Nouvelle 51 : LE CHIEN

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Quelle idée ! Encore un caprice. Ça n'arrêtait pas. Un jour ceci, un jour cela, ça n'en finissait pas ! Comment avait-il pu croire qu'avoir un enfant serait le bonheur ? Il y avait toujours un problème. Et quand tout semblait réglé, la petite faisait un caprice. Quand il avait le malheur de se plaindre à sa propre mère, elle lui répondait invariablement : "petits enfants, petits soucis, grands enfants, gros soucis". Et elle trouvait ça drôle ?

Qu'est-ce que donnerait l'avenir, il n'en avait aucune idée, mais le présent n'était pas rose. Entre la fatigue, les tensions au sein de son couple, le stress du travail et ses responsabilités de père, il ne savait plus où donner de la tête. Voilà maintenant qu'elle réclamait un chien ! Sa femme avait beau lui dire que ce n'était qu'une lubie qui passerait comme les autres, après six mois à en entendre parler matin, midi et soir, il n'en pouvait plus. Cela virait à l'obsession pure et simple. Une authentique torture ! Elle ne lâchait pas le morceau, il reconnaissait bien là sa fille. Elle avait appliqué le supplice de la submersion verbale sur eux, et les avait à l'usure.

Il craquait. Sa femme n'en pouvait plus. Elle envisageait même, dans le secret de leur chambre à coucher, l'éventualité d'un chien petit format, genre caniche, ou bichon, voire même plus petit. Il serait peu encombrant, trop mignon, ça lui ferait tellement plaisir ! Pourquoi pas ? Il était le dernier bastion, l'ultime rempart contre l'invasion animale. Mais il devait se rendre à l'évidence, la lutte était vaine, les femmes étaient sur le point de vaincre.

Aussi se résolut-il à revenir un jour, les bras chargés d'un lourd paquet, enrubanné d'un beau ruban rouge, qu'il déposa fièrement aux pieds de sa fille, devant sa femme ébahie. Il avait donc cédé se dit-elle, attendrie et quelque peu anxieuse. Un aboiement légèrement assourdi se faisant entendre, un hurlement de joie échappa à la fillette qui se rua sur le carton. Quelques secondes lui suffirent pour en découvrir l'intérieur et insuffler à ses prunelles la lueur dévastatrice d'une rage peu commune chez une si jeune enfant. Elle se jeta sur son père les mains en avant et lui lacéra le visage, hystérique, totalement incontrôlable, tant sa colère était foudroyante et son humiliation d'avoir été trompée insupportable.

Sa mère, tétanisée, ne put que jeter un œil au paquet dévasté par l'ouragan généré par sa progéniture et apercevoir, entre les coups et attaques de sa fille et les gestes affolés de défense de son mari, le petit chien Aibo, robot à l'intelligence artificielle qui tournait en rond en agitant la queue.

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