Angoisse quand tu nous tiens
Je tourne la clé lentement dans la serrure, le cliquetis du verrou résonne, j'appuie sur la poignée fatidique et l'air extérieur me saisit, je sors alors du refuge et fais un pas au dehors. Je prends une inspiration et me tourne vers le ciel, le soleil ne semble pas vouloir se montrer, rien d'inhabituel dans ce village abandonné. Je regarde à gauche puis à droite, personne. Pas une voiture ne vombrit en contrebas de la vallée, seul le bruit d'un papier jeté qui flotte sur la route semble perturber l'étrange quiétude ambiante. L'ombre, elle aussi, semble rôder dans le quartier.
Je commence à remonter la rue avec ma mission en tête. Le plus vite j'y vais le plus vite j'en reviens. Je presse contre moi le petit sac que j'ai emporté. Le temps est gris et le vent souffle étrangement sur les maisons décrépies, peut-être annonciateur d'un orage dans la soirée? Le long du chemin je me retourne plusieurs fois, m'assurant que personne ou quoique ce soit ne me suive. Je vois une unique silhouette menacante au bout de la rue, pas le choix je dois passer par là, elle est encore loin pour le moment. La distance nous séparant se réduit, je peux voir qu'à sa carrure c'est sûrement un homme. Nous voilà face à face, je ne lui laisse pas le temps de parler, je baisse la tête apercevant son ombre hostile et accélère le pas. Les bourrasques reviennent de plus belle.
Je retiens mon souffle, mon coeur s'emballe pendant un bon moment, mes mains sont moites, je n'arrive pas à marcher correctement, j'essaye de me reprendre: Jambe gauche, jambe droite, jambe gauche.. Je sens un frisson sur la nuque. Je continue d'accélerer un peu plus.
La démarche maladroite, j'arrive à destination, éssouflée. L'enseigne de l'enfer est là, devant mes yeux. La pancarte elle-même semble maudire cet endroit, à moitié décrochée de la devanture. J'entre timidement, agréssée aussitôt par le son strident de la clochette d'entrée et le son des employés qui courent dans l'arrière boutique.L'oxygène se raréfie soudainement, la température, elle, monte. La personne de l'accueil m'a vu sursauter, ajoutant son regard de jugement à mon malaise. Je sors un papier froissé de ma poche et le déplie en tremblant. les pattes de mouches que je comprenais plus tôt me paraissent en cet instant illisibles, comment faire sans mon texte? Les yeux toujours rivés sur le papier, j'entends un raclement de gorge, la femme m'attend, elle me regarde, impatiente. Je reste à bonne distance et prononce quelques mots.
"Pardon?"
Sa voix me fait de nouveau sursauter, elle n'a pas entendu... Une goutte de sueur s'insinue sous le col de mon pull , le décor s'assombrit, les larmes me montent aux yeux, j'essaye de respirer le moins possible pour ne pas faire de bruit. Je me racle la gorge, regarde le papier et dit:
"E-Excusez-moi ! deux pains au chocolat s'il vous plaît"
Elle pose sur le comptoir l'objet de ma quête, je m'en saisis, lui donne le montant exact et repart aussitôt, fuyant cet endroit lugubre. L'ombre toujours sur mes talons, je me rassure en me disant que le refuge n'est plus qu'à quelques mètres.
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