Chapitre 40

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Dans cette forêt, au beau milieu de nulle part, la vie semblait belle. Loin de tous les mensonges, loin de toute la misère, c'était là où je me sentais le mieux.

Je m'apprêtais à renter à Paris, à cette vile qui n'avait fait que me détruire, qui n'avait fait que me nuire. Elle était pour moi synonyme de souffrance et  rien d'autre. Je ne voulais pas y retourner, mais je n'avais guère le choix. 

Je sentais que ma place était ici, dans cette forêt, sous cet arbre, je me sentais bien, je me sentais libre. J'avais l'impression que j'étais comme ce prisonnier qui avait passé toute sa vie enfermé dans un cachot, et puis un jour, le voilà qui sort et qui découvre le reste du monde. 

Noha se réveilla et me dit:

- Ne me dis pas que tu n'as pas dormi.

- Je n'avais pas sommeil.

- Dis plutôt que tu avais peur.

- On ne sait jamais. Peut-être qu'il voudra s'en prendre à nous. Mieux vaut être prudent.

À ma grande surprise, Noha me demanda:

- Tu veux vraiment retourner à Paris?

- Oui, je n'ai pas trop le choix.

- Dans la vie, on a toujours le choix. Si tu ne veux pas y retourner, eh bien, ne le fait pas.

- Avant tout, je dois retrouver Joséphine.

- Et après?

- Je n'en sais trop rien.

Elle resta silencieuse un moment avant de dire:

- Toi, qu'est-ce que tu veux?

- Eh bien, je ne sais....

- Non, tu dois le savoir. C'est ta vie, donc fixe-toi un but précis, ait un rêve et tu verras que tout te semblera différent.

- Je ne peux pas. Je dois retrouver Edgar pour venger ma mère.

- Tu crois vraiment que tu pourras le battre? 

- Il faut au moins que j'essaye.

- Tu crois vraiment que ton seul but dans cette vie c'est de tuer quelqu'un pour venger ta mère. Il faut que tu te détaches de cette idée, et que tu profites de ta vie, à toi. Je sais très bien que c'est dur à surmonter, mais il le faut. À ton avis, pourquoi est-ce que je n'ai pas essayé de tuer Craig? Pourquoi je n'ai même pas essayé de venger ma mère? Je vais te dire pourquoi. Parce que j'ai enfin pu ouvrir les yeux et regarder la vérité en face. Le tuer ne la fera jamais revenir. Elle est morte et je dois l'accepter, et je te conseille d'en faire autant.

Elle se leva et alla rejoindre Maître Gloderhel. Elle commença à discuter avec lui, l'air de rien, alors que moi, je restai plantée là, ne sachant quoi faire, ne sachant que penser.

Ce que venait de me dire Noha m'avait  bouleversé à un point inimaginable. Depuis que j'avais découvert la vérité sur ma mère, je m'étais juré de la venger, je m'étais juré de mettre un terme à la vie de son meurtrier. Je n'avais pas pensé une seconde à abandonner ce but pour profiter de ma vie, de ma vie à moi. Mais, je ne savais pas pourquoi je ne pouvais plus m'en détacher. C'était devenu quelque chose de capitale, de vitale dans mon existence.

Devrais-je abandonner? Voici la question qui trottait dans mon esprit. 

Nous nous mîmes en route vers Ambra. Une fois arrivés devant les portes du village, Maître Gloderhel me dit:

- Vous allez vraiment y entrer?

- Oui.

- Et toute seule?

- Oui, Noha ne peut pas n'accompagner.

- Nous vous attendrons ici. Tachez d'être prudente.

Je savais très bien qu'il faisait allusion à Craig, mais je m'abstins de lui demander des explications. Je ne savais pas à quel jeu il jouait, mais j'étais déterminée à le découvrir.

Je franchis les portes, et commençais à chercher dans les maisons dont les portes étaient grandes ouvertes.J'essayais de ne pas attirer l'attention sur moi, en marchant normalement. Je finis par trouver Joséphine dans l'une des maisons. Elle était assise sur un lit, et lisait un livre.

Je me précipitais vers elle en lui disant:

- Enfin je te retrouve!! Viens vite!!

- Où ça?

- Il faut que tu sortes de ce village, et maintenant.

- Pourquoi je ferais ça?

- Joséphine, il faut y aller. Les autres nous attendent.

- Quels autres? Et au fait, qui êtes-vous? Que me voulez-vous?

- Qui je suis? Mais enfin, Joséphine, tu sais très bien qui je suis. Ce n'est pas le moment pour plaisanter, il faut se dépêcher.

- Je suis très sérieuse. Je ne peux pas vous accompagner puisque je ne vous connais pas. Partez ou j'appelle Kali.

- Kali?

- C'est une femme qui m'a retrouvé et qui m'a soigné. Je lui dois beaucoup.

- Écoute, Joséphine, tu ne peux pas rester ici, il faut qu'on parte!!

- Arrêtez, je sais très bien que vous me voulez du mal, je sais très bien que vous êtes comme eux. Sortez d'ici!!

- Joséphine mais enfin à quoi tu joues!! Tu ne me reconnais pas?

- Puisque je vous dis que je ne vous ai jamais vu. Sortez d'ici!!

- Mais Joséphine, tu ne....

- Kali!!! Kali!! Viens vite, je t'en prie!!

- Non, s'il te plaît, ne fais pas ça!!

- Je vous avais prévenu.

Une jeune femme entra dans la pièce, et en me voyant, s'écria:

- Oh mon dieu!!! Le monstre est de retour!! Appelez les gardes!! 

Je me rappelais avoir déjà vu cette femme. Elle était avec Noha, et m'avait reconnu. Plusieurs femmes entrèrent et se mirent à crier et à hurler. 

Avant que je ne puisse quitter la pièce, une main  me tint le bras. Je me retournai, c'était le garde à l'armure blanche. Il me dit, d'un ton ferme:

- La bête revient toujours vers sa proie.

Il me menotta. Je me mis à crier.

- Lâchez-moi!!! Vous n'avez pas le droit de faire ça!! Je ne vous ai rien fait de mal!! Lâchez-moi!!

Il me poussa hors de la maison. Une foule ne tarda pas à se former autour de moi. Je voulu me détacher, mais impossible, les menottes étaient beaucoup trop serrées. Les gens autour de moi ne cessaient de me fixer du regard, il me dévisageait. Soudain, ils se mirent à crier tous ensemble.

- Tuez-le!! Tuez-le!! Tuez-le!! Tuez-le!!

Les voix étaient toutes synchronisées. J'avais l'impression de n'entendre qu'une. Tout à coup, un silence s'installa au milieu de cette cohue. Je me retournais. Le Chef était là. Il s'approcha de moi, et me dit:

- Encore vous!! Moi qui croyais que je devais envoyer des troupes à votre recherche, mais je vois que les bêtes ne comprennent rien à rien, et au lieu de fuir loin d'ici, la voilà qui vient nous rendre une petite visite.

Des rires se faisaient entendre dans la foule. Le Chef reprit:

- Qu'est-ce qui vous amène parmi nous? Ne me dites pas que vous avez déjà eu marre de cette vie, et que vous voulez en finir!

- Je viens chercher mon amie, Joséphine. Qu'est-ce que vous lui avez fait?  Pourquoi ne se rappelle-t-elle de rien?

- Pour elle, vous n'avez jamais existé. Les filles de son genre ne doivent pas fréquenter des monstres comme vous!!  

Ce Chef commençait sérieusement à m'énerver.Pour une fois, je décidais de vider mon sac, et de lui dire ce que je pensais réellement de lui.  

- Qui êtes-vous pour oser me juger!! Qui êtes-vous pour oser me critiquer!! Je vais vous dire ce que vous êtes. Vous êtes une sale ordure. Vous vous prenez pour je ne sais qui, alors qu'en fait, vous ne valez rien!! Vous croyez que je suis un monstre, vous oubliez que le vrai monstre ici, c'est vous!! Je n'ai pas peur de vous, je n'ai pas peur de la mort. Je suis revenue ici pour sauver mon amie, et je le ferais, morte ou vive, et ce n'est pas quelqu'un de votre espèce qui va m'en empêcher!! 

Je me sentais plus légère. J'étais surtout très fière de moi. Il était vrai que ces paroles n'avaient servi à rien, et que je me trouvai à l'heure qu'il est enfermé dans une cellule, néanmoins, j'avais pu faire preuve de courage pour la première fois de ma vie, et qui sera sans doute la dernière.

Maître Fahey était mort, Joséphine m'avait oublié, Craig nous avait trahis. 

Afin de sauver Maître Gloderhel, nous avions fait le voyage ensemble, nous avions passé de très bons moments, mais, hélas, ceci faisait partie du passé. Jamais,  nous ne pourrons revenir comme avant. 

Et une fois de plus, j'avais perdu des personnes qui m'étaient chères.

Toi au moins, maman, je sais que tu ne m'abandonneras pas.

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