Chapitre 5.2

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Un intrus avait fait irruption dans le palais de Hel. En ombre silencieuse, il était passé par la fenêtre de la petite chambre. C'était une grande forme noire qui, à pas lents, se dirigeait vers le berceau placé au centre de la pièce. Sa démarche chaotique, désordonnée, évoquait celle d'un animal mourant. Un long bras, étique et crispé, s'extirpa de cette masse malbâtie. Suivit un cri terrifiant, semblable à un sifflement discordant. Pour finir, la chose se scinda en trois formes distinctes. Vomies par l'obscurité, des silhouettes encapuchonnées venaient de faire leur apparition.

« Il est beau, notre champion, murmura le plus petit des intrus, touchant de ses doigts squelettiques le visage poupin du bébé qui dormait à poings fermés.

— Il est parfait. Absolument parfait, fit un autre.

— Voyez comme il a l'air calme. Il ne sait encore rien de ce qui l'attend, pourtant je vois ce que lui réserve le Destin, ce que nous lui réservons », acheva le troisième.

Leur figure était dissimulée derrière un ample capuchon de toile qui semblait se fondre avec la nuit perpétuelle des mondes du dessous. Mais leur voix et leurs gestes ne les trahissaient que trop : il y avait un je-ne-sais-quoi de féminin dans ce trio mystérieux. Telles trois fées penchées au-dessus d'une vie nouvelle, ces macabres marraines ne parvenaient à détacher leur regard de celui dont elles paraissaient avoir tant attendu la venue.

« Au nom de ce qui a été, de ce qui est et de ce qui doit advenir, nous jurons de te protéger jusqu'à l'ultime affrontement. Sur les vents, la pierre, la terre, le feu et l'eau, nous promettons de ne jamais oublier qui tu es réellement », lancèrent-elles d'une même voix.

Les dieux d'Asgard et les iotnar de Iotunheim étaient à mille lieues d'imaginer qu'en Helheim, l'être le plus improbable qui soit venait de naître.

« Tu es notre secret, susurra l'une des femmes. Personne ne saura avant longtemps ni qui tu es, ni ce que tu vas devenir.

— Tu peux être tranquille, nous ne dirons rien à personne.

— Pour l'heure, nous devons être patients. Si nous sommes séparés durant une longue période, ce n'est que pour mieux nous retrouver lorsque nos chemins se rejoindront. »

Un son retentit dans le couloir qui longeait la pièce. Sans doute un serviteur avait-il entendu des bruits suspects dans la chambre du nourrisson. De toute façon, il n'était plus temps de rester davantage : depuis toujours, la sibylline trinité agissait dans le silence. Pour elle, le moment de se montrer n'était pas encore venu. Or, les pouvoirs de Hel étaient grands ; quelques minutes suffiraient à cette dernière pour détecter la présence des trois inconnues. Il ne fallait rien gâcher. Sans le savoir, la fille de Loki les avait déjà servies ; il y avait fort à parier qu'elle recommencerait. Pour cela, elle devait continuer à croire que les grilles de son palais lui offraient la plus efficace des protections.

« Grandis vite, champion », dirent-elles avant de disparaître pour de bon, comme avalées par le Grand Vide lui-même.

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