J2/30 : Tharok
Tharok sortit de sa demeure isolée, au milieu d’une forêt dense. Elle était faite de rustique pierre, accordée à sa taille et ses besoins ni plus ni moins, remplie du confort et des commodités essentielles.
C’était un grand homme bourru, une grosse barbe rousse aux éclats dorés, tout comme ses cheveux, le visage dégagé par deux tresses. Si on devait le décrire, on pourrait dire : un nain géant, il n’était pas loin des deux mètres, style viking.
Il s’installa dehors pour déguster son café bien corsé, plus noir que le désespoir.
La chaleur de la boisson le détendit. Il se relâcha sur le dossier de sa grosse chaise en bois, faite par lui-même avec soin. Il observa alors la forêt comme à son habitude, traversée par les doux rayons du soleil du matin.
C’est là qu’il aperçut une lumière différente, plus orangée, plus étincelante. Il se dit qu’il irait voir. Rien ne pressait, il était ici pour être tranquille, loin de la populace, ce n’était pas une lumière scintillante qui allait bousculer son petit déjeuner. Il savoura alors une grosse tranche de pain avec de la confiture de mûre, qu’il avait cueillie et confectionnée.
Il vivait en autarcie.
Puis le moment vint, il avança vers cette lumière, elle était encore plus visible, et semblait magique, sans les rayons du soleil.
Une hache. Une hache qui brillait divinement.
Il resta un moment devant à l’observer.
Il remarqua une inscription en vieux norrois incrustée sur le manche :
"Þeir er mega sjá mik, eru ætlaðir at vera hetjur, því at þeir hafa hreint hjarta ok friðsama sál." *
Il comprit les mots même sans connaître la langue.
Il la prit en main, le poids et l’équilibre étaient parfaits. Il la mania avec grâce.
« Cœur pur, âme en paix, oui. Héros, jamais.
Ils doivent apprendre à se sauver eux-mêmes.
Je suis ici par choix, j’y resterai, entends-tu ?
Toi qui as déposé cette arme ici pour moi.
Tu comprends, n’est-ce pas ? Reprends-la, si nécessaire, merci pour l’offre, mais je n’aiderai pas ces misérables destructeurs. » dit-il d’une voix si ancrée qu’elle venait du plus profond de son être.
Personne ne répondit, la hache était toujours en sa possession.
Parfait, pensa-t-il, il avait quelques contacts avec le monde extérieur, il pourrait utiliser l’arme pour couper et vendre du bois, dans le respect de la forêt.
Cette forêt qu’il chérissait tant.
Cela mettrait « du beurre dans les épinards », comme on dit.
Et puis avec une arme comme ça, il aurait de quoi défendre sa forêt, bien que rien que par sa présence, personne n’osait vraiment s’y aventurer. Mais les animaux, la nature, Elle, dans cet espace pouvait se développer à sa guise.
Ainsi Tharok devint le bûcheron à la hache magique.
Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’il était un héros, pas des Hommes non, mais de cette forêt.
— C’est fait ?
— Oui.
— A-t-il compris ?
— Il n’en avait pas besoin, il « est ».
— Bien, cherchons le prochain.
* Ceux qui peuvent me voir sont destinés à être héros, car ils ont le cœur pur et l’âme en paix.
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