30. Le retour des bisous

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Arthur

Quelle histoire avec Morin ! On savait qu’il y avait un espion, mais de là à ce que ce soit un des soldats de l’armée française ! Et puis, pas n’importe lequel. Un de ceux qui sont le plus proche de Julia et qui l’ont toujours soutenue. Je n’en reviens pas et je ne sais pas comment elle va prendre cette nouvelle quand elle va rentrer.

- Si elle rentre, oui. Elle est peut-être en train de se faire baiser par le Président. Et peut-être même qu’elle aime ça et qu’elle ne va plus revenir vers toi. Il est quand même Président, lui.

J’essaie de ne pas penser à ces horreurs et reporte mon attention sur la montagne que l’on distingue au loin. Ce magnifique pays est en guerre, et, comme je l’avais prédit, des malheurs arrivent, des choses inacceptables se passent et les armées sont au cœur de tout. La vue sur le paysage a un effet apaisant sur moi, mais mes pensées continuent à divaguer. Je n’arrive pas à penser à autre chose qu’à Julia. Julia qui n’est pas là. Julia qui est en train de risquer si ce n’est sa vie, du moins, son honneur. Julia que j’aime et qui me manque déjà tellement alors qu’elle n’est partie que depuis quelques heures.

Je passe un long moment comme ça, seul dans mon coin, essayant de ne pas me laisser distraire par l’agitation des réfugiés. Tout le monde me laisse tranquille et je soupçonne le camp d’être déjà au courant de tout ce qu’il se passe, entre le départ de Julia et la trahison de Morin. Même la petite Lila ne vient pas me déranger. Je l’ai aperçue avec ma mère il y a quelque temps, mais les deux ne se sont pas approchées, me laissant seul avec mes pensées.

J’en suis tiré par le bruit d’un véhicule qui entre dans le camp. J’ouvre grand les yeux et je me précipite vers le bâtiment principal car j’ai reconnu que c’est Julia qui est déjà de retour. Elle arrête sa voiture juste devant moi et dès qu’elle en sort, elle se jette dans mes bras.

- Oh Julia ! Tu es rentrée ? Tu vas bien ?

- Je vais bien, tout va bien, sourit-elle avant de m’embrasser avec fougue.

- Oh, que je suis content de déjà te revoir ! Ça s’est passé comment avec le Président ? Et ici… J’ai une mauvaise nouvelle pour toi.

- Une mauvaise nouvelle ? Qu’est-ce qu’il se passe ? s’inquiète-t-elle immédiatement. Dis-moi tout.

- C’est Morin. On a découvert que c’était lui, l’espion. C’est lui qui disait tout au Président. Je suis désolé, Julia.

- Je sais oui, j’en ai entendu parler… Le Président le faisait chanter. Oh mon dieu, mais… Tout le monde le sait ? Où est-ce qu’il est ? Est-ce qu’il va bien ?

- Tous tes hommes sont au courant, c’est Collins qui l’a arrêté sous les ordres de Snow. Il va bien oui, je suppose. Je ne sais pas où il est. Toujours dans la salle des opérations, je suppose. Mais toi, comment tu as fait pour revenir si vite ? Le Président est convaincu ? Il va nous laisser tranquille ?

- Lichtin est mort, Arthur…

- Tu l’as tué ? demandé-je incrédule.

- Non… Officiellement, Lichtin a pété un câble et… Un soldat l’a tué. Officieusement… Le Général lui a tiré dans le dos alors qu’il menaçait de s’en prendre aux gens que j’aime, ou de m’asservir à ses besoins sexuels, je ne sais plus trop exactement.

- Oh, mais alors, qui est au pouvoir ? Ankhov ? Il t’a laissée partir comme ça alors que tu l’as vu faire ? Viens, rentrons, explique-moi tout !

Je l’entraine avec moi et nous retrouvons rapidement Snow qui est toujours dans la salle des opérations. Il semblerait qu’il est en train de faire un rapport qui va ressembler à un roman au vu du nombre de pages qu’il est en train d’écrire. Morin n’est pas là, contrairement à ce que je pensais.

- Julia ? Tu es là ?

- Non, je ne suis qu’une de tes nombreuses hallucinations, voyons, rit-elle en allant le serrer dans ses bras. Quoi que je suis sûre que dans tes hallucinations, je dois être moins couverte que ça.

- Prends pas tes rêves pour des réalités, Ju. C’est le Président qui a su réveiller tes hormones ?

- Il est mort, lui. Où est Morin ? lui répond-elle de but en blanc, comme si elle lui disait qu’il fait soleil.

- J’ai hésité entre l’enfermer dans ta chambre avec les films pornos ou le laisser dans sa chambre sous la garde de Collins. J’ai choisi la deuxième solution, soupire-t-il. Tu sais que je suis content que tu sois de retour ? J’aime pas avoir à décider tout seul.

- Tu m’étonnes, il faut des couilles pour prendre des décisions, Beau blond ! se moque-t-elle. Et c’est quoi ce rapport ? Tu écris tes mémoires ou quoi ?

- Vu ce que tu dis sur la mort du Président, il va falloir que je recommence en plus, je crois. J’essaye de trouver et d’expliquer les circonstances atténuantes pour Morin, rajoute-t-il en montrant son écrit. J’ai commencé par expliquer le contexte, j’aurais pas dû. Bref, je jette tout et je te laisse faire ? Il lui est arrivé quoi, à Lichtin ? Crise cardiaque en raison de l’excitation que tu crées chez tous les mecs ?

- Chez tous les mecs ? Rien que ça ? Arrête, c’est le Bûcheron qui risque la crise cardiaque quand tu parles comme ça. Je vais faire ce rapport, mais ce que je vous dis ici ne doit pas en sortir, dit-elle plus sérieusement. Ankhov l’a tué, et je ne sais pas encore si c’est bien ou pas. Je ne le sens pas vraiment, ce type, même s’il m’apparaît moins pervers, il a l’air aussi dingue.

- C’est quoi ce bordel, Ju ? Ça veut dire quoi pour nous ?

- Il m’a assuré que nous étions hors de danger…

- Tu crois qu’on peut lui faire confiance ? C’est fou ce qui se passe dans ce pays.

- On va voir ce que ça donne… Il doit faire une allocution ce soir… Ce sera déjà un premier point sur lequel juger de son honnêteté, soupire Julia en venant se lover contre moi. Il veut organiser des élections, rétablir l’ordre et la démocratie, tout le tintouin du parfait politicien.

- Moi, je n’y crois pas. Quand on veut la démocratie, on ne commence pas par tuer et mentir. Le seul point positif, c’est que lui n’a pas d’obsession sur toi, Julia, dis-je en m’interrogeant sur les conséquences de toutes ces nouvelles.

- On verra bien. Si on pouvait juste respirer quelques heures et être tranquille, je ne dirais pas non...

- Tu penses qu’il faut en parler à ma mère ? S’il y a des élections, elle va peut-être vouloir y participer…

- Il faut lui donner la version officielle, mais oui. Enfin, je l’imagine bien gaffer et balancer comment Lichtin est mort en plein débat, donc… Version officielle, ça vaut mieux.

- Et pour Morin, tu veux faire quoi ?

- Il vous a tout balancé ? Je... Je crois qu’on aurait tous fait pareil à sa place, soupire Julia. On ne peut pas le garder ici, mais je ne veux pas qu’il ait des problèmes avec l’armée...

- Il nous a expliqué tout ce que ce salaud a fait à sa famille, oui. Les petits accidents, les plus gros, les pressions, les menaces… Tu m’étonnes qu’il ait craqué. Je suis d’accord avec toi, Ju, mais tu sais bien que l’armée n’a pas de cœur. Pas de pardon, non plus. Et il y a des soldats qui savent, on ne peut pas tout cacher.

- Je vais en discuter avec le Colonel, je pense qu’on peut négocier un départ sans heurts.

- J’ai réfléchi, moi, cet après-midi, interviens-je doucement. Si l’armée ne veut plus de lui, je suis sûr qu’on peut utiliser ses services et ses compétences à l’ONG. Si ça l’intéresse, on pourra lui proposer un poste.

- Ce sera toujours ça, sourit Julia en déposant ses lèvres au coin des miennes. Espérons ne pas avoir à en arriver là, même si c’est une bonne idée.

- Julia, tu sais, si c’est vraiment la fin de la guerre, ça veut dire que les réfugiés pourront rentrer chez eux, une fois que leurs maisons seront reconstruites. Je ne vais finalement pas à avoir à rester ici très longtemps.

- J’adore ton côté rêveur, mon Lapin, mais ne t’emballe pas trop… On n’y est pas. Si ça se trouve, en plus, tu vas te retrouver à bûcheronner pour reconstruire les maisons, sourit-elle.

- Il a déjà les chemises, à défaut d’avoir la hache ! rit Snow. Bon, on fait comment pour le rapport ? On baratine plein de choses ? Arthur, tu vas prévenir ta mère ?

- Je vous laisse à vos rapports, je vais aller apporter la bonne nouvelle à ma génitrice. Sans adversaire déclaré, je me demande si elle va cesser les hostilités.

- Une petite campagne électorale avec le Général en face, je n’appelle pas ça être sans adversaire, moi. Je suis sûre qu’elle va avoir envie de relever le défi. Ce serait beau, une femme présidente. Mais… Ta mère est un peu dingue, rit-elle.

- Un peu seulement ? s’esclaffe Snow. Elle est totalement folle, ouais !

- Je vous rejoins, elle est totalement dingue, et je ne crois pas que le poste de Présidente l’intéresse. Ce serait plus le Commandant qui pourrait se présenter, selon moi. Bref, je vais informer ma folle de mère, on verra bien comment elle va réagir. Bon courage pour le roman à l’eau de rose que vous allez écrire dans vos rapports.

- En parlant de roman à l’eau de rose, sourit ma Lieutenant en tirant sur le col de ma chemise. Interdiction de partir sans m’avoir offert un bisou, Bûcheron.

Je ne me fais pas prier et l’enlace alors que Snow lève les yeux au ciel. Je lui tire la langue puis m’occupe de Julia, magnifique et délicieuse dans mes bras. Je l’embrasse enfin avec toute la passion que j’ai pour elle. Nos langues se retrouvent comme si elles s’étaient quittées il y a des années, nos corps se collent l’un à l’autre et partagent cette joie d’être réunis. Les quelques heures passées au Palais ont été courtes mais auraient pu être terribles et nous avons pris conscience, je crois, de la chance que nous avons de nous être trouvés. Qu’est-ce que ça fait du bien d’être avec la femme qu’on aime !

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