Le Spationef Coincé (52)

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Les choses auraient pu en rester là. Seulement, couvert de produits gras comme je suis, je trouve encore la bonne idée de retomber dans le moteur. Tête la première, bien entendu. Ce qui explique que je tombe en même temps dans les pommes, voyez-vous.

Les autres ahuris continuent d'applaudir, peut-être parce qu'ils s'imaginent que j'ai un ultime réglage à faire pour les libérer de l'attraction terrestre. En guise d'attraction, c'est bientôt moi qui la fait. Je fais même sensation !

En effet, certains comprennent enfin que quelque chose ne tourne pas rond. Parce que la NASA à Houston est occupée, ils ne peuvent la prévenir que j'ai un problème. Donc, ils finissent par se dire qu'ils devraient agir rapidement, au cas où.
Oh, ce n'est pas pour moi qu'ils s'agitent soudain. Non, non, non... C'est juste pour leur fichu moteur. Faudrait pas qu'il retombe en carafe tout de suite, ils ne me le pardonneraient pas. Frôler les étoiles puis se retrouver cloué au sous-sol d'une planète sans intérêt, merci bien. Ils ont déjà donné !

Alors, les voilà qui s'activent comme des forcenés : les plus rapides relèvent l'échelle pendant que les plus lestes la gravissent comme des singes grimpent aux arbres ! Constatant ma situation, ils s'empressent de tout faire pour me dégager de là. Malheureusement, je me suis coincé un mollet, le plus beau, entre deux grosses tubulures en je sais pas quoi mais vachement solide et ils sont incapables de m'aider. Alors, fendant la foule agglutinée, Marcel prend les choses en main et hurle qu'il a besoin de la place, qu'il saura faire le nécessaire. Et vite ! Pour lui faciliter le passage, Obi Wan grogne quelques ordres de sa grosse voix des mauvais lendemain de cuite et tout le monde dégage le passage.

Alors Marcel monte...et plonge pour me sauver, pardon : pour sauver le moteur...

Tout le monde peut entendre ses commentaires, clamant comme quoi que l'ingénieur qui a conçu ce moteur mériterait de griller tout nu en orbite autour du premier soleil venu, qu'il vient de se coincer les mains dans un rouage qui n'a rien à faire à cet endroit, que si personne ne le retient il finira par foutre le feu à ce moteur pourri qui fait rien qu'à l'embêter. Etc...

Tout ça pour dire qu'il en bave un brin, le malheureux. Pourtant, le meilleur reste à venir quand, à force de contorsions et commentaires de plus en plus censurables, il hurle de rire en me découvrant enfin.  A sa place, je pense que j'en aurais fais de même. Je suis littéralement planté dans le moteur mais... tête en bas. Parce qu'il a pris un autre chemin que moi, il me découvre pile à hauteur de ses yeux. Tout cela n'est pourtant pas comique, en tout cas pas assez pittoresque pour justifier de l'hilarité du mécanicien. Sauf que c'est justement ma position qui fait que la bille, cette fichue petite bille reste coincée dans une de mes narines ! C'est grâce à mon nez, j'ai presque envie de dire grâce à mon flaire, que cette bille ne s'est pas brisée en mille morceaux. 

Quand elle est tombée la première fois, ce fut pour se poser en équilibre instable sur un tuyau souple. Tuyau que j'ai arraché sans problème pendant ma chute et elle est allée se ficher dans mon nez, ce cap, que dis-je ? Cette péninsule ! Toujours est-il qu'à la fin de l'envoi de la bille, je touche, c'est clair et net. 

Le Destin, auquel j'ajoute une majuscule pour bien vous faire sentir le côté surnaturel de la situation, a fait que je me suis arrêté dans ma chute, et mon nez tout particulièrement, pile à hauteur d'une petite dépression dans une énorme couronne crantée du moteur. Marcel à tôt fait de constater que l'arrondi de cette dépression recevrait à merveille une petite bille dont il ignore tout...

Coïncidence, me direz-vous ! Et pourtant... c'est bien à cet instant que le merveilleux Destin, auquel je continue de placer une majuscule, se montre favorable pour nous tous. En effet, le premier geste de Marcel est de prendre délicatement la bille coincée dans ma narine, m'arrachant au passage quelques poils, et se propose naturellement de la placer au bon endroit sur le moteur.Il n'avait jamais remarqué la présence de ce petit emplacement. Il comprend donc, la proximité de la bille l'aidant, que la solution de leur problème est sûrement là.

Par pur réflexe professionnel, il pense s'en saisir MAIS... et c'est bien là que Marcel devient mon super pote pour toujours, il se dit qu'il serait plus judicieux de me ranimer avant de faire quoi que ce soit d'autre, parce que c'est à moi que revient le devoir de la remettre à sa place. Oh, que je l'aime, le Marcel à cet instant-là ! Qu'il mérite toute ma gratitude ! Bon, je vous raconte tout ça, mais pour le moment je suis dans les pommes, je vous le rappelle. C'est à partir de tout ce que les autres m'ont raconté ensuite que je vous brosse le tableau de la situation, d'accord ? Mais, peu importe les détails, pourvu qu'on ait la suite !

Marcel ressort donc du moteur grâce à son agilité de gorille extra-terrestre et commence ensuite le démontage méthodique de tous les organes métalliques qui me retiennent prisonnier. Cela demande pas mal de temps, que les autres mettent à profit pour jouer au cartes, boire un petit canon et parler des prochaines courses de chevaux à Boston. Moi, enfin revenu de mes absences, je discute calmement avec Marcel qui est tout heureux de bricoler avec moi. Je lui passe les clés, les vis, et les outils dont il a besoin pour me libérer de mon piège. Tout se passe donc dans le calme le plus parfait jusqu'à ce que le mécanicien termine son job. Et il me libère enfin.

Il est vrai qu'il aurait pu penser à placer un matelas ou un truc moelleux avant de laisser tomber ma grosse carcasse par terre. Mais quand même ; libre, je suis. Libre. Et encore assommé.

On m'entoure, on me chouchoute, on me tapote les joues. Mais parce que je tarde à ouvrir les mirettes, on finit assez vite par me secouer comme un prunier, on me jette même un grand seau d'eau sur la tête. Bien entendu, je finis pas ouvrir les yeux. Normal, me direz-vous.
Ils sont tous là, autour de moi, me regardent avec attention, presque avec appréhension. Faut dire que s'il m'arrivait quelque chose de fâcheux, genre mortel, ils seraient bien ennuyés, tous ces cons... Pourraient pas repartir.

Alors, Obi Wan Kenobi, Grand Chancelier de l'Ordre des Jedis Perdus Depuis des Siècles sur une Planète de Merde, assisté de près par Agent, représentant d'une Organisation Inconnue, s'avance, se hisse sur un établi dont il évacue les outils d'un grand et auguste coup de pied et prend la parole d'une voix forte.

-    Mes amis, compagnons de galère ! Matelots, officiers, chercheurs, techniciens, armuriers, mercenaires... et toi, Marcel, notre mécanicien magique... le jour de notre Libération arrive enfin !

Tout le monde écoute religieusement, on sent dans l'assemblée une émotion intense. Je ne serais pas surpris de remarquer quelques larmes si j'étais en état de le faire mais, encore un peu commotionné, je ne pourrais l'affirmer vraiment.

-    Aujourd'hui, je vais vous prouver la puissance de la Force ! Longtemps vous avez cru que cela n'était que légende, fadaise, affabulations de ma part et pourtant vous allez aujourd'hui vérifier que mes visions étaient justes ! D'ailleurs, Elizabeth Teissier, cette adorable vieille pétasse, m'en faisait encore l'éloge il y a peu, sans compter les innombrables cartomanciennes et autres sorcières mercantiles de cette planète. Bref, aujourd'hui, presque maintenant, j'ai envie de dire, moi, Obi Wan Kenobi, je vais vous rendre votre liberté ! Allez Lou Yah !

Et les autres de l'acclamer avec ferveur, presque fanatisme ! Ils se mettent à danser sur place, se tapent sur les épaules et hurlent de joie. J'ignore depuis combien de temps exactement ils sont coincés sur Terre mais si leur joie est à la dimension de leur attente, alors je peux en conclure qu'ils sont là depuis très longtemps !

-    Pourtant, toute notre puissance galactique n'aurait pas suffit pour obtenir notre libération. Contre toute attente, nous ne somme rien sans... ça ! reprend-il en me désignant.

Et tout le monde de me regarder. Je sens une bonne centaine de têtes se tourner vers moi. Du coup, je ne sais pas trop quelle conduite tenir. C'est vrai quoi ! Je suis celui qui pourra mettre en place la bille dans la couronne. Moi, et personne d'autre ne pourrait le faire. Pourquoi, ça reste encore à élucider mais la chose est assurée ; je suis l’Élu !

C'est pour ça que je ne sais pas comment me comporter. Peut-être pourrais-je pérorer comme une vieille mégère, sourire de mes belles dents en plastique, ronronner comme une vieille chatte sur le point de se taper un petit gigolo aguiché à coups de billets de banque ? Ou, plutôt, faire honneur à la gloire du nom que je porte et me comporter comme un roi honorable et juste pourrait le faire ? Je ne sais pas. Pour ma défense, je dois préciser que je ne connais pas plus de vieilles mégères que de roi...

Alors, je décide soudain de faire à ma façon, c'est-à-dire avec ce naturel un peu brut qui me caractérise le mieux : direct au but !

-    Messieurs les Extra-Terrestres, commencé-je pour alléger un peu de la lourdeur des regards posés sur moi, sachez que c'est un honneur pour moi de participer à la fin de cet épisode galactique, à la fin de votre long emprisonnement sur ma planète. Si j'ignore encore pourquoi c'est moi qui fut un jour choisi pour votre bonheur, sachez que c'est avec fierté que je vous aiderai à foutre le camp de chez moi !

-    C'est une bonne remarque ! m'interrompt le Jedi, jaloux de garder la parole et, surtout, toute la gloire de l'instant. Tu ne peux pas comprendre pourquoi c'est toi
 qui mettra un terme à cette aventure ! Normal, tu n'es qu'un humain et...

-    Ouais, juste un humain, le coupé-je à mon tour, vexé de sa pique. En attendant, sans moi, vous pouvez vous l'arrondir et vous la mettre bien profond si je décide de vous laisser quimper, n'est-ce pas ?

-    On pourrait le dire comme ça, Arthur, c'est vrai. Mais on pourrait aussi utiliser quelques petits subterfuges pour te convaincre... rétorque-t-il d'un ton un peu doucereux.

-    Et  moi je pourrais décider de vous claquer entre les doigts, ce qui renverrait votre voyage intersidéral aux calendes grecques, hein ?

-    Avec la Force, je pourrais faire en sorte de te faire revenir d'entre les morts, tu saisis ?

-    Tu me diras comment un fantôme sans consistance fera poser une bille dans un trou, hein ?

Bon, l'ambiance commence à devenir un peu délétère et c'est Marcel qui, sentant que tout vire au vinaigre, tente une approche différente pour tenter de rafraîchir l'atmosphère.

-    Messieurs, messieurs...fait-il en écartant les bras comme pour séparer deux boxeurs en fin de round, et si on allait s'asseoir à cette table voisine ? Je vous propose une tasse de thé ou un autre petit remontant ? Je crois que tout le monde est un peu à vif. Il est indéniable que les récents évènements nous ont tous pas mal secoués et je crois qu'il serait dans l'intérêt de tous de prendre un peu de recul, qu'en dites-vous ?

On le regarde d'un air mauvais, le Jedi et moi, prêts à lui sauter à la gorge.
Puis, en soupirant avec force, Obi Wan lui concède qu'il a raison d'un simple petit mouvement du menton. Pour ma part, je réfléchis à la suite à donner à tout ça. C'est maintenant que tout se joue pour ma planète. Je commence à connaître le vieux pépère, et je ne suis pas loin de croire qu'il nous réserve une ultime mauvaise surprise, à nous les Terriens...

Je dois m'occuper de ma planète, non ? Si je suis l’Élu, je ne le suis pas seulement pour la sauvegarde des intérêts de cette bande de malotrus. Si la Force est véritablement un phénomène universel, alors elle agira aussi pour ma planète. Et puis, je dois veiller à sauver notre civilisation. Si je ne suis effectivement pas mécontent de savoir les chefs d’États sous verre, je sais par expérience que leurs successeurs risqueraient d'être pires et de vouer le monde aux périls extrêmes de dictatures forcément sanglantes... Enfin, je m'inquiète de savoir ce qu'il est advenu de mes amis, à commencer par Adolphe dont je suis toujours sans nouvelles... Alors, je cogite, voyez-vous ? Comment forcer ce vieux branque barbu à quitter ma planète sans la détruire, pour le simple plaisir de le faire, même s'il prétend le contraire ?

Obi Wan s'installe à la table proposée par Marcel pendant que je m'approche en silence. On se regarde droit dans les yeux, tous les deux. Celui qui saurait écrire assez vite pourrait publier un dictionnaire complet d'insultes télépathiques, peut-être même une encyclopédie !

-    Bien, messieurs, commence Marcel, maintenant que nous sommes tous attablés, si nous en profitions pour négocier ensemble un protocole pour la remise en route du moteur ?

-    Pas dur, rétorque le Jedi. Il place la bille et on se casse !

-    Compte là-dessus ! fais-je avec hargne. Sans moi, tu peux rien faire alors tu vas changer de ton !

-    Et sans mon aide, tu ne pourras jamais retrouver la surface !

Et c'est reparti !

C'est là qu'intervient Koenig. Il a retrouvé son râtelier, ce qui améliore grandement sa locution.

-    Vous allez arrêter de vous comporter comme des enfants, et tout de suite ! clame-t-il en frappant du poing sur la table. Je vous rappelle que toute mon équipe m'attend sur la face cachée de la lune pour repartir vers de nouvelles aventures ! Alors, vous allez vous décidez tout de suite, c'est clair ! Sinon, Obi, je t'attrape par la barbichette et je t'accroche à cette barre, vu ? Quant à toi, Arthur le terrien qui fait chier le monde, tu vas te grouiller de mettre cette putain de bille en place avant de retourner à ton quotidien de sauvage, ok ?

Il est terrible, hein ? Je ne pensais pas qu'il saurait se montrer aussi autoritaire. C'est vrai, à la télé avec sa longue silhouette filiforme et un peu voûtée, il faisait plutôt loulou de banlieue, ou encore vieux séducteur égaré sur la Promenade des Anglais, une avenue d'une grande ville française où mes compatriotes aiment à traîner pendant l'été.
Toujours est-il que, pour une raison que je ne m'explique pas mais dont je me fous pas mal puisqu'elle m'est utile, voilà que le Jedi se tient à carreaux...

-    Alors, commence-t-il avec mauvaise grâce, je vais te demander de bien vouloir mettre un terme à notre emprisonnement sur ta planète...de merde, finit-il à voix basse, desserrant à peine les dents.

-    Ma planète de quoi ? fais-je.

-    Ta superbe planète ! se reprend-il en baissant les yeux.

J'adore ce regard plongeant...
Qu'il est plaisant d'imposer sa loi à plus fort que soi ! Qu'il est agréable de renverser les ordres établis ! Je sens entre mes mains le pouvoir de diriger les actes de mes ennemis au mieux de mes intérêts...

-    Obi...fais-je, on ne va pas tourner autour du pot pendant des années. Je comprends ton impatience à...

-    Ne me tutoies pas, pauvre humain !

-    Je fais ce que je veux, ok ? Alors, je reprends, je vais démarrer ta chignole et toi et tes potes vous allez pouvoir repartir ad patres, mais...

-    Je m'en doutais... soupire le Jedi. Il y a toujours un "mais" avec vous, les terriens.

-    Je veux que vous me donniez garantie et moyens de me prémunir de toute nouvelle intrusion de la part d'un quelconque membre de vos organisations pourries.

-    Euh...ça veut dire quoi, ça ? demande Marcel qui n'a pas compris un mot.

-    Ça veut dire qu'il ne nous fait pas confiance ! jette Obi avec hargne.

-    Ça semble t'étonner ! Tu viens me dire droit dans les yeux que vous avez tout fait pour ruiner ma planète, que vous étiez sur le point de l'achever et il faudrait que je vous fasse confiance ? Tu rigoles, pépère ?

-    Mouais...t'as pas tort, dans le fond, concède-t-il. Alors, on fait quoi ?

-    Je sais pas trop.

-    On pourrait lui laisser quelques armes ? propose Koenig.

-    Gardez-les ! Pour rien au monde je ne voudrais ajouter l'horreur à l'horreur... On a déjà bien assez d'armes sur Terre pour la faire péter cent fois, fais-je d'un air désabusé. Non, je pensais à autre chose qui, d'ailleurs, avait souvent cours à l'époque du roi Arthur...

-    Genre ? fait Kenobi d'un œil méfiant.

-    Disons...des otages ? Je veux dire quelques personnes parmi vous qui resteront sur Terre, des personnes assez précieuses à vos yeux pour ne pas vous chopper l'envie de détruire la Terre à distance...

Ma proposition leur coupe le sifflet. Est-ce parce que personne parmi eux ne mériterait leur respect ? En tout cas, au bruit des murmures que j'entends tout autour de moi, je sais que ma demande leur paraît, sinon brillante, du moins bien pensée... même s'ils comprennent aussi que quelques condamnés devraient rester ici.
Ils se réunissent en un gros conciliabule duquel je suis exclu. Serais-je transparent qu'ils n'agiraient pas autrement. La discussion dure bien une vingtaine de minutes...
Finalement, Obi Wan lève les mains vers le plafond et impose le silence.
Je crois que le résultat de ma demande va tomber...

-    Arthur, tu es bien le digne descendant du roi celte. Ta proposition nous semble honnête. Toutefois, personne ici ne désire rester sur ta planète. il y aurait bien Marcel et Miss Alien mais je m'y oppose formellement. D'abord parce que nous aurons encore beaucoup besoin de Marcel pendant notre voyage de retour et Miss Alien risquerait fort d'échapper à tout contrôle sans ma présence et se livrer à quelques menues destructions, simplement pour assouvir sa faim...

-    Ah... fais-je, un peu déçu. Que faire , alors ?

-    Ceci : tu vas venir avec nous !

J'ouvre les yeux pour en faire des trucs tout rond... Sous le coup de l'émotion, mon cœur se met à cavaler sur les pampas de la trouille...

-    Tu sais, on a promis d'effacer toutes les traces de notre passage sur Terre... Or tu sais bien trop de choses et nous n'avons pas de produits miracles pour retirer définitivement de ta mémoire les évènements auxquels tu as assisté. Réfléchis bien, terrien.

Je l'écoute à peine. Pourtant, leur proposition me botte pas mal... C'est vrai que j'irais bien faire un petit tour dans les étoiles, moi aussi. Si j'oublie leur désinvolture, j'avoue sans peine que leur penchant pour la rigolade me branche bien... Sans compter qu'avec un peu d'insistance, je pourrais peut-être le convaincre de faire de moi un chevalier Jedi... Qui sait ?
Ils attendent ma décision. Je serais bien tenté de dire oui mais ils ne m'ont encore offert aucune garantie de protection de ma planète...

-    Et la Terre, dans tout ça ?

-    Ben, on en a largement parlé, de ton île perdue dans le Noir Céleste... et on se propose de la faire disparaître des cartes du ciel.

-    De quoi ? m'étranglé-je.

-    Calme-toi...! On l'effacera de nos bases de données spatiales, je veux dire, me rassure Agent. De la sorte, vous aurez la garantie que personne ne viendra jamais plus rôder dans les cinquante années-lumière à la ronde.Et on organisera des patrouilles de protection pour empêcher toute intrusion. Ça te va ?

-    Comment saurais-je que vous ne me manipulez pas ?

-    Tu assisteras notre opérateur stellaire, celui qui gère les enregistrements de nos vols spatiaux. Tu effaceras toi-même les coordonnées de ta planète de nos bases de données.

Je ne suis qu'à moitié convaincu pourtant je remarque une mimique encourageante de Marcel qui semble me dire que je peux au moins lui faire confiance, à lui. -    Et mes potes ?

-    Ils sont déjà revenus à leur petite vie. Pour eux, il n'y a pas de chance qu'ils en disent trop long sur ce qu'ils ont vu. Et puis ils sont encore plus insignifiants que toi sur cette planète. Toi..on t'a vu partout à l'ONU...

-    Dans un corps qui n'était pas le mien ! protesté-je.

-    Tu étais le seul à le croire, en fait... Tu n'as jamais changé d'apparence. juste de costume... rigole Obi Wan, content de lui.

Je garde le silence. Et puis...

-    Bon, disons que je suis d'accord sur le principe...

-    Parfait ! me coupe le Jedi. On part dans dix minutes !

-    J'ai une demande à faire avant de vous donner ma réponse définitive...

-    Encore une demande...? soupire Agent. Laquelle ?

-    Je voudrais qu'Adolphe soit du voyage avec moi.

-    Ton pote Adolphe...celui qu'on a récupéré dans les coursives tout à l'heure ?

-    Oui, lui...

-    Et pourquoi lui ?

-    Simple...il ne me pardonnerait jamais de partir pour l'Inconnu sans lui !

Dernier petit conciliabule... Décision rapide.

-    Vendu !

J'ai le cœur qui bat à tout rompre. L'avenir de ma planète ne me paraît pas complètement assuré mais je ne pense pas pouvoir faire plus...
J'aurais bien aimé avoir quelques jours, voire quelques semaines pour réfléchir encore à tout ça mais Marcel s'approche, l'air amical et, me tapant amicalement sur l'épaule me dit :

-    Bon, on fait un saut chez toi pour que tu prépares une petite valise ?

-    J'ai plus de chez moi...vous avez tout détruit !

-    Alors...ça te dirait de faire un saut dans quelques magasins ? Genre ceux que t'as jamais pu honorer de ta présence ? T'offrir des trucs et des bidules qui valent la peau des noix ? On peut te laisser revenir avec un max de trucs, même de vos stupides bagnoles qui puent et qui fument comme des soleils en fusion...

L'offre est sympa.

Pourtant, je la décline sans effort :

-    Je crois que là où vous nous emmenez, Adolphe et moi, on n'aura pas besoin de toutes ces choses... Par contre, j'aimerais bien prendre quelques cours de navigation, et puis plein de trucs que vous faites quand vous vous promenez dans l'Espace, tu vois ? Sans parler d'Adolphe qui ne va pas vous lâcher les baskets avant de tout savoir !


Nous discutons encore longtemps, Marcel et moi.
Puis Agent et Obi Wan s'approchent.

-    Bon...et si on la mettait en place, cette fichue bille ?

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