Chapitre 16 : La robe de Nêryah

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– Nous nous retrouvons enfin, me dit-il d’une voix enjôleuse. Quelle magnifique voix tu as ! Si pure, si angélique ! Ton chant était tellement beau que je n’osais pas t’interrompre…

– Merci pour le compliment. Bonjour Sèvenoir.

Il fallait que je donne le change. Ne pas me laisser impressionner.

– Pourquoi tes cheveux sont-ils mouillés ? me demanda-t-il, surpris.

– Ah… ça, répondis-je en touchant quelques mèches encore humides. C’est une longue histoire…

J’entrepris de les nouer en une tresse. Sèvenoir me regarda faire, courbant légèrement la tête, comme s’il observait le moindre de mes mouvements.

– Apprécies-tu le charme de cet endroit ? Une belle reproduction d’un monument Terrien, n’est-ce pas ? Je me suis amusé à y retirer les portes, histoire que tu ne t’enfuies pas, et j’ai scellé cet endroit à l’aide d’un sort très puissant. Avorian ne pourra pas venir te chercher, cette fois.

Je terminais ma tresse, dédaigneuse.

– Comment savez-vous que j’étais avec lui ?

– Qui d’autre viendrait te sauver en fabriquant un transgèneur ? Cette magie n’est pas à la portée de tous.

– Que me voulez-vous, encore ? Me faire du mal, je suppose ?

– Quelle drôle d’effrontée tu fais ! Je ne voulais pas te blesser, Nêryah, juste… vérifier ta dorure.

– Vérifier avec un couteau ? soulignai-je, absolument pas convaincue. En m’éventrant, peut-être ?

– Non ! Je t’assure ! Tu avais tellement de couches de vêtements que je devais utiliser un couteau pour les enlever. Tu n’arrêtais pas de te débattre ! se défendit Sèvenoir. Enlève ta robe et tu comprendras.

– Pardon ? Enlever quoi ? Jamais de la vie ! réfutai-je.

– Si je te demande de l’ôter par toi-même, c’est justement pour ne plus te faire peur, et te faire comprendre que je ne te veux aucun mal.

Devant mon regard méfiant, il ajouta :

– J’essaie de comprendre qui tu es. Ton corps détient les réponses. Tu ne cicatrises pas et ne semble pas pouvoir utiliser le fluide, cela signifie que tu devrais être Terrienne. Pourtant, un humain ne tiendrait pas plus de deux minutes sur Orfianne, à cause des vibrations de la planète. C’est incompréhensible ! Je dois découvrir ton identité. Tu es capable de vivre sur les deux mondes. Cela fait de toi un être extrêmement précieux.

– D’accord. Si mon corps peut apporter cette réponse, il me suffit de vous le décrire ! signalai-je.

– Non… tu te méprends sur ta valeur. Je dois t’étudier pour en être certain. Il faut aussi vérifier ton état de santé. Enlève-moi cette fichue robe !

– Certainement pas ! m’offusquai-je indignée, reculant de deux pas, les bras croisés contre ma poitrine en ayant la désagréable impression d’être déjà nue devant lui.

– Tu es drôlement sensible. Dans ce cas, parles-moi de ce qu’Avorian t’a révélé.

– Il ne m’a pas dit grand-chose, justement. Il m’a même donné une potion pour que je devienne docile, lui relatai-je.

– Je vois, il te cache la vérité pour mieux t’utiliser. Tu comprendras tôt ou tard que son but est de se servir de tes pouvoirs, déclara Sèvenoir. Mais je sens que tu ne me dis pas tout, Nêryah… Je lis dans tes pensées. Elles sont si limpides ! Bon gré, mal gré, tu parleras !

Je ne pouvais pas lui faire confiance. Je savais comment le surprendre. Sèvenoir venait juste de me donner la solution : il ne me pensait pas encore capable d’utiliser le « fluide », comme il disait. Je manquais certes d’expérience ; je voulais juste tenter de l’intimider.

Capter la magie d’Orfianne. Utiliser les énergies de type Yin et Yang, comme en médecine chinoise. Polariser ainsi la matière dans mes mains, me remémorai-je.

Armée de mon seul courage, je créai dans mes paumes une boule de lumière bleue, pouvoir que je maîtrisais le mieux, et la projetai de toutes mes forces contre Sèvenoir. Il l’esquiva sans difficultés. Ma magie s’éclipsa d’elle-même, sans doute trop faible pour perdurer ou pouvoir perforer quoique ce soit.

– Eh bien ! En voilà des manières : attaquer sans prévenir ! Merci pour cette première réponse, Nêryah. Tu es donc bien Orfiannaise. Alors, c’est tout ce que tu peux faire ?

Il me provoque, je ne dois pas m’abaisser à son jeu.

Sur ces mots, il me jeta une sphère rouge. À l’intérieur, je pouvais distinguer de la fumée noire. Je l’évitai de justesse, mais au lieu de s’écraser contre le mur comme la mienne l’aurait fait, elle revint vers moi. Sans réfléchir, je projetai un rayon paralysant en direction de sa boule de lumière. Mon faisceau n’arrivait pas à la contenir : elle me toucha au bras gauche, juste en dessous de l’épaule.

Je criai de douleur en titubant. Mes genoux tremblaient, ployèrent sous moins poids. Je tentai de me redresser, ce simple mouvement me donna la nausée. Du sang coulait le long de mon bras. Chancelante, je pressais fermement la plaie pour éviter l’hémorragie.

Sèvenoir avança lentement vers moi. Je le regardais, effrayée, le visage crispé par la souffrance. Je priai intérieurement qu’Avorian vienne me sauver.

Sèvenoir, impitoyable, enleva ma main pour examiner ma blessure. Je lâchai un hurlement, les yeux mouillés de larmes. Mon bras me faisait atrocement mal.

– Donc, tu ne cicatrises vraiment pas, confirma-t-il pour lui-même.

– Arrêtez avec vos expériences sur moi… c’est de la torture, soufflai-je, anéantie.

Il sortit un long couteau de son fourreau, enserra ma gorge de son autre main, et pointa la lame sur moi.

– Quel dommage… moi qui imaginais ce rendez-vous romantique. Tu aurais dû coopérer, Nêryah…, lança-t-il, impassible.

J’essayais de desserrer son étreinte mortelle, mais ma blessure me vidait de mes forces. Je n’arrivais plus à respirer correctement.

Sèvenoir appuya la lame de son poignard contre mon ventre, comme la dernière fois. Mais au lieu de l’enfoncer dans ma chair, il découpa simplement ma robe bleue au niveau de mon abdomen, arrachant tout un pan du tissu. Il arrêta son mouvement, interdit.

– Comment est-ce possible ? souffla-t-il en regardant mon ventre.

Il sembla si surpris qu’il en relâcha mon cou. J’inspirai enfin une grande bouffée d’air, pantelante.

Alors que je retrouvais mon souffle, courbée vers le sol, Sèvenoir se retourna soudainement en criant. Quelque chose venait d’apparaître derrière lui. Le lion ailé de tout à l’heure lui mordait l’épaule. Sèvenoir produisit une onde d’énergie pour faire reculer la chimère. Je découvris qu’Avorian se trouvait là aussi. Il jeta un regard glacial à mon agresseur, qui se plaça juste devant moi, bien décidé à me garder, son couteau pointé vers eux. Un puissant rayon lumineux déferla des mains d’Avorian. Sèvenoir l’esquiva, riposta avec sa sphère rouge. Le lion, imperturbable, remua ses longues ailes, créant une violente bourrasque qui propulsa le globe pourpre contre une colonne proche de moi. Le pilier s’écroula sous l’impact. Je roulai sur un côté pour éviter les débris, ignorant la douleur, et m’élançai vers mes alliés. Sèvenoir employait toute son attention pour éviter leurs attaques simultanées.

Avorian me pris la main. Nous commençâmes alors à disparaitre. J’entendis au loin Sèvenoir déverser tout son courroux :

« Maudits soient-ils ! Je vous aurai, tous les deux ! Vous mourrez… ensemble ! »

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