Une histoire ordinaire

14 minutes de lecture

Elle était adossée contre le mur grisâtre de saleté à l’allure décrépi, une attitude désespérée s’émanant de tout son être. Emmitouflée dans son manteau en peau de renard, qu’elle avait rabattu sauvagement contre son corps mince pour le refermer tout en le coinçant sous son bras gauche, elle fumait. Silencieusement, à mesure que le mégot s’évaporait en fumée, elle contemplait la vie qui se muait sous ses yeux clairs, donnant la sensation d’être profondément extérieure à tout cela.



De sa position, Emile le savait. Ce n’était pas seulement un sentiment qu’elle donnait à voir. C’était parfaitement ce qu’elle ressentait en son for intérieur, cette drôle de sensation d’être, à ce moment précis, à côté de tout, proche de rien. Et ce serait son rôle, bien sûr, de l’aider à reprendre sa place dans le mouvement incessant de l’existence, de l’extirper de sa place de spectatrice du monde. Néanmoins, avant de prendre ses responsabilités à bras le corps, il s’accorda le droit, puisqu’il le pouvait, de l’observer quelques secondes de plus encore, de retarder l’inévitable, mais surtout, d’essayer en vain d’arrêter le temps. Il la regardait consommer son mégot, ses longues jambes couvertes d’un collant léger à la teinte grise et de ses bottes noires qu’elle ne quittait jamais. Il n’était pas habituée à l’admirer dans ses tenues d’hiver. Où avait-elle trouvé ce manteau, d’ailleurs ? Il n’aurait pas su le dire. Ses cheveux tombaient en une cascade sauvage balayée par le vent froid qui s’emparait chaque jour de la ville. Malgré cette mine soucieuse sur son visage, elle ne perdait pas ce charme naturel, cette manière d’être qui la rendait si elle-même, qu’elle était incapable de constater ou de comprendre. A vrai dire, il aurait presque aimé que ce moment se fige. Qu’il puisse toujours revivre cet instant où il la regardait sans même qu’elle en ai conscience. Pour lui, ces moments volés étaient ceux qu’ils préféraient au sujet de sa fratrie. Néanmoins, son coeur battant ne cessait de lui rappeler à quel point le temps pressait, puisqu’il ne s’était pas résigné à s’arrêter.

D’un pas assuré, chacun d’entre eux appuyant avec force sur le béton, au rythme accéléré de ses pulsions cardiaques, il s’était avancé vers Elia. Son dos droit, son menton levé, il faisait preuve de dignité, qu’elle ne manqua pas de remarquer lorsqu’il arriva à sa hauteur. D’une main leste, elle s’était débarrassée de sa cigarette terminée, expirant une dernière fois la fumée tandis qu’elle s’était redressée pour accueillir son frère aîné. Ce dernier nota à quelle point, bien qu’elle feignait un habituel sourire espiègle, elle paraissait fatiguée. Il aurait presque parié qu’elle avait pleuré en silence, dans un moment propice de solitude.

- Les médecins disent que ça va aller…, Lâcha la jeune femme d’une voix à peine audible aux accents mélancoliques.

Bien sûr, il le voyait, elle n’avait pas l’air de cet avis. Mais comment lui en vouloir. Elle ne faisait confiance aux paroles de personne depuis bien longtemps.

- Tu es montée le voir ? Répondit Emile doucement.

La femme rétorqua silencieusement par la négative d’un petit mouvement de tête.

- Juste été à la réception, pour savoir où était sa chambre et prendre quelques nouvelles.

Lentement, l’aîné passa un bras réconfortant autour des épaules de sa petite sœur, l’invitant d’un mouvement délicat à rentrer dans le bâtiment. Soudain, alors qu’ils allaient passer les portes, la cadette s’arrêta, ses talons s’enfonçant dans la matière dru du paillasson mîteux qui jonchait le sol de l’entrée.

- Je…Ça ne sert à rien que j’y aille.

- Mais qu’est-ce que tu racontes ?

- Il ne veut voir aucun de nous deux. Et surtout pas moi. Vas-y tout seul.

- Arrêtes de dire n’importe quoi. Tu sais très bien que c’est faux.

- Et toi tu sais très bien ce qu’il dit et comment il est...

Immédiatement, le concerné, déposa deux mains solides sur les bras d’Elia, ses doigts s’agrippant légèrement à la douce fourrure animale qui composait son manteau.

- C’est ton frère, oui ou non ?

- Oui…

Elle baissa piteusement son regard au le sol. Ce seul argument la faisait constamment douter. Ce seul argument l’avait empêchée de monter par elle-même et passer de son plein gré la porte de la chambre d’hôpital où ce dit frère résidait depuis quelques heures. C’était toujours cet argument, partout, tout le temps. Le meilleur autant que le pire. Cette chaîne épaisse qui les reliait, ce lien involontaire. Désireuse de faire plaisir à son aînée, elle se contenta d’un hochement de tête, inspirant une profonde bouffée d’air, cette dernière lui apportant les affreuses effluves aseptisée si propre au monde hospitalier. Obéissante, elle se laissa guider par Emile, ses doigts tendrement emprisonnés dans sa main si immuable de force, si remplie de conviction.

Tout le temps du trajet, Elia était restée silencieuse, distante avec le monde. Ce dernier lui glissait dessus, tout aurait put arriver, aucune réaction n’aurait transformé son visage habituellement si expressif, cette fois-ci devenu aussi froid que le marbre. Elle avait laissé Emile s’adresser au personnel, jusqu’à même échanger un sourire avec certains d’entre eux, et l’avait suivit dans les différents escaliers et les multiples couloirs. Docile, elle s’était passivement conditionnée à l’accompagner. Néanmoins, quand enfin le duo arriva à quelques mètres de leur destination, il sembla tout à coup qu’elle reprit conscience de ce qu’elle s’apprêtait à faire, qu’elle revenait à elle même, Elia Savieri. Sans un mot, elle s’arrêta au milieu du long et étroit couloir blanc, à quelques mètres de leur point d’arrivée, se figeant brusquement au milieu du passage. Voyant qu’elle peinait à le suivre, Emile passa une tête par dessus son épaule, découvrant alors que sa comparse ne le suivait plus. Il se retourna dans sa direction, son corps et son visage se muant en une expression d’incompréhension, le tout dans un silence qui rappelait de façon intrinsèque qu’ils n’avaient nullement besoin de mot pour communiquer. La plus jeune haussa vers le plus âgé des trois Savieri, un regard plein d’incapacité. Elle ne passerait pas cette porte. Elle n’en avait pas le courage, ni l’ambition. Pas pour ce qui l’attendait derrière. Emile s’évertua à la convaincre par ses regards insistants, ces arguments qu’il laissait transparaître au fond de ses prunelles, tous tout droit sorti de son âme si mystérieuse et indéchiffrable. Pourtant, Elia ne cédait pas. Juste le temps de venir jusqu’ici, elle avait déjà de nouveau envie de fumer de toute façon. Et pour elle, comme pour Enzo, toutes les excuses auraient été valables pour qu’ils soient loin l’un de l’autre à ce moment précis. Ô elle était si désolée pour Emile. Cependant il fallait, au milieu de ce modeste, presque effrayant hôpital, que chacun se rende à l’évidence. Ce n’était pas possible. Plus maintenant.

Alors finalement, ce fut Emile qui fit le premier mouvement. Acceptant le choix de celle qui partageait son sang, il se détourna d’un demi-tour fluide, abdiquant par le seul bruit de ses semelles crissant sur le sol à l’effet plastifié. Elle n’avait qu’à rester ici. C’était sa décision. Il n’allait en rien la forcer à faire ce qui ne lui ressemblait pas ou ce qu’elle ne se sentait pas d’accomplir.

Immobile, Elia le regarda parcourir l’allée, puis sans un dernier regard, disparaître derrière la porte qu’il referma soigneusement derrière lui. Il l’avait laissé dans le silence. il n’y avait pas un patient. Pas un passant. Pas un seul membre du personnel pour palier à cette accalmie étrange qui régnait entre les murs désinfectés. Rien qu’elle et son impossibilité.

Alors elle était rentrée. A pied. Elle avait longuement vagabondé, des heures durant. La femme avait parcourue les rues parfois vides, parfois bondées sous la lumière tantôt blafarde, tantôt jaunâtre des lampadaires, lorsqu’ils ne grésillaient pas, prêt à s’éteindre à tout instant. Elle n’avait distinguée personne, marchant contre la foule, empruntant des axes qu’elle connaissait par cœur, sans réfléchir à sa route. De toute façon, cette petite ville, ce grand village n’était pas immense. Elle n’avait même pas prit le temps de s’arrêter sur le port ou du moins de ralentir pour s’imprégner de l’air marin qu’elle aimait tant. Non, elle avait progressé tête en avant, ses mains autour de son corps pour maintenir sa fourrure close. Elle se doutait que de multiples habitants l’avaient reconnue, elle qui était toujours de trop dans le décor. Ce soir, elle l’avait particulièrement perçu.

Puis elle avait atteint la maison, en passant rapidement par le jardin. Elle avait frappé trois fois à la porte, mais personne n’avait répondu à son appel. Dans un mouvement répété des centaines de fois, elle plongea ses mains dans les larges poches de son manteau. Néanmoins, elle découvrit avec effroi que ses clefs n’y étaient pas. Le souvenir la frappa avec violence. Elle les avaient oubliées dans la veste d’Emile lorsqu’elle lui avait empruntée quelques jours auparavant. Elle avait été négligente, avait omit de les récupérer pensant le faire plus tard, et bien sûr n’ayant pas pensé une seule seconde se rendre à l’hôpital. Intérieurement, elle se blâma quelques secondes avant que la solution ne lui vienne comme une évidence. Reculant du perron, elle revint sur ses pas, se dirigeant vers la droite de la demeure.

Alors elle était rentrée par la fenêtre du rez-de-chaussée, celle qu’ils avaient toujours laissée ouverte. Par précaution qu’ils disaient. La réalité était qu’elle servait aux oublis et à faire le mur. Evidemment prendre cette entrée avait serré son coeur, elle aurait adoré pouvoir l’ignorer. Mais elle manquait de moyen de passer à l’intérieur et c’était bien pour cela qu’ils avaient pensé ce système tous les trois.

La maison était vide, plongée dans l’obscurité. Une fois à l’abri des murs de pierres après avoir mécaniquement retiré son manteau avec négligence, l’abandonnant sur un fauteuil du salon, sans même vraiment savoir pourquoi, elle s’était rendu à la cuisine. Elle ne s’était laissée guidée que par la volonté de ses pas, sans vraiment savoir qu’elle destination ces derniers lui réservait. Sur son passage, elle allumait la lumière, ses doigts glissant avec fluidité, avec précision sur les interrupteurs. D’abord le couloir, puis elle s’était rendu jusque sur le carrelage orange ancien. Pourquoi la cuisine? Elle ne savait pas. Après tout, sa chambre à elle n’était pas loin, juste là, un étage au dessus. N’étais-ce pas un meilleur endroit où être ? Pas cette nuit apparement. De quelques pas inaudibles, elle se rendit sur les escaliers qui trainaient au milieu de cette vieille cuisine, ces escaliers qui séparaient la partie pour préparer des mets de la partie dînatoire, de quelques marches en suspension. Seule, elle appréciait s’asseoir sur ses marches sans vraiment pouvoir l’expliquer, sous la lumière pâle et sans âme du néon blanc. Une habitude d’enfance jamais partie, probablement. Là, depuis ce minuscule promontoire, elle pouvait réfléchir. Que s’étaient-ils dit ? Qu’avaient-ils tût ? Emile avait-il évoqué qu’elle avait refusé, abandonné au moment de passer sa porte ? Ces questions la firent redouter le retour de son aîné. Durant quelques secondes, elle songea. Qu’aurait été leur monde si quelques mots, quelques gestes, quelques non-dits avaient été différents ? Auraient-ils été une famille soudée comme celles qu’ils croisaient parfois, celle qu’ils avaient aspiré à être sans y parvenir ? Etait-ce un objectif vain pour les Savieri que d’espérer être plus que cette cellule familiale dysfonctionnelle dont-ils alimentaient les mécanismes et les rouages abîmés ? Elle avait parfaitement conscience, avait accepté même, qu’elle rendait le quotidien de cette fratrie ainsi parce qu’Enzo et elle était trop différents. Cependant, cela ne lui arrachait désormais plus que des soupirs de lassitude, de désarroi et de résignation. Il y avait probablement eu un échange à la naissance, et cette faute inconnue de tous les poursuivait comme une malédiction, le plus dérangeant des malentendus.

Elle songea une seconde à se servir un verre de n’importe quoi tant que cela contenait de l’alcool, pour finalement se raviser. Cela encore la rapprocherait d’un comportement trop semblable à celui de son frère détesté.

- « Ce qu’elle peut être agaçante quand elle s’y met. » Murmura t-elle entre ses dents, imitant la voix de son frère d’une façon caricaturale.

Là voilà qui se donnait en spectacle dans la cuisine. Ah, s’il voyait cela. Cependant il n’en avait pas la capacité. Comme elle ne pouvait changer leurs disputes, leurs incompréhensions, la différence considérable de leurs mondes ainsi que les gestes et mots odieux échangés. Non tout cela était immuable et gravé entre eux. Dans un geste désespéré de son sort, elle déposa sa tête dans ses mains. Y avait-il plus grande ironie que d’être si semblables pourtant si différents ?

Relevant une tête lourde affichant des traits tirés pas l’anxiété et la fatigue, ses yeux se promenèrent sur le décor, cet espace convivial dans lequel ils avaient tous les trois grandis. Puis d’une façon anodine, elle déposa ses pupilles bleues sur le mémo en ardoise, accroché au mur, qui disposait juste en dessous de deux minuscules emplacements pour ranger des bibelots. Dans la famille, on y mettait des clefs. De là où elle était, elle en distinguait quelques unes, dont le doré scintillait légèrement. Sur l’ardoise étaient griffonnées quelques instructions, probablement rédigées et abandonnées sur la pierre noire depuis quoi ? Des années sûrement. Elle y reconnût aisément des lignes d’Enzo. Il rédigeait si mal. Elle l’avait toujours pensé. D’ailleurs ce détail lui arracha un sourire nostalgique. Personne dans cette maison n'avait la calligraphie du second fils Savieri, et ce détail avait de quoi faire rire.

Curieuse, elle se hissa sur ses pieds tranquillement, faisant quelques pas jusqu’à se retrouver à la hauteur de l’ardoise. Elle eu comme la sensation de faire un brusque retour dans le passé. Ces quelques lignes rédigées à la va-vite étaient des vestiges de moments à jamais révolus. Plissant les yeux, elle s’acharna à déchiffrer la courte phrase. Pourtant, ce fut sans appel, elle n’arrivait pas à comprendre un traître mot de ce qui était inscrit à la craie blanche. Les lettres étaient illisibles. Et elle n’avait pas le courage d’y passer la fin de la nuit. Abaissant sa tête vers le sol, elle redécouvrit le mur de photos qui avait été fait en dessous. L’avait-elle déjà observé juste une seule fois ? Elle s’accroupit, prenant le temps d’observer chaque clichés. Beaucoup la représentait elle et ses frères pourtant elle doutait grandement que ses parents avaient un jour eu l’idée et entreprit de constituer un mur des souvenirs. Tandis qu’elle les balayait tous un à un, revivant sa vie telle un personnage extérieur à sa propre existence, elle se prit en flagrant délit de redécouverte de moments oubliés. Beaucoup lorsqu’elle n’était qu’une petite fille. Mais également plus grande. Ils avaient bien plus de photos à trois qu’ils ne l’admettraient chacun. Il y avait des clichés des anniversaires. Puis certains dans des soirées. Beaucoup même. Il fallait souligner qu’ils en avaient considérablement vécues. Ils avaient été à des concerts. Avaient reçus des diplômes. Avaient partagés des jouets, des amis et un appartement. Même certaines victoires, puisqu’Enzo avait reçu un prix littéraire qu’elle même avait obtenu l’année suivante. Elle avait été si jalouse qu’elle avait tout fait pour l’obtenir, et lui avait en retour été probablement jaloux qu’elle lui vole la vedette en s’accaparant le même trophée. Et parmi tout ces souvenirs immortalisés, il y en avait tellement où elle se tenait au coté d’Enzo. Tellement où ils étaient tous les deux côtes à côtes à sourire. Tellement où ils avaient mit leur différents de côtés, pour faire rêver l’objectif d’Emile, troisième maillon de leur chaîne indestructible qui tenait l’appareil. Tellement de clichés où ils partageaient le même moment de grâce et de légèreté, forcés par la vie à être présent l’un pour l’autre, forcé à être des protagonistes essentiels du monde de l’autre. Tout le temps là. Partout. Envers et contre tout.

Elle se recula légèrement. Puis, profitant de sa solitude, elle s’assit de nouveau, à même le carrelage glacé cette fois. La jeune femme était face au kaléidoscope de souvenirs, profitant de les dévorer des yeux. Son coeur était tant agréablement léger qu’affreusement pesant à cet instant. Tous ces moments étaient envolés, parfois oubliés, délaissés au passé. Pourtant il était si agréable de les revoir. Malgré le fait qu’ils ne pourraient jamais se reproduire aujourd’hui. Chacune de ses photos lui rappelaient à quel point elle haïssait son frère. A quel point elle l’aimait. A quel point elle le trouvait d’une intelligence folle à la fois qu’elle le méprisait pour une évidente stupidité. A quel point elle était heureuse de lui ressembler tout en étant à des milliards de kilomètres de sa façon de penser, d’aborder le monde et les autres. A ce moment, elle sentait la distance qui les séparait, autant que tout ce qu’elle revendiquait ou espérait de ressemblance avec lui. Cette ligne entre l’amour et la haine qui régnait constamment dans son coeur à son égard n’avait jamais été si bien exposée à son regard et son ressenti qu’en cette triste nuit hivernale. Alliés contre tant de fronts, ils ne cessaient jamais de se livrer bataille. Et même s’il pouvaient partager un adversaire commun, non, il fallait qu’ils trouvent le moyen de s’écorcher , se mutiler l’un l’autre constamment.

C’était ainsi.

Pour la première fois, elle avait une véritable crainte du futur. Elle redoutait de l’affronter, de le vivre. Elle qui avait toujours été si portée vers l’avenir. Son seul désir était de rester coincée dans cette cuisine, assise sur les pierres froides, sans Enzo, sans Emile. Juste elle, et les restes de son monde effacé par le temps.

Cependant le destin en avait décidé autrement. Alors qu’elle était encore à même le sol, ses jambes rassemblées contre sa poitrine, maintenues par ses bras qui les encerclaient, le cliquetis métallique et désagréable d’une clef pénétrant dans une serrure capta son attention.

Emile.

C’était lui sans l’ombre d’une hésitation. Lentement, elle l’entendit poser ses affaires en silence, par des gestes lents et calme, jusqu’à ce qu’à son tour il parvienne à l’entrée de la cuisine, restant à cette mince frontière qu’était l’encadrement de la porte. Il déposa ses prunelles claires sur Elia, et dans l’intimité peu chaleureuse de la cuisine, ils se toisèrent longuement.La conversation de regards fût brève. Ils n’évoquaient que l’essentiel

Lentement, l’aîné s’approcha, venant prendre place auprès de sa sœur avec un naturel déconcertant comme s’il était habituel de la trouver ainsi installée dans la pièce. Doucement, il se glissa à ses côtés, et Elia pût alors sentir le contact rassurant et solide de son frère, ce pilier inflexible. En silence, ils restèrent ainsi, sous la lumière faiblarde, surtout blafarde, du néon blanc. Mais il sembla à Elia qu’avec Emile vint un salut auquel elle ne s’attendait pas. Au loin, par la fenêtre, les premières lueurs de l’aube s’annonçaient, le ciel bleu se transformant petit à petit, allant de nuances marines profondes vers des teintes azures.

Simplement assis tous les deux de cette façon modeste, presque négligente, dans un calme parfait, sous les premières clartés du jour, un élan de soulagement s’empara d’Elia. Il y avait un moment de grâce dans la tempête. Délicatement, la femme déposa son visage marqué par l’épuisement sur l’épaule de celui qui fût toujours sont plus grand soutien, fermant les paupières. Elle ne s’imaginait nullement avoir besoin de les rouvrir. Noyée dans l’accalmie et ce qui restait de pénombre dans la maison de famille, elle se laissait bercer par le mouvement régulier des épaules de son aîné qui se levaient et s’abaissaient en suivant ses respiration tranquilles. Il n’y avait rien d’autre. Juste cette atmosphère presque irréelle. Rien que le parfum rassurant de l’aîné, la chaleur qui s’échappait de son corps robuste et l’incessant appel du sommeil auquel elle répondait un peu plus à chaque seconde qui s’écoulait.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Typhaine_Tascher ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0