Chapitre 67

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Layla

Pour le week-end du 1er mai, je descends à Bordeaux. L'anniversaire de maman est passé de quelques jours, le mien se profile pour le week-end suivant. Nous avons toujours profité, ces dernières années, de ce week-end souvent prolongé pour nous retrouver et marquer nos anniversaires, d'autant que cela m'est difficile d'être à Bordeaux pour la fête des mères. Dès que j'ai pu confirmer à mes parents que j'allais venir, maman m'a demandé si Alexis serait des nôtres. Lorsque je lui en parle, il marque un petit temps de réflexion, puis me dit que c'est jouable pour lui. Il n'ouvrira pas le cabinet le lundi et rentrera mardi, à la faveur du 1er mai.

C'est Serge qui me conduit. Nous partons dès le vendredi matin, très tôt, afin d'être là-bas pour midi. Nous marquons une pause vers 8h, après avoir déjà bien roulé, pour prendre un vrai petit déjeuner. Nous arrivons à Montussan un peu avant midi. Serge va profiter du week-end pour se rendre à Arcachon, chez des amis. Comme la semaine est écourtée à cause du jour férié, j'ai décidé de demeurer à Bordeaux. Je passerai ainsi du temps à l'usine, de mercredi à vendredi. J'ai plusieurs choses d'importance à y faire : le suivi du chantier de restauration, une réunion du Conseil d'Etablissement qui a été placée cette semaine-là à l'occasion de mon déplacement, des entretiens avec les responsables sur place et les représentants syndicaux.

Ayant prévu de prendre quelques jours de vacances à Antraigues la semaine suivante, Serge m'y conduira dès le vendredi midi. Nous arriverons un peu tard, mais Alexis ne termine jamais sa semaine de bonne heure.

Je me retrouve pour ce premier déjeuner et pour tout l'après-midi seule avec mes parents. Maman est ravie qu'Alexis puisse venir, même si cela lui fait beaucoup de route. En fin d'après-midi, je l'accompagne pour récupérer mes deux filous de neveux à l'école. Ils sont ravis de nous voir. Maman et leurs parents leur avaient réservé la surprise de ma venue. Ils vont dormir à la maison ce soir et sont très excités dans la voiture.

A peine arrivés, ils veulent m'entraîner à des jeux, mais nous parvenons à les faire goûter d'abord. Nous passons ensuite un bon moment tous les trois et le repas du soir est très animé. Gabin et Margot profitent de leur soirée "sans enfants" de leur côté et nous rejoindront seulement demain soir. Le repas de famille est prévu pour dimanche midi : Alexis sera là et mon frère et ma sœur seront présents.

**

Alexis arrive dans l'après-midi du samedi. Il est parti très tôt d'Antraigues ce matin et a pu faire la route dans de bonnes conditions. Jacob et Maxime sont les premiers à l'assaillir et je dois patienter quelques instants que mes neveux se soient un peu calmés pour l'embrasser.

- Ca va ? me demande-t-il. Pas encore sur les rotules avec les deux petits zouaves, là ?

- Non, ça va, ris-je. Mais ils étaient impatients que tu arrives !

- N'y avait-il qu'eux à être impatients ? demande-il en m'enlaçant plus étroitement.

- Je reconnais que je l'étais aussi.

C'est accompagnés de Maxime et Jacob que nous entrons dans la maison. Papa et maman sont au salon, alors que j'avais sorti les petits dans le jardin pour les faire cavaler un peu et leur faire prendre l'air. D'autant qu'il fait doux et que le soleil réchauffe agréablement l'atmosphère : on sent bien, ici, l'influence atlantique et la douceur du climat bordelais.

Mes parents et Alexis se saluent, puis il parvient à négocier cinq minutes de calme, le temps de monter son sac dans ma chambre. Quand il redescend, les garçons le houspillent et nous nous retrouvons dehors à jouer tous les quatre au ballon.

- Raté, tata ! s'écrie Jacob, ravi d'avoir fait passer la balle hors de ma portée, m'obligeant ainsi à courir jusqu'au milieu de la pelouse pour la rattraper. Je suis le plus fort !

- Moi aussi, je suis fort, dit Maxime de son ton toujours plus sérieux. Je peux taper aussi fort que toi !

Et il shoote à son tour, mais Alexis parvient à arrêter la balle.

- Recommence, Maxime ! lui lance-t-il. Je suis certain que tu peux faire encore mieux !

Il n'en faut pas plus et le petit tire à nouveau. Cette fois, le ballon finit dans la haie, derrière Alexis. Maman nous sauve d'une prolongation en annonçant que c'est l'heure du goûter.

Alexis

- Alors, ton installation, Alexis, ça se passe comment ?

Je tourne légèrement la tête vers ma gauche pour répondre à Luc, assis à côté de Justine qui me fait face. Nous sommes attablés pour le grand repas de famille. Les parents de Liliane sont également présents. Les discussions vont bon train et sont plutôt intéressantes, ma foi. J'apprends un peu plus à connaître cette famille et à m'y faire ma place, petit à petit.

Luc, le petit ami de Justine, est un jeune homme posé, qui paraît à peine sorti de l'adolescence. Très calme, jamais débordé par les deux garçons de Gabin, plutôt discret. Je l'avais à peine vu cet hiver, mais malgré notre différence d'âge - huit ans -, je me trouve aisément des affinités avec lui.

- Bien, ça se passe bien. Je commence à revoir mes premiers patients, pour un vrai suivi médical. Certains en avaient plus que besoin.

- Ca fait deux mois maintenant ? demande Justine à son tour.

- Un mois et demi environ. Cela a été plus vite que je ne le pensais, comme quoi, même dans certaines administrations, les choses peuvent être plutôt bien menées. D'ailleurs, contrairement à ce que bien des gens pourraient croire, c'est à la sécurité sociale qu'ils ont été les plus efficaces. Franchement, je leur tire mon chapeau. Dès que j'ai pris contact avec eux, j'ai eu tous les renseignements pour être enregistré auprès de leurs services, le rendez-vous pour installer le boîtier de la carte vitale s'est bien passé, le technicien a été précis, ponctuel.

- Tu fais des visites à domicile aussi ? reprend Luc.

- Oui, mais pas forcément tous les jours. J'essaie d'inciter les gens à venir au cabinet, mais ce n'est pas toujours possible. Et je passe tous mes lundis après-midis à la maison de retraite.

- Tu vas faire comment cette semaine ? demande Justine.

- Je n'ai pas fait de visites à domicile vendredi et je n'en ferai pas non plus mercredi : je ferai à la place deux passages à la maison de retraite pour voir les personnes qui ont vraiment besoin d'un suivi hebdomadaire. Avec un peu d'organisation tout se passe bien. Je ferai sans doute pareil pour la Pentecôte. Car je profiterai peut-être des trois jours pour monter à Paris.

Justine affiche un sourire un peu taquin à sa sœur qui lui fait :

- Et bien, quoi, Justine ?

- Pourquoi ça ne m'étonne pas du tout qu'Alexis soit comme toi capable de jongler avec un emploi du temps du tonnerre ? Avec le fait qu'en plus, tu te débrouilles pour te retrouver à Aizac au moins une fois par mois !

- Tu exagères. Je n'y suis descendue qu'une fois depuis le début de l'année. Et oui, ajoute-t-elle avec aplomb, je me débrouille, comme tu dis, pour y aller. Parce que j'ai à y faire aussi !

- Tu crois que tu vas réussir à faire repartir les usines là-bas ?

- Justine...

- Quoi, maman ?

- On avait dit qu'on ne parlait pas de travail ce midi !

- Bah... On a bien parlé du travail d'Alexis !

- Et c'est une exception. Je ne suis pas intervenue, car c'est une marque de politesse aussi que de se renseigner sur ce qui touche nos invités, je crois te l'avoir appris, n'est-ce pas ?

Liliane s'adresse à sa fille cadette d'un ton posé, mais ferme, tout en gardant le sourire.

- Bien sûr, maman, répond Justine avec vivacité. Bon, oublie ma question, grande sœur !

- J'aime autant, fait Layla. Merci.

Un instant, je crains que ce petit intermède ne jette un froid dans la conversation, mais elle reprend tout à fait normalement sur un autre sujet. Au moment du dessert, nous offrons les cadeaux tant à Layla qu'à sa mère. Sachant que cette dernière adore le jardinage et notamment les fleurs, elle reçoit plusieurs plantes pour son jardin. Avec conseil express destiné à ses deux petits-fils d'aller jouer au ballon loin d'elles.

Pour Layla, j'ai choisi un flacon de parfum, fabriqué dans une petite distillerie de lavande, à Saint-Remèze, sur le plateau nord qui borde les gorges de l'Ardèche. Je m'y suis rendu un samedi d'avril, pour visiter le coin que je ne connaissais pas encore et voir quelques villages dont Layla m'avait parlé : les Gras, Valvignières, Saint-Montan et Saint-Remèze bien entendu.

- Je crois que tu aimes bien la lavande, dis-je alors qu'elle place le flacon sous son nez.

- Et la lavande ardéchoise encore plus ! Tu sais que ce sont les cultivateurs de Saint-Remèze qui nous fournissent pour tous nos produits à base de lavande ?

- Non, tu ne me l'avais pas dit... Alors, tu connais.

- Oui, et j'aime beaucoup. Merci.

Et elle m'embrasse, sous le regard attendri de sa maman.

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