avait une foule. C'est clair, ma fuite les a mis en colère.

Je ne m'arrête pas, je continue de courir, hâte de me mettre à l'abri dans mon appartement. Je cours jusqu'à en perdre haleine; la peur m'a donné des ailes. C'est là que je le percute de plein fouet : je tombe à la renverse. Un monstre, encore plus grand que ceux que j'avais vus quelques secondes plus tôt, me fait face, recouvert de la même peau rocailleuse. Je ne bouge plus, je suis complètement tétanisée.

Soudain, un homme sorti de nulle part m'attrape le bras et cris :

 - COURS !

Ni une, ni deux, je me relève et me mets à courir dans le sens inverse. L'homme m'ayant sortie de ma stupeur dans laquelle j'étais plongée jusqu'au genoux, ne lâche pas mon bras et continue de me pousser à détaler à toutes jambes, bien plus vite que mon corps ne le pourrait en temps normal. Il me fait avancer dans une petite ruelle et ouvre une porte dérobée. Il la referme avec énergie et la bloque avec une planche de bois.

 - Vite ! À l'étage ! Me chuchotte-t-il à bout de souffle.

Je le suis, en faisant attention de ne faire aucun bruit. Complètement harassée, j'essaie de ne pas respirer trop fort. Arrivé au premier, il regarde à travers la minuscule ouverture d'une fenêtre calfeutrée et me fait signe de jeter un œil à mon tour.

Je distingue au moins cinq silhouettes, toutes de la même carrure, toutes la même façon de marcher, telles des zombies en attente de leur prochaine proie. Je tourne la tête vers mon sauveur qui me fixe d'un air grave.

 - Les hommes de pierre ne sont pas commodes. Ils sont apparus la nuit dernière et nous envahissent à une vitesse aberrante. Ce matin encore, il n'y en avait seulement quelques-uns à 50 kilomètres d'ici.

Brusquement, une détonation énorme vient briser le silence : quelqu'un ou quelque chose vient de défoncer la porte à l'étage du dessous.

 - Il faut se cacher !

Je m'enferme dans un petit placard inutilisé depuis longtemps et, dans ce minuscule repère, je me rends compte que je me trouve dans une espèce de laboratoire médical désaffecté. Je distingue, par l'interstice des portes du meuble où je suis cachée, une table d'opération inutilisée depuis des années probablement. Paniquée, je ne l'avais pas remarquée avant. De vieilles affiches sur l'importance de se désinfecter les mains sont encore en partie exposées sur les murs. La peur me tétanise, j'essaie de respirer le moins fort possible, ces créatures pourraient m'entendre. Ils pourraient également entendre mon coeur menacer de transpercer ma poitrine. J'essaie tant bien que mal de garder le contrôle de moi même.

Je les vois par l'interstice des portes du placard, entrer dans la pièce. Tout à l'heure, tout était beaucoup trop rapide, mais cette fois, je peux distinctement les voir, ils sont répugnants, ce qui les rends d'autant plus effrayant.
Alors qu'ils semblaient inspecter toute la pièce, un autre entre à son tour, grand de plus de deux mètres, il tient un homme entre ses mains. L'homme semble inconscient. Une petite voix me crie de le sauver, mais j'ai bien trop peur pour bouger. La créature le pose sur la table d'opération, tel un objet quelconque et colle son visage au sien. D'abord dégoûtée, je constate que l'homme change soudain d'apparence pour devenir une autre de ces créatures. Je pose ma main sur ma bouche afin d'empêcher un cri de sortir. Puis, dans un calme extrême, toutes les créatures s'en vont et quittent le bâtiment.
Je cherche des yeux mon sauveur, qui entre dans la pièce à tâtons, il me cherche du regard et finit par me trouver au bout de plusieurs minutes, recroquevillée dans mon coin, toujours aussi effrayée.

 - Ils sont partis, j'ai bien cru que t'allais y passer, me dit-il tout bas.

Je l'entends parler de loin, tellement je suis sonnée. Il me fait signe de sortir, mais je suis incapable de bouger.

 - Tu sais, à la vitesse où ils vont, ils vont finir par exterminer la race humaine...

Sa phrase me fait froid dans le dos, qu'est ce qu'ils veulent de nous finalement ? Juste nous transformer en l'un des leurs ou peut-être qu'il existe une finalité plus profonde ? Est ce que chacune de ces créatures était un humain ?

 - Après tout, me chuchotte mon nouvel ami, les rejoindre, ça ne parait pas si terrible...

Je le fixe, un peu décontenancée par ce qu'il vient de me dire.

 - Rejoins-nous toi aussi.

Avant même que je ne puisse m'enfuir, il me saisit le bras, et se transforme en une créature de pierre.

 - Rejoins-nous, hurle-t-il dans un grognement sorti de l'enfer.

Impossible de lui échapper tant il tient mon bras fermement, je finis par me faire transformer à mon tour...

Note de l'auteur : première fois que j'écris une histoire horrifique, j'ai un peu de mal avec le suspens, mais faut bien commencer quelque part, j'essaierais d'en faire d'autre de meilleure qualité à l'avenir :)

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