Chapitre 7

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   Coquette cessa de repenser à cette fête de la veille et au calvaire qu’on lui avait fait subir les jours précédents de la même manière qu'elle interrompit son activité domestique. Ranger, nettoyer, épousseter ne servait à rien. Elle le comprit avec ce dernier coup de balai qui ne chassait la poussière que le temps du mouvement. L’instant d’après, les saletés retournaient à leur point d’origine et recouvraient à nouveau toutes les couleurs d’un voile terne, sans éclat. Elle regarda autour d’elle. Les objets, la vaisselle, le ménage, tout ce dont elle s’était occupée était revenu à son état initial ; rien de ce qu’elle avait pu faire n’avait eu de conséquence. Alors, elle comprit que tout resterait figé et morne. Elle décida de sortir dans cette clairière, là, juste devant la maison, pour profiter de sa liberté, désormais totale.

  Elle cueillit une petite fleur, la même qu’elle avait choisi quelques instants auparavant, en sachant qu’aucun oiseau ne la lui apporterait naturellement et l’accrocha dans ses cheveux d’ombre sans chercher à contempler son reflet.

  Puis, elle recommença à fredonner un air, une petite mélodie qui lui était venue spontanément, sans y réfléchir. La chanson prit de plus en plus d'ampleur, portée à tue-tête par Coquette, apprivoisant comme elle le pouvait cette voix, qui était la sienne et qu'elle découvrait encore. Elle entama quelque pas de danse en lisière d’une forêt qui n’appartenait plus qu’à elle. Coquette était libre, libre de faire absolument tout ce qu’elle voulait. Personne ne pouvait l’interrompre. Surtout pas les sept, qu’elle avait transportés dans le cellier lorsqu’ils eurent fini leur repas par cette généreuse part de tarte aux pommes. Les fruits avaient été parfaitement conservés dans cet endroit qu'elle connaissait mieux que quiconque, à l'abri de toute lumière et des regards indiscrets.

  Au milieu des rhodoïds aux mille reflets, dans cette clairière artificielle qui restait à peupler, Coquette pensa une dernière fois à ses semblables, aux animaux de la forêt, à la Princesse. Aux desseins de chacun qui resteraient les leurs, immuables, exposés au grand jour d'une histoire éternelle qui ne serait jamais la sienne. Parce qu'elle était différente, étrangère à cet univers.

Elle pensa à tous ces personnages, à son créateur. À elle-même.

Ils étaient une fois.

Elle, n’était pas.

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