Chapitre 50 (mercredi 11 mai 2022)

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Arthur arriva cinq minutes en avance, à l'adresse que Julie lui avait communiquée, seulement une heure plus tôt. L'établissement était bondé et la musique beaucoup trop forte n'allait pas faciliter la discussion. Il mit un moment avant de trouver son ancienne amie, installée sur une banquette dans une partie reculée du bar qui semblait un peu plus calme.

Arthur appréhendait leur rencontre, la dernière fois qu'ils s'étaient vus, quelques jours seulement après l'accident, cela avait vite tourné au vinaigre. Julie l'avait insulté, lui reprochant d'être la cause de tous les problèmes arrivés à Lucas. Il n'avait même pas cherché à se défendre, puisqu'il était, à l'époque, entièrement d'accord avec elle. Il avait par la suite essayé de l'appeler de nombreuses fois, espérant qu'elle pourrait lui donner des nouvelles de son petit ami. Elle ne lui avait jamais répondu et le numéro avait fini par être injoignable.

– Salut, tu vas bien ?

Elle ignora sa question et Arthur s'assit en face d'elle sans attendre d'y être invité.

– Je te préviens, je suis plutôt pressée donc si tu pouvais en venir directement au fait.

– Tu sais Julie, ce n'est pas nécessaire d'être agressive. Je suppose que tu m'en veux toujours mais je n'y étais pour rien ce jour-là. C'est le mec qui conduisait la voiture qui a grillé le feu et je n'ai rien pu faire pour l'éviter.

– Je sais, c'est ce que m'a dit aussi Lucas quand je l'ai revu quelques semaines plus tard. Mais c'est quand même toi qui as changé à jamais le cours de sa vie et par la même, une partie de la mienne. Je sais que mon raisonnement n'est sans doute pas juste vis-à-vis de toi, un peu idiot et simpliste, mais je t'en veux toujours.

Elle avait dit tout ça d'une voix calme, semblant avoir mis de côté l'agressivité avec laquelle elle avait accueilli le jeune militaire.

– Du coup, dis-moi pourquoi tu souhaitais me revoir ?

Un serveur vint prendre sa commande, ce qui laissa à Arthur le temps de répéter une nouvelle fois dans sa tête la phrase qu'il avait préparée.

– J'ai besoin de toi pour aider un ami, Paul. Il vient de se faire opérer suite à un accident et ils ont dû l'amputer d'une jambe. Il voudrait rencontrer Lucas. Du coup, j'aimerais bien que tu essaies de lui parler pour qu'il accepte.

– Ton ami a vu le reportage ? C'est incroyable ce qu'il fait, lui qui n'aimait pas particulièrement le sport. Je suppose que tu l'as vu aussi ?

– Oui, ça m'a fait un choc de le revoir après toutes ces années. Il est toujours aussi...

– Beau ! Et je crois qu'il n'en a même pas conscience. Tu sais que j'étais amoureuse de lui en seconde. Il n'a rien vu, pourtant je crois que je lui avais donné plusieurs fois des signes assez clairs. J'ai mieux compris pourquoi ensuite.

La conversation cessa pendant quelques secondes. Ils étaient tous les deux plongés dans leurs souvenirs lycéens et ce fut finalement Julie qui brisa le silence.

– Tu fumes toujours ?

– Oui, pourquoi ?

– Ça t'embête si on sort s'en griller une ?

– Non, au contraire. Mais tu fumes toi maintenant !?

– Oui, un ex qui fumait. Je tirais des taffes de en temps en temps et lorsque ce connard m'a plaqué, c'est la seule chose qu'il a laissée chez moi. Un paquet de clopes. J'aurais mieux fait de le jeter tout de suite. Le mec. Le paquet aussi d'ailleurs.

Ils se faufilèrent au milieu de la foule d'étudiants, encore plus nombreuse qu'à leur arrivée, et sortirent.

– Tu sais pourquoi il se fait appeler Thomas ? demanda Arthur.

– Lorsque je l'ai revu après l'accident, il n'allait vraiment pas bien. Il partait le lendemain dans un centre de rééducation. Son téléphone était HS depuis l'accident et ses parents refusaient de lui en acheter un autre, je n'avais pas de moyen de le joindre. Il devait donc me téléphoner une fois sur place pour me donner sa ligne directe. Je n'ai eu aucune nouvelle pendant plusieurs semaines, si ce n'est par ses parents que j'ai appelés de nombreuses fois sans jamais obtenir le numéro de Lucas. C'est lui qui a fini par me recontacter, plus deux mois après, pour m'expliquer qu'il ne voulait plus qu'on se voie. Il avait besoin, selon lui, de se reconstruire une nouvelle vie puisqu'il était une nouvelle personne et il voulait faire table rase de son passé. C'est tout ce que je sais, mais on peut supposer que c'est aussi pour ça qu'il a changé de prénom.

– Et tu ne l'as jamais revu ?

– Je l'ai croisé quelques fois, il m'a salué mais il n'a jamais cherché à renouer des liens.

– Et pour mon ami ?

– Je ne reprendrai pas contact avec Lucas.

Arthur accusa le coup, même s'il avait bien senti aux intonations de sa voix qu'elle avait été fortement meurtrie par le refus de Lucas de la revoir. La déception visible sur son visage accentua le sentiment de culpabilité présent chez Julie, et ce fut cette dernière qui finit par reprendre la parole.

– Tu devrais aller le voir. Si je te donne une possibilité de le croiser "par hasard" peut-être que ça pourrait le faire, non ?

– Dis toujours.

– Il bosse au Mcdo près de la station de métro Charpennes Charles Hernu, rien ne t'interdit d'aller y manger !

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