Chapitre 22

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Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis que Sinélia s'entraînait sans relâche, elle supportait des tortures aussi horrible les unes des autres, qui parfois lui demandait beaucoup de repos.

Brusquement, elle fut projetée contre un mûr, elle entendit certaines de ses os craquer lors du choc, une douleur vive apparut dans tout son dos. Elle se releva difficilement, ses jambes tremblaient mais le soldat en face d'elle, Kidéro attaqua à nouveau, il ne lui laissait aucun répit. Elle sentit la lame s'enfoncer dans la chair de son bras, elle laissa une plaie béante après son passage. Sinélia continua encore et encore à se relever malgré les nombreux endroits douloureux dans son corps, qui lui hurlaient de tout arrêter. Elle encaissa encore et encore sans broncher. Pourtant, elle finit par s'écrouler de tout son long sur le sol, le visage ensanglantée tout comme son corps, elle n'arrivait plus à se relever.

Kidéro la souleva pour la remettre sur pied puis il la traîna jusqu'à sa chambre, où il la balança sur le lit à baldaquin. Quelques minutes après qu'il ait quitté la pièce, une infirmière rentra pour s'occuper de la femme aux cheveux de cendres.

—Encore une fois, vous avez été salement amochée. La plaie à votre bras va prendre du temps à se résorber, en sachant que je vais devoir la recoudre à vif, expliqua calmement l'infirmière.

Sinélia la regarda préparer l'aiguille ainsi que la ficelle pour refermer sa blessure et un désinfectant. Elle fut surprise d'entendre à nouveau la démone :

—Quand est-ce que vous cesserez de vous relever pour éviter d'arriver dans des états aussi catastrophiques ? Vous risquez de mourir à force.

—Votre roi me veut en vie donc il fera tout ce qui est possible pour que je le reste, répondit la jeune femme.

—Peut-être mais vous devriez vous méfier à partir du moment où il n'aura plus besoin de vous, il risque de vous tuer, murmura-t-elle près de son oreille. Il n'est pas aussi doux que l'était la reine, malheureusement.

Sinélia la regarda hébétée, certains démons étaient contre leur roi ? La plupart d'entre eux qui montraient la moindre rébellion en ce royaume mourraient par la suite, ils servaient d'exemple au peuple, les enfants terrifiés finissaient toujours par obéir en baissant la tête.

—Vous avez connu la reine ? Demanda Sinélia, curieuse.

—Oui, une femme si douce. Cela faisait des années que nous n'avions pas connu une reine aussi clémente et aimante, annonça l'infirmière d'un air rêveur. Les enfants étaient si heureux de la voir chaque jour et de pouvoir jouer avec elle. Malheureusement, elle est tombée gravement malade comme certains des petits avec lesquels elle jouait.

Un sanglot traversa ses lèvres gercées avant qu'elle ne se reprenne et continue.

—Aujourd'hui, ils reposent tous au cimetière derrière la ville, où il est interdit d'entrer, annonça-t-elle tristement. Attention, ça risque de vous piquer.

Lorsque l'aiguille traversa la chair abîmée, l'ange morte hurla à en faire trembler les mûrs. La douleur était tellement insupportable qu'elle voulait tenter de se débattre. Sa plaie commençait à s'infecter, alors l'infirmière prenait des précautions en désinfectant correctement.

—Je ne vais pas pouvoir vous recoudre. Je dois d'abord vous éviter une infection en premier lieu et après nous pourrons le faire, diagnostiqua la démone en grimaçant. Il va vous falloir du repos pour éviter que l'infection ne se répande ou empire.

La femme rangea tout son matériel et jeta un dernier coup d’œil à la plaie avant de quitter la pièce. Sinélia tourna la tête vers sa fenêtre pour observer le ciel ténébreux des Enfers, elle avait l'impression qu'il faisait constamment nuit dans ce royaume. Tout à coup, un homme ouvrit la porte avec un air inquiet.

—Comment est-ce que tu vas ? Demanda l'archer d'élite.

—Rien de grave, une petite infection simplement, murmura-t-elle en observant les cheveux du jeune homme qui était tout ébouriffés.

Cette coupe ajoutait un charme particulier au physique du démon, il ne laissait pas de marbre la jeune femme. Elle lui tendit la main pour sentir la chaleur de la sienne ainsi qu'elle voulait voir à nouveau la ficelle d'or autour de leurs poignets sauf qu'un flash l'emporta plus loin dans le temps, où elle se retrouva dans une ville qu'elle ne connaissait pas.

Brusquement, elle fut bousculée par plusieurs passants qui hurlaient haut et fort.

—Nous voulons être aidés ! Nous n'arriverons pas à nourrir nos enfants, nos familles tandis que vous, vous êtes au chaud dans vos maisons en touchant suffisamment de six, hurla un homme avec des vêtements déchirés de partout.

Une femme scanda à peu près la même chose tandis que Sinélia avança jusqu'à qu'une main ridée l'arrête, elle venait d'une vieille dame au visage doux, elle paraissait être une mamie gâteau mais aujourd'hui, ce n'était plus le cas, ses traits étaient tendues par la peur et le désespoir. Pourquoi ces personnes avaient l'air si malheureuse ?

—S'il vous plaît, j'ai besoin d'un peu d'argent pour nourrir mes petits-enfants, supplia la dame.

Sinélia fouilla dans ses poches et trouva cinquante siz dans ses poches, elle lui tendit et la vieille dame lui offrit un sourire franc.

—Merci énormément, souffla-t-elle en s'éloignant pour rejoindre deux enfants en bas âge, qui étaient terriblement amaigri.

L'ange morte les regarda avec compassion, il fallait qu'elle fasse quelque chose pour eux, elle ne pouvait pas les laisser dépérir. Elle alla les rejoindre en leur proposant de venir chez elle, la personne âgée refusa une première fois en disant qu'elle en avait déjà suffisamment fait mais Sinélia insista.

Les personnes descendants dans les rues continuaient de hurler leurs impossibilités à vivres et Sinélia avait du mal à comprendre ce qui était arrivé ici.

—Que se passe-t-il ici ? Demanda-t-elle à la vieille dame qui lui souriait avant de soupirer.

—Malheureusement de nos jours, la vie est très dure. Nous touchons environ quatre cent siz pour une grande majorité des métiers sauf que cette maudite somme ne nous permet plus de vivre, répondit-elle. Lorsque nous achetons de la nourriture quasiment la moitié s'en va, il ne nous reste que deux cent siz, suffisamment pour payer notre logement et encore...

La vieille dame essuya quelques larmes devant ses petits-enfants, ils paraissaient terrifiés et perdues au milieu d'une telle situation.

—Je comprends mieux. Vous serez en sécurité chez moi, vos petits-enfants pourront reprendre du poil de la bête, lui répondit-elle tendrement.

Elle guida cette petite famille aux travers des passants en cherchant à sortir de la ville le plus rapidement possible avant que ça n'éclate. Lorsqu'ils furent dehors, ils passèrent par un petit chemin qui les amèneraient directement à chez-elle.

Xocarès la regardait les bras croisés sur son torse, il était mécontent et cela se voyait à ses sourcils froncés. Il cria sur la jeune femme en lui expliquant qu'ils ne pourraient pas accueillir toute la misère du monde.

—Ils ont besoin de nous ! Rétorqua-t-elle en s'énervant. Je me fiche totalement que tu l'acceptes ou non, ils resterons là ! Ce sont des enfants et une personne âgée.

—Et alors ? Tu ne pourras pas toujours sauver tout le monde !

La jeune femme eut la sensation de prendre une claque en pleine figure. Quelques années auparavant, elle avait voulu le faire et pourtant, ça n'avait rien changé aux massacres qui étaient arrivés.

—Je ne peux pas les laisser sans logement, je ne suis pas comme toi, Xocarès, répondit-elle d'une voix tremblante. Ces enfants méritent de grandir avec tout ceux qu'ils ont besoin et cette dame a le droit de se reposer.

Elle lui tourna le dos en préférant guider les invités jusqu'à leurs chambres respectives, même si les enfants décidèrent de dormir ensemble. Sinélia expliqua à la vieille dame qu'elle pourrait participer aux tâches quotidiennes de la maison si elle le souhaitait.

—Merci, vous avez énormément fait pour nous, murmura la dame en lui serrant les mains, les yeux larmoyants. Grâce à vous, mes petits-enfants vont pouvoir grandir et continuer de voir le soleil se lever.

Une larme solitaire roula le long de sa joue, l'ange morte eut la sensation que son cœur se serrait à cette vision. Elle n'aurait jamais pu leur tourner le dos alors qu'ils avaient besoin d'aide. Personne ne méritait de vivre dans une telle pauvreté, d'en arriver à mourir de faim.

—Ils ne manqueront plus jamais de rien, lui promit la jeune femme. Vous avez des vêtements de rechange dans l'armoire. Dès demain, j'aimerais que nous allions faire les magasins pour en acheter aux petits.

—Avec plaisir, madame, lui répondit poliment la vieille dame avant de s'assoupir sur le lit.

Sinélia la recouvrit délicatement d'un drap avant de lui souhaiter une bonne nuit. Par la suite, elle passa devant la chambre des enfants encore éclairé alors elle rentra voir, les deux l'observaient du même lit.

—Vous voulez une histoire ? Demanda-t-elle en souriant.

Elle se rapprocha pour s'asseoir au pied du lit.

—Oui, murmura la petite fille d'une voix fluette.

La jeune femme souffla en fermant les yeux avant de les rouvrir. Elle commença lentement son récit :

—Il était une fois, une démone aux cheveux flamboyants, elle était liée à une légende où elle mènerait les peuples à la guerre contre un ennemi commun. Elle possédait une force inimaginable au point qu'elle-même ne savait pas ses limites, on racontait qu'un dragon aux couleurs d'automne restait à ses côtés comme si leurs âmes avaient été liées pour qu'il devienne son gardien. Elle sauva un loup et il lui voua allégeance. La démone rencontra un homme à l'âme aussi noir que le charbon mais pourtant, il réveilla elle des émotions incertaines. Plusieurs de ses proches étaient tombés au cours de son aventure mais le plus douloureux pour elle, fut le moment où son amie la trahit en lui ôtant la vie.

—Mais pourquoi a-t-elle fait ça ? Demanda la fillette en fronçant les sourcils. Elles étaient amies.

—Car la légende raconte qu'une enfant la tuerait, répondit Sinélia avant de répéter. « Les loups hurleront, le dragon veillera, la Phoenix s'éteindra tandis que la magie s'envolera mais une enfant la tuera, ce qui mènera à la fin de la magie. »

—Elle n'a donc pas survécu ? Questionna l'enfant.

—Je n'en ai aucune idée mais j'espère que si, murmura l'ange morte, en gardant espoir que ça soit bien le cas.

—Maman disait souvent que le destin n'avait jamais le plein pouvoir sur nous, déclara la fille en souriant.

—Elle avait bien raison, murmura l'ange morte. Maintenant, il est l'heure de dormir.

Sinélia les borda délicatement avant d'embrasser leurs fronts en leurs souhaitant une bonne nuit. Elle se retourna et vit Xocarès, il l'observait avec un sourire au coin des lèvres, une étincelle nouvelle illuminait son regard. Ils quittèrent la pièce ensemble avant que l'archer ne l'arrête.

—Si tu voulais des enfants, il fallait me le dire. Nous aurions pu trouver une solution ensemble, murmura-t-il en l'enlaçant.

—Peut-être mais on ne peut pas en avoir. Ces enfants avaient besoin de nous, Xocarès, je veux les aider à grandir comme on aurait dû le faire pour toi, annonça-t-elle en déposant sa main sur la joue du démon.

Ils s'observaient amoureusement l'un l'autre. Dans le regard de l'archer brillait une certaine tendresse envers la jeune femme.

—Si ça aurait été le cas, nous ne nous serons jamais rencontrés, murmura-t-il en déposant un baiser sur les lèvres pulpeuses de son apila.

Leurs fronts étaient appuyés l'un contre l'autre pendant que leurs corps se rapprochaient.

—Si seulement, nous aurions pu éviter cette guerre et de perdre des nôtres, souffla-t-elle d'une voix lasse tandis qu'une larme dévalait le long de sa joue.

—Mon apila, ils seront toujours auprès de toi, répondit-il en la réconfortant. Ils se sont aimés jusqu'au bout malgré les débuts chaotiques.

Sinélia le regarda et comprit que l'une de ses anciennes visions deviendrait réelle quoi qu'il arrive. Son père et Azuria allaient mourir sans qu'elle ne puisse y changer quoi que ce soit. D'un coup, elle fut ramené à la réalité face à Xocarès, il la regardait perdu.

—Qu'as-tu vu ? Demanda-t-il inquiet.

—Notre futur, répondit-elle en détournant le regard.

—Sinélia, que s'est-il passé ?

—J'apprends qu'une de mes visions est véritable et qu'elle va se réaliser, chuchota-t-elle terrifié.

Précipitamment, elle sortit de son lit pour se lever et marcher un peu, elle chancela mais ce n'était rien face aux émotions qu'elle vivait. Son cœur se comprimait dans sa poitrine, comment pouvait-elle avoir encore l'espoir de les sauver ?

L'archer la rattrapa par la hanche pour la soutenir, il se plaça à côté d'elle pour avancer en même temps.

—Je suis désolé pour cela, apila.

—Tu ne peux rien changer, il est inutile que tu t'excuses, rétorqua-t-elle.

Elle s'appuya contre la fenêtre en observant l'extérieur des Enfers, elle regarda le marché, quelques passants souriaient et marchandaient avec les vendeurs. Soudainement, elle se souvint d'une phrase qu'elle disait dans sa vision, elle parlait du passé de l'archer. Sinélia se retourna et observa la mâchoire carré du démon, où quelques mèches la recouvraient.

—Xocarès, que t'est-il arrivé ? Comment es-tu devenu archer d'élite ? Demanda-t-elle alors qu'il se crispait à cette question.

Il se détourna de la fenêtre pour s'appuyer contre le mûr à côté, il baissa la tête et préféra fixer ses bottes.

—Je n'étais qu'une petit garçon quand Kolaris m'a trouvé. Ma famille avait énormément de dettes car nous manquions d'argent, mon père était mort lors de l'attaque contre le clan des dragons, annonça-t-il. Mère essayait de travailler autant que possible mais arriva un temps, où la vieillesse ne lui permet plus d'être aussi rapide et agile dans son métier, elle était marcotik, elle créait constamment de nouvelles plantations que le palais souhaitait. Cependant, une de ses créations coûta la vie à l'un des gardes, ils finirent par la licencier.

Il croisa les bras sur son torse et souffla avant de continuer. Sinélia ressentait que c'était difficile pour lui de parler de cette partie sombre de son passé.

—Par la suite, tout s'effondra, elle n'avait plus aucun client et tout l'investissement qu'elle avait placé dans son entreprise la fit couler, avoua-t-il. Nous avions perdu les derniers siz qu'il nous restait. Ma mère promettait constamment qu'elle payerait sauf que cela était tout bonne impossible. Alors un jour, des soldats royaux sont arrivés en prenant le peu qu'il nous restait, ma sœur et moi, ajouta-t-il d'une voix tremblante.

Il pinça l'arrête de son nez, il retenait ses larmes et tenta de calmer ses tremblements.

—On nous a séparés l'un de l'autre. Je ne sais toujours pas où elle est pour te dire, ni comment elle est depuis toutes ces années, expliqua-t-il. On m'a amené dans les cachots souterrains où j'ai été fouetté à de multiples reprises, plusieurs cicatrices marquent maintenant mon dos et mon torse. Ils m'ont torturé de toutes les façons possibles, j'ai tué des personnes innocentes pour eux !

Il se retourna face au mûr et frappa son poing contre, il appuya sa tête dessus et laissa couler des larmes le long de ses joues.

—Enfin, ils ont décidé que je deviendrai un archer d'élite, j'arrivais à toucher chacune de mes cibles sans grande difficulté, rajouta-t-il d'une voix éteinte. Depuis, je suis toujours ici et sous le règne de la personne qui a brisé ma famille du début à la fin.

Sinélia le regarda à cet instant avec de la compréhension et de la tendresse envers ce cœur obscurci par la souffrance. Elle s'approcha de lui et releva délicatement son visage pour que leurs regards se croisent, elle l'embrassa avant de dire :

—Il est temps alors que tu te libères de tes chaînes, elles te maintiennent ici depuis trop longtemps.

Il la regarda totalement perdu quand la porte s'ouvrit brusquement, Kidéro rentra avec un sourire en coin.

—Tiens tiens, je me doutais bien qu'il se passait quelque chose ici pour que tu restes aussi longtemps, Xocarès.

Sinélia recula en se méfiant du soldat démon, il était rarement agréable au contraire, il prenait un certain plaisir à torturer les prisonniers.

—Que veux-tu, Kidéro ? Gronda l'archer.

—Je viens seulement prévenir ta petite princesse que l'entraînement reprend dès demain et qu'elle va devoir se battre. J'ai ordre de la blesser jusqu'à qu'elle soit inconsciente, ricana-t-il en lui faisant un clin d’œil, l'ange morte grimaça de dégoût.

—Kolaris a approuvé ça ? Qu'en pense son infirmière ? Rétorqua Xocarès en s'énervant.

Kidéro s'approcha de l'archer en bombant le torse face à la colère grandissante du démon.

—Oui et son infirmière n'a rien à redire des ordres du roi, tout comme toi, mon ami.

Le soldat quitta la pièce en ricanant face au visage colérique de l'archer ainsi que celui de la jeune femme, terrifiée.

Xocarès s'approcha de Sinélia et lui attrapa les mains avant que leurs nez ne se touchent.

—Je ne le laisserai pas te faire de mal, apila, murmura-t-il en appuyant son front contre le sien.

—Tu ne peux rien y faire, Xocarès. Ils veulent que je réalise la légende.

Il secoua la tête en refusant la réalité même si son cœur le savait. La jeune femme devrait tuer la démone, cela la détruirait même si elle tenterait de rester de marbre. Au fond elle, elle ne serait plus jamais la même.

—Tout ira bien, mon archer, le rassura-t-elle en allant s'allonger. Si ça ne te dérange pas, je vais dormir un peu avant que mon infirmière revienne.

Le démon l'embrassa délicatement avant de quitter la pièce en marchant d'un pas déterminé. Il devait agir pour protéger la jeune femme même si leur relation ne pourrait durer tant qu'il serait aux ordres de son ennemi.

Il prit son arc et monta dans une tour du château au-dessus des terrains d'entraînement, où étaient une grande partie des soldats démons. Il se mit en position à une fenêtre légèrement étroite, il écarta suffisamment ses pieds pour être sable et releva son arc déjà tendu. Il prépara une flèche et observa sa cible en détail, Kidéro. Il ne pouvait pas le laisser vivre car il risquerait de briser Sinélia.

Tout à coup, il encocha la flèche dans un sifflement assourdissant elle traversa rapidement la distance la séparant de sa cible. Elle se planta dans le crâne du soldat démon qui s'écroula inerte sur le sol, des hurlements retentir autour du corps pendant que l'archer fuyait à travers les chemins étroits et peu empruntés du château avec un sourire accroché aux lèvres.

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La calèche s'arrêta brusquement dans le désert de Vénusis. Une tempête de sable violente fouettait les chevaux, ils refusaient maintenant d'avancer, leurs pelages étaient recouvert de sang.

—Il faut qu'on se mette à l'abri avec la calèche, hurla un soldat avant que plusieurs graines de sables ne traversent les mailles de l'armure, en lui tranchant une artère. Il tomba au sol en se vidant de son sang sur le sable si clair.

Sakina observa autour d'elle à la recherche de la moindre grotte visible mais au loin, elle ne voyait pas grand-chose. Miodisos lui tendit la main pour la faire sortir pendant que les soldats se démenaient pour tenir les chevaux agités.

—Nous allons devoir abandonner la calèche et monter les montures, lui expliqua-t-il en grimaçant lorsque des grains de sables éraflèrent son visage.

Elle hocha la tête et le suivit, il lui donna une jument au pelage blanc et il grimpa sur un étalon noir. Quand on le voyait ainsi, on avait l'impression que son handicap n'existait pas et pourtant il s'y était seulement habitué aux files des années, ça lui avait permit de renforcer son ouïe, son odorat et son touché pour pouvoir se guider plus facilement. Quelques soldats montèrent les derniers chevaux restants puis ils repartirent aux galops en tentant de rejoindre Vénusis au plus tôt.

Quelques kilomètres plus loin, certains chevaux s'écroulèrent au sol à cause des entailles fait par la tempête de sable, tout comme certains soldats. Ils n'étaient plus que cinq et c'est à ce moment-là que par une chance quelconque, Miodisos remarqua une grotte à environ un kilomètre d'eux.

Quand ils furent arrivés, ils rentrèrent rapidement à l'intérieur de cet endroit humide mais qui leur suffirait le temps que la tempête se calme.

Les trois soldats s'occupèrent des chevaux tandis que Sakina leur disait qu'elle s'occuperait de la sienne. Elle sortit une bouteille d'eau de son sac, qu'elle vida dans une petite coupe pour l'abreuver calmement.

Miodisos assit écouté attentivement les bruits des pas de ses compagnons. Le chantonnement de la jeune femme atteignit ses oreilles et il se concentra dessus, elle devait être en train de soigner sa jument. Il pensa à la nuit qui les attendait vu les rafales de vent à l'extérieur, il songeait à ce qu'il pourrait arriver si le Ramhisa venait un peu plus tôt comme lors des jours précédents. N'ayant plus la calèche sous la main, ils devront trouver une autre solution pour contrôler cet être démoniaque. Cependant, tout allait bien pour la Phoenix, elle s'occupait tranquillement.

Un soldat approcha du roi elfe et prit la parole d'une voix légèrement chevrotante.

—La tempête s'intensifie, mon roi. On ne pourra pas continuer aujourd'hui, sinon nous risquerions de perdre la vie que ça soit la vôtre ou bien celle de votre invité.

—Alors nous allons nous faire un abri de fortune ici en prenant les selles des chevaux pour appuyer nos têtes, utiliser les tapis pour vous protéger de la fraîcheur de la nuit, ordonna Miodisos, détendu.

—Que faisons-nous de la Phoenix ? Demanda le soldat, inquiet.

—C'est mon affaire, je m'en occuperai, répondit le roi en continuant d'écouter la voix délicate de la jeune femme.

Les soldats retournèrent à leurs occupations pendant que Miodisos ne bougea pas du rocher, où il était assis à triturer ses doigts. Il essaya de trouver une solution à ce qui allait arriver mais c'était sans doute perdu d'avance, ils mourraient peut-être tous ici.

Il repensa à toutes ces années où la jeune femme était venue lui rendre visite avec Angalion, toutes les fois où il avait vu en elle, une sœur et une femme sur qui il pouvait compter. Il avait cru l'aimer à une certaine époque puis il avait entendu l'amour que se portait mutuellement le couple, ce qui lui avait fait réaliser que pour lui, elle ne serait qu'une sœur et rien d'autre. Il souhaitait tellement la protéger sauf que maintenant, elle devenait son ennemie, elle s'était perdue dans sa propre haine. Sa lumière s'évanouissait sous les ténèbres qui rongeaient son âme.

L'aveugle grimaça en sentant la douleur d'une blessure se réveiller au niveau de ses côtes. Il leva légèrement son haut en passant la main dessous pour sentir une entaille profonde du aux multiples grains de sables lors de la chevauché. Il resserra sa veste sur son poitrail pour camoufler la tache de sang naissant sur son vêtement royal.

—Miodisos, penses-tu que la tempête cessera bientôt ? Demanda une voix douce.

Il fut légèrement étourdie avant de reprendre ses esprits, un sourire rassurant étira ses lèvres.

—Nous en avons encore pour un certain temps avant que le soleil se couche. Elle devrait sans doute se calmer dans environ une heure, peut-être.

Sa blessure le tiraillait, il se raidit en contenant la douleur entre ses lèvres, il ne voulait pas exposer sa faiblesse aux autres.

—J'ai peur Miodisos, murmura-t-elle d'une voix chagrinée.

Elle s'était assise à côté de lui, en appuyant sa tête sur son épaule. Il pouvait sentir sa chaleur corporelle se propager dans son corps. Des milliers d'étincelles brûlaient dans les celles de l'elfe.

—Moi aussi, Sakina.

Il entendit la respiration de la jeune femme devenir régulière et plus lente. Miodisos comprenait qu'elle venait de s'endormir et c'est à ce moment-là, qu'il vit la brume obscure apparaître à nouveau dans son aura, le roi fut inquiet mais il se doutait que ça finirait par arriver, il aurait juste espérer avoir le temps pour l'aider à combattre cette créature.

Les soldats venaient de se coucher aussi, l'un d'eux montait la garde dans un roulement constant tout le long de la nuit. Miodisos n'arrivait pas à dormir, il déposa délicatement la tête de la jeune femme sur la salle à côté de lui puis il sortit de la grotte pour sentir le vent caressait son visage et l'odeur de la nuit. Il voulait profiter de ces derniers instants pour se rappeler les fois où Sakina lui avait décrit le ciel.

—Miodisos, ce soir le ciel est étoilé ! Si seulement, tu pouvais voir comme c'est beau, s'écria-t-elle enjouée.

Il voulait l'imaginer comme elle lui avait décrit en détails. Il repensa à ce qu'il laissait derrière-lui, un royaume sans descendant, il était maudit depuis le début. Il perdait ses proches petit à petit en le laissant seul à bout de force, il avait toujours combattu pour son peuple, pour l'égalité au point de combattre dans chacune des guerres, de relever son peuple à chaque fois. Il fut surnommé « le roi aveugle », ses ennemies avaient tous cru que c'était un handicap pour lui mais ce ne fut pas le cas une seule seconde. Il combattait à merveille contre ses adversaires, il avait toujours dit que si une vie était à sacrifier ce serait la sienne car son peuple le valait.

Il entendit derrière lui un grognement suivi par des hurlements et il sut que la fin était proche.

Un coup de griffe brutale l'envoya contre une paroi de la grotte. Le soldat de garde était toujours en vie et ayant entendu le bruit, il se précipita au côté de son roi avant que celui-ci lui ordonne :

—Prends un cheval et fuis le plus loin possible d'ici sans regarder une seule fois derrière-toi, est-ce clair ?

—Mais mon roi... Vous devez...

—Est-ce clair, soldat ? Hurla-t-il en direction du jeune homme.

Le guerrier hocha la tête avant de fuir vers un des chevaux. Le Ramhisa courra à sa poursuite mais avant que la créature ne l'atteigne, Miodisos s'interposa et contra de sa lame les crocs de la créature.

—C'est entre toi et moi, Sakina, déclara-t-il, sûr de lui.

Un nouveau coup le frappa de plein fouet en brisant certaines de ses côtes, avant qu'il ne s'écrase contre le sol. Il se releva difficilement, son corps tremblait de toute part mais il se prépara à combattre encore. Le Ramhisa tenta un coup de griffe qui rencontra l'épée du roi dans un fracas assourdissant, les deux y mettaient toutes leurs forces jusqu'à que leurs armes ne cèdent.

Ils s'éloignèrent l'un de l'autre en se tournant autour prêts à agir à la moindre occasion. L'animal grogna tandis que de la bave coulait le long de ses babines, il bondit d'un coup pour atteindre le roi qui l'évita de justesse, pourtant il fut toucher par un coup de griffe, une entaille profonde traversait maintenant son dos, il ressentait une douleur atroce même à la poitrine. Cette fois-ci, il eut du mal à se relever, il utilise même son épée comme appui tandis que son corps tanguait dangereusement.

—Sakina, reprend le contrôle !

Le Ramhisa hurla avant d'attaquer à nouveau, il le chargea de tout son poids et l'elfe ne put l'éviter, il glissa sur plusieurs mètres en s'écorchant les bras et le visage. Il était sur le vent et crachait du sang, alors qu'il essayait de se remettre debout.

—Sakina, souviens-toi de nous, de ce que nous avons vécu, hurla-t-il en tremblant. Combats l'obscurité !

Il se remit sur ses jambes avec difficulté et brandit son épée pour contrer un coup de griffe puis une morsure, qui aurait pu lui être fatale. Son épée était dans la gueule de la bête, elle possédait bien plus de force que l'elfe, il épuisait petit à petit.

—Tu es un Phoenix, un être de lumière et tu seras toujours ma petite sœur dans mon cœur, déclara-t-il en cédant.

Il chuta à genoux pendant que les crocs de l'animal lui tranchèrent la chair au torse, des larmes coulaient le long du visage angélique de l'elfe.

Le Ramhisa lâcha le corps de Miodisos, il tomba contre le sol mourant pendant que la bête faisait place à nouveau, à une jeune femme horrifiée et en pleurs. Elle hurla, l'écho de la grotte porta sa voix jusqu'à l'infini du désert.

—Miodisos, reste avec moi, le supplia-t-elle en tentant de compresser les nombreuses plaies profondes. Je suis tellement désolé ! Je croyais que j'arriverai à le gérer mais...

—Ce n'est rien, souffla-t-il difficilement, il tendit la main pour toucher une dernière fois le visage de la jeune femme. Tu es quelqu'un de... bien Saki...

Il lâcha son dernier souffle en utilisant ses dernières forces. Son corps s'affaissa dans les bras de la Phoenix, elle balança Miodisos en le suppliant de ne pas l'abandonner, de ne pas la laisser. Ses larmes coulaient le long de ses joues pour tomber sur le visage éteint de son ami, elle ferma ses yeux mais garda sa main dans la sienne. Tout était de sa faute, elle venait de tuer des innocents, le sang de ses alliés tachait ses mains.

—Pourquoi Miodisos ? Pourquoi, hurla-t-elle anéantie.

Elle frappa ses poings à côté du corps. Sa gorge se serra et sa voix se brisa.

—Je suis tellement désolé...

Tout à coup, submergé par les émotions, le démon reprit le dessus sur elle. Sakina disparut avec un air apeuré tandis que la créature apparaissait à nouveau.

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