Réannelle

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Alors là, c’était une sacrée boulette ! Une boulette énorme, aussi grosse que la boule de cristal qui venait d’exploser sur le sol de la grande cave voûtée. Une clameur sépulcrale avait accompagné la chute de l’orbe translucide.

Réannelle se figea un instant devant les fragments d’étoiles qui brasillaient à la lueur des torches. Ses yeux glissèrent le long des vastes étagères sur lesquelles des centaines de boules de cristal reposaient sur un socle en métal. Un millésime indiquait pour chaque sphère l’année à laquelle elle se référait.

Maître Philéas Asparagus et ses prédécesseurs avaient accumulé au fil des ans ces capsules temporelles qui narraient sans fard les événements passés.

La jeune acolyte avait rejoint les rangs des chroniqueurs d’Éfraël deux ans plus tôt. Elle apprenait avec ardeur les arcanes de sa corporation. Dans un an, elle serait en mesure d’insuffler suffisamment d‘énergie spirituelle dans une sphère afin d’entrer en communication avec elle. En attendant, il lui fallait encore l’assistance d’une lectrice confirmée.

Elle avait lu les archives de l’an un, celles qui contaient Le Grand Voyage. Comment leurs ancêtres avaient quitté la planète d’origine à bords de fabuleux navires venus s’échouer sur Éfraël. Mais le vivre de l’intérieur par les yeux de ceux qui étaient partis, quelle aventure ! On éprouvait quelques difficultés à comprendre leur langage archaïque et plus encore à appréhender le fonctionnement de leurs étranges machines. Mais quelque trois millénaires après, les technologies perdues enchantaient toujours l’imaginaire des Éfraëliens.

Des corvées de toutes sortes rythmaient le quotidien des aspirantes lectrices. À l’aube de ses dix-huit ans, Réannelle devait épousseter une cinquantaine d’orbes, dont celle de l’année de sa naissance. La jeune fille n’avait jamais connu ses parents. Elle ne put résister au désir d’apprendre quelle tragédie l’avait rendue orpheline.

Elle avait saisi la boule, tenté une transe mal contrôlée et à présent, des éclats de cristal jonchaient le plancher.

Elle saisit un balai et s’empressa de faire disparaître dans le coin le plus sombre les restes de son forfait. À chaque coup de balai, une plainte lugubre s’élevaient des morceaux de cristal. Elle n’osait imaginer la punition que maître Asparagus lui infligerait si jamais il venait à le savoir. Elle prit dans la réserve une boule vierge et la déposa sur le socle en priant que l’on penserait à une erreur de classement et que la boule de l’année trois mille cent trente-quatre était définitivement perdue, ce qui arrivait parfois.

Des pas retentirent, Roméric le gardien du savoir accomplissait sa ronde. Réannelle courut se cacher dans la réserve. Les pas sonnaient de plus en plus fort. Tout au fond du local Réannelle aperçut une porte que l’on ne remarquait pas au premier regard. Elle l’ouvrit. Un escalier humide s’enfonçait dans l’obscurité.

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