Gabriel, le premier
« C’est vieux cette histoire, je ne m’en souvenais plus, ça doit remonter au moins à dix ans en arrière. »
    « Je sais, essayez de vous souvenir du plus de détails possibles, je mets en marche le dictaphone. »
    « Je n’étais pas encore marié à l’époque, donc si ma femme écoute, je n’aurais pas droit à la scène habituelle. 
On  sortait beaucoup le vendredi et le samedi soir avec des potes, presque  toujours dans  la même boite, le Boeing, ou l’Avion, je ne sais plus. »
    « L’Aéroplane, c’était le nom de l’époque, mais ça n’existe plus. Continuez je vous prie. »
Stéphane  doit arriver dans dix minutes, il va falloir que je me presse, il m’a  dit vingt heures, je ne suis pas encore douché. Je vais l’attendre parce  que sinon, je ne vais pas entendre la sonnette.
Presque à l’heure pile.
    « Merde, tu fais chier, t’es pas encore prêt. On avait dit huit heures. On va encore faire la queue dehors. »
    « Dix minutes, tu me laisses dix minutes, et je suis lavé, habillé. »
Je cours dans la salle de bain en criant :
    « Fais toi un café, pendant ce temps. »
Je  suis toujours à la bourre, je sais. J’ai toujours une bricole que je  veux terminer. Une minute avant l’heure, je suis toujours dans les  temps, je ne sais pas faire autrement.
Les portes de la boite nuit  ouvrent vers vingt heures, et si on arrive après, il faut attendre en  une longue file à l’extérieur. Je n’ai jamais compris pourquoi, ils  n’ont jamais doublé le personnel qui s’occupe du vestiaire à l’entrée.  Le temps de récupérer les vêtements, de mettre sur des cintres, de  donner les tickets et de faire payer, les gens attendent dehors, qu’il  pleuve ou qu’il vente. En plein hiver, c’est pas gagné.
Marie Cécile, la jolie blonde, est à son poste au vestiaire, tous les mecs voulaient se la faire, mais pas évident.
Elle  connait presque tout le monde, pas intimement bien sur, et son accueil  terminé, certains ou certaines allaient discuter avec elle derrière son  comptoir. On tentait d’en savoir plus, sauf moi j’avais bien compris en  entendant les autres, elle restait évasive, pour ne pas mélanger  l'intime et le travail, comme elle dit. Quelques uns tentaient quand  même le coup, mais en pure perte.
Comme d’habitude avec  Stéphane et d’autres amis que nous avons trouvé sur place, on reste  accroché au bar. Ils tentent de danser, mais pas moi, je n’aime pas me  donner en spectacle, je me sens ridicule, plus spectateur qu'acteur.
A  mon poste de pilier de zinc, j’arrive à engager la conversation, pas  que cela m’intéresse, mais si j’ai l’occasion d’embarquer, nous sommes  venu pour ça. C’est assez rare d’ailleurs, beaucoup ne sont là que pour  danser et se montrer, je les connais presque toutes de vue.
Bonjour, bonsoir, on s’embrasse.
Comment tu vas ?  Tu as vu la fille là bas, elle a un nouveau mec.
Il ont changé le DJ, il était nul l’ancien ...
Ça ne volait pas bien haut, on faisait semblant de se connaître, on était en pleine intimité de Dance-Floor.
Si Marie Cécile ne bosse pas, je vais aller lui faire la conversation ça m'occupera sans chercher plus.
    « Il y a du monde ce soir. Tu as du boulot ? »
    « Non, ça va, d’ailleurs je vais aller fumer dehors, tu veux venir? »
    « Ok, je te suis. »
Elle  fait allumeuse Marie Cécile, avec sa robe serrée au corps, et ses  collants résille, je ne l’ai jamais vu habillée autrement qu’avec des  vêtements qui épousent ses formes, c’est entre autre pour ça que les  mecs tentent en vain. Personne ne sait rien d’elle, personne ne l’a  jamais vu avec un mec.
Je me suis habitué depuis des mois que je viens ici, à la regarder comme une jolie poupée qu’on ne  peut entreprendre.
    « Tu fais quoi dans la vie ? »
    « Je travaille comme toi. Il faut bien s’occuper. »
    « On va dire ça. »
Elle se met à rire, ce qui illumine son joli visage. »
    « Non mais, sérieusement . »
     « Je m’occupe d’un service technique qui répare des trucs. En fait, je  prends les rendez vous et je planifie les déplacements. »
    « C’est  plus précis, maintenant j’en sais un peu plus. Tu viens souvent avec  tes amis, j’ai l’habitude de vous voir. Tu es avec quelqu’un ? »
Mince, c’est la première fois que l’on discute réellement, et elle me demande si je suis célibataire, enfin je crois.
    « Euh non, ou alors je ne suis pas au courant . »
Elle se met à rire de nouveau.
     « Tu sais, tu es le seul qui ne vienne pas m’embêter quand je  travaille, c’est gentil, je te vois avec ton verre à la main, tu ne  bouges pas, tu parles à tout le monde. »
Je viens de grimper dans son estime, elle me voit autrement que comme un noceur.
    « Viens me voir quand tu t’embêtes, on pourra discuter, parce que c’est long derrière toute seule. »
Elle  avait fini sa cigarette, nous sommes rentrés ensemble, et je suis allé  rejoindre mes potes. Je venais d’approcher Marie Cécile, j’en étais tout  retourné. Je n’ai rien raconté à mes amis, je devais me faire des  idées, eux qui la voyaient comme une forteresse.
Je suis revenu  presque tous les vendredi et samedi soir, seul ou avec des amis, rien  que pour la voir, on discutait de tout avec elle, derrière son comptoir  ou dehors, ce n’était pas de l’intimité bien sur, mais un gentil  rapprochement.
Mes potes s’étaient aperçu de mon manège, je me fais charrier gentiment.
     « Tu te rends compte que tu es le seul qui soit tout le temps avec  elle. Si jamais tu sors avec, tu vas faire des malheureux. »
Je riais bêtement avec eux, mais c’est vrai que j’avais envie de sortir avec elle, à qui ne plaît-elle pas ?
Il me semble que je l’intéresse, mais je dois me faire des idées, parce qu’elle raconte un peu sa vie.
Elle  est mariée depuis l’âge de ses dix huit ans, elle en a trente huit  maintenant. Elle a voulu s’enfuir d’un milieu familial dur, c’était un  ami de son frère aîné, elle ne l’aime pas, c’est juste une bouée de  secours, elle le lui avait dit. Ils ont une fille de vingt ans qui est  autonome, mais habite loin d’ici. Son mari a une très bonne situation,  et si elle travaille, s’est pour s’occuper et ne pas le voir. Son  travail, c’est son argent de poche, comme elle dit. Il est assez  violent, pas en gestes, mais lui reproche sans cesse la cause de leur  mariage et cela fait plusieurs années qu’il ne se passe rien entre eux.
Je crois que j’ai bien compris sa dernière phrase.
Un soir, elle me dit.
     « Je crois que j’ai trouvé un autre boulot, mieux payé dans une autre  boite, tu pourrais m’accompagner, ils font aussi restaurant, et je dois  voir le patron. »
C’est ainsi que le samedi suivant, nous dînons dans le restaurant d’une grande discothèque.
Elle a eu son rendez vous juste avant, l’affaire était conclue pour le mois suivant, elle était toute contente.
     « Je vais travailler un week-end sur deux, et je suis mieux payée, tous  les pourboires sont divisés entre le personnel, ça va me changer de ma  commission sur les vestiaires. »
Deux amoureux sont en train de  dîner, c’est l’impression que ça donne tellement elle est joyeuse, on  aurait dit une petite fille qui ouvre son cadeau de Noël, mais chaque  chose à une fin et tout peu commencer.
J’avais pris ma voiture pour  aller la chercher à un parking du métro, inutile de prendre deux  véhicules pour aller au même endroit.
Je me gare a coté de la sienne au retour du restaurant. Je vais pour lui dire bonsoir, elle m’embrasse.
Je suis tellement surpris, que nos dents se cognent, nous nous enlaçons tendrement.
     « Gabriel, je sais que je te plais, tu as toujours été gentil et  patient sans rien me demander. Je ne vais plus travailler à mon ancien  boulot vendredi prochain, on passera la nuit ensemble si tu veux. »
J’ai du répondre oui, enfin je crois, parce j’étais tout chamboulé.
Elle me plaisait vraiment cette fille, le détail, et pas des moindres, c’est le mari.
J’ai  passé la semaine à faire des conneries au bureau, je mélange les dates,  les jours, rien n’allait bien, si bien que le patron est venu me voir,  et sur un ton de la plaisanterie.
    « Vous êtes amoureux Gabriel, ça ne vous va pas, pour le boulot non plus. »
Je ne sais pas si je l’étais, mais elle me plaisait diablement et je sais peu de choses d'elle.
Son  mari, sa fille, son travail, mais c’est tout, quelques généralités, peu  de ses goûts et de ses habitudes, mais sans plus. Elle habitait en  proche banlieue, mais je ne sais pas où. Je n’ai jamais vu  ses amis,  mais elle m’avait averti, que pour la punir,  son mari avait fait le  ménage. Elle les avait tous perdu au fil des ans. Je commence à me  douter du genre de violences qu’elle subit.
    « Coucou  chéri, c’est moi. On se retrouve sur le parking du métro vers dix neuf  heures, on va manger en ville, j’ai réservé un restaurant et on va chez  toi après, si tu es d’accord. »
    « Bien sur, j’attendais que tu m’appelles. »
Le restaurant me semble interminable, soit je mange vite, ou je ne termine pas, je voulais partir vite mais sans être impoli.
Elle s’en aperçoit d’ailleurs, en me prenant la main.
     « On va y aller chéri. Je paie, c’est mon cadeau de t’avoir rencontré.  Je suis aussi impatiente que toi, j’ai envie de cette nuit. »
Nous  n’avons pas couru jusqu’à ma voiture, mais presque, on riait comme des  enfants, sans nous lâcher la main. Je la ramène à la sienne, elle me  suit, pour éviter que je la raccompagne. Je suis sûr maintenant, elle me  plait beaucoup plus que je ne le pensais.
Chez moi, ce fut magique.
     « Tu es le premier homme après mon mari, je n’ai connu personne  d’autre, sois doux je t’en prie, je n’ai aucune expérience, mais j’ai  tellement envie de toi. »
Je fus doux, tendre comme jamais, elle n’a  aucune expérience, mais elle sait aimer, se donner, jouer comme  personne. J’ai embrassé toutes les parcelles de sa peau, elle a mordillé  tous les recoins de mon corps, nous avons fait l’amour comme si la fin  du monde approchait, je n'ai plus le souvenir de m'être endormi.
Au petit matin, je la sens se lever.
    « Il faut que je rentre chéri, je suis  revenir du boulot. »
    « Mais il est quelle heure ? »
     « Cinq heures, rendors toi, je t’appelle dans l’après midi. Fais  attention à toi, je crois que je vais t’aimer si je te revoies. »
Je me suis rendormi, non sans penser que ça va vite tout ça, trop vite.
Elle me rappelle dans l’après midi, comme convenu.
    « Coucou chéri, c’est moi. Tu as bien dormi ? »
    « Comment tu vas ? C’est surtout toi, parce que partir si tôt. »
    « J’aurais bien aimé rester, tu me manques depuis que je suis partie mais on aura d’autres moments, si tu veux. »
    « Bien sur que je veux, n’en doute pas ! »
     « Pas la semaine prochaine parce que je commence à travailler, mais  l’autre après, J’alterne avec une autre fille. Je vais voir si je peux  m’absenter quelques jours, j’ai de la famille assez loin, mais je ne  promets rien, je t'expliquerais. Je te laisse, je crois que l’autre  arrive, il m’a déjà pris la tête parce que j’ai fait du bruit en  rentrant. Des câlinons partout où tu veux, je te laisse.
Elle raccroche en riant, ça je l'ai entendu, et une porte claquer.
Une tornade, je suis encore fatigué de sa venue, il faut que j’appelle un pote qui la connaît de vue, il ne va jamais croire.
    « Salut Steph, je te réveille ou tu t’endors ? »
     « Abruti va, pas à cette heure. On ne te voit plus depuis que tu  dragues le vestiaire, elle n’était pas là hier soir, toi non plus  d’ailleurs. Tu fais la gueule ou tu es en mains ? »
Je lui raconte, sans trop de détails où se trouvait le vestiaire cette nuit.
     « Sans déconner, comment tu as fait ? Fais gaffe au mari quand même,  moi, ça me ferait flipper, j’aurais dit au revoir juste après. »
Il a  sans doute raison, mais à la vitesse ou ça va, j’ai du mal a réfléchir,  surtout qu’elle me fait de l’effet cette demoiselle mariée.
Nos  rencontres se planifient par quinzaine, elle ne travaille qu’une semaine  sur deux et nous avons supprimé les restaurants pour gagner le temps de  nous retrouver. Nous ne voyons plus grand monde de mes amis, centrés  sur nos ébats et nos conversations.
    « Je préfère éviter de les  connaître, à cause de mon mari, on ne sait jamais, il connait plein de  monde. Tu sais ce qu’il a fait l’autre jour ? Il s’est servi de ma  voiture pour éviter de prendre la sienne, et je suis tombé en panne  d’essence. Il avait oublié ou fait exprès sans doute. J’en ai marre, il  va falloir que ça s’arrête . »
J’avais droit à ses plaintes, chaque fois que l’on se voyait, je comprend qu’elle lui en veuille.
    « Mais pourquoi ne divorces tu pas ? Ce serait plus simple. Ce n’est pas un conseil, juste une remarque . »
     « On voit que tu ne le connais pas et  je n’y tiens pas d’ailleurs. Une  seule fois, j’ai évoqué le divorce, j’ai passé deux jours dans la  chambre. Il m’avait enfermé et barricadé les volets. Il me fait peur des  fois, même s’il ne me touche pas. Je me méfie. »
    « Tu pourrais porter plainte. « 
     « Je me suis renseigné ne crois pas. Tu verrais comment ça se passe  avec les voisins, il fait le gentil hôte quand ils passent. Il me sert à  boire, débarrasse la table, et si j’élève la voix ou émet une remarque  c’est moi qui passe pour méchante. Non, je ne peux rien faire. Il me  donne juste ce qu’il faut pour payer les achats et demande les factures,  j’ai déjà beaucoup de mal à lui faire admettre que je travaille. »
    « Mais c’est infâme ce qu’il te fait. Vous avez des amis qui viennent vous voir? »
     « Quelquefois, mais ce sont les siens et je ne les aime pas, ils ne  parlent que d’argent et position sociale. Quand il s’absente  quelquefois, ils viennent à la maison, comme pour me surveiller. Je suis  a bout Gabriel, heureusement que je t’ai trouvé. Évite de m’appeler si  tu peux, pas que je n’en ai pas envie, mais si jamais il se trouve là,  il va me demander qui c’est et j'aimerais éviter de le mettre en  colère.»
Elle me fait tourner la tête cette fille, je ne sais pas  quoi faire. Je ne peux pas lui proposer de rester, ça ne fait que  quelques mois que l’on se connaît. Je ne sais pas si je suis amoureux,  mais j’ai envie de la protéger, de l’aimer, elle parait si fragile. Elle  a l’air heureuse avec moi, et me donne son amour comme si l’on était  vraiment ensemble, un oiseau sans défenses.
    « Je vais pouvoir  partir quelques jours si tu veux, j’ai commencé à en parler à l’autre,  je cherchais une raison, je t'en avais parlé. »
    « Il te laisse partir ? Je pensais qu’il faisait attention où tu vas ? »
     « Là, c’est spécial, il me faut préparer pour les vacances d’été. Nous  avons une maison à coté d’Argelès. Chaque année, je dois voir s’il n’y  pas eu de dégâts de l’hiver. Nous y allons rarement, mais il loue à des  amis à lui. Tu verras, c’est tranquille, juste à coté de la mer. »
    « Il ne risque pas de venir ? Je n’ai pas vraiment envie de me trouver face a lui. »
     « Ne t’inquiète pas, il m’envoie là bas comme la bonne à tout faire. Je  fais les chambres, range les pièces, remplis les placards, pour ceux  qui y vont et ce n'est jamais lui, il n'aime pas le climat. »
C’est ainsi, qu’à la fin du printemps, j’ai pris quelques vacances avec Marie Cécile. Trois jours de pur bonheur, dans une grande bâtisse à deux pas de la mer. Nous nous sommes aimés, cajolés dans la dizaine de pièce que compte l’habitation. De longues promenades en bord de plage, restaurants et visites, elle semblait libre de toutes attaches, personne ne la connait, nous vivons le jour et la nuit, un couple d'amoureux en congés.
Il a bien fallu rentrer un jour, je reprends le travail,  et elle, son poste en discothèque. Je n'y suis jamais allé d'ailleurs,  fidèle à son adage.
    « Je ne mélange pas le travail et le privé, personne ne doit savoir. »
Un soir, elle téléphone complètement bouleversée.
     « Je ne sais pas si on pourra continuer à se voir, je crois qu’il se  doute de quelque chose. Il est venu me voir au travail et J’ai eu  beaucoup de mal à  éviter le scandale. Il voulait que j’arrête de  travailler, que je rentre de suite. Je n’en peux plus Gabriel, il faut  que tu m’aides. Il m’attendait quand je suis rentrée, il m’a fait une  scène terrible, il a failli me frapper, tu aurais vu ses yeux je suis  terrorisée. »
    « Bien ma chérie. Si tu viens ce week-end, on va en parler. Je t’adore tu sais, on va trouver une solution. »
Ça c est arrêté net, j'ai cru entendre une porte claquer au moment ou elle a raccroché.
J’ai  appelé mon pote Stéphane, et je lui ai raconté pour trouver une  solution et une aide, j’étais perdu, je ne savais quoi faire.
    « Tu l’aimes cette fille ? Tu as envie de passer ta vie avec elle ? »
     « Je ne sais pas, elle me fait beaucoup d’effets, elle me plaît  énormément, elle me semble si fragile, j'ai envie de l'aider. »
    «  Je ne sais pas quoi te dire. Si tu es accroc, fonce, mais réfléchis  bien, c’est peut être toute une vie, mais d’après ce que je comprends,  tu représentes aussi une bouée, un bon moment pour vous deux. Je ne  connais que toi, je ne sais rien de plus comme elle veut voir personne.  C’est assez étrange d’ailleurs. »
Elle est arrivé vendredi soir,  on a fait l’amour comme jamais, j’ai voulu discuter d'un futur dont je  n'avais aucune idée d'ailleurs, mais elle semble fermée. Elle élude tout  ce que j’envisage en commun, elle me semble avoir peur.
    « Je vais aller le voir, je vais discuter avec lui. « 
    « Non Gabriel, non ! Je le connais, c’est impossible, il risque d’être violent et ça va me retomber dessus . »
     « Mais je fais quoi alors ? Je suis prêt à t’aider, je peux aller avec  toi à la police, porter plainte mais au moins faire quelque chose de  concret. »
    « Je ne sais pas, je ne peux pas tout quitter comme  ça, j’ai tout chez moi, et s’il me voit faire mes bagages, ça risque de  dégénérer parce que tu ne seras pas là pour me protéger. »
Elle est repartie dans la nuit, comme à son habitude, me laissant tourmenté par des tonnes de questions.
Je ne savais plus quoi faire, j’étais inquiet pour elle.
Elle m’appelle le soir même.
     « Mon chéri, je suis désolé, mais il a décidé que je ne travaillerais  plus. On risque de ne plus se voir. J’ai eu droit a une scène terrible.  Je te rappelle demain si je peux. »
Elle a raccroché, j’ai entendu des sanglots dans sa voix.
J’ai attendu une semaine, j’ai appelé plusieurs fois bravant son interdit, envoyé des messages, mais rien en retour.
Un soir elle téléphone, je suis bien décidé à ne pas la lâcher.
     « Mon chéri, c’est peut être la dernière fois que je t’appelle,  j’aimerais tant sentir ta peau contre la mienne. J’ai tant rêvé qu’il  disparaissait pour être avec toi. Il ne va plus me laisser maintenant. »
    « Je suis décidé, je viens te chercher et je t’emmène. »
     « Je ne peux pas. Si je suis là, il va me faire du mal, il ne te  laissera pas entrer. Je pars chez ma fille quelques jours, pour me  reposer . Peut être que si tu le vois à ce moment là, il sera plus  calme, mais je n’en sais rien, il peut être violent quelquefois. »
     « Il faut que je le vois avec toi, je pense que c’est le mieux. Dis moi  où tu habites et j’arrive. Je viens te chercher tout de suite avec un  ami s’il le faut. »
    « Non Gabriel, non. J’aurais tant aimé être  avec toi, et qu’il disparaisse a jamais. Il est capable de me retrouver  partout, il en a les moyens. Je l’ai déjà vu faire. »
    « Dis moi où tu habites, j’appelle Stéphane et on arrive. »
J'ai entendu pleurer quand elle a raccroché à la fin de ma phrase.
J’ai encore appelé, appelé, envoyé des messages par dizaines.
J’ai passé le mois suivant à chercher, à faire les restaurants ou nous étions allé, et je suis allé a la discothèque.
     « Marie Cécile ? Non, il n’y a personne de ce nom ici, c’est la femme  du patron qui tient le vestiaire, elle n’a pas besoin d’aide. »
Je suis retourné à l’Aéroplane.
     « Marie Cécile ? Elle a travaillé quelques mois ici. Non elle n’était  pas employée. Vous savez ce que c’est, on ne fait pas de fiche de paie  pour quelques heures par semaine. Elle se payait avec l’argent du  vestiaire. Elle était gentille, mais personne ne connaît son nom, elle  n’avait pas vraiment d’amis ici. »
je suis retourné devant la maison d'été.
Une pancarte " A louer "  accrochée au portail.
J'ai contacté l'agence.
Ils  louaient depuis des années à la journée, la semaine ou le mois. Non,  ils ne pouvaient divulguer le nom du propriétaire ni des personnes qui  l'ont utilisé.
    « J’ai passé des mois à la chercher. J’avais presque tout oublié avant votre appel. J’ai rencontré ma femme un an après. »
    « Je vous remercie beaucoup pour tout ça . »
Il arrête son dictaphone et se prépare a partir.
    « Vous avez de ses nouvelles ? Pas que je regrette, mais sa disparition m’avait inquiétée à l’époque. » 
« Pas vraiment, mais si je la retrouve vous serez au courant, j'essaie juste de comprendre pourquoi elle disparait si vite, et n'existe nulle part. Comme je vous l'ai expliqué au téléphone, je n'ai qu'un intérêt purement personnel je veux savoir qui c'est et pourquoi elle fait ça. »

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