Prémices
Dans un fracas assourdissant il sentit sa chair partir en lambeaux. Ses muscles perforés s'écartèrent brusquement pour révéler à l'air libre des os brisés noircis par la cendre qui se déposait sournoisement dessus. Il sentit un fluide inconnu s'écouler de son ventre ainsi ouvert et ses organes internes pulser au rythme haletant du mourant. Mais il ne voulait pas réaliser qu'il allait mourir. Il mordit son masque à gaz avec la même hargne qu'un chien refusant qu'on l'abandonne et leva la tête vers le ciel empli de nuages noirs zébré d'éclairs violacés et d'éclats lumineux surnaturelles comme les bombes chimiques explosaient au loin en défigurant le ciel et la terre. Le shrapnel qu'il avait reçu de plein fouet ne l'avait pas tué sur le coup. À ses yeux c'était le signe que son heure n'était pas venue. Sa rage emplit chacun des nerfs de son corps, ne laissant aucune place pour la douleur physique.
La butte était là, à quelques mètres devant lui. Mais ses jambes ne répondaient plus. À quelques mètres, l'unité de commandement se tenait fièrement, inébranlable; et contemplait le champs de bataille d'un œil nonchalant, cachés derrière les boucliers énergétiques qui s'élevaient des grosses machines qu'entretenaient des mécaniciens cyborgs avec un soin religieux. Le commandeur était en train de prendre le thé. Le porte étendard du régiment se tenait au garde à vous. Les gardes du corps du général étaient aux aguets. L'opérateur radio tripotait ses machines. Seul le sergent major regardait dans sa direction d'un œil morne, comme s'il ne voulait pas s'approcher de peur de se retrouver avec du travail supplémentaire. Ordill n'avait plus vraiment d'espoir. Il sentit le vent empli des miasmes du champs de bataille caresser les parois de ses poumons à l'air libre. Ce frisson immonde lui arracha un cri qui attira l'attention du général. Celui ci, sans hésiter, sortit de la couverture fournie par les boucliers énergétiques, bientôt suivi par ses gardes du corps et toute son escorte, et se rapprocha du soldat à terre. Ordill gémit au moment où la silhouette du général vint occuper tout son champs de vision. Le commandeur parla d'une voix assurée de vétéran et d'aristocrate.
-"Ce n'est pas une blessure, mais une cicatrice pour demain! Debout!"
Ordill ne sut jamais si ce fut grâce aux paroles du général ou au geste du sergent major qui lui planta brutalement une seringue de stimulants dans le bras, mais une force nouvelle jaillit en lui, et ses jambes lui obéirent en dépit de tout.
Ordill se mît debout. Vaguement debout. Un peu voûté pour ne pas laisser glisser ce qui lui restait d'entrailles. Et il marcha péniblement. Il fit quelques pas, puis le sergent major vint l'aider à tenir debout et l'aida à marcher jusqu'à l'abri. La piqûre de stimulant lui faisait presque plus mal que le reste, et inconsciemment, Ordill en nourrit du ressentiment envers le sergent major.
Une fois à l'abri, le général reprit sa tasse de thé et lança au blessé:
- "Un guerrier courageux ne craint pas les tirs; mais un guerrier intelligent ne s'expose pas inutilement au feu ennemi." Il marqua une pause pour prendre une gorgée de thé avant d'ajouter:"Si vous aviez été plus intelligent, vous ne seriez pas tombé au combat adjudant Ordill."
L'intéressé émit un grognement entre ses dents.
-"Si j'avais été intelligent, je me serai pas engagé pour commencer."
Le général ne répondit rien. Il reporta sa pleine et entière attention sur son thé. Puis il finit par dire:
-"Nous allons vous reconstruire, et vous serez promu adjudant chef. Je vous laisse aux bons soins de nos techniciens."
À ces mots, une meute de cyborgs se précipitèrent sur Ordill, et le noyèrent dans un chaos inextricable de câblages robotiques.
Ce qui s'ensuivit resta à jamais dans la mémoire du soldat comme un tourbillon interminable de souffrance et de hurlements. Chaque câble, chaque vérin, chaque fibre métallique traversant son être fut connectée à un nerf selon un processus atrocement douloureux, faisant découvrir au soldat qui pensait avoir déjà bien souffert de nouvelles parties de son corps dont il ne soupçonnait pas l'existence et des pics de douleur physique comme il n'en avait jamais imaginé. Il découvrit également que même lui était capable de hurler, et ses cris atroces montèrent de la salle d'opération à travers tout le campement. Ses longues plaintes faisaient sursauter les soldats qui se regardaient, haussaient les épaules, puis tachaient de l'ignorer. Ce que les hommes craignaient le plus, c'était l'état mental du nouvel adjudant chef quand il sortirait de la maison des technochirurgiens.
Cela dura une semaine sans trêve ni pause. Et cela lui parut des siècles. Puis encore après, il lui fallut une autre semaine pour s'habituer à ses nouveaux implants et pour que la douleur s'en aille.
Quand il émergea du ténébreux repaires des chirurgiens, Ordill n'était plus le même homme, si encore on pouvait dire qu'il fut encore un homme à ce stade.
Tout ce qui avait été perdu ou abîmé avait été remplacé ou renforcé par des organes artificiels d'acier et de vérins. Tout son torse et son ventre s'étaient mués en une cuirasse aussi solide que le blindage d'un char. Ses poumons robotiques gorgeaient son corps d'un air purifié mieux que ne saurait le faire un masque à gaz. Et son cœur artificiel battait maintenant au rythme qu'il déciderait. Quand il surgit des ténèbres et vit les visages de tous les soldats se tourner vers lui, il écarta les bras et s'exclama tel un prophète:
-"Louée soit la machine! Car la chair n'est que faiblesse et mort, tandis que l'acier est éternel. Avec nos machines nous purgerons tous nos ennemis, et avec ma nouvelle force je porterais la ruine sur nos opposants!"
Et il le fit. Menant ses hommes de façon toujours plus téméraire, Ordill s'occupa avec diligence de toutes les missions qu'on lui confiait. Mais il s'exposait trop au danger, trop sûr de lui, il s'exposa un jour inutilement aux tirs d'une tourelle. Un projectile explosif le toucha à l'épaule gauche, et son bras se décrocha aussi simplement qu'une fleur perd un pétale. Ordill ne fit que regarder son membre arraché avec curiosité, puis fut saisi d'un rire hystérique devant la satisfaction de voir son système sanguin artificiel stopper l'hémorragie aussitôt. La perte de son bras ne le mettait même pas en danger de mort.
Il retourna de lui même chez les technochirurgiens, et tant qu'à faire il demanda deux bras robotiques. La douleur ne fut pas la même, il hurla, mais il trouva la souffrance à son goût car prometteuse de plus de force.
Plus tard, il reçut un tir en pleine tête. Et cette fois ci il l'avait sciemment cherché, courant sous les tirs ennemis, s'approchant inutilement d'un sniper, il se fit d'un coup arracher l'œil droit et une partie du cerveau.
Mais cela n'arrêta nullement les techniciens qui réparèrent le cerveau et y inclurent un ordinateur capable d'effectuer tout type de calcul et d'enregistrer les données. Ils lui offrirent également un œil bionique et lui greffèrent du métal sur toute la moitié du visage. Ils en profitèrent également pour perfectionner les filtres à air et les incorporer au système respiratoire d'Ordill. Ils lui placèrent également des protections dans les genoux, des renforts métalliques injectés dans les os, un estomac artificiel, un sang chimiquement amélioré, des drogues et des stimulants intégrés avec un système permettant de les injecter d'une simple pensée, sans oublier des fibres nerveuses supplémentaires décuplant ses réflexes. Ordill s'était habitué à la douleur et il réclama tous les implants envisageables, même ceux expérimentaux, pour la plus grande joie des savants de guerre qui virent en lui le cobaye parfait.
Cette fois ci, en sortant de la base des technochirurgiens, il n'était définitivement plus possible de le considérer comme un simple humain. Ses implants firent de lui quelque chose de plus grand. Quelque chose de plus imposant. Quelque chose de plus effrayant.
Avec les implants vinrent les grades, et Ordill finit par être promu colonel, et sa division fut bien vite connue sous le surnom des "Têtes en fer".
Un jour vint où le général convoqua le colonel Ordill dans son bureau.
Le soldat se plaça au garde à vous, respectueusement silencieux, devant son supérieur qui une fois encore sirotait du thé.
-"Colonel Ordill. Vous savez tout comme moi que ce front n'avance pas beaucoup. La guerre s'enlise pour ainsi dire, et on en voit pas la fin.
- C'est évident. Mais si je puis me permettre c'est tant mieux. C'est là qu'est tout le plan. Nous sommes plus nombreux et on peut avoir des renforts illimités. La guerre d'usure est un bon parti pour nous.
- Je suis tout à fait d'accord avec vous. Pourquoi brusquer les choses? Notre victoire est assurée de toute façon. Hélas, certains ne pensent pas de la même manière. Les galonnés qui nous regardent de loin et ne savent rien de ce qui se passe vraiment s'imaginent que nous ne faisons pas assez de zèle. C'est triste à dire, mais certain osent mettre en doute la qualité suprême de mon commandement. À moi. Vous saisirez donc l'absurdité de la situation.
- En effet.
- Tout ça pour vous dire que nous recevrons très prochainement la visite d'une supérieure de la hiérarchie militaire qui a insisté pour venir en personne regarder pourquoi nous n'avançons pas plus. Cette visite sera probablement très irritante mais nous devons malgré tout faire notre possible pour qu'elle se passe bien et ne pas nous attirer les foudres de cette supérieure très influente. Aussi, vous qui êtes l'un des officiers dont nous sommes les plus fiers, j'aimerais qu'avec vos hommes vous soyez présent lors de son arrivée pour la saluer et être parmi les premiers soldats qu'elle verra.
- Très bien monsieur. Comme il vous plaira.
- Toutefois avant il faudrait que je vous prévienne de quelques détails à observer avec circonspection lors de son séjour ici. Voyez vous, c'est quelqu'un que je connais assez bien et je sais qu'avec elle les détails deviennent des problèmes d'ampleur cataclysmique." Il s'arrêta pour touiller son thé." Disons qu'il est certaines choses que vous ne devrez surtout pas faire.
- Ah bon? Comme quoi.
- Eh bien premièrement, quoi qu'il arrive ne parlez surtout pas de thé. Ne lui dites pas que j'en bois. Le thé est quelque chose qu'elle abhorre. Et qui sait, elle pourrait aller s'imaginer que je passe tout mon temps à boire du thé au lieu de coordonner mes troupes.
- Reçu. Autre chose?
- Oui. En sa présence, évitez de trop faire l'étalage de vos implants. Ceux ci ont souvent un prix assez élevé, et elle pourrait se trouver outrée que du matériel aussi coûteux soit envoyé en première ligne.
- Reçu. Autre chose?"
Le général grimaça un peu en songeant à ce qu'il allait dire, puis se lança:
-" Comme vous le savez probablement, c'est bientôt le jour de l'équinoxe de la lune Daarbo, ce qui pour une bonne partie de nos soldats signifie la fête de la bière. Or il se trouve que par une incommensurable malchance, c'est précisément ce jour là qu'elle arrive. Aussi, la fête devra être annulée. Je sais que les hommes ont justement économisé leurs stocks de bière en prévision de ce jour, mais il faudra impérativement que les festivités soient reportés. Aussi signifiez bien à vos hommes que pas un seul soldat ne doit être ivre pendant toute la durée de la visite, c'est un ordre formel, et j'en suis le premier navré. Expliquez tout de même aux soldats que ce n'est pas uniquement pour moi que je fais ça mais aussi pour eux. Si elle trouve un soldat ivre, la première chose qu'elle fera c'est l'exécuter. Après, tout ça peut peut être me retomber dessus si elle m'accuse de trop laisser mes hommes boire et prétend que ça explique notre faible avancée. Vous savez comment sont les hauts gradés, toujours à pointer du doigt leurs subordonnés. Alors c'est compris?
- Oui monsieur. Mais ça va pas être simple. Ça fait un an que les soldats se retiennent chaque jour de boire justement pour pouvoir se saouler lors de la fête de la bière. Ils vont tous être très déçus.
- Je suis navré, mais c'est ainsi. Le très haut commandement ne comprend rien aux loisirs des simples mortels comme vous.
- Pour ma part ça ne me fait ni chaud ni froid. Ça va faire des années que je n'ai pas bu une goutte d'alcool. Mes hommes, pour la plupart, partagent mon avis.
- Merveilleux. Mais à ce propos, il faut que je vous demande… c'est vrai ce qu'on raconte sur vos hommes? Les Têtes de fer, c'est bien ça?
- Je ne sais pas ce qu'on raconte.
- J'ai ouï dire que les soldats sous vos ordres avaient pour coutume de décorer leurs masques à gaz d'une tête de mort en métal. Est ce vrai?
- En effet, ils le font systématiquement quand ils arrivent sous mes ordres. C'est un peu leur rituel à eux. Certains m'ont dit que c'était pour me ressembler. Ceux là je ne les crois pas. En fait, la tête de mort est plutôt un signe de résignation, car ils savent que sous mes ordres ils ne pourront pas éviter le danger et sont presque sûrs de mourir tôt ou tard. C'est un peu leur façon d'accepter la mort avec le sourire. Quand au fait de les faire en métal, ça ça vient du surnom Têtes en fer. Car c'est la coutume qui vient du surnom, et pas l'inverse.
- En temps normal cela ne me dérange pas, au contraire même. Après tout, du métal sur les masques ne fait qu'augmenter la protection, et votre signe distinctif vous offre la possibilité de vous tailler une effrayante réputation jusqu'à chez l'ennemi, et ils auront peur de vous. Seulement cela reste tout de même un non respect des règles de l'uniforme de notre armée, et c'est un acte répréhensible. Je ne sais pas si la supérieure s'en formaliserait ou non. Notez que même pour elle c'est plutôt négligeable. Nous avons déjà vu bien pire avec de l'auto scarification, des totems tribaux, et des haruspices, alors des masques décorés, je ne crois pas qu'il y ait de problème.
- Bien. Y a-t-il autre chose?
- Oui, une dernière. La personne qui va venir nous visiter est une femme de la très haute société. Une aristocrate à laquelle vous devez respect et une supérieure dans la hiérarchie militaire à qui vous devez de la considération. Aussi, même si nous autre aristocrates savons qu'il est inutile d'attendre du bas peuple un respect pointilleux de l'étiquette, il serait de bon goût que vous vous assurassiez qu'aucun de vos homme ne témoigne d'irrespect à son égard. Ainsi, je pense surtout aux moqueries et chuchotements. Vous connaissez les aristocrates, toujours avec des parures exotiques et des manteaux en fourrure de bébé ornithorynque ou une ânerie du même acabit. En clair, j'aimerais éviter qu'elle ne se sente d'une quelconque façon offensée par le regard de ces rustres de soldats. Est ce bien compris?
- Parfaitement compris monsieur. Si un de mes soldats manque de respect à la supérieure, je le flingue sur le champs."
Le général grimaça.
- Il serait bien aussi, colonel, que dans la même idée, en la présence d'une supérieure, vous qui êtes officier de rang supérieur, vous délaissiez, un temps du moins, le langage et les expressions du vulgaire pour vous adresser à elle dans un langage moins familier. Essayez d'employer une langue, disons, plus fleurie. Vous voyez ce que je veux dire?
- Alors là, pas du tout.
- Enfin, un langage plus fleuri. Par exemple, en lieu et place de dire que vous flinguez un soldat, dites fusiller un soldat. Enfin, ne lui parlez pas à elle comme vous parleriez à un soldat. Avec moi ça va encore puisqu'après tout nous sommes bien obligé de travailler ensemble couramment et si je ne savais déchiffrer le langage du bas peuple nous serions dans la panade, mais elle, elle appartient à ce genre d'état major si haut placé que cela fait des années qu'ils n'ont pas vu à quoi ressemblait un soldat et sont même incapables d'imaginer que dans cette ressources dispensable puisse luire l'étincelle de la vie. Elle est du type d'officier qui vous ferait charger un mur à la baïonnette si ça pouvait faire finir la guerre plus vite. À ce titre, elle n'aura nullement la patience de s'attarder sur ce que disent les soldats pour le décrypter. Si vous encore vous vous orientez naturellement vers un langage officiel et bien militaire dans votre façon de répondre aux ordres, veillez à ce que votre verbe ne migre pas vers l'instable cacophonie éreintante des masses ignorantes de rustres qui constituent, hélas, le gros de nos troupes.
- Je saisis à quoi vous faites référence monsieur. Je veillerais comme vous dites.
- Très bien. En ce cas, allez dès maintenant prévenir vos hommes."
Le général porta à nouveau son thé à ses lèvres tandis que le colonel saluait et prenait congé.
C'est une semaine plus tard que le jour tant attendu arriva. Le terrain n'était qu'une tourbière radioactive, défiguré par des millions de cratères d'obus. C'est au sommet d'un piton rocheux que la navette vint atterrir, juste devant le général et son escorte qui faisaient leur possible pour rester stoïques malgré le souffle des réacteurs d'atterrissage qui faisait voler leurs capes et leurs manteaux. Les Têtes en fer se tenaient parfaitement immobiles, en rangs bien droit, leurs fusils levés en signe de vigilance.
De la navette émergèrent vingt gardes prétoriens en armure rouge vif qui vinrent se poster autour de la navette en jaugeant les soldats d'un regard suspicieux. Suivie par deux valets brandissant des encensoirs, une femme de forte carrure, emmitouflée dans un manteau de fourrure pourvu d'une longue cape en cuir, s'avança d'un pas ferme avec un regard hautain et enragé.
-"C'est donc eux qui en quatorze ans de conflit ne sont toujours arrivés à rien." Fit elle en voyant les soldats." Larves! Vous n'êtes que des larves!"
Les Têtes en fer ne cillèrent pas. Elle se tourna alors vers le général qui se retenait difficilement de rire.
-"Vous! Vous avez du café?
- Naturellement. C'est prévu."
Il lui tendit une cafetière pleine et une tasse. Elle empoigna la cafetière et but directement le café brûlant qui dégoulina sur ses joues. Puis elle sortit une serviette de sa poche et s'essuya le visage.
-"Le café il n'y a que ça de vrai. Maintenant, je veux des ennemis. Montrez moi nos ennemis.
- La zone est bien sécurisée. Et, en soi, ils ont peu d'intérêt. On a déjà lâché tant de substances dans l'atmosphère qu'on sait de source sûre qu'ils sont tous devenus stériles. Dans une génération l'affaire sera pliée.
- Je n'en reviens pas que vous envisagiez une guerre aussi longue. L'état major est exténué vous savez?
- Plus que nos soldats? Allons bon!
- Ne plaisantez pas avec ça. Tout porte à croire que vous avez échoué.
- On a fait que avancer. Lentement mais sûrement. Et on a pas perdu un pouce de terrain.
- Mais pour un soldat ennemi tué vous en perdez deux!
- Et alors? nous restons vingt fois plus nombreux, et pour chaque mort, on a dix nouveaux arrivants. C'est la tactique habituelle. Je ne vois pas ce qu'il y a de mal là dedans."
Elle ne prit pas la peine de répondre. Elle se tourna vers les soldats et leur cria:
-"Soldats! Vous allez cesser de vous tourner les pouces, et au lieu de guetter les fortifications ennemis comme des paralytiques, vous allez les charger et les balayer glorieusement. Nous allons réunir nos forces et frapper sans pitié ni hésitation. Nous allons les submerger sous nos baïonnettes, mettre à bas leurs murailles avec notre artillerie supérieure et les écraser sous les chenilles de nos chars. Que la boue mange leurs cadavres et que toute trace de leur existence disparaisse de ce monde. Nous foulerons leurs crânes au pied, et nous les enterrerons dans leurs propres terres. Préparez vous à donner vos vies pour assurer la glorieuse victoire de notre toute puissante armée. La décision est prise et est irrévocable. Nous chargerons l'ennemi et lui ferons goûter à nos baïonnettes. Alors hissez les rosalines et trucidez ces misérables! Compris?"
Elle s'attendait à une réponse de la foule, mais les soldats ne bougèrent pas et Ordill s'avança et parla pour tous ses hommes en disant:
-"Vos ordres sont clairs madame. Moi et les hommes sommes prêts à tout, et ne désirons rien tant que mourir pour la gloire.
- Très bien!" Fit elle un peu dépitée par le silence des soldats. Le général se raidit d'un coup et broya la tasse à café entre ses doigts gantés. Puis il s'avança et, mettant ses mains dans le dos, il annonça à ses hommes:
-"Messieurs. Nous allons déployer pour cette mission notre fer de lance, le char de modèle Britannicus que nous avons en stock sera sorti de son hangar sitôt que nous aurons reçus des pilotes." Il eut à ce moment là un regard vers sa supérieure." Nous allons avancer vers l'ennemi dans une offensive coup de poing. Nous disperserons leurs défenses par des charges successives d'infanterie, puis nous progresserons en formation fer de lance avec nos blindés et le char Britannicus en tête. Quant à vous, Têtes en fer, je vous rebaptise grenadiers et rend officiel le port du crâne dans votre corps. Vous servirez dans cette offensive de corps de sapeurs d'élite. Nous intégrerons systématiquement les vétérans survivants d'autres escouades à la votre pour remplacer les morts et les blessés. Votre rôle sera d'approcher les lignes défensives adverses et de placer des charges explosives de sorte à ouvrir des brèches pour notre infanterie laquelle préparera le terrain pour le fer de lance. Vous agirez toujours sous les ordres du colonel Ordill, mais vous devrez collaborer avec les hommes du colonel Vragen, les nettoyeurs de tranchées. Vous serez les tout premiers exposés et vous devrez courir sous les tirs de mitrailleuses pour faire exploser vos ennemis, alors vous pouvez vous considérer comme étant déjà morts. Si vous survivez à cette guerre vous serez nommés seigneur vétéran. Si vous faites preuve de lâcheté nos technochirurgiens ferons de vous des chiens cyborgs serviles dénués de cerveau. Mourir reste la meilleure option que vous ayez, alors vous porterez la tête de mort sur votre masque comme on porte un linceul. Vous êtes déjà morts." Il se tourna vers la supérieure et lança:
-"Amenez moi l'équipage pour le char Britannicus et je vous gagnerai cette guerre en une semaine.
- J'aime mieux ça." Fit elle." Mais je vais quand même rester vous surveiller."
Le général ne montra rien de sa déception, et il se tourna à nouveau vers les soldats.
-"Il est déjà temps de faire des préparatifs. Et nous n'avons pas une seule seconde à perdre.
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