Chapitre 45

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Je n'avais pas pu fermer l'œil de la nuit tellement j'étais préoccupée du cas de Joséphine. Je ne savais si elle avait recouvert la mémoire ou pas, et je mourrais d'envie d'aller lui parler, seulement, elle dormait encore. 

À 10 heures, nous nous mîmes en route. Joséphine garda le silence pendant tout le trajet. Après avoir traversé la forêt, je décidais d'aller lui parler. Je m'approchai d'elle en lui demandant:

- Ça va?

- Oui, ça va.

Je ne m'attendais pas à cette réponse si froide. Je lui demandais:

- Alors, tu te souviens de quelque chose?

- En quoi ça te regarde?

- Je veux juste savoir.

Elle s'arrêta, et me dit en élevant la voix:

- Fiche-moi la paix, tu entends! Je ne te connais pas, tu ne me connais pas, alors arrêtes de jouer les gentilles avec moi. Tu n'es pas mon amie et tu ne l'as jamais été!!

- Mais je veux juste t'aider et..

Craig intervint en disant:

- Joséphine, tu te calmes un peu!!

À ma grande surprise, elle lui obéit. Je ne savais pas pourquoi le sort n'avait pas marché, je ne savais pas pourquoi Joséphine réagissait comme ça, et ce, seulement avec moi. En fait, j'ignorais plusieurs choses.

Nous marchâmes longtemps avant d'arriver au pied d'une montagne. D'après Craig, il ne nous fallait plus qu'à la traverser avant d'atteindre l'arrêt du car. 

J'étais fatiguée alors que Jada marchait sans même être essoufflée. Je l'avais toujours trouvée forte et résistante. La preuve qu'elle avait pu surmonter la mort de sa mère avec une facilité surprenante. Je l'admirais énormément pour ça.

À 13 heures, nous avions enfin pu traverser cette montagne, chose qui me paraissait impossible. Alors que nous faisions une petite pause, Jada s'approcha de moi et me chuchota à l'oreille:

- Depuis tout à l'heure, quelqu'un nous observe.

- Qui ça? Edgar?

- Oui, sûrement. 

Malgré son jeune âge, elle pouvait se montrer très sérieuse. Noha l'avait drôlement bien éduquée et surtout, elle en avait fait une jeune fille courageuse.

Je devais faire attention. Si c'était Edgar qui nous surveillait, il fallait se montrer très prudents.Je me doutais bien que Craig avait déjà senti sa présence et était sur ces gardes. Joséphine était la seule qui m'inquiétait. Elle était assise sous un arbre et ne semblait pas préoccupée de la situation. Cependant, j'étais la seule d'entre eux qui ne savait pas se battre. J'étais une cible beaucoup plus facile.

Nous nous levâmes et nous nous apprêtâmes à continuer la route quand Craig dit:

- Ta mère ne t'a pas appris à ne pas espionner les gens.

Une voix que je reconnus lui répondit:

- Elle est morte avant qu'elle puisse me montrer quoi que ce soit.

Vollard sortit d'un énorme feuillage. Il avait tué Maître Fahey, alors que cherchait-il encore? 

Il nous dit:

- Votre fin est proche.

Craig lui répondit d'un ton sec:

- La tienne est beaucoup plus proche que la nôtre.

- C'est une menace?

- C'en est une.

Une lumière rougeâtre entoura le corps de Vollard. Ce dernier leva sa main, et là, une décharge électrique se propulsa en direction de Craig. Celui-ci l'esquiva avec une incroyable facilité, et avec une rapidité impressionnante, projeta une boule de feu qui atteignit le bras gauche de Vollard. 

Malgré le sang qui coulait, malgré que son bras ait été carbonisé, il pouvait encore tenir debout. Avec un ricanement, il dit:

- Tu es toujours agile à ce que je vois. Mais voyons ce que tu pourras faire maintenant!!

En bougeant sa main, il réussit à propulser une énorme lumière rouge, qui n'était pas dirigée vers Craig, mais vers moi. Je voulus l'esquiver, mais j'étais beaucoup trop lente. Je fus touchée au niveau des jambes et je m'effondrais à même le sol. 

Jada se précipita vers moi en criant:

- Ça va? Est-ce que tu vas bien? Tu as mal? 

- Non, non, je n'ai pas mal. 

En effet, je n'avais pas mal. Seulement, je ne sentais plus mes jambes. Je voulus les bouger, mais c'était chose impossible. On aurait dit qu'elles n'existaient plus. Cependant, elles n'étaient pas endommagées et semblaient en bon état. Je voulus me lever, mais je ne pouvais pas. Je me sentais encore plus impuissante. Je réalisais enfin que mes jambes étaient paralysées. Je m'écriai:

- Vollard, qu'est-ce que tu m'as fait? 

- Eh bien, ...

Avant qu'il ne puisse terminer sa phrase, il fut touché en plein fouet par une lumière bleue. Il poussa un cri de douleur avant de se transformer en cendres que le vent ne tarda pas à disperser. Craig s'approcha de moi, posa sa main sur mes jambes, et me dit:

- Alors, tu sens quelque chose?

- Non, je ne sens rien.

Jada demanda:

- Est-ce qu'il est mort?

- Il l'avait cherché. Je lui avais bien dit que sa fin était bien proche.

- Et....grande sœur pourra à nouveau marcher?

- J'en doute.

Je m'écriai:

- Comment ça? Je ne pourrai plus jamais marcher?

- Vollard a utilisé un sort très puissant et surtout que je ne peux pas annuler.

- Et.... il n'y a....pas d'autres...moyens?

- À ma connaissance, non.

Je ne savais plus quoi penser. J'étais totalement perdue. Je ne pourrai plus jamais marcher, je ne pourrai plus jamais me déplacer. Mes jambes étaient comme mortes. Je ne les sentais plus. Non!! Comment était-ce possible? Ce n'était pas ce que je voulais. Comment allais-je vivre sans elles? Des larmes coulèrent sur mes joues. Mes mains commençaient à trembler, j'avais de plus en plus mal à respirer. Je ne voyais plus rien devant moi. J'étais complètement désemparée. À cet instant précis, ma vie me semblait insensée. Je ne voulais plus voyager, je ne voulais plus découvrir le monde, je ne voulais plus venger ma mère, je voulais seulement marcher.

Jusqu'à ce jour, je n'avais jamais su la vraie valeur de mes jambes. Je me considérais toujours comme n'ayant pas de chance, alors qu'en réalité, j'en avais beaucoup. Je pouvais marcher, je pouvais courir, je pouvais m'asseoir, je pouvais me déplacer, mais maintenant, je ne pouvais plus rien faire. Je m'en voulais terriblement. Si seulement j'avais pu l'esquiver à temps, si seulement j'étais plus rapide, si seulement je pouvais revenir en arrière, cependant, j'avais bien conscience  que c'était impossible, et ça me détruisait encore plus. Je me sentais vide de l'intérieur, je me sentais comme creuse. J'étais comme une feuille fanée, qui ne pourra plus jamais redevenir verte. 

Craig me porta jusqu'au car où il me posa sur un siège. J'étais devenue une chose que l'on porte,  j'étais devenu un objet que l'on déplace.

J'avais perdu la faculté de marcher, mais j'avais aussi perdu le sens de la vie. Nous arrivâmes à Verzy, un petit village près des montagnes. Je fus portée jusqu'à l'auberge où l'on me fit coucher.

Je n'avais pas prononcé la moindre phrase, le moindre mot. J'étais incapable d'ouvrir les yeux et de voir le paysage qui s'étendait devant moi. J'étais incapable d'apprécier la valeur de la vie, car j'estimais qu'elle n'en avait aucune.

Je souhaitais, de tout mon cœur, de mourir ici et maintenant. 

Depuis le jour où j'avais commis l'irrécupérable, j'avais compris que ma vie était gâchée, que j'allais de plus en plus souffrir et que je ne pourrai plus jamais retrouver la paix et la sérénité. Aujourd'hui, j'en avais la preuve concrète. 

Sans mes jambes, j'étais devenue inoffensive, je n'avais plus de valeur. Je ne servais plus à rien dans ce monde. C'était comme si je n'existais plus.

Je restais allongée sur le lit, sans même essayer de me lever. Je ne supporterai plus cette sensation de vouloir mais de ne pas pouvoir.

Dans cette vie qui est maudite, je n'ai fait que perdre sans rien gagner en retour, et ce que j'ai perdu ne peut être réparé.

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