Chapitre 7

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« Fin de l’histoire : obligés de se séparer,
Ils s’étaient promis leur éternelle fidélité.
Aujourd’hui, le garçon torturé vit pour elle,
Puisque la fille, pour lui, a rendu ses ailes... » W.S
Lucian
Une semaine plus tard, Lucian n’est plus qu’un tas d’os, il ne rit plus, ne sourit plus, ne mange plus, ne dort plus, ne sort plus, et ne parle plus. Depuis la mort de Lyra, il n’a plus ouvert la bouche, la dernière fois que l’on a entendu sa voix, c’était un cri, atroce et désespéré. Aujourd’hui, ce sont ses funérailles et il doit prendre la parole. Mais il n’est pas sûr de savoir encore parler, même respirer lui coûte. Le soleil se lève derrière un voile de nuages gris, comme si la nature elle-même pleurait la perte de Lyra. Les rares rayons de lumière qui parviennent à percer ce manteau sombre se posent timidement sur le cercueil blanc, éclatant contraste avec la tristesse ambiante. Les fleurs déposées par les proches forment une couronne de couleurs vives autour du recoin où elle repose, mais l’atmosphère est lourde et oppressante, emplie de chuchotements et de souvenirs. Quand ce fut son tour de parler, il tenta de se lever mais ses muscles ne coopéraient pas et aucun mot ne sortit de sa bouche, il ne réussit qu’à verser des larmes. C’est trop dur... Il n’y arrive pas. À la fin de la cérémonie, une vieille dame, marchant au rythme le plus lent, le plus maladif que Lucian n’avait jamais vu, se dirige vers lui.
— C’est toi alors.
— C’est toi le garçon pour qui elle a pleuré pendant une semaine.
— C’est toi celui qu’elle aimait tant.
La vieille dame se met à pleurer. Il aimerait la réconforter mais aucun mot ne parvient à s’échapper de sa gorge.
— Ce n’est pas ta faute mon garçon, j’étais sa grand-mère, et c’est moi qui ai envoyé Lyra ce jour-là.
La voix tremblante de la vieille dame résonne dans son esprit comme un écho lointain, amplifiant la douleur qui l’assaillit. Il la regarde, ému, tandis que les souvenirs de Lyra défilent devant ses yeux, des éclats de rire aux promesses murmurées sous les étoiles. Lyra, son rayon de soleil, son étoile dans la nuit, était une source de vie et d’espoir. Mais maintenant, tout cela ne semblait plus qu’un rêve lointain, brisé et emporté par le vent. "Je n’ai pas su la protéger," murmure-t-il, sa voix à peine audible au-dessus du murmure des autres. La grand-mère de Lyra, ses yeux embués de larmes scintillantes, s’approche de lui, pressant une main ridée sur son bras. "Ce n’est pas un hasard si elle t’a choisi," dit-elle doucement. "Elle voyait en toi la lumière, même quand tu ne pouvais pas la voir chez toi. Elle aimait ta douceur, ta force intérieure." Un frisson parcourt l’échine de Lucian. Ces mots, bien qu’étrangers, semblent résonner en lui. Il se souvient des sourires de Lyra, de sa façon de voir le monde avec des yeux d’émerveillement. Peut-être a-t-elle raison, après tout. Peut-être que même dans sa douleur, il a un devoir à accomplir. "Comment puis-je continuer sans elle ?" La grand-mère, avec une tendresse infinie, répond : "Tu dois honorer sa mémoire, Lucian. Elle ne voudrait pas que tu vives dans l’ombre de sa tragédie. Elle t’inspire à être le meilleur de toi-même, à vivre pleinement." Lucian ferme les yeux. Les pensées de Lyra, sa voix, son rire, affluent vers lui. Ce qu’il avait imaginé comme une fin alors que la réalité était devenue terne, pourrait peut-être être un nouveau commencement. Il doit lutter, non seulement pour lui-même, mais aussi pour elle. Ses larmes, bien que toujours amères, deviennent un symbole de son amour pour elle, une force à exploiter.

Un mois plus tard. Lucian pousse la porte de la chambre de Lyra avec une hésitation palpable. L’odeur de lavande, bien que légère, est encore présente, comme un dernier vestige de son passage. L’effluve de ce léger parfum fait remonter du plus profond de son âme des réminiscences qui mêlent la plus grande des tristesses et une mélancolie incontrôlable. Les murs, jadis ornés de posters colorés et de photos joyeuses, portent maintenant le poids d’une tristesse insondable. Il avance lentement, ses pas feutrés sur le tapis usé, son cœur bat à tout rompre. Sur le bureau, un petit carnet en cuir attire son attention. Il se penche et, avec un tremblement dans les mains, le prend délicatement. Il sent la chaleur des pensées de Lyra, enfermées entre ces pages, comme des éclats de son âme. En l’ouvrant, il est accueilli par une écriture soignée mais tremblante, une calligraphie qui raconte des histoires bien plus sombres que celles qu’il aurait pu imaginer. Les premières pages décrivent son enfance : des souvenirs d’innocence, de rires et de jeux, vite voilés par des événements plus sombres. Au fil des mots, Lucian découvre les horreurs que son père inflige à Lyra — des cris dans la nuit, l’ombre menaçante d’un homme qui, sous les dehors d’un père, est un tyran. Chaque ligne résonne comme un cri étouffé, une douleur sourde qu’elle cache derrière un sourire, à l’extérieur, pour ne pas frapper ceux qui l’aiment. Mais, en dépit de l’obscurité, Lucian voit aussi la force de Lyra. Dans son journal, elle raconte comment elle cherche refuge dans les livres, la musique et les rêves — comment chaque jour, elle se reconstruit pièce par pièce. Un passage le touche particulièrement : « J’apprends à me relever, même lorsque la peine me tire vers le bas. Chaque page écrite est une victoire sur ma condition. » Elle parle de sa quête de lumière, d’amitié, et du réconfort que lui apportent ceux qui l’entourent, une communauté tissée avec des fils de compréhension et d’amour. Ces mots évoquent non seulement la souffrance, mais aussi l’espoir, une lueur d’espoir qui, malgré tout, persiste. Lucian est émerveillé par cette résilience, la manière dont elle trouve une échappatoire à travers l’écriture, la créativité et l’acceptation. Il tourne la page et lit ces derniers mots : « PTN je l’aime pourquoi me repousse-t-il. Je suis tombée amoureuse de ses défauts, de ses qualités, de son sourire comme de ses larmes. » Les larmes aux yeux, Lucian referme doucement le carnet, conscient que, malgré l’absence physique de Lyra, son héritage demeure. En lisant son histoire, il découvre une note de résilience et de beauté au sein de la douleur.

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