• Bonsoir, madame !

Figée sur le pas de ma porte, je reste en silence, frappée par la vision qui s’offre à moi. Ce soir de mai, dans la lueur pâlissante du jour qui se couche, des dizaines d’adolescents me font face. Ils portent chacun un œillet blanc, au liseré rosé.

Les larmes aux yeux, je les passe en revue : Lila dans son fauteuil roulant ; Marc, son sourire de travers et ses taches de rousseur ; Marine et ses appareils auditifs ; Jasmine et sa boule anti-stress bleu turquoise ; Valentin et ses attelles Avengers. Et tellement d’autres…

Il y a aussi des parents aux sourires tremblants d’émotion. Des jeunes adultes dont les visages, autrefois tourmentés, sont désormais apaisés.

• Madame.

L’un d’eux s’avance et me tend sa fleur.

• Madame, on voulait vous remercier. On sait tous les efforts que vous faites, tous les sacrifices, toutes les fatigues que vous endurez pour faire de votre centre une réalité. On est là pour vous assurer de continuer, madame.
• Un jour, nous serons réalité. C’est une promesse qu’on vous fait.
• Oui ! On vous promet qu’un jour, vous nous rencontrerez vraiment. On n’aura pas les mêmes visages, pas les mêmes histoires, pas les mêmes noms… Mais on aura le même sourire.
• Parce que vous aurez réussi. C’est la promesse qu’on vous fait, madame.

Un vieil homme au sourire tendre s’approche. Il a réuni toutes les fleurs pour en faire un bouquet qu’il me remet avec fierté.

— N’oublie pas, jeune fille. N’oublie pas cette promesse.

Sur ces mots, la scène s’efface, tandis que mes yeux s’embuent de larmes. J’enfouis le nez dans les œillets en sanglotant.