Promenade sans thé sous l'océan

4 minutes de lecture

Personnages :
LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN
ISABELLE

CLAIRE MARIE PIERRE COUTURIÈRE

KATHARINA LAME TRANCHANTE

JOSIE L’ECRIVAINE

LA DISEUSE D’AVENTURE

L’ALLUMEUSE D’ETOILE


Dans un sous-marin meublé comme un salon bourgeois de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle après Jésus de Nazareth, roi des Juifs, six femmes sont assises sur des fauteuils rouges confortables, une autre femme, la capitaine, est accoudée à son gouvernail :

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Eh bien mesdames, je crois qu’il est temps de remonter

ISABELLE : Déjà,

CLAIRE MARIE PIERRE COUTURIÈRE : alors que nous nous amusons tant,

KATHARINA LAME TRANCHANTE : que nous nous habituons tout juste

JOSIE L’ECRIVAINE : à être cinq mille lieues sous les mers,

LA DISEUSE D’AVENTURE : alors que le ciel est encore gris au-dessus des vagues,

L’ALLUMEUSE D’ETOILE : alors que vous êtes si belle,

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Mais enfin

ISABELLE : Vous savez Capitaine, quand vous nous avez proposé cette virée sous-marine dans ce vaisseau de bois de noyer, je me suis dit que l’appareil ne résisterait jamais à la pression de l’eau, à vrai dire, je l’espérais, j’espérais qu’il explose à force de descendre

Les autres hochent la tête

CLAIRE MARIE PIERRE COUTURIÈRE : Oh oui, comme nous l’espérions

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Ah ah ah, mais Isabelle enfin, vous avez un humour caustique

KATHARINA LAME TRANCHANTE : Et j’ajoute à tout hasard que si par mégarde la capitaine s'évanouit, ou meurt, nous n’aurons plus aucun moyen de remonter

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Katharina, vous êtes beaucoup moins drôle

JOSIE L’ECRIVAINE : Allons capitaine, s’il vous plait, laissez-nous profiter encore un peu d’être sous l’eau, une heure tout au plus, venez donc boire un verre avec nous, juste un whisky

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Malheureusement, je ne peux pas me le permettre, si nous avons un contrôle de police sous-marine et qu’on me surprend avec une alcoolémie supérieure à 0,2 gramme par litre de sang, on me retirera mon permis

ISABELLE : Vous n’allez pas me dire qu’il y a beaucoup de patrouilles de police sous l’océan

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : À vrai dire, si, entre l’Atlantide et Saint-Cieux les bains, c’est fréquent

CLAIRE MARIE PIERRE COUTURIÈRE : Enfin ça m’étonnerait qu’il y ait des contrôles un mercredi à dix-sept heures

KATHARINA LAME TRANCHANTE : Claire a raison, à dix-sept heures le mercredi toutes les vaches de la région sont devant le journal pour le feuilleton littéraire,

JOSIE L’ECRIVAINE : Ce que Katharina appelle les vaches, se sont les policiers car Katharina est une anarchiste, vous voyez, tu peux le dire Katharina que tu es une anarchiste, tu sais, tu

KATHARINA LAME TRANCHANTE : Je suis ce que Dieu m’a faite,

JOSIE L’ECRIVAINE : Ah, ça non, tu ne peux pas le dire, ou alors si tu le dis, tu n’es plus une anarchiste parce que tu vois les anarchistes,

L’ALLUMEUSE D’ETOILE : doivent bien rire de nous à l’heure qu’il est, dix-sept heures et nous ne sommes toujours pas en train de boire, ni de baiser

LA DISEUSE D’AVENTURE : Tout cela parce que notre capitaine a une phobie de l’amusement

ISABELLE : Un petit verre, ce n’est pas la mer à boire

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Bon allez, soit, un verre, un verre seulement, après, nous démarrons, de toute manière il pleut des méduses, je n’aime pas trop ça conduire quand il pleut

La capitaine s’éloigne de son gouvernail pour venir s’asseoir avec les autres, un verre à la main

ISABELLE : Alors capitaine, dites-nous pourquoi vous tenez tant à remonter

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Mais parce que j’aime vivre, je veux vivre, et j’ai une daube dans le four qui mijote depuis trois heures

CLAIRE MARIE PIERRE COUTURIÈRE : Au diable la daube

KATHARINA LAME TRANCHANTE : Pensez à la mort, cruelle, à une fourchette qui s’enfonce entre les os désordonnés de votre main, au doux chant des lames qui s’entrechoquent dans vos entrailles

JOSIE L’ECRIVAINE : Pensez au déluge qui commence, au désastre qui se prépare

La diseuse d’aventure sort un paquet de tarot de Marseille de sa poche, le mélange, tire trois cartes, les montre à tout le monde :

LA DISEUSE D’AVENTURE : Pensez que cette première carte, l’âne chevauché d’une poule, annonce pour vous un grand malheur, que la seconde, une table sans pieds accoudée à un bar, annonce pour vous un grand malheur, et que la troisième, une photo de Josie, annonce pour vous un grand malheur

L’ALLUMEUSE D’ETOILE : Pensez que vous êtes toujours pucelle à votre âge, ce qui est bien triste

ISABELLE : Pensez à votre mère

LA CAPITAINE DU SAINT LEVAN : Ah bon Dieu, ma mère, que va-t-elle encore inventer pour me houspiller, je ne sais pas, je ne veux pas savoir, peut-être avez-vous raison finalement

ISABELLE : Buvez, buvez , ça vous consolera

Et, puisque je n’ai plus le temps d’écrire, ni la foi, à vrai dire, elle boit et boit jusqu’à s’endormir et replongeant dans les profondeurs, le sous-marin vient se garer dans l'Atlantide où des sirènes récupèrent les pochtronnes et les emmènent à l’hôpital sous-marin le plus proche où on les soignera de leur coma idyllique

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