Chapitre 18

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À seize heures trente, j’attendais de pouvoir récupérer la fille à l’école. Quand le portail s’ouvrit, je rejoignis sa classe, en compagnie d’autres parents. Dont la plupart me regardaient de travers. C’était la première fois qu’ils me voyaient et ma jeunesse devait se voir.


— Bonjour, je suis Amélie Clarfield, la maman de Corentin et déléguée des parents d’élève.

– Enchantée. Élia Aubelin, maman de Lianna, lui répondis-je intimidée.

— Votre fille vient de faire sa rentrée ?

— Ce matin oui.

— Avez-vous déménagé ? D’où venez-vous ? Vous me semblez bien jeune pour…

— Vous avez fini avec vos questions ?

— Je vous demande pardon ?

— Je ne veux pas m’étaler sur ma vie privée. Je sais déjà que vous allez parler de moi avec les autres parents parce que je suis jeune. Je ne vais pas, en plus, vous donner les informations nécessaires pour me critiquer.


Être aux côtés de Véra, c’était apprendre à être direct et cash. J’avais subi plusieurs années de harcèlement, ça n’allait pas recommencer. La porte de la salle de classe s’ouvrit, l’empêchant de répliquer.


— Bonsoir, commença la maitresse. La journée s’est bien passée pour tout le monde. Nous avons accueilli une nouvelle élève qui s’est très bien acclimatée.

— Veuillez libérer le passage !


Derrière le groupe de parent, deux soldats en uniforme avançaient. Les parents durent se déplacer contre les murs pour laisser passer Elena.


— Votre Altesse, la saluèrent-elles.

— Je ne suis pas en retard ? L’école finissait à seize heures quand mes enfants y étaient. Ah Élia, te voilà. Ma petite fille m’a dit que Lianna faisait sa rentrée aujourd’hui et que tu devais m’appeler. Pourquoi tu ne m’as pas appelé ?

— Heu… et bien… il n’y avait pas besoin, paniquais-je. Je ne voulais pas vous déranger.

— Élia, Élia, Élia, soupira-t-elle.

— Lia !


Dans la salle de classe, Lianna m’aperçut et courut dans mes bras.


— Mademoiselle Aubelin, j’aurais aimé discuter avec vous de la journée de Lianna, si vous avez le temps.

— J’ai tout mon temps. Elena ?

— Je n’ai rien de prévu non plus.


La présence d’Elena allait faire jaser les parents. Mais en même temps, sa présence était rassurante. J’avais été occupée toute l’après-midi, oubliant de l’appeler, comme me l’avait conseillé Véra. Dès que tous les enfants furent partis, la maitresse de Lianna nous invita à entrer.


— Ça ne vous dérange pas si je reste ? questionna Elena.

— Pas du tout. La directrice m’a prévenu que l’Impératrice était la deuxième personne à contacter en cas d’urgence. Installez-vous.


Lianna sur mes genoux, je m’assis autour d’une des tables, suivis par Elena.


— Lianna est une petite fille très attentive. Elle ne participe pas beaucoup, son langage peu développé joue beaucoup, mais elle fait les ateliers avec soin. Je pense qu’elle va vite apprendre et rattraper son retard.

— Je dois vous avouer être rassurée. J’ai adopté Lianna il a seulement une semaine. Je crois que cette rentrée était plus dure pour moi que pour elle.

— Ce qui est compréhensible et tout à fait normal, rassurez-vous. Pour aider Lianna dans son apprentissage du langage, je vous conseille de la solliciter un maximum.

— Merci beaucoup Madame.

— C’est normal Mademoiselle. Je suis là pour les enfants, mais aussi pour les parents.


Après avoir longuement discuté avec la maitresse, Elena nous invita à boire un verre. Elle me rassura, mais surtout, me prodigua de nombreux conseils pour élever Lianna. On dériva ensuite sur le bal de fin d’année que j’avais à organiser.


— Malheureusement, je ne pourrais pas t’être d’une grande utilité. Je n’en ai jamais moi-même organisé. Ce n’était pas trop ma tasse de thé, contrairement à Véra.

— Ce n’est pas grave. Je suis bien plus douée en danse qu’en évènementiel, rigolais-je. Mais j’aime bien les nouveaux défis.

— Dis-moi, Élia. Quel est ton plus grand rêve ?

— Intégrer l’Opéra-Théatre de Glenharm, en tant que danseuse, avouais-je en souriant. Depuis que ma sœur m’a appris à danser, je ne rêve que de ça. De la scène, de la musique, de juste pouvoir danser en fait. Mais maintenant que je travaille que Véra, j’ai peur que ça ne freine ma carrière.

— Pourquoi ?

— Travailler au côté de Véra est un poste à temps plein, surtout avec Lianna maintenant. Être danseuse professionnelle aussi.

— Une fois que vous serez mariée, tu ne travailleras plus pour elle. Tu feras quoi à ce moment-là ?

— Je n’y ai pas réfléchi.

— Tu peux tout à fait être danseuse professionnelle, si c’est que tu veux. Ne te prive pas de ton rêve, juste parce que tu seras l’épouse de l’Impératrice. Si c’est ce que tu veux faire, vas-y à fond.

— Mais comment ? Je ne sais même pas comment faire.

— Je suis sûr que tu trouveras. Fais-toi confiance. Et puis, ce n’est pas comme si l’Opéra était loin du palais, souligna-t-elle.


Elena était la grand-mère que j’avais toujours voulu avoir. Pour la préparation du bal de fin d’année, elle me donna plusieurs adresses. Un fleuriste, un professionnel de l’évènementiel, mais surtout, sa boutique de couture préférée. Là où elle avait de nombreuses fois emmené ses enfants, et surtout ses filles.

C’est avec toute les adresses en poches et avec plein d’idée que je rentrais au palais, où Liva et Sélina lisaient un livre dans l’antichambre. Elles se levèrent quand j’entrais, mais je les informais qu’elle pouvait continuer leurs activités. Lianna courut alors dans sa chambre. Après avoir posé mon sac dans la mienne, je rejoignis ma fille qui avait déjà une voiture dans la main et son doudou sous le bras.


— Lapin, pose ton doudou pour jouer. Tu n’en as pas besoin.

— Si ! Doudou, moi !

— Tu as fait quoi à l’école ? Tu me racontes ?

— Heu… dessin !

— Tu as dessiné quoi ?

— Monter moi ?

— Tu veux me monter ce que tu as fait ? D’accord. Tu viens avec moi piquer des feuilles et des stylos à Véra ?

— Ouais !


Lianna se mit à sauter partout, abandonnant sa voiture. Elle grimpa ensuite dans mes bras et se cacha le visage dans mon cou en rigolant. En vitesse, je rejoignis le bureau de ma fiancée ou elle et Rosalie travaillait. En entrant, je posais Lianna qui s’installa sur son fauteuil préféré.


— Tu as besoin de quelque chose, Élia ? me questionna Véra.

— C’est un secret.

— Chut, pas parler, ajouta Lianna en posant sur doigts sur sa bouche.

En marchant sur la pointe des pieds, sous les rires de ma fille et le sourire de ma fiancée, j’attrapais des feuilles blanches dans l’un des placards et la trousse à crayons de couleur.

— C’est bon, j’ai tout. Vite Lianna, on s’en va avant de se faire attraper.

— Vite vite.


Lianna sortit du bureau et j’adressais un clin d’œil à Véra au moment de refermer sa porte. Nous avions réussi notre mission d’infiltration. La main de Lianna dans la mienne, les feuilles et le stylo dans une autre, on remonta dans l’antichambre ou j’installais tout sur la table, pour que ma fille puisse dessiner. Pour qu’elle puisse me montrer ce qu’elle avait fait aujourd’hui. Pendant qu’elle était sagement assise, occupé avec tous ses crayons de couleur, j’en profitais pour me reposer. Pour lire un livre, comme Liva et Sélina. Après une demi-heure, Lianna commença à s’agiter sur sa chaise. Je posais mon livre et la rejoignis.


— Qu’est-ce que c’est, mon lapin ? la questionnais-je en regardant son dessin.

— Apin.

— C’est quoi un apin ? Un lapin ?


Pendant quelques minutes, j’essayais de la faire parler correctement. Je ne fus pas peu fière quand elle réussit à dire correctement le mot lapin. Je la libérais ensuite pour la laisser aller jouer dans sa chambre. Quand Véra et Rosalie nous rejoignirent, ayant fini la journée, ma fiancée avant un grand sourire.


— Élia, tu peux venir s’il te plait ? Faut que je te parle.

— Heu… oui d’accord.


Le « faut que je te parle » n’envisageait rien de bon. Mais avec Véra, je pouvais m’attendre à tout. Elle devait simplement vouloir me parler sans que ni Rosalie ni nos demoiselles de chambre ne nous écoutent.


— Qu’est-ce qu’il se passe ? la questionnais-je une fois la porte fermée à clef.

— Rien du tout, mon amour. Je voulais juste t’embrasser.


Ses mains se retrouvèrent rapidement dans mon dos et ses lèvres sur les miennes. Ravie, je fis de même et lui rendis mon baisé.


— Je t’aime, Élia. Je voulais te le dire.

— Je t’aime aussi, lui répondis-je en souriant.

— Demain j’ai rendez-vous dans mon salon d’esthétique habituel, celui où je vais une fois par moi. J’aimerais que tu viennes avec moi, cette fois-ci.

— Sélina et Liva ne sont pas encore assez formées pour que je puisse les laisser seules.

— Nous ne partirons que pendant deux heures, Lianna sera à l’école, il n’y a pas de soucis à se faire. Elles en profiteront pour nettoyer la salle de bal.

— Et après je t’apprends à danser ?

— Si tu veux, je suis partante. Mais faudra passer m’acheter une tenue pour danser.

— C’est un bon programme, je valide. Du coup, ce que je te propose. Petit resto, la détente, shoping puis cours de danse. Ça te convient ?

— C’est parfait. J’aime quand tu fais ça. Quand tu mets un peu de côté ton rôle d’Impératrice pour moi.

— On a pris pas mal d’avance avec Rosalie alors autant en profiter. Ce ne sera pas toujours le cas.


Heureuse, elle m’embrassa une dernière fois avant de sortir de la chambre. J’allais avoir un vrai rencart avec Véra, pour la première fois. Une vraie sortie en couple. Sans enfants, sans garde, sans demoiselles de compagnie. Rien que nous deux, proposant chacune notre tour une activité qui nous plaisait. Le salon d’esthétique pour Véra, le cours de danse pour moi.

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