Chapitre 5

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Ne voulais déranger les deux femmes qui travaillaient, je frappais à la porte et attendis l’autorisation de Véra pour entrer. Celle-ci en fut d’ailleurs surprise.


— Depuis quand tu frappes avant d’entrer, toi ?

— Depuis que vous avez une assistante, Ma dame.

— Mouais. Je t’écoute.

— Marcus, Isa et les filles viennent d’arrivée. Votre mère est toujours là et je lui ai plus ou moins tout expliqué. Vous devriez discuter avec elle.

— Non. Si c’est pour qu’on s’embrouille encore…

— S’il vous plaît.

— Tu m’énerves, Élia ! J’arrive, soupira-t-elle. Viens avec nous, Rosalie. Je vais te présenter à mon cousin.


J’accompagnais Véra ainsi que Rosalie dans l’antichambre. Marcus jouait avec Lianna qui rigolait à cœur joie. Celle-ci ne s’aperçut même pas que je venais d’arriver.


— Lianna t’aimes bien on dirait, commençais-je les bras croisés, appuyés sur le mur.

— Cette petite est incroyable. Tu es la princesse de ma princesse.

— Tes filles vont être jalouses si tu continues de m’appeler princesse.

— Non, ce seront mes reines.

— Mais quel idiot celui-là, soupira Isa, nous faisant tous rire.

— Je vous présente Rosalie, mon assistante, intervint Véra.

— C’est un honneur, Vos Altesses.

— Une assistante ? Et Élia fait quoi maintenant ? questionna Marcus.

— La plante verte, rigola-t-elle.

— Non mais ho ! S’occuper de cette pile électrique n’est pas de tout repos, je vous rappelle.

— Lia !!

— Quand on parle du loup.


Lianna m’aperçut et courut pour sauter dans mes bras, comme à ses habitudes. Véra s’approcha de nous en souriant et vint déposer un baisé sur le front de la petite. Discrètement, je jetais un regarde à Elise qui nous observait en souriant. Elle savait ce qu’il y avait entre Véra et moi mais ne disait rien. Finalement, sa mère n’était pas aussi terrible que me l’avait dit Véra. Leur relation était certes complexe mais Elise ne m’avais pas rejetté. Du moins, pas pour le moment.


— Véra, intervint alors Elise, en regardant sa fille, est-ce qu’on pourrait discuter, toutes les deux ?

— Je ne sais pas si…


Elle s’interrompit immédiatement quand elle croisa mon regard. Elle comprit qu’elle n’avait pas intérêt à refuser et leva les yeux au ciel.


— D’accord. Allons dans mon bureau.


Je sentais ma fiancée nerveuse mais elle fit tout pour ne pas le montrer. Sans attendre sa mère, elle sortit de l’antichambre. Elise me remercia silencieusement avant de suivre sa fille. Puis ce fut au tour de Marcus de m’observer.


— Si tu as quelque chose à dire, dis-le, crétin.

— Il se passe quoi entre ma cousine et ma tante ?

— Elles ont un différent un régler.

— J’ai compris, je ne poserais pas plus de questions. Toi, comment tu vas ?

— Beaucoup mieux, comme tu peux le voir.


Retrouver Marcus, c’était aussi reparler de tout ce qu’il s’était passé. Il était arrivé dans ma vie, par l’intermédiaire de Véra et je ne voulais plus qu’il en parte. Il m’était devenu aussi indispensable que Véra et ma sœur. C’était donc ça d’avoir un meilleur ami ? Quelqu’un à quoi on pouvait parler d’absolument tout sans avoir peur d’être jugé. Quelqu’un qui me comprenait avant même que je comprenne moi-même. Quelqu’un qui serait présent pour moi quoi qu’il arrive.


— Bah, qu’est-ce qu’il y a ? rigola Marcus. Pourquoi tu souris bêtement ?

— Parce que je t’aime, crétin. Je suis contente de t’avoir comme ami.

— Oh ! Mais c’est que tes vacances t-on rendu fleurs bleues.

— Tais-toi, rigolais-je à mon tour.


Marcus se leva, m’attrapa par la taille et me fit tomber sur le canapé avant d’enchainer avec des chatouilles. Ce fut Lianna qui me vint en aide, chatouillant Marcus à son tour. Quand il arrêta, Marcus se leva et confia Lianna aux bons soins de Rosalie et de sa femme et attrapa ma main. Il me tira ensuite jusqu’à l’extérieur du palais. Il voulait parler et je le comprenais.


— Bon alors, dis-moi vraiment comment tu vas ? Pas de détour possible.

— Je vais bien, je te le promets. Véra m’a demandé en mariage et j’ai accepté, on a adopté Lianna ensemble, je suis de retour au palais, dans ses bras, je ne pouvais pas rêver mieux.

— Donc tout est parfait ?

— Bien sûr que non. Mais je suis heureuse comme ça, pour l’instant.

— En cachant ta relation avec Véra, c’est ça ?

— Oui. Comme ça, j’ai le temps d’apprendre à la connaitre et je n’ai aucune pression. Je n’ai pas à devoir l’embrasser en public, à prouver mon amour pour elle à d’autres personnes qu’à elle-même.

— Tu préfères être son amante plutôt qu’être officiellement sa fiancée ?

— Pour le moment, oui. Le temps que notre famille se construit lentement. Je sais que dès que ce sera officiel, tous les regards seront braqués sur moi et aujourd’hui, je n’en suis pas prête. Je ne suis pas prête à les entendre dire que je ne suis pas faite pour elle, que je n’ai rien à lui apporter.

— Élia, soupira-t-il.

— Ma vie me convient très bien telle qu’elle, Marcus. Je ne veux pas aller plus vite que la musique.

— Tu veux être certaines de ton choix, je comprends. Ce n’est pas simple d’être la femme de l’Impératrice. Si c’est comme ça que tu envisages ton couple, très bien, je n’ai rien à redire.

— Merci.


On marcha pendant plusieurs minutes en silence, profitant du vent qui soufflait sur les feuilles en une douce mélodie. Marcus glissa délicatement sa main dans la mienne et me sourit. En sa présence, j’étais apaisée. Comme je l’avais été auparavant auprès de ma sœur.


— Vous restez combien de temps avec Isa ?

— Nous sommes là pour le bal de demain.

— Parce qu’il y a un bal ?

— Oui… enfin pas vraiment. C’est plutôt une petite réception privée, en famille.

— C’est-à-dire ? le questionnais-je, nerveuse.

— C’est-à-dire que toute la famille sera là. C’est l’anniversaire de ma grand-mère.

— Mais non ! Et dire qu’elle ne m’en a même pas parlé. Elle va le regretter.

— Tu ne savais vraiment pas ?

— Je te jure que non. Ni Véra ni Elena ne m’en a parlé.

— Maintenant tu sais. Tu as jusqu’à demain midi pour te préparer à rencontrer toute la famille. De ma grand-mère, à l’ancienne Reine de Carrandis, Stephania, mon autre grand-mère.

— Mais je ne suis pas prête !

— Je serais là, ne t’inquiète pas.


Il me sourit pour tenter de me rassurer, en vain. Je commençais déjà à paniquer mais j’arrivais à le lui cacher. Quand on remonta dans l’antichambre, Véra et sa mère étaient revenues. Quand ma fiancée croisa mon regard, je la vis déglutir puis sourire nerveusement.


— Il faut qu’on parler, murmurais-je en passant à côté d’elle.

— Si vous voulez bien m’excuser.


Elle me suivit jusqu’en dans la chambre et ferma la porte derrière elle. Heureusement, la chambre était insonorisée.


— Pourquoi es-tu colère contre moi ? Qu’est-ce que j’ai fait ? s’impatienta-t-elle.

— Pourquoi tu ne m’as pas dit pour demain ? Pour l’anniversaire de ta grand-mère ?

— Je voulais justement éviter ça.

— Pourquoi tu me mets toujours à l’écart de tous ? J’ai moi aussi droit de savoir ce qu’il passe ici ! J’ai droit de savoir que toute ta famille va débarquer demain matin ! J’ai le droit de préparer à tous les rencontrer.

— Excuse-moi, Élia, ce n’était pas pour te mettre à l’écart.

— Mais bien sûr. Tu fais toujours ça de toute façon.

— Mais qu’est-ce qui t’arrive enfin ? Je ne te comprends pas là.

— Quand est-ce que tu m’aurais parlé de cette réception qui a lieu demain midi ? Quand j’aurais été au pied du mur ? Nous sommes fiancées maintenant, il serait peut-être temps que tu me considères comme tel, que tu arrêtes d’avoir des secrets à chaque fois.

— On va vraiment se disputer pour une broutille ?

— Ce… tu fais exprès en fait. Tu ne m’écoutes même pas.

— Bien sûr que si, soupira-t-elle en levant les yeux au ciel. Je savais que tu allais paniquer alors…

— Alors tu ne m’as rien dit, la coupais-je. Je suis déçu.

— Excuse-moi chérie. Je voulais seulement…


Quand elle s’aperçut que je commençais à préparer un sac avec des affaires, elle s’arrêta de parler pour m’empêcher d’agir. Elle bloqua mes bras contre ma poitrine qui mon bloqua dans ses bras.


— Arrête tes bêtises.

— Lâche-moi.

— Élia, rien ne t’oblige à partir. Si tu n’es pas prête à les rencontrer, tu n’auras qu’à rester ici.

— Il en est hors de question. Je ne vais pas m’enfermer dans la chambre alors que tu t’amuses en bas. Quand à Elena, j’irai la voir en personne, après ta réception ridicule pour lui souhaitez un bon anniversaire.

— Ne fais pas l’enfant enfin.

— Tu vas me lâcher oui !

— Élia, s’il te plait.

— Lâche-moi immédiatement.


Ma colère venait de prendre le dessus. Si je ne partais pas rapidement, j’avais peur de ne plus pouvoir me contenir.


— Très bien.


Elle me libéra enfin et je pus continuer de remplir mon sac. Ses yeux commençaient à s’humidifier mais je tentais d’y faire abstraction. Dès que j’eus fini, je sortis de la chambre en claquant la porte contre le mur et me dépêchais d’ajouter les affaires de Lianna dans le sac. J’attrapais ensuite la petite pour lui mettre ses chaussures et son manteau, sans jamais regarder Véra.


— Élia, qu’est-ce qu’il se passe ? tenta Isa.

— Tu n’auras qu’à lui demander, cinglais-je en désignant Véra.

— Déjà ? Ça n’aurait pas duré longtemps.

— La ferme, Marcus.


Son sourire s’effaça immédiatement. Il venait de comprendre que je n’avais aucune envie de plaisanter. Pourtant, Rosalie était là, dans un coin mais discrète. Je devais faire attention à ce que j’allais dire si Véra intervenait à nouveau, ce que je savais qu’elle allait faire. Alors que ma main se posa sur la poignée de la porte, la main de Véra entoura mon bras pour m’empêcher de partir.


— Élia, s’il te…


Sans parvenir à me contenir, folle de rage, ma main termina sa course sur la joue. J’en avais assez d’être prise pour une idiote, d’être toujours mise de côté juste parce que nous avions décidé de cacher notre relation.


— Élia ! s’exclama Marcus, dans l’incompréhension.

— Ne t’avise même pas de me retenir.

— Ne t’avise même pas de partir, s’énerva-t-elle à son tour en me regardant droit dans les yeux. Tu n’as pas le droit de partir avec Lianna.

— J’en ai tous les droits. Tu n’es rien pour elle, pour l’instant, attaquais-je.


Échec et mat, ses yeux s’emplirent de larmes, elle baissa la tête et j’en profitais pour partir avec ma fille. Dès que je refermais la porte derrière moi, mes propres larmes m’obstruèrent la vue. Je n’avais nulle part ou aller. Hormis le palais et ceux qui y travaillaient, je ne connaissais personne à Glenharm. Sous le coup de la colère, j’avais fui avec ma fille sans même savoir où nous allions dormir ce soir. Il ne me restait plus qu’à quitter ce palais qui m’étouffait et à trouver un hôtel pour la nuit.

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