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* ; ° . ; ° ~ . Racine Rongée . ° . , . . ° ~ - `

Turbule dévale les ramures, virevolte et s'en revient, ravi d'avoir des voyageurs avec qui bavarder. Iel se détourne et rapplique, mille fois plus vif que les miens, pour reprendre notre conversation entrecoupée.

' : ° ` ~ Oui, oui ! La pluie ! J'en parlais à l'instant avec Racine Rongée ! . , .*

Je marque un arrêt : serait-iel en train de se moquer ? Qu'importe, je dissipe mes doutes.

* ; ° Je suis Racine Rongée. ` . '

À son tour de soupçonner la raillerie. Iel tangue de gauche à droite, de droite à gauche, de gauche à droite sur ses lestes pattes.

; ` . Sans vouloir vous offenser, vous vous ressemblez. ; . .

Bourgeon Bruni nous rattrape mollement.

, . ° Racine Rongée a pourtant une racine rongée... ; ° '

~ ` " , Oh ? Je n'avais pas remarqué. ' . °

Iel s'abstient gracieusement de remarquer que depuis l'escapade qui nous a coûté Branche Brisée, j'ai de quoi m'appeler Tout Abîmé.

Turbule s'immobilise soudain. Sont-ce les relents écœurants qui læ figent ? Nous læ rattrapons aussi vite que nos veules podes le permettent... et l'imitons.

Là, au creux d'un nœud ligneux, la pépinière putréfiée nous souffle ses exhalaisons.

L'air vicié manque nous suffoquer, mais nous bravons les vents fétides et approchons les restes liquéfiés de ce qui a dû être nos amis.

Nos espoirs s'enfuient : qui reste-t-il à sauver dans ce bourbier où l'on ne discerne læ clausifle de la boue ? Où la vie s'est arrêtée, sans personne pour la relancer ? Où l'on ne trouve nulle bouture à greffer, ni terre où la planter ?

Ici... Ici la mort s'est installée, et pour de bon. Ici, une centaine des miens a fané à jamais, pour ne plus reverdir.

Ni avec, ni sans souvenirs.

Il me semble chuter dans les profondeurs de l'humus. Un poids terrible m'affaisse, m'écrase, me tue... et pourtant m'épargne. Il me semble subir mille vies, souffrir mille vies, mourir mille vies... et pourtant je me sais immobile. Transi. Affolé.

Que pouvons-nous ?

Nous contemplons notre impuissance, infirmes face au marais puant. Nous voulions prévenir ce mal ? Il nous vole nos vies et notre esprit ! Nous n'y comprenons goutte ! Peinons à rester éveillés !

Nous ployons. Incapables, le temps d'une absorption, de fuir ces tristes visions. Les flocons chutent et s'écoulent dans la tourbe de feu les nôtres. Qui sait, peut-être ces petits êtres se délectent-ils de ceux qui les dévoraient.

Je n'avais jamais saisi la raison pour laquelle des plantes décident de cesser de vivre ; je n'avais jamais songé qu'on le leur imposait.

Nous quittons notre rêverie cauchemardesque lorsque Turbule nous appelle depuis l'autre côté du nid. Ses effluves délicats se noient dans la nécrose ambiante, pourtant nous les percevons. Ils ressortent, réalisons-nous. Seul parfum printanier dans ce cimetière empesté.

Nous décrochons notre attention de ce que notre imagination peine à comprendre et, lentement, affrontons l'instinct et les courants pouacres pour suivre notre guide. Nous cessons de compter les fois où l'infection nous fait perdre conscience et avançons à pas mollassons. Comme si quelque chose ici nous retenait.

Plus qu'une attache cependant, c'est sans doute la pestilence croissante qui nous freine. Même sans parler, nous le savons : ce nid détruit n'est que le prémisse de ce qui attend en amont. L'air s'alourdit toujours plus d'âcreté et nous ne rêvons que de rentrer. Pourtant, nous continuons d'avancer.

Une rafale s'envole, lourde d'une bruine sombre. Voici le vent, venu nous voler les vestiges de nos valeureux enlevés.