Chapitre 97 : Tous les matins du monde

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Blottie dans ses bras, je tergiversais sans relâche. J’aurais dû savourer la douceur de ce réveil post-perte-de-virginité. Tout avait été merveilleux et mes deux orgasmes matinaux m’avaient encore comblée, et pourtant... Pourtant... j’avais une question à lui poser, même si je craignais la réponse. Adam ne pouvait pas y échapper.

— Adam...

— Hum ?

Son grognement d’outre-tombe m’indiqua qu’il n’aurait pas été contre un peu de rab de sommeil. Mais je devais savoir, je ne pouvais pas continuer à me torturer mentalement ainsi.

— Toi et moi, c’est...

— C’est ?

— Officiel ?

— Officiel, comment ça ?

— On a fait l’amour.

— Oui, je te le confirme, s’esclaffa-t-il, on a officiellement fait l’amour. J’espère que tu ne regrettes pas.

— Bien sûr que non, tu le sais très bien. Arrête de me le demander.

— Ok... alors, quoi ?

J’appréciai le fait qu’il n’essaie pas d’échapper à mon interrogatoire matinal, qu’il se montre à l’écoute. Je le sentais très différent des autres fois. Il semblait plus calme, plus apaisé, et surtout, plus sûr de lui. Il n’avait plus cet air aussi perturbé, toujours sur le qui-vive, prêt à détaler. En même temps, nous étions chez lui. Il était en quelque sorte coincé. Pauvre de lui ! S’il savait ce qui l’attendait si je lâchais les chevaux et commençais à lui dire tout ce qu’il me passait par la tête ! Il prendrait à coups sûrs ses jambes à son cou pour ne plus jamais me parler.

Mais non, il ne savait pas et il attendait patiemment que j’aille au fond de mes pensées.

— Alors, heu... qui suis-je désormais pour toi ?

— Anna...

Ah, je me disais bien aussi. Son ton agacé était révélateur. Il ne désirait pas du tout avoir cette conversation-là, mais se débiner n’étant pas une option que j’autoriserai. Il allait devoir jouer franc jeu.

— Adam...

— Tu veux que je te dise quoi ? souffla-t-il dans mon oreille. Je ne comprends pas.

— Tu ne comprends pas où tu fais semblant de ne pas comprendre ?

— Parle clairement.

— Lis entre les lignes.

Il rit, amusé de me faire tourner en bourrique.

— Well, que tu es têtue par moments ! Je ne sais pas exactement ce qui tu attends de moi, mais je ne peux pas m’afficher avec toi. C’est hors de question.

— Ah bah au moins, c’est clair. Super... Tu vas me faire croire que tu ne sais pas ce que j’attends de toi ? Mais je te l’ai dit hier soir, Adam ! Avant qu’on fasse l’amour ! Je t’ai dit que je voulais une histoire normale, avec un type normal !

Énervée, je commençai à me lever pour sortir du lit. J’étais horriblement vexée de m’entendre dire ça après tout ce que l’on avait partagé. J’avais raison, il allait encore me snober. Pourquoi avais-je été aussi naïve et crédule ? Ce type ne changerait jamais !

Voyant que je voulais m’échapper et prendre la poudre d’escampette, il me retint in extremis, me saisissant de son corps qui enserra fortement le mien.

— Nan, nan, ma princesse. Tu restes là. Laisse-moi terminer, s’il te plaît.

Ma princesse ?

Ok, il marquait un point. Je ne bougeais plus, l’oreille aux aguets.

— Il y a une vraie raison pour laquelle nous ne pouvons pas nous afficher ensemble.

Aucune ne me vint à l’esprit. Aucune ne me semblait valable. Quelle excuse tordue allait-il encore me pondre ? Je recommençai à bouillir, petite marmite sous tension prête à exploser.

— Je n’ai pas envie que tu me dises que toi et moi nous ne sommes rien l’un pour l’autre.

— Je ne vais pas dire ça, Anna. Mais tu sais très bien pourquoi on ne peut pas s’afficher tous les deux.

— Me parle pas de ton foutu pacte à la con, sinon je t’étripes.

— Non, c’est plus grave que ça, ma belle. Tu es mineure.

Ma belle ? Ma princesse ?

Eh bien ! Deux possessifs en deux phrases, il se contredisait tout seul !

Néanmoins, son explication me parut tirée par les cheveux. J’étais mineure ? Il venait de s’en rendre compte ou bien ? Parce que, cette fois, ce n’était pas une information que je lui avais cachée. Il l’avait toujours su. Mais mon âge n’avait jamais été sujet à controverse jusqu’à présent, surtout depuis le jour où il avait reconnu que je n’étais plus une enfant, deux ans auparavant.

— Dix-sept ans, c’est pas être mineure, arguai-je. C’est être presque majeure.

— Aux yeux de la loi, ce genre d’approximation n’est guère utile devant un juge. Tu es mineure, j’ai vingt-deux ans, fin de l’histoire.

Fin de l’histoire, heu... ? Je n’étais pas convaincue par le choix peu judicieux de ces mots mais je comprenais l’idée. Si j’étais dans le flou total, lui n’était pas sujet à quelconque tergiversation. Les choses avaient l’air très claires pour lui. Claires et limpides comme de l’eau de roche. J’en conçus aussitôt une agitation intérieure proche du remous d’un volcan en ébullition.

— Donc, tu vas m’ignorer pendant un an encore ? supposai-je, outrée. Comme si tu ne me connaissais pas...

— Le sens de la mesure, Anna, ça te parle ? Je ne vais pas t’ignorer ! Il y a un monde entre ignorer une personne et lui prendre la bouche en public. Pour le moment, je refuse de m’afficher avec toi, c’est tout. Cela n’a rien à voir avec ce que j’attends pour la suite, juste ce que je peux faire pour le moment.

Ce qu’il attendait pour la suite ? Il envisageait une suite ?

En voilà des paroles pleines de bon sens soudainement.

— Ok, alors nous deux, ça va ressembler à quoi, à présent ? Je ne comprends pas.

— À ce à quoi ça ressemblait avant.

— Mais avant on n’était pas ensemble Adam, répliquai-je, énervée. Avant, je n’étais rien pour toi, tu ne me calculais pas ! C’est à ça que tu veux retourner ?

— Tu n’as jamais été rien pour moi, Anna. Si c’est ce que tu penses, tu es très loin du compte. Ce n’est pas parce que j’ai mis du temps à te montrer mes vrais sentiments pour toi, qu’ils n’étaient pas en moi.

Je buguai.

Des sentiments, really ???












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