Visite

2 minutes de lecture

Il attend là, dehors, derrière ma porte. Il me rend souvent visite ces temps-ci et il prend de plus en plus de place.

Comme une menace constante, une épée de Damoclès prête à fendre à tout moment.

Ce monde que je n'ose pas pénétrer, cette vie dont je suis simple observatrice, ce vide que je remplis de peurs et de colère, tout ça m'attend, prêt à me sauter dessus comme un prédateur assoiffé de sang.

Je reste sur mon radeau de survie, enveloppée dans des draps rassurants qui me protègent de cette fosse aux lions. Les vivres commenceront bientôt à me manquer. Je suis épuisée de tout le temps me reposer. La survie n'est plus vivable.

Ce vide, je vais le faire parler. C'est la rage qui me jette à l'eau.

La mer est agitée et tente de me repousser pour m'empêcher d'avancer. Les vagues tumultueuses me submergent, je n'arrive pas à crier à l'aide.

Sans l'ombre d'une bouée de sauvetage à l'horizon, je suis la seule à pouvoir me sortir de là.

À bout de souffle et épuisée, je m'extirpe de l'eau et m'avance sur une plage déserte. Je pèse au moins dix fois mon poids, ce qui rend chaque pas lourd et maladroit.

La porte, je l'ai ouverte avec fracas, pénétrant hors de ma zone de sécurité. Mais tout cela ne compte plus. C'est la rage qui m'a déportée jusqu'ici.

J'ai la haine, et cette fois, j'en ai assez de me taire et de prendre sur moi. Il va m'entendre pour de bon.

: Allez ! Viens ! Montre-toi !

Je hurle, mais je suis seule.

: Je sais que tu es là !

Il ne se montre pas.

: Pourquoi tu t'acharnes !? Pourquoi est-ce que tu restes !?

La plage est vide, j'ai l'air d'une folle. Tout ce que j'entends, ce sont mes propres cris qui résonnent et qui reviennent à moi.

: J'ai envie que tu me laisses ! Je te déteste !

Mes hurlements résonnent. Je suis seule, et pourtant j'ai réussi à me faire pleurer.

Je m'allonge sur le sable et je ferme les yeux. Le soleil réchauffe mon visage et mon corps, je plonge mes orteils dans le sable chaud.

J'ai envie de pleurer, alors je pleure. Personne ne me regarde, ici, je suis tranquille.

J'ai envie de me reposer, mais plus comme sur mon radeau. J'ai envie de me reposer pour de vrai.

J'ai envie de me rappeler les bons moments que j'ai passé sur cette plage.

Les rires raisonnent au loin, de la guitare et du piano retentissent. Les scènes de mes livres et films préférés se rejouent, mes crayons et mes cahiers s'éparpillent à nouveau et ma plume, virevoltante dans les airs, se pose délicatement dans ma main. Elle m'invite à parler.

Ma plage n'est plus aussi flamboyante qu'autrefois, mais je ne laisserais plus ceux et ce que j'aime la déserter aussi longtemps.

Ce vide, c'est moi. Je me faisais souffrir et je continuerai peut-être par moment, mais je ne perdrai plus mon temps et mon énergie à hurler sur quelque chose qui ne pourra jamais s'en aller.

Je viendrai simplement lui rendre plus souvent visite pour qu'il n'ait plus à le faire à ma place et pour qu'il ne prenne plus autant de place.

Ce vide, il suffisait d'en prendre soin, alors, je le comblerai d'amis, d'histoires, de musique et de rires.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Lia coco ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0