Chapitre 30

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À peine arrivée au Conservatoire, j’interpelais Mathilde. Sans rien lui dire, je la questionnais sur ses activités de ce soir. Comme elle n’avait rien de prévu, je lui proposer de sortir avec moi, après notre journée et elle accepta.

Après une dure journée d’entrainement intensif, avec Gaëtan, nous avions enfin réussi les mouvements complexes. À la fin de la séance, j’attrapais ma serviette pour m’essuyer le front. Au même moment, des bras entourèrent ma taille et la douce odeur de la rose envahit mes narines.


— Votre Majesté, entendis-je alors.


Je me retournais dans les bras de ma fiancée et l’embrassais, comme si nous étions seules. Je m’éloignais ensuite pour l’observer. Elle avait enfilé une robe rouge avec un grand décolleté, pour mon grand plaisir. Celle-ci était ouverte jusqu’à la cuisse sur tout le côté droit. Ma robe favorite. Ses lèvres étaient rehaussées d’un magnifique rouge à lèvres de la même couleur. Il en était de même pour ses yeux verts envoutants, avec une légère touche de maquillage. Quant à sa coiffure, je reconnus immédiatement le travail de Liva, bien moins à l’aise. Des mèches s’échappaient un peu partout.


— Demi-tour, lui ordonnais-je.


Elle me vola un dernier baiser avant de se retourner. Je récupérais ma brosse et grimpais sur le banc pour pouvoir ajuster sa coiffure correctement.


— C’est mieux comme ça. Je vais devoir reformer Liva.

— Votre Majesté, bienvenue, l’accueillit enfin le Professeur Lane.

— Merci. Comme c’est passé la journée d’Élia ?

— Tu sais que je peux répondre toute seule  ?


Elle leva le bras, m’obligeant à me terre. Je la laisser discuter avec mon professeur pour ranger mes affaires. Une fois mon sac prête, je me glissais dans ses bras et elle embrassa le haut de mon crâne. Dans mon dos, j’entendis Judith faire ses commentaires habituels. Mais, contre la poitrine de celle que j’aimais, ses remarques me passaient au-dessus de la tête.


— On y va ?

— Tu es impatiente, mon ange. Mais oui, c’est parti. Mathilde ?

— Tu es géniale, Élia. Je vous suis.


Véra glissa ma main dans la sienne, s’assura que Mathilde nous suivait et on sortit du conservatoire. Elle me jeta les clés de la voiture au dernier moment.


— Tu conduis, mon ange.

— Je n’ai pas le permis et je sais encore moins conduire, je te rappelle.

— Je vais t’apprendre. J’ai emprunté une voiture-école de l’armée. J’ai des pédales de mon côté alors pas de soucis. Ça ne te dérange pas, Mathilde ?

— Pas du tout, répondit celle-ci nerveuse.

— Et on va où ?

— En ville. Il y a une petite fête sans prétention et ensuite surprise. En voiture, les filles.


Pour me rassurer, Véra m’informa que nous étions suivis par Sacha. Pour ce premier cours, je n’eus qu’à assurer la direction de la voiture, l’utiliser du volant. Véra s’occupa des pédales. Arrivées en ville, on échangea les places et elle se gara. La fête en question, c’était un petit marché où flottais plein de bonnes odeurs. Tandis que je laissais les deux femmes discuter entre elles, refaire connaissance, je vagabondais entre les étals de pâtisserie. Dès que j’en avais l’occasion, je goutais.


— Je vais vous en prendre trois, commanda Véra après s’être glissée dans mon dos.

— Et voilà pour vous.


Après avoir récupéré les trois brochettes de poulet frit, elle les distribua. Depuis notre arrivée, mes papilles se régalaient. Véra s’approcha ensuite d’un stand de gravure tandis que j’observais un stand de bijoux, juste en face.


— Cherchez-vous quelque chose de particulier, mademoiselle ? me questionna le marchand.

— Ma future épouse m’a offert une bague de fiançailles. Mais elle, elle n’en a pas.

— Vous voulez lui en offrir une à votre tour ? C’est adorable. Je veux vous conseiller dans ce cas.

— Avec plaisir.

— Est-ce qu’il y a une couleur ou une pierre particulière qui vous évoque votre fiancée ?

— Le rouge. Un rubis, même, si vous en avez.

— J’ai beaucoup chose. Quel est votre budget ?

— Je peux me permettre une folie. Mais elle, elle n’aimera pas que je dépense mon argent pour ça.

— Donc un bijou de qualité, mais qui n’étale pas son prix. Laissez-moi un instant.


Il se retira derrière une toile fine. J’entendis les frottements de diverses boites avant de le voir revenir avec deux d’entre elles. La première était discrète, le rubis était sombre et l’anneau était en or. La deuxième étincelait plus. Le rubis, légèrement plus gros, me rappelait celui présent sur la couronne de Véra. L’anneau, lui, était en platine, tout aussi brillant. Ce qui augmentait forcément son prix.


— Je pense que la deuxième lui conviendrait.

— Est-ce une femme importante, dans la société, pour choisir le platine ? Il ne faudrait pas que ça ressorte trop avec ses tenus.

— Elle ne porte que des robes rouges et des bijoux de rubis.

— Elle devrait lui aller parfaitement, dans ce cas. Concernant le prix…

— Rassurez-vous, je peux me la payer. Et je ne peux me permettre d’offrir une bague d’une valeur bien moins inférieure que la mienne.


Je lui montrais celle que j’avais autour de mon doigt. Il leva immédiatement les sourcils, reconnaissant sa qualité.


— Mais qui donc allez-vous épouser ? Vous avez là une bague d’exception.


Véra observait toujours les gravures dans le stand derrière moi. Sans savoir comment, elle sentit mon regard dans son dos et se retourna. Elle me sourit puis s’approcha.


— Quelle bague magnifique, commenta-t-elle en apercevant la seule qui restait sur l’étale.

— Votre Majesté, la salua le marchand.


Discrètement, j’informais le marchand de rester silencieux.


— Tu trouves ? Je ne sais pas, j’ai l’impression qu’il manque quelque chose, tentais-je.

— Au contraire. Elle est légère, bien équilibré, aucun défaut et malgré tout discrète.

— Vous avez un œil remarquable, Majesté.

— Je sais ce que vaut la qualité. Et vous avez des pièces d’exceptions, Monsieur. Élia, on part dans vingt minutes pour la suite de la soirée.

— Je fais au plus vite.


Ignorant totalement ceux qui nous observaient, elle glissa sa main dans mon dos et m’embrassa. Des murmures commencèrent à s’élever et elle s’éloigna.


— Attendez… c’est elle ? Vous êtes fiancée à l’Impératrice ?

— Oui. Vous comprenez ma situation pour lui trouver une bague ?

— Digne de son statut, mais pas trop. Et elle a validé cette bague.

— Je vous la prends.

— Je vous fais même un prix.


La bague rangée dans son écrin et dans mon sac, je partis retrouver ma fiancée. Elle écoutait attentivement un groupe amateur de chanteurs, assis, les jambes croisées et le dos droit sur un banc. Autour d’elle, tout le monde s’était décalé pour lui laisser la place. Je me glissais rapidement dans la foule de spectateurs et la rejoignis. Mathilde était assise à côté d’elle et écoutait aussi en silence. La prenant par surprise, je m’assis sur ses genoux et elle glissa ses bras autour de ma taille pour me retenir.


— Tu en as passé du temps auprès de ce bijoutier, commenta-t-elle.

— J’avais mes raisons.

— Et quelles sont-elles ?

— Tu sais que je t’aime ?

— Bien sûr. Et je t’aime aussi.

— Alors, dis-moi pourquoi, toi, tu n’as pas de bague de fiançailles ?

— Parce que c’est moi qui t’ai demandé en mariage.


À côté, Mathilde s’étouffa. Elle avait appris en même temps que tout le Conservatoire, ma relation avec l’Impératrice. Mais je n’avais pas pris le temps de lui expliquer. Encore moins que c’était Véra qui était à l’initiative de nos fiançailles.


— Justement, ce n’est pas juste. Je ne trouve pas ça normal.

— Qu’est-ce que tu essaies de me dire ?


Je sortis l’écrin de mon sac et l’ouvrit. Elle me regarda avec stupéfaction, sans vraiment comprendre.


— Je veux que toi aussi tu aies ta bague. Ce n’est pas logique que la fiancée de l’Impératrice en ait une et pas l’Impératrice. Et puis, on a commencé à tout dévoiler, autant aller jusqu’au bout des choses.

— Tu es certaine que…


Sans la laisser continuer, je retirais la bague de l’écrin et la glissais à son doigt. Autour de nous, un silence s’était formé. On nous observait attentivement. Il était tant que notre amour soit officiel. Ainsi, la date du mariage pourrait être réfléchie puis actée.


— Je t’aime, Véra Stinley, et je veux que tout le monde le sache. Je veux me marier avec toi, je veux fonder notre famille.

— Je vais me répéter, mais cette bague est vraiment magnifique.

— Tu l’acceptes ?

— Bien sûr.


Elle l’étudia une dernière fois avant de m’embrasser. Il y eut de timides applaudissements. Je vis Véra rougir avant qu’on ne parte pour notre prochaine destination, un karaoké.

La seule fois où je regardais mon téléphone de toute la soirée, il était déjà vingt-deux heures. Liva m’avait envoyé un message, trois heures plus tôt pour m’informer que Lianna s’était endormie sans problème. Sur la piste de chant, Véra et Mathilde chantaient à tue-tête et surtout, faux. Elles avaient retrouvé leurs complicités d’antan. Depuis plusieurs chansons, je restais en retrait, commençant à fatiguer. Ma fiancée le remarqua, s’installa à mes côtés et posa sa tête sur son épaule.


— Tu veux rentrer ?

— Amusez-vous encore.

Après m’avoir embrassé, elle me proposa de m’allonger sur le canapé et posa sa veste sur mes épaules. Dans cette position, mes yeux se fermèrent jusqu’à ce que je m’endorme complètement.


***


Vingt-trois heures trente, Véra et Mathilde s’arrête enfin. Elles s’asseyaient sur le canapé et vidaient leurs verres d’un trait.


— Je crois qu’Élia s’est endormi, remarqua Mathilde.

— Il est temps de rentrer alors. Ne la réveillons pas, je vais la porter.

— C’était une super soirée. Merci de m’avoir invité.

— Tant qu’elle dort, j’aimerais te poser une question. À propos de ta mère.

— Je t’écoute.

— Où est-elle ? Maintenant qu’on a officialisé notre liaison, j’ai peur qu’elle revienne s’en prendre à Élia.

— Je ne sais pas du tout. On se parle peu depuis que j’ai quitté la maison. Quand elle a été virée du palais, elle a essayé de venir s’installer chez moi, n’ayant nulle part où aller, mais je l’ai ignoré. Élia est quelqu’un de bien, protège là autant que tu peux.

— Je ferais tout pour elle.


Les deux femmes continuèrent de discuter sérieusement un moment avant de devoir rentrer, la fatigue les rattrapant à leurs tours.

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