Chapitre 10 : Une lumière dans la nuit

7 minutes de lecture

Hey :D Nouveau chapitre ! Adrick continue de s'attirer des emmerdes dans les terres de Tyrnformen ! Si vous avez lu Lazare, le personnage présenté aujourd'hui ne devrait pas vous être inconnu :3

LE CHANT DE L'OISEAU SOLITAIRE

Chapitre 10 : Une lumière dans la nuit

Les premiers rayons du soleil illuminèrent ma grotte sombre avec violence, sans aucune pitié pour le sommeil que j’avais durement fini par gagner. Mes muscles ankylosés eurent bien du mal à me porter et je restai un long moment assis par terre à gémir comme un enfant. Mon dos me faisait toujours autant souffrir, et je remarquais, en passant la main sur mes plaies, que celles-ci étaient chaudes et gonflées. Il ne manquait plus à mon malheur qu’une infection pour venir m’achever. Je patentais deux heures encore avant de daigner me lever pour reprendre la route.

Mon ventre gargouilla avec force. Depuis combien de temps n’avais-je pas eu faim ? Je ne m’en souvenais même pas. Je pris quelques minutes pour fouiller les buissons, à la recherche de baies. J’avalais goulûment quelques groseilles avant de reprendre la marche, vers ce que je pensais être le nord. A vrai dire, je n’en avais aucune idée. Les arbres se ressemblaient tous et aucune direction ne me semblait meilleure qu’une autre.

Après une demi-journée d’errance, j’avais déjà l’impression de tourner en rond et de perdre l’esprit. Tout était vert : le sol, les arbres, les buissons, et je n’avais aucun moyen de pouvoir me repérer avec la lumière du soleil tant les feuilles étaient impénétrables. A cela s’ajouta bientôt la chaleur et les moustiques qui m’encerclait et m’étouffait sans répit. En seulement quelques heures, je me mis à haïr cette forêt de toute mon âme.

La soirée arriva plus vite que je ne l’aurais crû, et j’eus l’impression de ne pas avoir avancé plus. Mes pieds me faisait mal et les bruits de la forêt devinrent plus agressifs. Les arbres empêchaient toute visibilité, aucun rayon de lune ne filtrait entre les feuilles épaisses. Il fallait que je trouve un abri pour la nuit, mais je ne trouvais pas de grotte, de terrier où me cacher. Tout était ténèbres, bruits et peur. Perdu dans le noir, le moindre son me faisait sursauter, le moindre grattement dans les buissons me forçait à courir droit devant moi, parfois dans une direction que je n’étais pas censé emprunté.

Et puis, au loin, je remarquai une petite lueur, comme celle d’un feu de camp. J’hésitais un moment à m’engager dans cette direction, de peur de m’attirer de nouveaux ennuis. Qui pouvait bien passer la nuit au milieu des bois, lampe allumée, qui plus est ? Tout le monde savait qu’il ne fallait jamais signaler sa présence dans ces lieux. Ici, c’était la nature qui régnait. Les hommes avait autant de pouvoir ici que lorsqu’ils vivaient dans les cavernes. Nous disons souvent que la loi de la nature appartient aux plus forts, eh bien, dans cette partie du monde, l’Homme ne l’était clairement pas. Allumer un feu ici, c’était un appel à toutes les créatures sauvages aux alentours, et je n’avais pas franchement envie de me retrouver de nouveau dans les griffes d’un autre prédateur.

Mais… Je suppose que le destin en décida autrement. Alors que je me tenais camouflé derrière deux buissons, la pointe d’une flèche se colla à l’exact milieu de mes deux omoplates. Mes yeux s’écarquillèrent de terreur et je lâchai immédiatement tout ce que je tenais pour lever les mains bien en évidence.

“Pi cuyhib qet. Ryo îvit-wuyt ?”

Cette langue inconnue, encore une fois. Je lançai un regard rapide vers l’homme au bout de l’arc. Très grand et fin, son visage était barré par une grosse cicatrice récente. Deux oreilles pointues dépassaient de ses cheveux noirs mi-longs. Dès qu’il s’aperçut que je n’étais qu’un gamin, il baissa son arc et se radoucit. Je n’avais encore jamais vu d’elfe de ma vie, mais je savais que c’en était un. Une aura étrange se dégageait de lui, à la fois ancienne et magique.

“Du calme, gamin, finit-il par dire dans ma langue. Je ne te veux pas de mal. Tu m’as fait peur. Comment est-ce que tu t’appelles ?”

J’ouvris la bouche, avant de la refermer, incapable de prononcer un mot. Mon coeur tambourinait dans ma poitrine, je me remettai difficilement de la surprise. L’elfe me tendit une main que je finis par prendre. Il ne paraissait pas agressif. Je pris quelques secondes pour prendre une grande inspiration avant de lui répondre.

“Je m’appelle Adrick.

— Iphranir, répondit l’homme, en s’inclinant légèrement.”

Il avança vers le feu et me fit signe de le suivre. Trop heureux d’avoir trouvé quelqu’un qui paraissait savoir ce qu’il faisait là, je le suivis avec empressement. Une jeune fille se trouvait près du feu, l’air inquiet. Dès qu’elle me vit sortir des fourrés, elle se cacha légèrement derrière ce que je compris rapidement être son père. Elle avait l’air plus jeune que moi, mais je savais aussi que les elfes ne vieillissaient pas beaucoup et qu’il était fort probable qu’elle ait trois fois mon âge.

“Installe-toi, me dit Iphranir. On a un peu de viande sur le feu, tu as l’air d’avoir faim.”

Puisqu’il s’asseyait près des bûches, j’en fis de même. La petite elfe resta près de son père, à moitié camouflée dans l’obscurité. Elle avait abandonné un collier de fleurs inachevé derrière elle, de toute évidence impressionnée par ma présence. Elle était très belle, pour sûr, et le regard insistant que je portais alors sur son visage ne devait pas aider à la mettre plus à l’aise.

Iphranir posa un bol devant moi et y déposa délicatement une louche énorme de ragoût de lapin. Tout d’abord méfiant vis à vis de la consistance du plat, une sorte de soupe pâteuse dans laquelle flottait des morceaux de viande, l’odeur raffinée du plat ne tarda pas à me convaincre de le dévorer. Je vidai le réceptacle en seulement quelques minutes, réalisant sur le coup à quel point manger m’avait manqué.

Je remerciai de tout coeur mon hôte, tout en lorgnant sur le fond du plat, qu’il ne tarda pas à verser dans mon bol, amusé. La jeune fille souriait également, plus discrète.

“Qu’est-ce que tu fais seul dans les bois ? demanda l’elfe. Ce n’est pas un endroit pour les humains.

— C’est une longue histoire… J’ai été enlevé par un griffon.

— Ah ! cria Iphranir. C’est certainement celui que nous cherchons. Il a pris plusieurs des nôtres également. Sais-tu où est son nid ?

— Détruit, répondis-je d’une voix sombre. Un reptile gigantesque a tué les jeunes et leur mère. J’ai eu beaucoup de chance de pouvoir m’en tirer vivant et sans trop de dégâts.”

La fille d’Iphranir parut impressionnée. Je me sentis pris d’une fierté mal placée et bombai inconsciemment un peu le torse, comme Armand le faisait lorsqu’il s’emparait de la plus grosse part des trésors sous prétexte qu’il avait fait tout le travail. Son souvenir raviva une pointe de douleur au fond de moi. Les années avaient beau passé, je ne parvenais toujours pas à l’oublier. Il secoua la tête pour arrêter d’y penser.

“Et vous ? les interrogeai-je. Vous êtes chasseurs ?”

Iphranir éclata d’un grand rire gras, qui m’arracha un haussement de sourcil. J’ignorais totalement ce que je pouvais avoir dit d’aussi tordant. Son attitude était méprisante, je pouvais le sentir : il se moquait de moi.

“Je ne suis pas un vulgaire chasseur, dit-il avec grandiloquence. Je suis le chef de l’escadron d’élite des maraudeurs de Lothariel. Il s’agit simplement de mon jour de congé.”

Je vis à son regard qu’il s’attendait à ce que je sois impressionné, mais, ne connaissant rien à la société elfe, je ne réussis pas à saisir les nuances de ce rang. Je supposais qu’il s’agissait de l’équivalent de nos nobles, bien que je n’avais jamais vu de riches camper dans les bois comme les vagabonds. Iphranir passa une main pleine de fierté dans la chevelure blonde de sa fille.

“Lorette prendra ma suite lorsque je serais trop vieux pour parcourir la forêt.

— Père, vous n’avez même pas deux siècles, répondit la jeune fille en riant.”

Sa voix fluette me paralysa sur place. Les battements de mon coeur accélérèrent pour une raison qui m’échappait. Ses deux yeux d’un bleu aussi beau que la nuit étaient parfaitement accordés à sa peau pâle. Ses fines lèvres s’étiraient dans un fin sourire qui laissait entrevoir des dents immaculées. Elle était parfaite, tellement parfaite, que je la présentais inatteignable. Mon ventre se tordait sous le poids d’une douleur inconnue et je ne pus retenir bien longtemps la bouffée de chaleur qui me monta à la tête. Je me sentais défaillir d’amour pour cette fille que je ne connaissais que depuis quelques secondes. J’en étais persuadé, elle aussi était sous mon charme.

“Lorette… murmurai-je. C’est joli comme prénom.

— Dans notre langue, cela signifie “Lumière dans la nuit”, expliqua son père.”

Elle portait bien son nom, me dis-je à moi-même. En seulement quelques minutes, je venais de retrouver un but à ma vie : je devais séduire Lorette et fonder une famille avec elle.

Il se trouvait, en réalité, que je venais de commettre une des plus grosses erreurs de ma vie.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Myfanwi ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0