la fragilité de la conscience, une histoire folle

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Avec le soutien de  Louis de Lagarde 
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Piliop : L'Énigme d'un Homme

En chacun de nous, il y aurait un Piliop : un prisonnier d’une pensée solitaire qui imaginait son parcours mental et sablonneux. On pouvait dire que le principal défaut de l’accaparement de son soi était sans doute son entourage social, qui était sans visage et sans nom. C’était ainsi que peindre virtuellement sa réalité équivalait en général à l’identifier à des moments sociaux brefs, ce qui constituait un tout petit point sur la toile pour Piliop, désignant un homme bien seul face à lui-même. En exagérant bien entendu, ses pensées ne faisaient que s’embourber dans une bulle de savon, ne laissant aucun air s’échapper de son enveloppe psychique. On ne savait pas comment te le faire comprendre ; ni visuellement, ni méthodiquement, ni scientifiquement, cette situation ne représentait en aucun cas une situation anodine. Seule une histoire aurait pu supposer tout haut les pensées glaçantes et obscures de Piliop.

Elles lui donnaient une mine sombre de son miroir, et leurs noirceurs avaient leurs origines dans l’apprentissage. Sur le monde psyché de cet homme, il arborait la mélancolie et le désespoir comme symptômes de celui dont son existence n’avait rien de bien glorieux. Pourtant, on l'avait jadis vu souriant, sans aucune véritable anormalité, aux côtés de son unique fils, Hystein, désormais incarcéré.

Mentalement, ses réflexions vives sonnaient comme des flocons de neige trempés de gasoil. Elles participaient à sa vie comme des actions sournoises et se prolongeaient dans un présent – laid et frivole. C’était que Piliop, lui-même, avait sa vraisemblance avec un poète ou un philosophe excellant dans l’art oratoire difficile, s’assimilant à un flux de paroles délaissées, sans impact. Jamais, il n’avait autant souffert de sa solitude.

Telle une clarté lunaire, elles lui dictaient sa mine flamboyante quand il tentait de saisir ses idées clairsemées de noires dans un essai de : résoudre, raisonner et parler – ces instruments d’un aspect contemplatif. Cela lui arrivait encore fréquemment en fait de sortir de ses torpeurs.

Le Revers de la Réalité

En creusant le fin fond de sa psyché et en la laissant se poser sur les envies de Piliop, on se rendait compte que ses réflexions, centre de spécialités extravagantes de cet homme, se détachaient de la réalité à l’image d’une buée à sa bouche. Si celles-ci n’étaient pas exposées à travers des stimulus plaisants pour lui, elles diminuaient en envergure dues à leur intensité et à leur concentration baissière comme une glace Eskimo. Et en l’occurrence, elles le rappelaient, sans cesse, son déséquilibre, qui le rattachait ainsi à une vie médiocre. Baignés de leurs teneurs et différences avec ses aspirations, les voluptés du réel vivaient sans Piliop. Ses flambées de désir ne le choisissaient pas telle une soucoupe à deux faces malchanceuses. Une fraîche concrétisation, même en période de faste appétit de ses besoins, ne se matérialisait que trop rarement. Cela le rendait hermétique et perplexe si l'on imaginait un visage serein dans cette première impression. Et si l'on souhaitait obtenir sa bénédiction pour entretenir une relation amicale et passagère, rien ne valait sa poigne pour son originalité, d’un savant désenchanté et plus !

Comme un feu se consumant sur le bois, Piliop générait suffisamment d’énergie pour ses idéaux sociaux. Et, ses idées rebelles prenaient forme avec une foi toute dévouante, et une caricature comique, le tout s’imprégnant du grotesque, pour ceux qui ne cherchaient pas à comprendre. Ces flux d’idées, souvent emmêlés, étaient si fertiles, si interpellants, fougueux et imprévisibles.

La Sagesse Face au Temps

Parce que le temps les faisait baisser inexorablement en grand nombre, ils se soumettaient, par la force de la physique, aux lois de l’éternel vieillissement. Piliop, lui, possédait une sagesse comparable au soin qu'un barbu grisonnant pouvait rendre à sa tendre barbe. Il avait ce don très unique d’une écoute fantastique envers les nombreux passants s’agglutinant à son chevet et admiratifs de ses discours, ce qui constituait à son époque une grande force pleine d’originalité.

La Pratique de l'Oralité

Dans la pratique, se mettre à entretenir son flux personnel de parole semblait être sûrement son exutoire préféré ; et notre héros en redemandait vraiment. On était à coup sûr en droit de se faire des réflexions. Le bon déroulement de ces dialogues narratifs à plusieurs, auxquels Piliop demeurait autant de marbre, se distinguait à un geyser d'une montagne, une puissante éruption volcanique toujours vivace et incandescente. C’était la tonalité des mots, le désordre occasionné qui donnaient l’effervescence citée, plus dans l’art de provoquer qua dans la maîtrise de véritables coups à se calmer.

Pour un homme de son allure, Piliop se devait de choisir méticuleusement ses paroles mielleuses, des mots soupesés avec une précision chirurgienne. C’était bien plus que des mots, mais des poignards acérés contre l’injustice ambiant. D’un ton assez directif, secouant le premier cocotier de la grande indifférence générale, Piliop animait à chaque coup un débat de toute une vie. C’était qu'il était profondément épris de son monde, de ses pensées, et souhaitait façonner son univers personnel à la vue enchanteresse de ses passants pour bien poser les bases, afin qu'ils devinssent, très naturellement, égal à ses fantasmes. Mais y avait-il un point d’entrée et de sortie pour encenser son don et être finalement plébiscité de ses contemporains ? S'il souhaitait éperdument soutenir son allocution vive encore longtemps, vers plus d’expression d’un égo à sa mesure, l’aurait-on vivement interdit, comme il le fallait, sans doute ? Rien n’était moins sûr que ce chemin alambiqué le mettrait davantage en valeur.

Échanges Sociaux et Solitude

Il serait ainsi judicieux de nous attarder, dès maintenant, sur ces échanges sociaux de ce grand esprit tourmenté qu'était Piliop. C’était une consécration de voir que ses idées, dans ses paroles, étaient partagées avec certains novices à sa pensée. Rien ne semblait vouloir perturber ce grand oral, une fois les débats bien lancés. Pourtant, ces gens ne réagissaient pas ; les derniers de la classe lui faisaient une face toute d’incompréhension, et aucun échange d’idées ne pouvait se produire en l’espace de quelques microsecondes. Il était assez simple de comprendre pourquoi. Car Piliop préférait une soi-disant écoute fine à une réaction forte en demi-teinte, sans toutes les informations dans le creux d’une main. Or, l’enregistrement des idées par les badauds se faisaient à petite goutte ce qui conférait à Piliop une source d’amertume et d’espoir.

Ses propos filaient avec tendresse, tel un cachemire synonyme de bonté. Personne ne s’apercevait, en fait, de la nature empathique de sa vision, le laissant tout isolé dans l’opacité de ses réflexions. Et, c’était dur. Pourtant, les mots de Piliop favorisaient amplement cette nuance du gris, sans se juger, juger les autres. Il délaissait spontanément le noir et le blanc pour mieux englober cette réalité complexe et fragmentée, si l'on devait lui distinguer une gamme de couleurs d’un ton lui allant au mieux. Les retombées, si peu gratifiantes, que le quinquagénaire espérait étaient toutes révélatrices d’un effroyable malaise. Le silence équivoquement, à un silence de mort suscitait des interrogations que Piliop allait mettre son poing dessus pour révéler à autrui sa quintessence de sensibilité et intellectuelle, au moins à son fils Hystein.

La Nature Profonde de Piliop

De sa dite nature, la déviance maladive de Piliop existait comme la brusque fourmilière de pluie à ses nuages, tel une grosse enclume à son lourd martelet. C’était un partage continuel de convictions, de sincérités et de profondes mélancolies en elles-mêmes. Mais on disait, en outre, que c’était un réel orateur à écouter, vraiment. Il était si décrié et allait de fausses notes en fausses notes.

Piliop : L'Orateur et le Philosophe Incompris

Le défaut majeur que Piliop devait surmonter, était sans doute le plus difficile. Il redéfinissait ses conditions mortuaires le représentant quasi en cadavre. La notion de charges émotionnellement pénibles à tenir semblait être son fardeau. Sur sa société idéalisée, il y avait ce retour du jugement froidement accueilli. À force d'une agitation propice de son corps à cogiter, notre acteur-penseur avait une façon bien à lui de faire constater son mal-être, son esprit à bout de force. Faites d’avis bienveillants et de subtiles recommandations pour la société, il demeurait ce piquet du vent en proie à la déconfiture mentale, surtout pour une approche fantasque aussi chaleureuse et énergique que la sienne. Il ne savait pas qu’il devait exercer sa connexion émotionnelle par rapport à des personnes réceptifs et, pas à tout le monde comme un incendie à une cité, si quelque chose avait à changer.

Piliop avait sa mission dans son transfert oral du savoir, qui sortait du fond de la flamme vive de son cœur : la reconnaissance et l'évolution sociale, chères à Durkheim. Pourtant, malgré ces températures d’inconfort criant à la difficile maladie, il vivait si tristounet ; et, tempête du dramatique, il fustigeait ce manque d’empathie et de reconnaissance envers ce qui ne suscitait aucun attrait. Piliop essayait ces vives voies royales d’un juteux dragon absorbant le feu ou d’un grognement de loup, dépourvu de gentillesse. Or, ses congénères le désignaient d’autant plus vindicativement – tel un original décrit davantage par son physique désagréable que par la saveur et le poids de ses élans et tournures narratives à perdre haleine, ce qui sentait la bonne exagération de l’habitude morose d’une personne sans connexion émotionnelle forte et même faible.

Une Communication Paradoxale

Il n’avait en apparence que faire de ces charges émotives ; et il continuait, dans l’oralité, à distiller ses sujets tant aimés. Il était si coutumier de le voir mains levées et visage tiré, tel un agitateur génial de lui-même, dans la mise en œuvre de son entreprise collective idéale, sa grande trouvaille : un mieux-vivre ensemble. Il était nécessaire de trouver la bonne approche même si, celle qu’il adoptait, ne portait aucun fruit.

Son sujet de prédilection était la cohésion sociale ; et il cherchait, par tous les moyens – au-delà du peu d’estime de ses contemporains – la mise au point fondamentale et humaniste, dont la collectivité s’en moquait, des sens échappés aux mots et aux caractères : d’amour partagé, d’amour vécu, d’amour expérimental et d’amour émanant, par une analyse approfondie, dans sa grande tradition conceptuelle. Sa manière, à la fois originale et ludique, de mettre en bouteille son monde, lui conférait un reflet à la fois comique et très théâtral. Il fallait se déplacer pour savoir à quel point Piliop sentait le parfum de la verve et de l’énergie.

L'Intimité et les Défis

On trouvait que, tel un esprit ne sachant pas y faire dans ses relations, sa vie solitaire lui permettait de broyer du noir, mais aussi de trouver, finalement, des réponses très adaptatives. De son intimité, hors de ses joutes verbales publiques, on lui connaissait peu, sauf un fils : Hystein. C’était en lui que Piliop serait déterminé à porter toute son attention et toute son affection. Bien plus qu’un amour filial, Piliop était tiré d’obligations morales envers sa progéniture, à défaut de ne pas savoir le propager autrement que dans sa sphère très personnelle. Une machine à fabriquer l’amour mettait de surcroît la puce à l’oreille à qui connaissait la façon de Piliop de se comporter envers ses relations si mal fichues.

Si on lui disait qu’il n’était pas le bienvenu quelque part, il essayait, vraiment, de se venger violemment, puis de réparer ses actions fautives. Car, muni d’un profond et doux sentiment de culpabilité, il reconnaissait tout de même la valeur vitale d’une vie humaine. C’était, en définitive, cette simplicité dans ses manières et la rédemption qui rendaient Piliop très unique ! C’était l’invitation à le connaître qui primait pour lui redonner la joie du monde merveilleux tout autour.

Les Coulisses de la Pensée

On avait une soif, évidemment, de connaissance et de curiosité envers ce Piliop, indiscernable. C’était sans peut-être oublier les manières dont il traitait et ressentait les informations : de la générale à la singulière. Car on savait bien en discuter pendant des heures sur son envie de bien-faire. Ce qui mettait sa critique en bonne et en mauvaise effervescence, c’était son ressenti. Agité, ce dernier tendait Piliop dans ses interrogations comme le jet d’un essui rêche. L’immobilisant, il résonnait en un ding-dong de contradictions que Piliop essayait tout de même de museler.

Misant tout sur sa défense et sur de bons rails de l’apprivoiser, Piliop se repentait à l’occasion pour faire taire son hébétement, tout risible et grotesque. Contre la sensibilité, par exemple, il la jugeait si impropre à la bonne direction à donner dans l’assiduité, dans de minutieuses valeurs de ces germes intellectuels tels que la logique, le raisonnement et les scénarios de l’opportuniste. Fronçant ses sourcils de blancs, il songeait, penseur, tête basse, à ce qu’il pouvait intrinsèquement le contenter. C’était ainsi qu’il sourcillait comme indiquant cette voie : celle d’un éclair à proprement dire de génie ; et souhaitait appeler, sans demi-mesure, sa mémoire logique et photographique : celle des ressentis antérieurs et ceux, évidemment, du souvenir. Une fois que Piliop serait justement apte à se défaire de ses éléments penchants et indésirables, il procéderait à leur remplacement des souvenirs effacés, façonnés de leurs tristes penchants.

Le Combat Contre l'Individualisme

Donc, comme une force invisible, son esprit n’était pas serein ; et il détériorait son corps, cet objet pratique et naturel qui avait prise sur le réel. C’était ainsi qu’il rassemblait toute sa vive sagacité jusqu’au-boutiste pour pousser ses invectives contre l’ennemi de toujours : l’individualisme. Car il ressentait que ce mal pouvait être détruit par la même technique qu’il utilisait : à savoir sa déshumanisation programmée faite en grande souche de rigueur, de froideur et tranchante. À tort ou à raison ? C’était dans sa vive intériorité qu’il cachait les causes de ses comportements indésirables à ses tracas persistants. Bien qu’il fût excentrique, il n’en demeurait pas moins l’homme rigoureux d’une pensée jamais en berne, toujours effervescente, fougueuse, interpellante et imprévisible.

N’atteignant que partiellement son but, il se mettait à philosopher sur son déni, le déni de ressentir le moment présent. Donc, entre une émotion et une autre, Piliop posait ses questions sur les sentiments d’où naissaient sa sensibilité. C’était une facette, selon lui, de la ténacité de celui qui souffrait, qui ne pouvait pas se maîtriser entièrement. Ses grandes détresses émotionnelles parvenaient à se transmettre ainsi volontairement à sa conscience. Elles le laissaient pantois ; et Piliop adoptait la posture tout ébahie de celui qui savait entièrement son chemin.

Piliop avait pris ses renseignements dans un amas de désordre émotif pour en extraire richesse et utilité. Car la souffrance amenait son lot de conscience et d’expériences de vie. Par des discours émotionnants, il trouvait inopportun ses observations de l’origine de ses maux, mis dedans un orage colérique de temps à autre, évacuant la surchauffe émotionnelle. Ce n’était certainement pas chose aisée s’il se permettait d’attendre une lumière diffuse et opaque après chacune de ses apparitions publiques. Alors, au plus incroyable de ses états intérieurs, ceux le faisant tomber de son pied d’escale, il éprouvait cette force réfractaire d’exister comme une œuvre défraîchie plutôt que de se transformer vers des aspirations moins compliquées. Ses pensées en dormeuses-rêveuses se situaient aussi bien dans un simple homme qu’il était mais aussi au travers d’un homme sombre et bon père de famille. Celles-ci lui rappelaient toute l’ambiguïté de faire face à ses raisonnements, ne pouvant agir en tant qu’acteur décortiquant ses perceptions. C’était bien plus qu’un simple hobby délaissé par tous, comme son petit instrument de jardinage sans son attirail. Cela ressemblait à son métro-boulot-dodo. Pourtant, Piliop voulait en faire son cheval de bataille ; et il souhaitait une embellie à sa mesure. N’étant pas préparé pour tout cela, il disait quand même non aux petits joujoux existentiels qu’il savait en concordance très forte avec sa force spirituelle. C’était de là que parvenaient ses émotions, pensait-il. Son but recherché était ce soupçon de preuve pour voir apparaître un ruisseau d’autodiscipline s’autorisant une légère baignade de répit. Il souhaitait arborer des réflexions alliant, improbablement, concret, pragmatisme et imaginaire. Autre temps, autre lieu, l’âme de Piliop ressentait ce besoin de s’émanciper de son brouillard d’incertitude par de langoureux soupirs, en soulageant sa tête pleine de ses rêves cadenassés de détresse solitaire. Sans doute, la solitude l’avait conduit à une intériorité envahissante. Mais ce n’était pas tout ce qu’il éprouvait – sûrement pas tout !

La Virtuosité et l'Engagement

Pouvait-on lui reprocher en quelque sorte sa virtuosité ? Car un esprit aussi difficile, aussi plein, mûrissait au gré symphonique de sa symphonie musicale intérieure. Une vraie conséquence du rythme coïncidait avec ses battements de neurones, comme de pures actions mécaniques et spirituelles. Au gré des tumultes, Piliop se redéfinissait comme un homme intérieur, de spiritualité et de caractère. On pouvait définir ce qu’il vivait comme une de ses valeurs fondatrices, comme un savoir impalpable souhaitant surgir, comme une connaissance porteuse de sens. Ne laissant jamais personne dévoiler ouvertement la pensée sur notre héros, on lui aurait porté volontiers une tunique de rose et de noir, aménagé ainsi une bouteille à moitié vide ou fait ressentir vivement une fleur de peau d’un chaos bondissant. Car ses aboutissements personnels n’avaient pas encore atteint la cime qu’il s’était fixé.

Un fait quotidien, un fait anodin, rassemblaient toute sa pigmentation intérieure, tout son éclat en verre fragmenté. Un jour, durant un éclair orange de lune, son humeur mélancolique s’assombrissait. C’était dans ses habitudes de voguer en surrégime de neurones, surtout lors de phénomènes perturbant son fonctionnement intérieur comme un réel qui ne se mettait pas en bouteille. Pour Piliop, c’était très dur à accepter. Il était, par ailleurs, inscrit à la craie sur un bout de chiffon qu’il irait se battre contre un mal objectif et latent : son vécu de sa propre injustice sociale du monde. Il espérait fournir une aide pour autrui, même si celui-ci ne le comprenait pas comme il l’aurait voulu. Il n’exagérait nullement quand il disait qu’il allait faire en sorte de réparer, seul, toutes les fautes des repentis : son Hystein adoré compris. Dorénavant, il aurait ce marteau du Dieu Thor alliant sagesse et enseignement pour de grandes réussites : la collaboration sincère à plus de fraternité.

Le Pédagogue Désabusé

Il vit son enthousiasme ruisseler sur son front, se penchant sur un savoir-faire hautement maîtrisé. Piliop était bien plus qu’un simple orateur, mais un pédagogue de niche et désabusé. Il avait cette idée lui tendant ses lèvres étirées : amener sa didactique là où il voulait. Cela aurait permis, à la pédagogie de ses disciples, un bond de son grand collectivisme. Il avait des éléments abstraits au-dedans, ce qui contribuait au charme de son enseignement. Malheureusement, il trébuchait sur la définition de son mot coincé sur le bout de la langue, comme « apprenti ». Alors, s’enchaînant tout autour d’une botte, il se jetait dans des lancées communicatives intuitives et fluides. Il posait sa tendre main rugueuse sur son dessus de la tête pointu et rasé pour apprivoiser ses élans joyeux.

À propos de cela, dit-il, le culte des valeurs communes, il y avait cette difficulté à discerner et à critiquer. Il en suggérait que c’était un vrai problème non résolu. Le communautaire sonnait creux quand on plaçait les idées pécuniaires au-dessus de tout système social. Il relativisait, comme l’énorme enclume d’une diction trop directive, comme si celle-ci était un fuseau lumineux rigide d’un croissant blanc de son écosystème habité – pour un philosophe, un poète tel que lui. Ou, homme de science, mais il n’aimait pas ce terme lui rappelant ce manque d’humilité qu'il engendrait. Pourtant, il s’inscrivait dans ce droit accomplissement.

La Quête Inassouvie

Sur des pas lourds, il expirait si fortement comme s’il traînait un pénible souffle à son cœur. Pourtant, il laissait spontanément s’échapper un tout petit bout d’esprit de sa simple expiration. Avec tout ce qu’il croisait de différent dans sa vie, il s’étonnait encore de la volonté de sa démesure, toujours un élément poussant son comportement à l’excès, qui nécessitait l’allure stoïque. Avec une pensée vigilante, Piliop tentait, s’il le savait vraiment, d'atteindre ses propres limites intellectuelles. Le but avoué était : combler ce vide laissé en friche par un destin moribond, ne souhaitant pas se voir dépérir mais plus se tonifier et les sarcasmes en faire sa nourriture vitalisante. D’un bon fond et du comportement vif du généreux, il semait, tout autour de lui, pour qui le connaissait, les graines ainsi fécondes de ses critiques piquantes, pour sa pure insatiabilité et les tourments de la société.

Une autre idée englobait ses soucis comme un puzzle où les interactions entre pensées étaient non linéaires. La rédemption venait avant l’Everest, bien loin au-dessus. Son art et sa sensibilité déployaient ce firmament d’or de l’intelligence faite d’abstraits et de concepts, toujours prêt, néanmoins, à secourir ce qu’on ne pouvait pas lui reprocher. Il n’était en aucune manière hautain dans sa démesure. Piliop savait qu’il ne pouvait plus se fier à sa dérisoire précarité pour encaisser sans cesse les difficultés de sa vie. Il souhaitait plus rentrer dans le moule et ne pas s’éloigner ainsi trop des standards. C’était sans doute crier assez fort ce qu’il avait ainsi à dire. Et ceci équivalait à la vie de son présent, des remords de son passé et de l’espérance de son futur.

D’un désert d’un Sahara ravageur, ces mots avaient un tortueux écho. Et, de manière articulée, ces paroles s’éteignaient à petit feu dans la rose si odorante d’un parterre d’hommes, empli du délaissement d’un animal, comme la vieille chèvre de M. Seguin. Si du moins les gens le percevaient comme finalement érudit et non comme un pur insignifiant. Tout dépendait de l’art de se faire remarquer en sa faveur ; et comment il l’aurait mis en pratique. Et son souci pour ses semblables allait sans doute finir par payer, un jour ou l’autre.

Les Particularités de Piliop

Les caractéristiques que Piliop portait venaient, en outre, de ses pensées et aussi de son amertume généralisée du spécifique au global. Remarquables et dantesques, il savait que ses réflexions sortaient des sentiers battus. Mais il ne voulait absolument pas s’encombrer les bras de leurs remèdes. S’il était constitué de forme particulière, c’était probablement une conception vicieuse du destin où chacun trouvait sa place à l’heure H. Piliop pensait qu’elle les savait propices à une noble cause, toute dédiée à l’autre. Souvent, la joute verbale l’attendait pour élargir sa place au monde. Mais, il était rattrapé par sa dure réalité de vie sans ménagement, un combat virulent où chaque sueur devenait un atroce effort pour se faire accepter. Jouant les partitions comme le violoncelliste de talent qu’il était, il aimait pester comme l’ouragan sur la cause première, le système chaotique qu’il trouvait inadapté aux besoins. Il refusait maintes fois la considération d’homme de science, même si ses préoccupations suggéraient un socialisme, un scientifique poussé. Mais non ! Cet homme était davantage un poète sans valeur éducative formelle. Il maniait l’art joli de faire virevolter les mots justes par des ruptures, des sauts ou des enchaînements complexes. Il sonnait les oreilles des carillons de son époque pour dénoncer, haut en couleur les dérives antisociales. Par une fourmilière d’images sonores, il s’en prenait au manque criant de choix, au manque de flexibilité, au manque de l’élan social qu’il jugeait à vomir de ce petit monde. Trop poussé dans l’anticonformisme, il ne supportait plus l’air si prévisible de son monde suicidaire sur lui-même.

Il y avait certaines facettes inconnues dont Piliop hésitait à s’aventurer pour l’heure. Par exemple, il ne souhaitait pas trop en rajouter et se mettre en colère, car il savait que l’irritation faisait apparaître ces sentiments spontanés les plus mal-aimés. Mais ses méditations ultradéveloppées lui venaient en aide, parce qu’elles étaient synonymes de clairvoyance et de sérénité pour un espoir dévoilant ses ambiguïtés et les tentacules sinueuses du chemin.

Hypersensibilité et Contrôle Intérieur

C’était avant tout son hypersensibilité qui, dans sa vie alambiquée, s’échelonnait en paliers jusqu’à une grave et réelle saturation. Elle laissait, à vrai dire, couler le sang sombre du possédé qu’il ne supportait plus y faire face, d’où ses tensions internes visibles par des comportements agités. Mais c’était aussi la raison pour laquelle ses prises de recul parvenaient tout de même à le maîtriser s’il ne s’emportait pas entre-temps. Piliop fourmillait tel un esprit vif, de pensées captivantes sur lesquelles venaient s’ajouter, inexorablement, au firmament de la joie, le plus bel effet de ses plus belles excitations : l’amour de tous par tous. C’était en cela qu’il s’amourachait de ce don d’aimer et de ressentir plus violemment et intensément que tout autre.

Dans sa lucidité, il avait l’occasion, par ses paraboles, de rapporter sa poésie, au-dedans de son humeur, parfois sans saveur, aux concitoyens de la seule cité qu’il aimait vraiment.

Solitude et Rébellion

Inexorablement, dans sa crevasse froide de mélancolie, de temps en temps, il se situait hors des radars de la tendresse, quand on le voyait peaufiner ses violentes proses contre la société. Il revendiquait, par une certaine distance, ce concept, cette définition symbolique et ce sens adjoint au mot « individu » qui le mettait dans tous ses états, comme apeuré et névralgique d’une migraine.

De sa belle démarche narrative, Piliop se brisait sur elle comme une noix sur le sol, dans l’utopie d’un idéaliste. Cela, c’était vraiment mal. Il pensait chèrement à ses familiers, à son Hystein. L’inconnu d’un avenir à construire et défaillant se faisait pressant. Jusqu’à la boîte noire de subjectivité de Piliop, on savait l’interpréter comme inhérente à sa personnalité.

À son courage d’en faire davantage que le strict minimum, on pouvait lui rappeler que la quantité n’était pas toujours un synonyme de grande qualité. Pourtant, devait-on le forcer à naviguer sur un yacht de croisière, sur un navire en bois de hêtre ? Devait-il jouir d’une vie pleine, en se surprenant lui-même, dans la fabrication d’un abri à sa hauteur, fût-elle modeste ?

Pourtant, le pan social de la société, ses règles, ses abus – dite si exigeante – s’étirant au loin comme une balle de squash et se lassant du poids de son passé, ne lui convenait absolument pas. S’il avait su à l’avance ses déconvenues, il n’aurait jamais autant maudit, dans l’écho creux d’un bocal de poisson. Et quel désespoir que celui d’un ours captif tournant en rond, pas à pas, dans sa cage toute opaque !

La Voie Incomprise

Obsédé et influencé par des nerfs tendus, ses longs moments de somnolence promenaient son ombre transparente sur une tôle de pugnacité clair-obscur. Il allait bien à l’encontre de ce monde, le trouvant perfectible. Cette boule de bowling (la communauté) s’avançait tout de même sur une mauvaise trajectoire et agrémentait les esprits, hormis celui de Piliop, d’une brouillonne discorde de l’asociabilité telle une épaisse et sombre brume pinçante anglo-saxonne. Il ne savait pas comment y faire face, où se situer. Si ce n’était du moins pas des hypothèses, des thèses de suggestions, elles avaient le pouvoir de le rassurer dans ses idées d’un changement important. Il convenait de donner à ce Piliop du respect, autant qu’il se respectait en tenue extravagante de l’âme.

Il dit à la goutte amère de sa salive abondant fertilement de postillons : « Comment pouvait-on se demander si cet engin métallique, troué et baigné d’une solidité, le rendait rigide au changement ? Si on le maniait de manière isolée, brute et sans le fruit de l’humanité et de sociabilité, de cette dure surface bombée en équilibre, il filtrait ses envies purement théoriques : quelque chose à voir avec le spleen. Car elle cherchait sa nouvelle forme en deçà de sa structure… »

De vague en vague, il se confondait malheureusement. Il supportait sa tempête, esseulée et brune du pourri pour lui, pour son avenir, un objet si dense et fragile intérieurement.

La Société vue par Piliop

De là, parlons un peu de ce que les gens me laissaient imaginer, sous ma manière très personnelle et avisée de ce que je ressentais.

Présentées de chair et d’os, ces personnes avaient ainsi leurs cœurs touffus en artichaut.

À la fois droits et hauts, leurs comportements donnaient une certaine bizarrerie mondaine. Dans une sorte de tromperie, en faux-semblants de ce qu’ils paraissaient, les gens ajustaient sur leurs têtes un petit couteau à pain : celui-ci ne sachant qui maniait le manche et qui en était vraiment responsable.

Dans leurs tentatives d’un monde juste pour eux, ces individus semblaient alertés du manque d’aisance qu’ils pouvaient se permettre, autant dans la pauvreté que dans la richesse. La raison était leur peur. Notre société n’offrait pas un grand nirvana de bonheur qui opposerait les uns aux autres.

Si des événements s’embourbaient en méandres cadavériques, les profiteurs, sans aucune vergogne, sans rendre univoquement à la nature son unique droit, se donneraient la main, d’un gros profit à un autre.

Pourtant, un simple petit pinceau à jet d’un rendu de coloriage d’artiste pouvait les faire s’agripper, tenter leurs minces chances, si le monde des grands imbéciles, des indécis, des sédentaires sans direction, voulait comprendre, agir et se faire entendre. »

La Peur et la Mortalité

Ses nombreuses idées commentaient une et une tracasserie en amont : la peur du danger, la peur du danger social d’apprendre dans la précipitation des concepts importants et vils, au lieu de s’ouvrir, d’approfondir soi-même ses défis de la communauté d’Hommes. Se faisant ressentir vivement dans ses proses verbales, la mortalité des morts inutiles l’étouffait, surgissait comme cette admirable et captivante vue d’un feu lumineux sur une grande avenue. Piliop en avait fait une obsession folle, un sous-entrepôt de la folie. Cela ne pouvait s’arranger, disait-il. La menace possédait de nombreux rameaux, pas toujours visibles. Comme narré poétiquement, elle ressemblait à un oiseau mal famé, par exemple un corbeau ou un vautour.

Piliop enchaînait donc sur des faits de son histoire. Il rapportait ces échantillons de réalité qui se déployaient à foison comme une tempête dans son esprit déjà envie de passer à autre chose. C’était l’occasion toute particulière de découvrir l’homme-individu comme le porteur manifeste du néant, de l’espoir zéro pour nourrir le besoin d’autrui. Chacun des contemporains de Piliop avait des insatisfactions, mais ne savait pas qu’une vision et des objectifs communs à chacun auraient pu les servir bien plus. Donc, en une très forte imprégnation, cette tendance, dans la façon singulière de naufrager les gens, mettait les cœurs sous forme d’un roc et les actions individuelles menaient au délaissement de l’identité collective qui se réfugiait au chaud comme un outil secondaire.

La stratégie même de cette structure sociale visait à isoler chacun. L’individu devenait un électron libre, portant à merveille ses fruits pour le repas d’un seul. C’était un fait de débat et hautement admis à l’époque de Piliop. Cela coïncidait à un procédé un peu brutal, mais efficace pour celles ou ceux se trouvant au-dessus de la hiérarchie, telle une reine à ses abeilles. Dans sa civilisation, l’abri du solitaire ressemblait à la dureté des jours sombres. Par une tromperie unique, on le contraignait à n’avoir aucun rapport intime qui l’aurait secouru de son cageot non communicatif. Piliop ne savait pas où cela avait débuté, ni où cela se terminerait finalement, vers quelle fin. Il connaissait la marchandise, sa valeur et ses échanges que l’on ne distinguait plus de l’individu.

Le cercle d’amis ou familiers était devenu ainsi ce vieil isoloir pourri, désuet, excessif et si mal perçu. Mieux valait être seul que mal accompagné. Pourtant, ceci avait une source du mal : l’individu. C’était à partir de son avènement que la société prenait son lointain envol pour saccager la pléthore de valeurs en chacun, dont le solidarisme ramené à des préoccupations secondaires.

Cet isolement mettait à bien le fossé grandissant entre égoïstes et altruistes. Il était en place comme un carrousel musical d’une grande fanfare, où chaque place de l’orchestre influait sur sa propre catégorie de statut. Pourtant, plein de gens, dans la nécessité d’un lendemain qui chantait et d’une main tendue qui réconfortait, invoquaient, sous leurs conditions, les termes d’échec, de misère et de besoins inaccomplis en dénonçant bien fort les méfaits dangereux et les travers dans les agissements pour l’égo.

La Voix du Philosophe : Un Avertissement

Faisant preuve de la maîtrise dans l’argumentation, d’où sortait une autre de ses flambées éloquentes, Piliop dit, non sans prévenir, d’un ton dramatique :

« Notre situation était menaçante, et elle était en adéquation avec notre société que nous subissions.

Tel l'un de ses horizons, un phénix périssant dans son déclin apocalyptique, tout en feu, le corps de la société, tel qu’elle se présentait, prenait un risque insensé de voir le loup dans la bergerie et d’engendrer, quand l’espoir sera vain, l’incrédulité manifeste de ses habitants. Elle donnait un coup d’arrêt au centre névralgique, meurtri et en veilleuse : le cœur, les émotions et l’entraide d’une mission, d’une missive, d’un prochain.

Aux détours de vents à sens unique, de vrais moments ténébreux, notre siècle, notre nature, notre chère terre ne pouvait plus se permettre de propager à foison autant de périls. Les mots effrayant, cauchemar, catastrophe, donnaient l’épilogue dans lequel la non-cohésion allait provoquer, petit à petit, un raz-de-marée de détresse si le temps ne changeait pas de cap. »

La Douleur et le Regard

Dans la pratique, le fil très fin qui tenait auparavant les communautés ne se déchirerait pas si celui-ci n’était pas bien relié par le nœud des aînés, établi par amour des liens sociaux. Il fallait, avant tout, retrouver tendresse, sécurité et la foi.

Pourtant, d’une lame finement aiguisée, les anciens ne pourraient occulter ainsi la dimension précaire et asociale de la réalité. Cette perspective durcissait si bien que, maintenant, elle disposait, en somme, tel un mur rempli de fissures, les hommes en bataille, en composition variée et en formation individuelle. En effet, ils se divisaient entre eux, parmi ceux ayant un véritable atome de rebelle pour certaines anomalies sociales perfides et ceux qui ne trouvaient nullement la société en porte-à-faux, celle, en fait, qui représentait bien entendu l’étendard de la vie terrestre insoutenable.

Ce vil poison se répandait sous formes multiples. Du moins, si l'on s’imaginait notre copinage, notre singulière amitié, notre bonhomie, il était plus gratifiant de s’en camoufler. De trop de compliments, les gens n’y prêtaient aucune attention. La perception que Piliop s’était faite de ce trou antisocial avait un lien direct à son vécu. Car, comme le hêtre sans feuillage, seul face à un monde vide et sans véritable chef de musique au ton festif, il avait été longtemps rabroué, lui qui ne désirait qu’une seule chose : l’amitié. Bien que cela incitât les individus comme lui à d’autant plus s’isoler, tel un rouage à ses ressorts d’une machine aux dimensions extralarges, Piliop pensait très intelligemment et avec lucidité, tel un clair de lune, que la vie ne devenait pas un Éden mais une malédiction. Il passait d’une tournure réflexive à une autre, à l’inverse de ce que nous pouvions sans doute trouver, tel un singe éduqué. Car oui, nous devrions nous rattacher à la solitude, comme substitut par défaut ou vice irraisonnable. Si, en plus, le délaissement entrait en jeu dans un choix, où l’apparence ou la psychologie de chacun comptait avant tout, elle forçait les tournures émotives des gens vers un usage de sélection draconienne. Cette nouvelle forme de « à soi » prenait le clivage rocambolesque du dicton : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais qu’on te fasse. » La bataille amorcée de chacun contre tous paraissait solidifiée comme un roc, pour s’enchaîner à une substance saupoudrée d’humanité : le cœur grisant de l’opportuniste. Et, Piliop établissait ainsi son arène de vaincus : ses amis, ses connaissances et d’autres mis en exil et en péril d’un lendemain qui ne chantait pas.

La Sensation de Clôture

La sensation voulue par la société pour ce petit bout d’homme, Piliop, était de se sentir aussi cloîtré dans son espace entre quatre murs, par choix à défaut d’un confort plus profitable, que dans sa misère individuelle, par acceptation. Il y avait sûrement encore pire que cette situation-là. Il suffisait de se tourner, se pencher à droite, à gauche. Et, comme c’était accepté dans sa forme, bien des gens connaissaient les mêmes conditions chaotiques que Piliop. Et, la souffrance de la solitude faisait partie de son quotidien. Pour un physique inhabituel, hors de toutes frontières acceptables, il n’en revenait pas qu’il était mis ainsi sur le bas-côté. De sa part, le fait de se proscrire de tout contact pour des raisons de timidité provoquée représentait cette intolérance des autres ; et cette tension nerveuse créait en lui une émotion de détresse intérieure. Les partisans de Piliop ne pouvaient pas l’aider à surmonter ce fardeau car celui-ci semblait cette terre sur ses épaules d’Atlas. C’était dans l’individualité dans cette piste sablonneuse où était son salut à son époque, parce qu’elle délaissait la raison de son poids collectif : les beaux fruits des gâtés. Le jugement hâtif avait de beaux jours devant lui. S'il existait des solutions malgré tout.

Le Temps et l'Évolution Sociale (Discours de Piliop)

Piliop se mit à parler de l’homme fort, puissant et brave de son époque, avec les époques révolues, et dit : « C’était une profonde logique qui se cachait derrière le sac rempli d’émotions altruistes des hommes. Un retour précipité d’un Moyen Âge fut enrôlé de force dans une sorte de diktat. Ce fut imaginé vers cette solution efficace pour éviter le saccage du collectivisme. Son évolution à la Renaissance, où l’on découvrit les charrues avant les bœufs, tendait, dans les maux du peuple, les armes de l’expulsion spontanée. Si ce n’était pas l’occasion de contempler l’individu – maître de sa bonne humeur et coupable de l’exil des autres – cognant les murs de sa raison collective, et délaissant aussi le bonheur d’autrui. »

Après avoir ouvert ses portes à sa grande sagesse, Piliop ajustait ainsi son fil discursif : « Nous devions, pour susciter l’émoi autour de l’individu pingre, supposer que cet homo-je-sais-donc-je-suis sortait de la même cuisse abondante que Jupiter se revendiquait. Au-dessus de la générosité gratuite d’antan, on trouvait une générosité personnelle. Ladite sacralisation de l’individu, telle cette invention en eau potable, au détriment d’un plantureux avenir tout doré de l’étendard de la collectivité, faisait sans doute partie des seules priorités de société jusqu’ici. »

La Réalité de Piliop et ses Combats

C’était, de cette réalité-là de sa tendre époque, que Piliop avançait, sans connaître, sans points de repères établis, en somme, en véritable aveugle. Ce réel-ci était mis au-devant, au-delà de ses nombreuses critiques envers celui qui tirait profit des situations à son compte. Dans une communauté, l’art du partage devait être un droit de la constitution. Sur les plus faibles, le désordre mental se lisait sur leurs visages comme un champ de patates non fleuri, qui était une vaste plantation non finie de gens malheureux. C’était aussi, dans et par la nature qui nous commandait et nous interpellait ainsi, le détour amer d’un beau fruitier bien semé et la présence verte d’un ver si besogneux, dans une société très gâtée en long et en large ! murmurait-il.

Dans bien des situations qu’il présentait à tous, on sentait que les tourments de Piliop menaient à une complète complexité des questions sur l’identité du rebelle de la révolte. Entre une perception maintenant et une réalité l’enfermant dans une cage, Piliop ne trouvait pas, plus que cela, les moyens de donner un sens à sa captivité imprégné d’un réalisme funeste. Selon lui, ces phénomènes avaient leurs propres limites comme tout, mais le chemin devait sembler pour tous sans issue. Le social sauverait Piliop s’il pouvait enfin se rebeller contre son stéréotype et de faire tomber les masques de la peur. Le verbe parler semblait ce prompt, face à sa nudité du paraître quand il se confrontait aux autres, un moyen efficace d’attiser la rébellion si c’était pour enfin exister. Mais sa personnalité allait de pair avec les événements de son existence difficile sans possible ticket d’un nouveau tour de carrousel.

Il y avait sûrement plein de choses à dire et à redire sur sa manière de titiller son réel. Une était plus marquante que d’autres. En effet, si nous recommencions depuis le début, c’était sans doute l’intonation fébrile mais existante des paroles d’espoir, tel le chant d’un coq annonçant un matin radieux, qui nuançait sa tristesse. Piliop disait, selon les circonstances qui se présentaient à lui : « Comme la braise vivifiante d’un plaidoyer, des sourires très interrogatifs et parfumés, de parfums de Jacinthe, faisaient rejaillir sur nous leurs feux brûlants des mots éloignant nos semblables d’eux-mêmes, perte d’identité, confusion. »

Cela signifiait que la simple compréhension des problèmes des autres ne suffisait malheureusement pas. Notamment, une forte odeur de critique en ressortait, celle disant que l’empathie serait un pur et seul moteur à cultiver. Or, peu importe la façon de formuler, nous retombions souvent dans les sillages infernaux d’une voix unique commune aux individus, celle de la pendaison courte de l’homme empathique.

La Solitude Incontournable

Comme on le savait depuis longtemps, il était plus que recommandé de mettre son profit à son maximum, cette liberté extravagante du rivage solitaire conduisant à la folie, à la dépression. L’histoire nous apprenait pourtant le don de soi par la mise sur pied de la spiritualité. Il serait utile, évidemment, de considérer mieux les vieux grimoires moisis, ceux des valeurs, dont le titre illisible avait été effacé sur le sujet de l’abandon, l’abandon des mœurs, l’abandon spirituelle de la fidélité des proches, de la connivence avec ses propres voisins. C’était ce qu’en appelait ladite prospère société en marche, destructrice d’accises.

Ce qui perpétuait le harcèlement intellectuel de Piliop, c’était la constance dans les sentiments d’un dépérissement. Il faisait partie de notre arc narratif qui sera délaissé par la suite pour aborder la vraie histoire mettant en scène la praticité d’un homme fort acquis de la maturité et faible engendré par ses caractéristiques propres. Piliop rentrait en jeu comme symptôme du monde, de la vie difficile. Son bras gauche de rédempteur prônait une sensibilité pour les autres et une force de réaction proportionnelle aux coutumes naturelles et apprises. Face à tous, tout seul, cela serait probablement le slogan fantastique de l’histoire. Il avait, néanmoins, une racine solide en lui, où les éléments se déchireraient en un flux continu introspectif pour le bien fondé d’une société se souciant des dérives et les corrigeant. Pourtant, affaibli et usé, Piliop sentait son heure maudite être à la croisée des chemins. La question demeurerait celle-ci : de mal en pis ou de mieux en mieux, de torpeur, de mélancolie, de souffrances était cela vivre ?

D’un problème né à un autre encore à concevoir, même si on souhaitait une vie sociale réjouie, on aurait une position, d’un point de vue externe, la même, celle d’une obligation de remettre à jour les composantes de sa vie – la fatalité, les responsabilités, l’affect, etc. – et de s’y confronter. Et Piliop, de son histoire, en savait plus que quiconque de ses aléas subis.

Le Regard, Miroir de l'Âme

Cette position en appelait une autre, celle plus énigmatique, plus ouverte, mais tout aussi importante que la première. Car, des enchaînements, des surprises, des moments clefs à déchiffrer faisaient la part belle à l’intrigue qui se dévoilait peu à peu. Si Piliop était un éléphant, il serait seul à s’aventurer dans les riches savanes dépeuplées. « C’était à ça que nous cherchions, de fait, notre salut tant sanitaire qu’existentiel de notre excellente fortune d’être présent ! » disait Piliop. « Car, nous nous mettions souvent à faire de notre existence comme une piste cyclable aménagée où il serait possible de changer son sens de direction, sans l’influence de freins pour diriger, similaire à une route sans chemin, sans saveur, monotone et de fait provoquant sa perdition et celle de nos semblables si nous ne relevions pas nos têtes pour s’apercevoir du non-sens abouti celui de l’égo démesuré de rire du danger. C’était cet individu qui ne se contentait pas du peu mais souhaitait le plus », selon Piliop. Dans ce monde où il avait vécu, il était important d’apprécier la compagnie du vivant au détriment des objets qui, eux, étaient sans substance de vie. Pourquoi faire simple quand on pouvait faire si compliqué ? Cette dimension rosée en mare de sang d’un chaos social insupportable était vue dans sa transparence physique comme du gibier important à dompter. Par ce qu’on pouvait en déduire, c’était la caractéristique symbolique qui menait à la subjectivité de la question en suspens : « Comment réagir de sa solitude ? » Face à une problématique si dense, comme un monde sans connectivité touffue de social que Piliop vivait, personne d’autre que lui ne connaissait une réponse probable en adéquation à son profil.

Pour l’heure, cela sentait le fait horrible du même acabit lorsqu’on percevait tout l’intérieur de Piliop qui donnait élan, à bien des égards, à une part importante de sa nature plus retirée sur lui-même que jamais. Car, là où le bât blessait et la souffrance, c’était finalement dans l’émancipation personnelle de ses souhaits et dans ses lettres de noblesse de ne pas faire n’importe quoi si ce n’était pas se mettre en danger.

C’était de cette facilité toute sommaire que devait se jouxter une couche de subtilité. Car, avec son recul, de sa société, et de ses camarades, si Piliop voulait dûment interagir, il le pouvait à l’aide du regard, précieux outil qui devait révéler tant de secrets. Un regard se posait en salvateur. Cela n’arrivait pas, en fait, pas du tout. C’était sans doute la plus affligeante des blessures. Car, il était enfoui comme préoccupation secondaire, la première étant le regard sur soi.

Désordonné, posé en mosaïque de la vision, le regard, ainsi vécu, avait plutôt mené Piliop dans les tourments abyssaux. Glacés de ses frissons et d’angoisses, de l’inquiétude en somme, remplaçaient la félicité rendue possible par l’attitude posée des yeux sur l’autre. Il avait franchi le palier de l’isoloir, d’une raison justificatrice d’un « pourquoi ». Seul son fils permettait à Piliop de flirter avec le réel qui le fuyait, sans nul doute à raison, ne faisant que s’apitoyer. Mais son fils, était-ce suffisant pour rendre Piliop heureux ?

La Métamorphose et le Progrès

Vu le geste du désespéré qu’il était, un soupir du fond de sa gorge devenait ainsi le plus profond et le plus réflexif de tous ses états d’âme, tel un penseur poète dramatique. Enfoui en son subconscient, ne pas s’en faire comme chuter dans la cage de son alter-ego retentissaient en une manifestation peu agile mais sincère dans son ressenti investi sans penser, outre mesure, à une duperie. C’était ce qu’on aurait appelé adopter un regard débroussaillé de toute rancœur visible à travers les yeux. Telle une métamorphose, une transformation d’un bloc de marbre en granit, Piliop se serait senti bien plus qu’un chef-d’œuvre s’il s’était contraint par les différentes étapes de sa sensibilité comme l’admiration, le respect, le dévouement, etc. Car, un regard ne manifestait sa vraie force que par l’humilité de celui qui discernait les sentiments d’autrui pour de vraies interactions d’amour et d’affect. Et, là, on aurait pu parler d’avancée et de progrès !

Mais où le trouver ? Par honnêteté, dans ce groupuscule social, la seule question avait peu de véritables solutions simples et complètes. Dans d'autres circonstances, vainement, cela ironisait le sort de Piliop, marginalisé des autres, jamais un sourire, une affection, sauf pour son fils, un terreau cultivé et entretenu toute sa vie.

C’était ainsi que le contenu de son regard se définissait comme un sel marin dont on en diminuait la teneur, sans rien de rien, du tout au rien. Sans regard, pas de relation. Sans relation, pas de regard.

Comprenait-il, Piliop, les enjeux, versés de larmes sur ce non-lieu ? Les remous affrontés devaient-ils se mesurer en désavantage ? Les affronts, ayant été ainsi supportés en long et en large, avaient-ils provoqué un renouveau ? Non, juste une vision solitaire d’un état de fragilité en permanence ! D’un autre côté, comment avait-il été malmené par des regards de mépris, d’incompréhension et de peur ? Dans son long chemin d’homme mûr, y avait-il d’autres mystères enfouis non résolus ? Outre ce fait, Piliop s’occupait de son enfant en prison. Hystein serait une belle petite embellie si ce n’était pas la résurgence des défauts de Piliop.

Piliop faisait face à la nostalgie d’un combat perdu d’avance. Les coups du sort s’acharnaient tel le fouet sur le lion en cage. Piliop ne s’en sortait manifestement pas et la fatalité venait truster le premier plan. Rien ne lui fut refusé comme désagrément, surtout pour un état où les choses simples devaient avoir de l’importance. De ce qui lui incombait, c’était de ne pouvoir nuancer l’avenir tout tracé d’un passé tristounet. Sans possibilité d’un changement, c’était bien là une lassitude, une monotonie dans ses activités menées entre prison obligatoire et confort primaire.

Limites et Perspectives

Pour les esprits raffinés, cela manquait de quelque chose. Face à l’inconnu, à son double quand il se présentait à lui (entendez, ses paroles se réfléchissaient sur lui-même), il ne donnait pas de signe de grande attention et finissait seul à surmonter ses peurs existentielles. Pourtant, telle une superbe poudre blanche ou encore un énoncé d’une chaotique somme, privé de ses additions, sa phase de désordre personnelle s’immisçait et ressortait à chaque coin de son pas mis en avant vers la sociabilité. Car la sociabilité s’acquérait dans le désordre, c’était bien connu. Et puis si toutes ces choses jouxtaient son armada de pensées, il fut bien trop souvent incompris et il ne lui fut pas permis de faire des ponts entre sa réalité et celle extérieure.

Ou encore, similaire à un pont neuf et son relâchement de soi, tel un sentiment d’un marasme évoquant sans nom le profond embourbement d’un séisme annoncé, d’un déclin mis en perspective, sa ligne inclinante, Piliop devait s’immerger, malheureusement, sans laisser quelques plumes au retour d’une conviction, sans l’appel à ses qualités sociales, bien amoindries de fait de ne pouvoir conforter une relation. Il ne lui en restait plus d’atouts pour combler dans sa vie un vide centré sur les disponibilités d’un ami, un copain, une petite amie, etc.

Et, pour notre père de famille, il n’allait pas au-devant de choses faciles à appréhender. Pour rien au monde, il ne pouvait trouver de solutions pires que celles de rester seul. Mais le monde social tournait en laissant des personnes comme Piliop sur le chemin car, bien d’autres ressemblaient à lui. Essayer un moyen d’un retour à sa normalité acceptable l’aurait sorti de son bunker de solitude de longue durée.

D’ailleurs, la disposition naturelle de ses composantes, le corps, tel l’agencement d’un circuit informatique, ne prenait pas une place aisée au sein de son envolée identitaire, empiétant dans les méandres du désespoir et d’une vie sans attache. Avoir un fils était un compte mais rien ne remplacerait une vie sociale de très grande richesse.

Par-dessus tout, une forte identification de la démesure, du plus petit des petits au très grand, avait la ressemblance poignante d’une tour vacillante au destin sans sa faille, sans cette fissure consciente de la perte de soi ! Car, son ego avait besoin de cette nourriture, des sentiments altruistes. Rien ne pouvait changer si la maîtrise de son mental n’incitait pas Piliop dans le lâcher-prise et l’apaisement d’un vécu, centré sur ses relations n’aboutissant pas.

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