Chapitre 11

13 minutes de lecture

Alice
20 juin 2023

Le sommeil me fuyait, insaisissable, comme une idée qui glisse entre les doigts au moment précis où l’on croit l’attraper. Agacée, je repousse les draps, attrape mon manuscrit sur la table de chevet, puis le dépose sans conviction sur mon bureau. En relisant mes notes, une pensée fugace me traverse vive, tranchante, presque douloureuse. Je reste suspendue un instant, le stylo immobile au-dessus du papier. Puis, sans plus réfléchir, je me lève. Mon cœur bat trop fort, sans raison apparente.

La maison dort. Je longe les couloirs assombris, glissant une main sur la rambarde, m’accrochant à ce contact familier pour ne pas me laisser happer par l’étrange frisson qui me parcourt.

Une lueur faible filtre sous une porte entrouverte. Je ralentis. Mon pas se fait discret. Je connais cette aile du chalet, je la croyais vide. Pourtant, ma main se tend déjà. La curiosité est plus forte que la prudence.

La porte grince doucement. J’entre.

Aucune lumière. Aucune présence. Seulement un vide pesant, presque solennel. Mes pas résonnent faiblement sur le parquet, comme s’ils troublaient un silence ancien. Une atmosphère étrange règne ici figée, suspendue, comme si le temps s’était replié sur lui-même.

Les murs sont ornés de grandes toiles dissimulées sous des draps blancs. Draps qui ondulent légèrement dans l’air, tels des spectres figés dans l’attente.

Je m’approche, hésitante, et soulève le tissu du premier tableau.

Mon souffle se coupe net.

Une femme me regarde depuis la toile. D’une beauté troublante, certes, mais ce n’est pas la grâce de ses traits qui me foudroie : c’est l’intensité dévorante de l’émotion qui y est peinte. Une tristesse insondable. Une haine contenue. Le regard d’un amour brisé. Son visage, pourtant immobile, semble sur le point de crier. J’ai la sensation d’avoir transgressé quelque chose — une intimité féroce, une douleur jalousement gardée. Honteuse, presque coupable, je rabats le drap.

Je passe au suivant. Puis au suivant. Toujours elle. Toujours ce visage, sous des angles différents, traversé d’émotions d’une violence maîtrisée. Chaque toile raconte une histoire qui m’échappe mais m’enveloppe, me happe. Il y a là quelque chose d’obsessionnel, d’intime, de profondément dévorant.

Et puis… je soulève le dernier voile.

Je me fige.

Sur la toile, une femme repose, allongée dans un parterre de violettes. Elle semble presque irréelle, trop vivante pour être peinte, trop précise pour être inventée. Ses cheveux bruns, indisciplinés, s’étalent en cascade autour de son visage. Ses yeux brûlent d’intensité, de vie, de passion.

C’est moi.

Ma gorge se serre. Mon corps refuse de bouger, cloué par le choc. Je me regarde à travers un regard qui n’est pas le mien. Un regard qui me connaît. Peut-être trop bien.

Le silence se fait plus épais, presque liquide. Chaque seconde s’étire, douloureuse.

Puis je recule. Une fois. Deux. Le cœur au bord des lèvres. Et soudain, je tourne les talons et quitte la pièce à grands pas, comme si l’air y devenait irrespirable.

Je reprends ma route dans les couloirs, cette fois plus vite, comme pour échapper à quelque chose ou à moi-même. Mon souffle est court. Mes pensées en désordre. Pourtant, mes pas me portent instinctivement vers une porte sombre au fond du couloir. Son bureau.

Je m’arrête devant, le poing hésitant. Puis je frappe. Un instant plus tard, j’entends le rythme lent et régulier de sa canne s’approcher. La porte s’ouvre.

Mathieu se tient là, droit, enveloppé d’ombre. Ses traits sont marqués, ses cernes profonds les stigmates d’un homme qui dort peu, pense trop. Son expression est indéchiffrable.

— Alice. Quel plaisir, dit-il d’une voix basse, presque caressante, teintée d’une fatigue ancienne. À quoi dois-je l’honneur de cette visite nocturne, ma chère ?

Je cherche mes mots, hausse les épaules dans un geste qui se veut léger mais je sens qu’il ne dupe personne.

— Je pensais que tu pourrais m’aider. Cette maison… cette vie… c’est la meilleure source d’inspiration que j’aie jamais eue.

Un sourire effleure ses lèvres. Il arque un sourcil, amusé.

— Tu souhaites t’inspirer de ma personne ? Voilà qui me flatte, sincèrement.

— On peut le dire comme ça, oui. Je lui coupe la parole d’un ton léger, presque joueur. Je me permets, ajoutai-je, avant qu’il n’ait le temps de réagir.

D’un geste assuré, je pose ma main sur son torse pour le pousser doucement, mais fermement, hors de l’encadrement de la porte. Son regard s’assombrit, s’ourle d’une lueur d’alerte mais il ne dit rien. Il me laisse passer.

Je pénètre dans son bureau. L’odeur du cuir ancien, mêlée à celle des livres, m’enveloppe aussitôt. Mes yeux effleurent les étagères chargées, les reliures patinées par le temps, puis s’arrêtent sur le fauteuil en velours rouge qui trône derrière le large bureau en bois massif. Tout ici respire une élégance surannée, maîtrisée au millimètre.

Je prends place sur la chaise qui lui fait face, sors calmement mon carnet et mon stylo.

— Je serai rapide, promis-je, en levant vers lui un regard faussement innocent.

Un sourire furtif effleure ses lèvres. Il disparaît aussitôt, remplacé par un soupir las, résigné, presque affectueux.

— Uniquement pour vous, ma chère, murmure-t-il en contournant le bureau d’un pas mesuré.

Sa démarche est fluide, contrôlée, malgré la canne qui l’accompagne. Il s’installe dans son fauteuil avec une grâce naturelle, presque monarchique. Ses coudes se posent sur le bois poli, ses doigts s'entrelacent. Son regard capte le mien et le retient, acéré, brûlant d’une attention qu’il distribue rarement.

— Bien, Je redresse le dos, stylo en main. Alors, commençons. Comment es-tu entré dans ce milieu ?

Il plisse les yeux. Une ombre passe dans son regard, un souvenir peut-être.

— Ce monde a toujours été mien, murmure-t-il finalement, sa voix comme un écho venu d’un autre siècle.

— Je sais que ce n’est pas ton fort, glissai-je avec un demi-sourire. Mais tu pourrais au moins faire l’effort de détailler un peu.

Cette fois, il sourit franchement. Un sourire dangereux, mi-fascinant, mi-prédateur.

— Dis-moi, ma chère…

Il se lève sans prévenir. Son pas est lent, mais chaque geste semble calculé, pensé. Je le suis du regard, jusqu’à ce qu’il s’arrête derrière ma chaise. Ses mains se posent sur le dossier avec une pression à peine perceptible. Puis, tout près, son souffle effleure mon oreille.

— Ton intérêt porte-t-il vraiment sur ton ouvrage ? Ou bien n’est-ce là qu’un prétexte délicatement enrobé pour approfondir ta… connaissance de ma personne ?

Un frisson me traverse la colonne vertébrale.

— Disons deux en un, répliquai-je, bravache, me calant un peu plus contre le dossier.

Sans réfléchir, je tends la main, saisis l’arrière de sa nuque, et l’attire légèrement vers moi. Un souffle de surprise s’échappe de ses lèvres. Il se fige. Puis se redresse brusquement, comme s’il reprenait soudain le contrôle de son corps tout entier. Une rougeur discrète colore ses joues — à peine visible, mais bien réelle.

Il regagne son siège d’un pas sec. Sa voix claque :

— Une charge conséquente m’attend. Tâchons d’abréger cette entrevue.

Mais ses yeux, eux, trahissent quelque chose d’autre. Une faille. Un trouble. J’en souris intérieurement. Petite victoire.

— Très bien, dis-je en notant sa réaction dans un coin de ma mémoire. Quelles émotions as-tu ressenties la première fois que tu as tué quelqu’un ?

Son visage se ferme aussitôt. Ses traits deviennent de marbre.

— Aucune, répondit-il d’un ton glacial. J’ai été formé à cet effet. Cela m’a toujours paru… d’une normalité absolue.

Les questions se succèdent. Les réponses tombent, nettes, mécaniques. Il me parle de contrats, de noms oubliés, d’endroits où l’on n’attend personne. Sa voix est constante, sans chaleur, mais jamais absente. Il choisit chaque mot comme un chirurgien choisit sa lame.

Puis, soudain, il redresse la tête. Son regard s’attarde sur moi avec une lassitude mêlée d’une étrange douceur.

— Une dernière question, ma chère. Ensuite, je te prierai de regagner tes quartiers.

J’hésite. Prends une inspiration. Et me lance.

— Que t’est-il arrivé à la jambe ?

Le silence s’abat, brutal, comme une gifle.

Son visage se durcit. Son regard devient tranchant.

— Cette interrogation n’est mue que par une curiosité purement personnelle. Elle ne présente aucun lien direct avec ton ouvrage, tranche-t-il, glacial.

Je m’apprête à protester, mais il lève une main.

— Je suis au regret de t’annoncer, sweetheart, que tu viens de dilapider ta dernière question.

— Quoi ? Non, ça ne compte pas si tu refuses de répondre…

— Alice, coupe-t-il, plus doucement cette fois. Mais le ton ne laisse place à aucune insistance.

Je me fige. Il n’a rien crié. N’a pas haussé le ton. Pourtant, tout en lui crie : stop.

Je range mes affaires en silence. Puis me lève. J’ouvre la porte.

Et je sursaute.

Sasha est là, la main levée, prêt à frapper. Nos regards se croisent. Il passe de moi à Mathieu, puis s’écarte légèrement pour me laisser passer, sans prononcer un mot.

Je descends les escaliers, l’esprit en vrac. Un tumulte silencieux. Tout en moi cherche à comprendre. À digérer. À classer ce que je viens de voir, de sentir.

Dans un coin d’ombre, mon chat surgit comme une évidence familière. Je le ramasse avec un geste machinal, le serre contre moi. Sa chaleur contre ma poitrine me ramène à la réalité, doucement. Il ronronne.

Je regagne ma chambre en silence, les pas feutrés, mais les pensées en désordre.

Alice
21 juin 2023

Aux premières lueurs du jour, je suis réveillée par Maurice qui gratte frénétiquement à la porte. Encore à moitié endormie, je laisse échapper un soupir et me lève pour lui ouvrir. Il s’élance aussitôt, me laissant seule face au silence paisible du matin.

Plutôt que de retourner me coucher, je décide de rester debout. Quelques minutes plus tard, je descends lentement au salon, pieds nus sur le parquet encore frais.

Dans la cuisine, Sasha est appuyé contre le comptoir, concentré sur son téléphone. À l’instant où mes pas résonnent dans la pièce, il lève les yeux vers moi. Son regard est tranchant, une impatience mal contenue y brille.

— Alice, justement… commence-t-il, reposant son téléphone avec une nervosité mal déguisée. Mathieu m’a demandé de te préparer un petit déjeuner adapté pour l'entraînement. Et, compte tenu de la situation actuelle, il a aussi décidé d’annuler votre rendez-vous.

Le piercing.
J’avais complètement oublié.

— Je ne prends pas de petit déjeuner, dis-je, haussant les épaules avec indifférence.

Il plisse les yeux, puis lâche sèchement :

— Tu la fermes, et tu manges.

Je le fusille du regard, mais il détourne le sien, comme s’il refusait de s’engager dans un duel ce matin.

— Débrouille-toi avec Mathieu. Moi, j’ai fait ce qu’il m’a demandé, grogne-t-il, désignant d’un geste brusque le plateau sur le plan de travail.

Sans un mot de plus, il quitte la pièce, les épaules tendues, l'air d'un volcan prêt à exploser. Je reste là, figée quelques secondes, puis finis par m’asseoir sur un tabouret. J’observe le plateau : œufs brouillés, fruits découpés, smoothie vert... Rien de très appétissant à cette heure.

Mais je mange. En silence. Comme une mécanique sans âme.

Une fois le repas terminé, je remonte dans ma chambre pour enfiler ma tenue de sport. En passant devant le miroir, je m’arrête. Mon reflet me dévisage avec une lassitude familière.

— Espérons que ça se passe mieux que la dernière fois, murmurai-je, en effleurant machinalement un hématome jaune-violet sur mon bras. Trace muette de l'entraînement précédent.

Mon téléphone vibre sur la commode. C’est un message d’Axel.
Un sourire me surprend. Cela faisait un moment qu’il n’avait pas donné signe de vie. Après un bref échange, je descends au salon.

Mathieu est là. Impeccable comme toujours, il ajuste son chapeau d’un geste précis, puis saisit sa canne. Il s’apprête à partir.

— Attends…, dis-je, avançant de quelques pas vers lui.

Il se tourne vers moi, intrigué.

— Es-tu prête à débuter l'entraînement, ma chère ?, demande-t-il d'une voix calme, mais traversée d'une douceur discrète.

— Oui… mais avant… Je prends une inspiration. Je voulais savoir… est-ce que je pourrais sortir, voir mes proches ? Juste un moment.

Un silence. Il m’observe longuement, ses traits soudain plus durs, plus fermés. Puis il répond, lentement :

— J'entends et prends en compte ta requête, Alice. Cependant… cela ne pourra se faire qu’en pleine journée. Et uniquement en présence de nombreuses personnes.

Son regard se plante dans le mien, appuyé, clair. Un avertissement, en filigrane. Il veut s'assurer que je comprends ce que cela signifie : surveillance, exposition, contrôle.

Je hoche la tête. Il s’incline légèrement, puis quitte la pièce, le cliquetis régulier de sa canne frappant le sol comme une ponctuation.

Je me dirige vers le sous-sol. Là, Sasha est déjà à l’œuvre, alignant le matériel avec une efficacité militaire. Il ne me regarde pas.

— Apparemment, tu t’es plainte à Mathieu, lance-t-il, sans lever les yeux.

— Les mots sont un peu forts…, murmurai-je en croisant les bras.

Il dépose brutalement une paire de gants sur le banc. Toujours sans me regarder.

— Qu’on soit clairs, reprend-il, la voix basse mais tendue. Tout allait bien avant que tu débarques. Mathieu qui te défend ? C’est insensé. Tout ça nous met juste plus dans la merde.

— Alors quoi ? Tu es jaloux qu’il m’aide ?, répliqué-je, acide.

Cette fois, il se retourne d’un bloc. Ses mâchoires sont serrées, ses yeux fulminent.

— Jaloux ?, grogne-t-il. Tu n’es qu’une étrangère, Alice. Une distraction. Mathieu est tout pour moi. Il est comme un frère, et je refuse de le voir mettre sa vie en jeu pour quelqu’un qu’il connaît à peine.

— Ce n’est pas ce que je veux…

— Peu importe ce que tu veux, coupe-t-il, glacé. Mets-toi en position de défense.

Je serre les dents, enfile les gants. L’entraînement commence.

Il est brutal. Implacable. Aucun mot inutile, aucun moment de pause. Chaque coup est sec, précis, destiné à corriger, mais sans pitié. Mes bras tremblent, mes muscles brûlent, et chaque impact me rappelle que je suis encore loin d’être prête.

Mais je tiens bon. Je serre les poings. J’encaisse.

Parce que je ne veux pas être une distraction.

Je veux devenir un atout.

.__.

Plus tard, je ferme les yeux, immergée dans un bain chaud. La douleur s’atténue peu à peu, se mêlant à la vapeur, mais les mots de Sasha continuent de tourner en boucle dans ma tête, comme un écho que je ne parviens pas à faire taire.

Une vingtaine de minutes passent. L’eau tiédit. Je sors enfin, enfile mon pyjama, et sans trop réfléchir, je me dirige vers le bureau de Mathieu.

Arrivée devant la porte, j’hésite une seconde. Puis je frappe doucement et entre.

— Il semble que tu développes un certain attrait pour me rejoindre ici, remarque-t-il sans lever la tête, les yeux fixés sur un dossier qu’il annote à l’encre noire.

— Désolée si je suis trop envahissante, dis-je en avançant de quelques pas, mais c’est au sujet de ma demande de ce matin.

Il repose sa plume avec une lenteur mesurée, puis se renverse légèrement contre le dossier de son fauteuil, l'air pensif.

— Il me semble t’avoir déjà répondu favorablement.

— Oui, mais… j’aimerais pouvoir le faire dès demain.

Il arque un sourcil, puis tapote doucement le bois du bureau du bout des doigts, comme s’il pesait les implications de ma requête.

— Tu t'y prends un peu tard, constate-t-il finalement. Toutefois, cela reste acceptable. Demain, je serai contraint de m'aventurer parmi les simples mortels. Je me chargerai donc de te déposer en chemin.

— Pourquoi un corbeau ?

Son regard remonte vers moi, surpris, presque déconcerté. Il fronce légèrement les sourcils, me scrutant comme s’il cherchait à percer le véritable sens de ma question.

— Plaît-il ?

— La canne que tu utilises le plus souvent… le manche est sculpté en forme de corbeau. Pourquoi ce choix ?

Il pousse un léger soupir, pas tout à fait exaspéré, plutôt pris de court par ma curiosité.

— Eh bien… Premièrement, cela me rappelle sans cesse mon objectif. Ensuite, bien que je nourrisse une aversion profonde envers cette organisation, les corbeaux eux-mêmes ne sont en rien responsables.
Ces créatures sont d’une fascination particulière : elles inspirent une crainte instinctive chez bien des gens, tout en faisant preuve d’une intelligence remarquable.

— Alors, c’est comme ça que tu te vois ? Cruel et intelligent ?

Un sourire fugace se dessine sur ses lèvres, un éclat d’amusement malicieux dans le regard.

— C'est ce que je suis, Darling, murmure-t-il, avec une ironie presque tendre. Mais, ajoute-t-il en reprenant son sérieux, il semble que ta présence ait le don de me faire oublier cette réalité…

Je hoche lentement la tête, un léger soulagement m’envahissant. Je fais mine de tourner les talons, puis je m’arrête sur le seuil, une pensée me retenant. Je me retourne.

— Tu aimes peindre ?

Il me fixe un instant, ses yeux ancrés aux miens. Un silence suspendu. Je devine derrière son regard une forme de prudence. Puis :

— As-tu découvert ma salle d’exposition ?

Son ton n’est pas accusateur, mais je perçois dans son regard une lueur furtive de mécontentement. Comme si je venais de franchir une frontière invisible. Un frisson me parcourt.

— Oui…, admis-je à mi-voix.

Il soupire doucement, puis, après une pause, me demande :

— Qui est-ce ?

Sa voix a changé. Plus basse. Plus posée. Une douceur rare s’y glisse.

— Garance Ashley. Ma mère.

Il penche légèrement la tête, un voile d’émotion trouble ses yeux.

— Oh… Je suis désolé.

Il se redresse lentement, puis se penche légèrement vers moi, le regard toujours intense, mais empreint d’un respect nouveau.

— Tu l’as aperçue, n’est-ce pas ? murmure-t-il, presque fasciné. Elle est d’une beauté remarquable.

Je le fixe à mon tour, troublée par la sincérité de son ton. Une part de lui semble s’être entrouverte, mais il demeure insaisissable.

— J’aime beaucoup les violettes, soufflai-je, presque comme une confession.

Il incline doucement la tête, ses yeux brillant d’une lueur étrange.

— Je suis pleinement conscient de cela, dit-il, sans détourner les yeux. Si tu m’en fais l’honneur… j’aimerais beaucoup, un jour, te peindre. En tant que modèle. Si tu y consens.

Une part de moi hésite. L’idée me trouble. Il y a dans sa demande une promesse muette, un terrain où je n’ai pas encore osé poser le pied. Et pourtant… je souris, à peine.

— Pourquoi pas. Mais il semblerait que tu sois très doué, même sans modèle.

Un éclair amusé passe dans son regard. Il se redresse légèrement, l’air presque triomphant.

— Ma mémoire est excellente, en particulier lorsqu’il s’agit de toi, répond-il, sa voix glissant comme du velours. Cependant, je dois admettre que cela me procure un certain plaisir personnel. Te voir poser pour moi est un spectacle qui me ravit.

Je sens mes joues chauffer malgré moi. Il le remarque aussitôt.

Un sourire narquois ourle ses lèvres. Visiblement ravi.

Puis, comme si rien ne s’était passé, il se tourne de nouveau vers son ordinateur, me laissant là, plantée au milieu de la pièce, avec ce mélange déroutant de trouble, de fascination… et de questions sans réponses.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Madyson ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0