CHAPITRE 2 - L’INCONSCIENT SEXUEL COLLECTIF - Partie 1

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Partie I : Les fantômes de la déesse, quand l’histoire écrit le désir

Le désir n’est jamais né d’un regard. Il naît d’un héritage enfoui de milliers d’images, d’interdits, de mythes recyclés en silence à travers les siècles. Ce que nous croyons aimer chez une femme n’est souvent que la réminiscence d’un symbole plus ancien que nous : la déesse, la mère, la vierge, la sorcière. Ces figures dorment dans notre inconscient collectif et guident nos pulsions bien plus sûrement que nos choix conscients.


1. La mémoire archaïque du féminin

Depuis les grottes paléolithiques, l’homme a gravé des hanches, pas des visages, pas des sourires, juste des hanches. La fécondité comme première religion. Le cerveau humain a donc associé pendant 40 000 ans la rondeur, la chaleur, la peau, à la survie de l’espèce.

Ce n’est pas une métaphore : l’imagerie cérébrale moderne montre que les zones activées par la contemplation de formes féminines sont les mêmes que celles liées à la recherche de nourriture ou d’abri.

Autrement dit : le féminin est pour le cerveau un abri.

Cette empreinte reste. Même chez les hommes les plus rationnels, il subsiste cette trace biologique : le besoin d’une présence qui apaise le système nerveux, d’un corps qui régule. C’est pourquoi l’attraction véritable dépasse la beauté, elle relève d’une compatibilité de régulation émotionnelle.
Nous ne cherchons pas un corps, mais un rythme qui calme le nôtre.


2. La domestication du désir

Puis vint l’ordre patriarcal, qui n’a pas inventé la domination mais l’a codifiée. Les mythes grecs, bibliques, indiens ou égyptiens ont tour à tour domestiqués le pouvoir du féminin en le divisant :


- Ève, coupable de curiosité.


- Marie, sanctifiée par la chasteté.


- Pandore, punie pour avoir voulu savoir.


- Sita, récompensée pour sa fidélité.


À chaque fois, la femme n’est plus une force, mais un rôle.

Cette fracture a imprimé dans le psychisme masculin est un double réflexe : désirer et craindre.

Désirer la liberté, craindre la puissance qu’elle implique. L’homme occidental moderne hérite de cette schizophrénie inconsciente, il veut la femme sauvage mais sécurisée, la complice rebelle mais prévisible.

Résultat : il se retrouve dans une tension permanente entre attraction et défense.

La séduction, dans cette optique, devient une négociation avec nos propres mythes, jusqu’où pouvons-nous aimer une femme sans réveiller nos peurs ancestrales ?


3. Les archétypes actifs aujourd’hui

Si l’on observe les comportements amoureux contemporains, on retrouve les mêmes figures déguisées :

- La Mère Primordiale : la femme qui apaise, nourrit, répare.
Le danger : confondre soin et servitude.


- La Déesse Érotique : symbole de liberté et de jouissance.
Le danger : la réduire à une fonction de performance.


- La Sorcière : celle qui trouble par son intuition.
Le danger : la diaboliser quand elle voit trop clair.


- La Guerrière : indépendante, verticale, inatteignable.
Le danger : s’y brûler en cherchant à la dompter.

Chaque homme active inconsciemment l’un de ces programmes selon son histoire, l’enfant de mère absente cherchera la guérisseuse, celui d’une mère contrôlante fantasmera la rebelle, celui d’une sœur protectrice désirera la complice.

Nos goûts ne sont pas des préférences, ce sont des scénarios de réparation.


4. Quand les neurosciences confirment les mythes

Les chercheurs en neuro-endocrinologie affective (McClintock, Carter, Porges) ont montrés que le corps humain répond aux visages, aux voix et aux odeurs selon un principe d’attachement biologique complémentaire.


L’homme sécrète plus de testostérone face à une femme qui lui rappelle inconsciemment la figure maternelle sécurisante, mais plus de dopamine face à celle qui stimule l’incertitude. Ce double système explique pourquoi nous oscillons entre stabilité et chaos amoureux : le cerveau tente de concilier deux forces antagonistes, l’instinct de survie et l’instinct d’expansion.

Ce que la mythologie appelait “la tentation de la déesse”, la science le nomme aujourd’hui désir de complexité neuronale.

L’homme ne cherche plus seulement à posséder, il cherche à se dépasser par le contact du féminin.
Et c’est là le cœur du nouveau paradigme, la femme n’est plus un but mais un vecteur d’évolution du cerveau masculin.


5. La trace hypnotique

Chaque culture imprime dans le corps une chorégraphie du désir.

Regarde comment une Italienne, une Japonaise, une Française ou une Brésilienne utilisent l’espace, la voix, la distance. Ce ne sont pas des coquetteries, ce sont des scripts hypnotiques culturels transmis par observation mimétique.

L’homme réagit à ces signaux avant même de les percevoir consciemment. Un léger basculement du bassin, une inflexion de ton, une micro-pause dans la parole suffisent à activer des circuits cérébraux du “signal d’ouverture”.


Nous ne choisissons pas, nous sommes programmés à lire et à écrire ces langages corporels sans grammaire explicite.


6. Vers une science des archétypes

La psychologie analytique de Jung parlait d’archétypes collectifs. La neuro-psychologie moderne parle aujourd’hui de réseaux de saillance affective, des ensembles neuronaux qui associent forme, émotion et mémoire. Autrement dit, la “Déesse” existe réellement, mais sous forme de pattern neuronal activé par certains stimuli. Quand un homme dit “elle m’obsède”, il ne parle pas d’une personne ; il décrit une activation prolongée d’un archétype interne.

Ce n’est pas romantique, c’est exact. Et comprendre cela, c’est se libérer de la croyance que l’amour est un coup du sort. L’amour est une résonance mythologique matérialisée. Un ancien dieu qui trouve un nouvel hôte.


7. Ce que cela change pour la séduction

Si tu veux séduire une femme, tu dois d’abord savoir quel archétype elle incarne pour toi et pour elle-même. Une femme n’est jamais une seule figure ; elle en abrite plusieurs qui se succèdent selon la sécurité émotionnelle du moment. Le secret n’est donc pas de “jouer un rôle”, mais d’apprendre à parler à la part d’elle que ton propre inconscient a appelée. C’est la seule séduction durable : celle qui dialogue d’ombre à ombre.

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