22. Enflammée (partie 2)

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La soirée se déroule bien. Sten est assis au centre d’une table en forme de C avec nous autres, de chaque côté, tandis que les autres convives restent à la grande table. Sten parle de batailles et les filles s’extasient avec des cris de fausset. Pauline et moi n’entrons pas dans ce jeu d’artifices. En observant les autres, nous réalisons bien qu’elles ne savent reproduire que ce qu’on leur a appris. Si je devais m’en tenir aux leçons de Dame Irène, je serais une de ces filles artificielles, sans véritable nature. Alors même si l’armure commence à me peser, je n’ai aucun regret. Pendant près de deux heures, Pauline et moi restons aussi silencieuses que Cendre, échangeant des regards amusés lorsqu’une phrase d’une prétendante nous parait trop surfaite.

Quant à Sten, il ne surjoue pas lorsqu’il parle de lui, il vulgarise même pour pouvoir être compris de son public. Il parle des comtés de chacune pour les mettre en valeur, pour s’attirer une réponse. Puis après le plat principal, il nous interpelle :

— Nous ne vous entendons pas.

— Parce que nous buvons vos paroles, lâche Pauline.

— Personnellement, je ne me suis pas exercée au — Je prends une voix aiguë pour caricaturer les autres et porte mes mains à mes joues — Seigneur, mais que vous êtes fort et beau.

Cendre se cache, Pauline éclate de rire et même Sten lâche un petit son amusé. J’ignore si la carte de la provocation était à utiliser, mais si Sten a souri, c’est que j’ai marqué un certain nombre de points.

— C’est un peu exagéré, me dit la grande noire.

— Je ne pensais pas à toi, Malika, lui dis-je. Toi t’es vraie.

— Qui ? demande la Bimbo.

— Je pense que les concernées se sont reconnues. Tu te sens visée, Valériane ?

Sten sentant un hiver nucléaire approcher, suggère en faisant signe aux serviteurs de remplir nos verres de vin :

— Egayons un peu l’air ! Il y a autour de moi de si ravissantes jeunes femmes ! C’est un jour de fête !

La soirée se poursuit. Sten a choisi les courtisanes qu’il irait voir ce soir. Il commence par moi, ensuite Cendre. Pauline devra attendre demain. Il suit le cortège d’enfants à travers le couloir des chambres qui nous sont réservées. Chacune leur tour, elles lui souhaitent bonne nuit ou à tout à l’heure. Je suis heureuse de ne pas avoir à attendre la dernière heure pour le recevoir.

Notre garde pose un genou au sol. Fantou ouvre la porte, puis je précède l’Empereur qui s’incline pour faire passer sa ramure majestueuse. Lorsque la porte se referme, je lui dis :

— Prenez une chaise, je crois que je vous dois une danse.

Je ferme les rideaux du lit, puis Adelheid défait mon plastron. Sten silencieux, observe mon décolleté avec satisfaction. Je passe les pouces sous les bretelles de mon soutien-gorge pour les remettre en place, puis lui annonce :

— Je place mes courtisanes à leurs instruments, et je vous en mets plein la vue.

Il a un rictus carnassier. Les filles passent avec moi derrière le rideau du lit et je leur fais signe de n’émettre aucun bruit. Mon estomac est si serré que j’ai envie de vomir le dîner. Il ne faut pas que je me foire, que je sois aussi sensuelle que chez Dame Irène, pour ne pas qu’il me prenne pour une fille facile. Je vérifie la batterie de mon téléphone, branche l’enceinte, puis lance les tambours africains que j’ai téléchargés. Mon cœur bat à mille à l’heure. J’apparais devant le rideau, puis avance en rythme vers lui. J’aime cette musique, ce rythme, il entre facilement dans la peau. C’est dans celle d’un guépard que je me glisse au travers de mes regards. Je choisis un air neutre, pas perçant, pas provocateur. Mon corps danse, ondule en se tournant, dévoile mes jambes au travers de ma jupe. Mes doigts désolidarisent la jupe du bustier et défont les attaches de mon corsage. Il sourit, calme et attentif. Je m’approche de lui en me penchant, le dos creux, pour que ses yeux plongent sur ma poitrine lorsque je dévoile mon soutien-gorge. Des étincelles illuminent son regard, accroché à ma dentelle. Mes paupières se ferment pour mieux m’isoler et lui donner l’idée d’avoir percé mon intimité. Délicatement mes mains passent lascives sur mon ventre pour accompagner la danse. C’est ma jupe qui glisse et mes caresses voluptueuses se poursuivent sur mon corps ardent. Une longue minute enflamme son désir, embrase ma peau. Reconnaissant le changement dans la musique, j’ouvre les yeux, me rapproche de lui passe une main sur sa veste d’uniforme et mon ventre dessine des vagues torrides. Ses doigts robustes se posent sur mes cuisses, tandis qu’il reste captivé, la bouche entrouverte. Il n’a plus l’air d’un prédateur, mais d’un enfant devant un spectacle de magie. Sans interrompre mes reptations de couleuvre, je dégrafe mon soutien-gorge. Sten a la mâchoire qui tombe devant mon audace. Je recule, danse, tournoie, les bras levés pour donner à mes seins leur meilleure forme. Le trac est définitivement tombé et l’excitation m’habite autant que lui. La musique s’accélère, m’indiquant qu’elle approche de la fin. Je reviens vers lui, une jambe de chaque côté des siennes pour une lap dance torride. Son souffle rapide glisse sur ma peau. Chaque ondulation de mes hanches, pressent son sexe tendu, comprimé dans son pantalon. Les caresses de ma dentelle réveillent tant son appétit que sa langue s’écrase sur mon mamelon, juste avant que sa bouche ne se referme pour l’aspirer. La surprise me fige malgré-moi une seconde. Tout en reprenant ma danse sensuelle, mes mains glissent derrière sa nuque musclée. Les siennes explorent la dentelle de mon tanga sur mes fesses. Je brûle de sentir sa langue sur ma poitrine, sans l’effet de la surprise. Je lui murmure dans un soupire :

— L’autre est jaloux.

Sten ne se fait pas prier et il suce délicatement mon second mamelon, avec la même intensité. Ses papilles me sont délicieuses et un torrent brûlant déferle dans mon ventre. Les tambours s’arrêtent brutalement. Je me dégage de ses mains et m’incline sans le regarder. Lorsque je trouve mes mots, je pose mes yeux sur son visage de guerrier :

— Voilà un avant-goût de comment pourraient commencer toutes nos soirées d’époux.

— Sous vos airs glacés, vous êtes un volcan, Léna Hamestia. Vous tenez du dragon, lui-même.

J’accroche ma jupe et ramasse le soutien-gorge.

— En parlant de ce dragon, vous vouliez entendre l’histoire de ma bouche ?

— Cela me changera des conversations habituelles des autres prétendantes.

— Si vous voulez que nous nous revoyions, il faudra convaincre vos sujets de voter pour moi. Adelheid, peux-tu m’aider ? — Ma courtisane apparaît pour m’aider à remettre mon corset. — Fantou, sers de l’eau au Seigneur Varrok. Je suis sûre qu’il est plus assoiffé que moi.

Les filles apparaissent, nous servent de l’eau. Je vois bien à la déformation de la tenue de Sten qu’il ne débande pas. Moi-même je suis encore si chaude que j’aimerais poursuivre au-delà de la danse. Mais il y a des limites à s’imposer.

— Alors ? Ce fameux dragon ?

— Et bien en quittant Les Deux-Pierres, j’ai choisi Ig-le-Grand car c’était proche et que c’est de là-bas que venait une aspirante qui a essayé de me faire violer. Mais Fantou et moi avons tué ses sbires.

— Voilà une histoire que je veux entendre.

— Je commence l’histoire d’Ig-le-Grand, puis je vous raconte. En vérité, nous ne savions pas qu’il y avait un dragon…

Lorsque je termine de discuter de mon périple, Sten semble satisfait de notre rencontre. Grâce mes croisements de jambes réguliers, je l’ai maintenu en tension sexuelle tout le long. Lorsqu’il se lève, son vêtement ne saurait cacher son érection.

— Bien, rappelez-moi de me méfier de vos courtisanes, si elles manient toutes aussi bien le couteau.

Je me colle à lui et pose délicatement mes lèvres sur les siennes, juste au cas où je ne pourrais pas le faire à nouveau. Je n’ose pas passer ma main sur la toile tendue de son pantalon, par crainte de me retrouver soudainement plaquée au lit.

— J’espère que vos autres entretiens seront ennuyeux à souhait.

— Vos rivales ont d’autres atouts. Nous nous reverrons, je ne m’inquiète pas pour votre détermination à trouver des soutiens.

— Bonne soirée, Seigneur.

Chihiro lui ouvre la porte, puis il baisse la tête pour passer sa ramure, un peu rêveur.

— Déshabille-moi, vite, supplié-je Adelheid.

Elle m’aide à défaire mon corset. Je fais voler ma jupe, puis baisse mon tanga détrempé de ma cyprine.

— Beurk ! commente Mala.

Je fonce à la porte côté bains. La sentinelle endormie sursaute. Elle me laisse passer sans avoir le temps de fouiller mes cheveux. Je compte les portes, une, deux, trois quatre. Je colle mon oreille à la porte de Cendre, sous le regard de la gardienne en armure dorée, puis m’agenouille. Je peine à entendre la voix de Cendre.

— Je ne vous plais pas ?

— Ta nudité est aussi resplendissante qu’inattendue, ne doute pas de ta beauté. C’est un clair de lune dans une nuit noire.

Vu comment j’ai chauffé Sten, si elle s’est dénudée pour lui, il doit avoir la bite dure comme de la pierre, il ne résistera pas à la disqualifier. Je croise les doigts tandis qu’elle balbutie d’une voix trop faible pour que j’entende tout.

— Je… Je ne crois pas avoir votre talent pour les mots…

— L’expérience des mots vient avec le temps.

À sa voix doucereuse, je l’imagine caresser en même temps la peau de Cendre tétanisée. Rien que cette image ravive mon désir. Mes courtisanes qui m’ont rejointe collent à leur tour leur oreille contre le bois épais. Nous n’entendons rien, pendant un moment, puis la voix de Cendre peine à nous parvenir :

— Je veux dire, je ne suis pas une grande oratrice qui rassemble. Personne ne voudra de moi comme Impératrice.

— Et ne le désires-tu pas ?

— Je… vos bras… juste ça.

— Tu ? insiste la voix virile de Sten… D’accord.

Le silence est difficile à sonder.

— Je n’entends plus rien, chuchote Fantou.

— Chht ! Patience.

Pendant cinq minutes, je n’entends plus que les respirations de mes servantes. Sten est-il parti ? Je peine à le croire. Un gémissement à peine audible passe la porte de bois. Je retiens mon souffle. Les gémissements montent, s’accélèrent, prennent en puissance.

Je me relève, brûlante. Mala questionne :

— Il se passe quoi ?

— Ils font l’amour, répond Fantou.

La sentinelle m’observe en silence. Je tire la langue avec mon plus beau sourire :

— Une de moins. — Je tourne l’interrupteur de céramique pour augmenter la lumière au-dessus des bassins — Les filles, restez ici.

Je retourne à mes appartements, seule, puis m’enferme. Mes doigts passent sensuellement sur ma peau, mes hanches reprennent leur danse lentement. Je repense à notre conversation, à cette bouche chaude sur mes seins. Mes doigts effleurent leur pointe si tendue que la caresse en est brûlante. J’imagine ce pénis blanc et imberbe tendu. J’aurais voulu tenir entre mes doigts. Je l’imagine se glisser entre les nymphes détrempées de Cendre. J’imagine le corps musclé de l’empereur onduler, savourer cette exquise étreinte charnelle en ne pensant qu’à moi, à ma danse, à ma poitrine, à ma voix. Je l’imagine obsédé par mon envoûtement. Je m’assois sur le lit sans pouvoir retenir ma main. Mes doigts écartent mes lèvres, baignées de nectar et glissent contre mon clitoris saillant. Le contact me donne un frisson violent. J’écrase mes cuisses autour de mon bras, appuie sur mon pubis enflé et ma paume imprime des cercles.

Une minute, même pas… Mes dents mordent les draps, étouffant mes gémissements, laissant mes muscles se contracter de plaisir.

Mes membres retombent, mon souffle se calme. Ça ne va pas être suffisant pour éteindre le volcan. Je veux de la langueur et un corps chaud contre le mien. Je veux Sten !

Je me relève, gagne les bains et baisse la tête pour que la soldate me fouille la tignasse. Mais elle me fait confiance.

— Allez-y.

Je passe les arcades et m’assois sur le bord du bassin en exigeant :

— Une me savonne, une autre me peigne ?

Mes courtisanes se regroupent en se saisissant des ustensiles à disposition. Adelheid verse délicatement l’eau chaude sur mes épaules. Mala se saisit du peigne. Tandis que la fille de Sigurd savonne mes épaules, Fantou à genoux sur les marches se place entre mes cuisses. La petite éponge à la main, elle dit à Chihiro :

— C’est pour la fleur.

L’éponge glisse sur mes nymphes souillées. Les yeux fermés, je savoure les gestes délicats de chacune. Chihiro savonne mes jambes quand Adelheid passe aux bras. Fantou passe sur mes seins encore sensibles. Quelle bonne idée d’avoir inventé l’esclavagisme. Je ne pense plus à rien, sinon à mon souverain.

Quand chaque parcelle de peau est couverte de mousse onctueuse, je me glisse dans l’eau. Le savon s’étend sur la surface de l’eau.

— Ça va ? s’inquiète Fantou.

Je lui souris :

— Mieux que jamais. Câlin ?

— Vous êtes triste ?

— Non très contente. Grâce à toi, je sens que je peux gagner.

— Grâce à moi ?

— Si je ne t’avais pas rencontrée, je suis sûre que ça aurait été différent. Serais-je allé chez Dame Irène, déjà ?

Elle s’assoit sur mes jambes, se blottit contre moi, et je l’étreins. J’ai besoin de cette chaleur, de cette tendresse que je ne peux qu’imaginer de la part de Sten.

Dix minutes plus tard, une porte s’ouvre. Cendre sursaute en voyant une présence, puis me reconnaît. La main entre les cuisses tâchant de retenir le sperme qui s’échappe, elle se glisse honteusement dans un des petits bassins. Ses courtisanes viennent la peigner et la savonner.

Fantou descend de mon étreinte et Chihiro demande :

— Je peux câlin aussi ?

Je hausse les épaules. Elle s’installe sur les jambes et cache son nez dans mon cou. Un reniflement trahit la présence de larmes. Me souvenant qu’elle est orpheline, qu’elle a vécu comme servante docile chez le maire d’Ig-le-Grand, je caresse son dos. Merde, si j’avais su qu’elle avait besoin de tendresse, je lui en aurai donné plus tôt.

Je n’ouvre les yeux que lorsque j’entends Cendre marcher jusqu’à moi, enveloppée de trois draps colorés pour bien masquer sa peau. Un sourire fend son visage puis elle murmure :

— Merci.

— De quoi ?

— J’ai suivi votre conseil. J’ai passé une soirée merveilleuse.

— C’est l’essentiel, de n’avoir aucun regret.

— Oui. Bonne nuit Léna.

— Bonne nuit, Cendre.

Elle s’éloigne et Chihiro les larmes encore visibles sur ses joues s’éloigne de moi en supposant :

— Elle a perdu si elle a fait l’amour.

— Ouais, confirme Fantou.

— Elle a perdu, mais elle est contente ?

— C’est le pouvoir de l’amour, souris-je. Allez, allons-nous coucher.

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