Chapitre 12 - Partie 3

3 minutes de lecture

  Mon cœur battait si fort que j'avais l'impression de l'entendre résonner entre les murs et ma respiration semblait de moins en moins régulière à chaque mètre parcouru, mais je ne ralentis pas une seule seconde, évoluant dans cette demeure le plus silencieusement possible. Mes étranges chaussures m'y aidèrent beaucoup : elles ne produisaient pas le moindre son. Arrivée devant la chambre, au bout du corridor, je bifurquai à nouveau vers la droite, seul choix possible.

  Ce couloir était tout aussi riche que celui que je venais de traverser : de nombreux tableau de l’Ancien Temps et de notre époque ornaient les murs. Au bout d'un moment, des colonnes de présentation en marbre s'ajoutèrent à la décoration. À l'instar de celles d'un musée, elles exposaient des objets et étaient accompagné de cartels en or pour les identifier et savoir à quoi ils servaient. J'eus de nouveau les larmes aux yeux en voyant toute ces reliques. Irrité par cette réaction, je cillai plusieurs fois pour les chasser et accélérai le pas. Que m’arrivait-il à la fin ? Ce n’était pas la première fois que j’en voyais et cela ne m’était jamais arrivé auparavant. Étaient-ce qu’elles étaient aussi nombreuses ?

  Je chassai ces interrogations de mon esprit pour me focaliser sur mon avancée : je venais de trouver un escalier. Je m'y engageai sans attendre tout en jetant des coups d'œil à chaque étage. Contrairement à celui où nous étions enfermées, ceux-là étaient complètement vides et plongés dans l'obscurité. Les rayons du soleil qui parvenaient à atteindre le manoir malgré la végétation dense se retrouvaient bloqués par les planches qui calfeutraient les fenêtres. Cela créait une atmosphère sinistre qui me fit froid dans le dos. Depuis combien de temps personne n'avait vécu ici ? Si l'Horloger n'avait pas pris la peine de les dépoussiérer et de les orner, cela signifiait qu'il n'y mettait jamais les pieds. Il préférait rester au troisième étage, au milieu de sa collection.

  Une fois au rez-de-chaussée, l'idée de déblayer une fenêtre me traversa l'esprit mais je l'oubliai rapidement. Les planches étaient très épaisses ; je n'avais pas la force nécessaire et même si c'était le cas, cela aurait été trop bruyant. Aussi partis-je à la recherche du hall d'un pas encore plus pressant qu'au début. J'essayai de suivre le même chemin qu'à l'allée, en sens inverse, mais l’agencement des couloirs était différent de celui du troisième étage. Cela ne me facilita pas la tâche. Au bout de plusieurs minutes, je parvins malgré tout à accéder à l’entrée. Je ne pus contenir mon soulagement et courus vers la double porte altérée par le temps.

  Mon cœur manqua un battement lorsque je fus assez proche pour remarquer le nombre de systèmes de fermeture qu'elle possédait : trois serrures et deux verrous. J'ouvris en vitesse ces derniers, puis avisai les autres. Il me restait entre dix et quinze minutes pour finir tout ce que j'avais à faire. Je n'aurais jamais le temps. Devais-je... Non. Je ne savais pas si j'en étais capable, cela risquait de m'épuiser pour rien.

  Je pris mon visage entre mes mains et inspirai profondément pour apaiser mon stress grandissant. Je pouvais le faire si je concevrais mon calme. Armée de cette nouvelle détermination, je m'accroupis devant la première serrure, y enserrai mes épingles et mes doigts prirent la relève. Ils les bougèrent avec minutie dans la fente jusqu'à ce qu'un cliquetis retentisse, puis s’attaquèrent à la seconde et, enfin, à la troisième.

  Lorsque ce dernier loquet céda, le temps n'eut soudain plus aucune importance : j'avais réussi. Ma main se posa sur la poignée et, le souffle coupé, j'ouvris la porte.

  Une larme roula sur mes joues, tandis qu’un immense sourire fleurissait sur mes lèvres.

  Un vent frais s'engouffrait dans le hall et caressait ma peau. L'extérieur, cette forêt dense que je pouvais seulement apercevoir à travers les fenêtres, me tendait les bras, comme une vieille amie que j'aurais retrouvée après des années de séparation. Malgré la faible luminosité qui y régnait, jamais un lieu ne m'avait semblé si accueillant. Il me suffisait de faire un pas pour qu'elle me libère des griffes de mon ravisseur. Et Dame Nature, je désirais tant le faire ! Ne pas me retourner, rejoindre ces bois, les laisser me rassurer et me protéger, oublier ce qu'il s'était passé dans ce manoir... Mais je ne pouvais pas partir seule, abandonner les autres entre les mains de ce monstre.

  La gorge nouée, j'admirai une dernière fois cette forêt, reflet de liberté, puis refermai la porte.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Asa No ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0