Light's out.

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C'était l'année dernière. L'ambiance était électrique, je n'avais jamais été aussi excité. Le ring était pourri, le stade sentait la moisissure, et dans les gradins, il n'y avait que mes amis et ceux de mon adversaire. Nos gants étaient déchirés, et on combattait pieds nue faute de chaussures. Quel souvenir, c'était tellement excitant ! Rien que d'y repenser, j'en ai des frissons. J'avais le souffle court, mes sens étaient en alerte, et mes jambes tremblaient, oh oui, c'était le pied.

Chacun assis de notre côté du ring, mon adversaire et moi, nous dévisagions, je pouvais lire la rage dans son regard, il était aussi déterminé que moi à en découdre. Keisuke, un de mes plus vieux amis, mon partenaire de sparring, et le premier avec lequel je me suis vraiment bagarré. Ce vieux salopard avait un an de plus que moi, il était aussi un peu plus grand, mais il lui avait toujours manqué un truc. Il aimait gagner, et il cherchait la victoire, ça, ça ne faisait aucun doute, mais il avait toujours eu peur de perdre. Et c'était sa plus grande faiblesse.

La cloche avait sonné, nous étions tous les deux au centre du ring. À cet instant précis, j'avais le sentiment de serrer un glaive au creux de ma main. Nous n'étions pas de simple garçon un peu bagarreur qui s'était jeté dans la boxe pour se distraire, nous étions deux gladiateurs, des guerriers, des machines de morts. Je me sentais comme Achille combattant Hector, après avoir remporté ce combat, je pourrais passer à autre chose, partir d'ici, en conquérant, en vainqueur. C'est ce que je me disais en tout cas.

Finalement, le combat commença. Je fus celui qui engagea les hostilités, Keisuke était plus grand que moi, il fallait que je réduise la distance, un ? Non, deux pas. J'étais plus petit, mais plus agressif, deux directs lui firent remonter sa garde juste au-dessus de son menton, et c'est l'ouverture que je cherchais. Sa garde basse était emmerdante pour moi, il fallait donc que je la lui fasse monter. Et c'est quand il était assez haut que mon poing vint s'écraser contre son foie. D'un crochet puissant, je coupais la respiration de Keisuke. Enfin, de mon poing droit, un uppercut pour mettre fin rapidement à l'affrontement... C'est ce que je cherchais. Mais ce vieux salopard n'était pas de cet avis. J'avais fait une erreur. Une erreur qui me valut un énorme crochet dans la tronche. Et ses crochets, faisaient mal. Je le savais plus que quiconque, mais ses crochets, faisaient TRÈS mal. Je l'avais poussé dans les cordes, et si pour n'importe quel boxer, être poussé dans les cordes était mauvais signe. Keisuke était un maître de la stratégie du rope-a-dope suivis d'un kangourou punch. Et c'est là que je perdis l'avantage. Keisuke évitait toutes mes frappes, et, durant une petite pause, un direct connecta à nouveau, et cette fois, mon genou toucha le sol. Bordel ce que ça faisait mal. Il était bon le fumier. Il avait forcé sur les cordes dans son dos, il s'était enfoncé dans celles-ci, je ne connaissais personne qui faisait ça comme lui. Son poing, propulsé par la force des cordes tendu, me sonna.

Pendant quelques secondes, le monde était flou. Je ne voyais rien, c'était ça que je cherchais, ce combat. Mon corps me hurlait de m'allonger quelques secondes. Mais putain, je ne lui avais jamais demandé son avis jusqu'à présent, ça ne commencera pas maintenant. Jusqu'à présent, je l'avais toujours poussé au-delà de ses limites, et aujourd'hui encore, il allait fermer sa gueule, et faire ce qui je lui disais de faire.

Je me levais, lentement, difficilement, dans un ring comme celui-ci, il n'y avait pas de cloche après le début du match. Pas de points, on perdait, ou gagnait, uniquement avec un KO. Ce ring, c'était la vraie vie, celle où tu ne perds, que quand tu as décidé de perdre, ou quand tu es mort. Enfin, debout, je tremblais de tous mes membres, mes yeux ne suivaient pas, le monde était encore tout flou. Et Keisuke revenait à l'offensive. Une, deux... Stop, sa respiration s'était arrêtée, il allait frapper. J'allais prendre ce coup, mais je pouvais l'encaisser. Il venait avec un jab du gauche, c'est maintenant ou jamais. Plongeant dans sa garde, mon bras glissait contre le sien, et c'est là, que le match se termina. D'un contre-croisé, je scellai la victoire. Keisuke était déstabilisé. Et, enfin, repoussant à nouveau les limites de mes propres muscles, je plongeais à nouveau dans sa garde. Un, deux, trois, jab, crochet du gauche, uppercut, " light's out".

Keisuke gisait au sol. Et à nouveau, la cloche sonna, il était KO, j'étais au bout, mais vainqueur. Ce jour-là, j'avais conquis ce coin ou j'avais grandi. Je m'étais élevé au-dessus de la compétition.

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