8.1 Retrouvailles

7 minutes de lecture

Koliane observa l’appareil descendre doucement vers la piste d’atterrissage de la base, apportant l’une des futures pupilles dont elle avait la charge. Elle sentit son regard se perdre dans le vide, happé vers un souvenir de son propre départ.

Elle s’ébroua, chassa le malaise qui l’envahissait. Chez les vlin’ns, seuls les enfants se laissaient emporter dans leurs songes et si ses congénères l’avaient vu faire, elle aurait reçu des regards en coin. Heureusement pour elle, aucun vlin’ns n’était en vue et il en était bien mieux ainsi. La haïkadenne en devenir ne supportait plus ses aïeux et leurs mœurs et préférait grandement ceux de l’ordre de gardien galactique.

Elle sauta de la barrière qu’elle utilisait comme siège et s’avança jusqu’au vaisseau d’où descendit une jeune humaine à l’impressionnante chevelure argentée. Koliane ne put se retenir de sourire en la voyant accourir à toute vitesse.

— Bonjour page Koliane ! s’écria Gwën qui tapa deux fois son cœur comme le salut des gardiens le voulait.

— Je vois que tu n’as pas eu à faire le mur cette fois-ci, rit la vlin’ns. Tes parents t on laissait venir sans problème ?

— Ils ont rouspété du début à la fin donc j’ai filé jusqu’au skycraft pour partir. Elle se massa les oreilles. Je n’en pouvais plus de les entendre crier.

Gwënaelle sautilla en avant, suivit par le petit drone qui portait sa valise. Son regard fit un cercle et elle fronça légèrement les sourcils.

— Anil n’est pas là ?

— Non, il est en train de préparer le nef pour le décolage.

— Ce n’est pas toi qui pilotes cette fois ?

Koliane secoua la tête.

— J’ai reçu un ordre de notre chef instructeur. Il a besoin d’un pilote pour transporter quelque chose et comme je me trouvais sur la planète il m’a demandé de m’en charger. En plus, j’aurais deux gardiens en tenue de vacances avec moi.

En entendant toute l’histoire, le sang de la nouvelle écuyère ne fit qu’un tour. Gwënaelle était familière avec les expressions employées par les haïkadens, et comprit que Koliane faisait référence à des gardiens équipés seulement de leur flea. La fanatique de haïkaden avait bien sûr pris le temps de tous les apprendre par cœur.

— Que vas-tu transporter ?

— Même moi je n’ai que des détails et l’on m’a ordonné de ne pas en parler.

— Tu t’es fait confier une mission secrète ! s’extasia Gwënaelle des étoiles dans les yeux.

Koliane ne put s’empêcher de rire devant le zèle de la nouvelle pupille. Cela rappela à la vlin’ns ses premières semaines à la base et l’étrange mélange de peur et d’émerveillement qui les avait accompagnés.

— Je vais simplement rapporter un vieux bazar datant d’il y a des années pour le stocker quelque part dans Skalia. Ça n’a rien de bien extraordinaire. D’ailleurs, maintenant que j’y pense, tu ne seras pas toute seule pour ton vol.

Les sourcils de Gwënaelle firent un accent circonflexe.

— Tu veux dire qu’il y a un autre écuyer sur Sol IV ?

— Oui ! Une jeune humaine qui m’a tout l’air un peu perdue. Elle va avoir besoin de ton aide pour s’adapter au début.

Le sourire de Gwënaelle vacilla et elle s’attrapa le bras. Koliane nota aussitôt l’allure pincée de sa nouvelle camarade et l’interrogea dessus.

— Ce n’est rien. C’est juste qu’il y avait une personne avec qui j’aurais aimé devenir écuyère, mais je ne pense pas que ce sera possible. Elle réaffirma son sourire. J’ai hâte de la rencontrer !

Les deux filles se mirent en marche vers la base et prirent l’un des ascenseurs en direction du poste de commande d’où Anil préparait le décollage. Gwënaelle n’en pouvait plus d’attendre et couvrait de question la vlin’ns sur ce qui aller se dérouler à leurs arrivées.

— D’ailleurs Koliane, je me demandais, comment c’était passé ton inscription chez les écuyers ? Comme tu ne viens pas de la Confluence, je ne savais pas si c’était pareil…

— Moi ? Elle réfléchit quelque peu puis se racla la gorge. Tu vois, ma mère s’en est toujours voulu de m’avoir donné un prénom de garçon. Elle disait que cela m’empêchait d’être comme les autres vlin’ns de mon âge. J’étais plutôt téméraire et très solitaire. Je faisais plein de trucs dans mon coin et n’avais pas vraiment de bonnes notes. En ce qui concerne mon inscription… Ce fut un peu mouvementé, comme pour tout le monde. J’étais en pleine période de choix d’école et mes moyennes n’étant pas hautes, mes parents n’étaient pas contents du tout. Alors quand un nog’lon de deux mètres vingt a sonné à notre porte, je ne te dis pas la tête qu’ils ont faite.

— Et ils t’ont laissé partir ? s’étonna Gwën.

— Ils en étaient ravis. Vois-tu, l’empereur accorde des avantages aux familles qui envoient leur enfant chez les haïkadens. Cela va des réductions d’impôt aux privilèges sociaux et peut aller jusqu’à gagner un rang.

Gwënaelle ne connaissait rien du tout à la société vlin’ns et ne comprit pas tout à fait les propos de la vlin'ns. Cette dernière le devina et profita des quelques mètres leur restant à parcourir pour entrer dans les détails.

— Ma famille est une An, c’est un rang social plutôt haut voulant dire que l’on a le droit à la propriété, de posséder un commerce et de prendre part à la politique locale. Mon père espère devenir un Din et acheter des terres agricoles.

— Donc, ils t’ont vendu pour un titre ! C’est horrible !

Koliane haussa des épaules.

— Non, c’est ainsi chez les vlin’ns. Je savais très bien que je n’étais pas une LialNur, une fille d’amour. Mes parents ne m’ont eu que par nécessité et c’est tant mieux. Cela m’évite de devoir aller les voir.

Koliane activa la porte de la tour de contrôle et entra sans attendre. Anil était assis sur l’un des sièges d’où il activait le hangar et la piste de lancement.

— Salut petite crapule, jeta le garçon par-dessus son épaule. Ton examen s’est bien passé ? Paraît que t’as fait que dormir sur le chemin du retour.

— C’était génial ! s’égosilla Gwëanelle. Il y avait tellement de haïkadens venus nous voir alors que nous n’étions que trois pour les épreuves.

— En tout cas, t’as l’air d’avoir bien réussi puisque t’es là. Koliane, j’ai tout initialisé, je te laisse terminer pendant que je démarre le nef. Il se tourna vers Gwënaelle. Tu me suis, pupille ?

L’écuyère partit vers la porte et sortit de la salle de contrôle. Anil lui emboîta le pas, mais fut stoppé par Koliane qui lui attrapa le bras au dernier moment. Avant que le garçon ne pût réagir, elle déposa un baiser sur ses lèvres puis le poussa en avant.

— Ne te crashe pas cette fois.

— Seulement sur le bureau de Sibelle, répondit-il avec un sourire en coin.

Sortant de la pièce, il laissa la porte se fermer avant de se tourner vers Gwënaelle qui l’observait avec regard joueur.

— Elle est folle de moi, lança-t-il en détachant chaque mot. Si tu veux, je te donnerai quelques conseils quand tu seras plus grande. Après tout, tu as devant toi le meilleur séducteur de tout Skalia !

Gwënaelle et le garçon rirent ensemble puis prirent le chemin du hangar. La route fut rapide et en approchant le nef, Anil remarqua aussitôt que quelque chose clochait. S’arrêtant net, une pointe d’inquiétude lui piqua le cœur en ne voyant pas Vaillance là où il l’avait laissé.

— Qu’est-ce que cette andouille a encore fait ?

Il accéléra le rythme, courut presque jusqu’à la porte arrière qu’il atteignit juste à temps pour observer la fille écraser une des épées de Koliane contre l’un des deux fleas. Un sifflement glissa entre ses lèvres, sans que Gwënaelle arrive à savoir si c’était de soulagement ou de colère.

— Ne bouge pas Gwën, ordonna Anil.

Le pas du garçon changea, silencieux telle une chouette s’approchant de sa proie. Il avança jusqu’à se trouver à portée de bras de Vaillance et se racla la gorge.

Depuis l’arrière du nef, Gwënaelle ne vit qu’une fraction de la scène et entendit les lamentations de sa camarade suivie des remontrances du page. Bien que cela l’étonna qu’Anil se montre aussi strict, elle ne pipa mot jusqu’à ce que, finalement, il se retourne et laisse l’autre pupille apparaître.

— Sa… salut, Gwën…

Le cœur de Gwënaelle manqua un battement, la voix de la fille aux cheveux de jais fut comme un coup de fouet. Cette dernière eut à peine le temps de bouger, encore moins de bégayer des excuses que Gwën s’élança à travers la soute et se jeta dans ses bras. Le rire de cristal de la noble argentée emplit l’appareil, elle rayonnait telle une pépite d’or.

— C’est quoi ce cirque ? Vous vous connaissez ? demanda Anil, troublé.

— Bien sûr ! s’exclama Gwën tout sourire. C’est ma meilleure amie !

_ _ _ _ _ _ _ _


Quasar point :

La société vlin’ns est segmentée en rang symbolisant l’importance de la famille. Il existe deux types de rang :

- Les familiaux qui se transmettent à tout les membres d’une famille. Les An et les Din font partie de cette catégorie.

- Les personnels qui sont attribués à un individu particulier.

On notera plusieurs rangs de haut niveau tel les Ad, un rang familial utilisé par les familles de chevalier vlin’ns. Et les Ar, rang personnel attribué uniquement au vlin’ns ayant maîtrisé le psyck, les pouvoirs psychiques naturels de la race.

Le rang le plus haut est celui de ‘Thy’ uniquement utilisé par les membres de la famille impériale vlin’ns, les Elderis.

Quand deux vlin’ns se marient, l’époux au rang le plus bas prend le rang et le nom du plus élevé. En cas d’égalité, c’est celui de la famille la plus prestigieuse.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Quasar ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0