L'intrigante Lise Fougas

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Intelligente, belle, mystérieuse et intrigante.

Samuel n'avait pas d'autres qualificatifs pour désigner Lise Fougas. En l'espace de ces quelques heures passé à l'observer, il avait beau cherché à la comprendre, à lire en elle, il n'y arrivait pas. Alors qu'elle buvait son cacao avec cette élégance toute-puissante dont elle avait le secret, il n'avait pas cessé de l'examiner, mais pas une seule de ses manières ne trahissait son véritable caractère. Soucieuse de l'étiquette, elle maintenait une posture droite et silencieuse attendant sans doute de lui qu'il relance la conversation ; or, il ne savait que lui dire pour qu'elle soit mieux disposée à son égard.

Ses compliments étaient tombés harassés tels des soufflets et semblait lui faire ni chaud, ni froid. De plus, la réponse glaciale qu'elle lui avait apportée la différenciait de toutes les femmes qu'il avait connues. Et pour une raison qui lui échappait, cela le contrariait bien plus qu'il ne le désirait. Il n'avait jamais cherché à conquérir quiconque encore moins plaire à tout prix à une femme qui se fichait aussi ouvertement de ses attraits. Il se savait bel homme et en général, les femmes lui tombaient dans les bras sans qu'il n'est à déployer d'effort. Il ne le pensait pas avec l'orgueil imbécile de certains mâles qui se croyaient irrésistibles, il l'affirmait avec l'assurance distinguée d'un homme d'expérience qui savait déployer son pouvoir de séduction.

Il n'avait rien de ces butors sans éducation et sans manières qui n'avait pas eu l'occasion de côtoyer des personnes de qualité. Ses parents s'étaient assurés qu'il s'introduise avec succès dans le monde et ne développe en aucune façon le comportement de l'insulaire typique dont la pauvreté en matière d'instruction était capable de jeter l'opprobre sur même la plus noble des lignées. Toute sa vie avait été préparée et pensée afin de faire de lui un homme talentueux dans de nombreux domaines, ce qui aurait dû lui insuffler une confiance inébranlable ; or, cette femme le faisait douter de ces compétences et de sa capacité à se faire aimer d'elle. C'était absurde et pourtant rien ne lui laissait entrevoir un semblant d'espoir de réussite matrimoniale.

Il l'observa avec insistance de nouveau et ne comprit pas l'attitude fermée qu'elle lui apposait ; à la regarder, on dirait qu'elle prenait plaisir à le torturer. Au nom du ciel, il n'était même pas encore marié !

Qu'avait-elle de si exceptionnelle, pour le pousser à agir tel un fieffé idiot ?

Sa nourrice Mabô, n'arrêtait pas de lui dire qu'il trouverait un jour quelqu'un de spécial, une femme qui lui résisterait le faisant céder malgré lui, mais il n'y avait jamais cru. L'amour n'était pas quelque chose qu'il connaissait ; bien qu'il ait la certitude que ses parents s'aimaient d'une profonde dévotion. Ce qui l'étonnait d'ailleurs, car seules les alliances scrupuleuses arrangées ayant pour but un enrichissement familial conséquent étaient d'usage. Il n'avait jamais interrogé ceux-ci sur leur union après tout cela ne se faisait pas. Cependant, le monde pharisaïque dans lequel il vivait s'était chargé de lui enseigner cet aspect du mariage de ce fait, il n'avait aucune raison de la croire à l'amour. Car si la bonne société créole ne pardonnerait jamais à Lise Fougas d'être métis, à moins que cela reste pour toujours un secret, il était vain de sa part d'espérer d'elle à son tour une quelconque absolution de ses préjugés le concernant.

Il la contempla davantage tentant vainement de se rassurer. Pourquoi se tourmenter maintenant alors qu'elle n'était même pas encore sa femme ? Et même si elle le devenait bientôt, personne sur la plantation ne lui dirait rien. C'était sans doute égoïste et sournois, mais il ne pensait pas devoir être honnête, après tout, elle n'était qu'une femme, une sang-mêlé de surcroît. Alors pourquoi vouloir tergiverser sur des choses qui faisaient d'eux ce qu'ils étaient, des mœurs qui n'étaient prêt de changées, une société qui se basait sur ce principe de couleur dont il n'était pas responsable. Et quoique Mabô en dise, il ne s'agissait pas de sentiment, mais d'arrangement. Leur famille respective désirait ce mariage, après l'avoir vu lui aussi la voulait, et ça suffisait.

Enfin, il espérait que ça suffirait ou qu'il s'en accommoderait, car lui comme elle étaient prisonnier de cette entente familiale et financière. Il n'avait aucune illusion sur le fait que cette union devait reposer sur une compromission d'envergure. Samuel avec presque honte de s'y vautrer, mais la noblesse avait tout de même quelques limites lorsqu'il s'agissait d'obtenir ce que l'on voulait. Et en présence de l'objet d'une attraction presque immédiate, il ne pouvait mentir ; il désirait Lise Fougas donc elle serait à lui, c'était aussi simple que cela.

Pourquoi s'interrogeait-il d'ailleurs ?

(Sa voix intérieure toujours aussi moqueuse que sarcastique se fit entendre. _ Simple ? Cette jeune femme n'a rien de simple mon cher. Si vous pensez que l'apprivoiser sera quelque chose d'aisée, vous vous fourvoyez. À vous entendre, j'aurais pu vous croire naïf ! Simple, simple ah ah ah)

Furieux contre sa conscience, il s'oublia.

_ Il suffit dit-il à haute voix.

Au même moment incapable de cacher dédain, Lise s'adressa à lui d'un ton furieux.

_ Vous disiez, monsieur ?

Tel un adolescent pris en faute, Samuel se mit à rougir en s'excusant.

_ Pardonnez-moi je vous prie ce manque de respect, il ne s'agissait pas de vous. Je semble me ridiculiser sans doute en votre présence, mais je puis vous assurer que je m'adressais pas à vous. Quelque chose de contrariant m'est apparu, m'en rappelant par mégarde, j'ai tenté de m'y soustraire de la mauvaise manière. Veuillez s'il vous plaît m'en excuser.

L'expression sur son visage changea passant de la confusion à la suspicion, avant qu'elle ne baisse les yeux afin qu'il ne puisse lire en elle. Elle ne le croyait pas, elle ne semblait pas croire un seul mot qui sortait de sa bouche. Déçu, Samuel tenta une autre approche, car il refusait de se faire battre froid sans raison, il serait bientôt époux et épouse un minimum de courtoisie entre eux ne serait pas superflue. De toute façon, n'avaient-ils pas été laissé seuls dans ce salon dans l'unique objectif de faire connaissance ? Enfin, seuls pas réellement, car il savait qu'aucun père digne de ce nom n'aurait laissé sa fille sans chaperon surtout une jeune fille aussi belle que Lise Fougas.

_ Mademoiselle Fougas quel qu'ait été ma maladresse, elle n'était destinée qu'à mieux vous connaître.

Il hésita quelques secondes avant de reprendre.

_ Pour être honnête, je ne sais rien de vous cependant, je souhaiterais qu'il en soit autrement Lise. Je vous assure que mes intentions, vous concernant, sont sincères et honorables.

Elle releva la tête, mais son expression ne laissait pas deviner ses pensées, elle semblait avoir érigé autour d'elle une muraille infranchissable et il ne pensait pas être capable de l'abaisser aussi facilement finalement.

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