Chapitre 55 (samedi 6 mai 2017)

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Ce soir, c'est pizza ! Le père de Kieran vient de garer la voiture sur le parking du retaurant. Nous n'avons pas pris le temps de repasser à l'appartement, l'après-midi à Bertheaume était super sportif et nous mourrions tous de faim.

À midi, exceptionnellement nous n'avions pas fait resto. Je voulais remercier Erwan de son accueil, et comme il ne voulait jamais rien que je paie, j'étais allé au marché dans la matinée. J'avais acheté tout ce qu'il me fallait pour préparer une ratatouille et du poulet pané. En rentrant, nous avions fait les révisions de mathématique qui étaient programmées et ensuite Kieran m'avait aidé à préparer le repas. Son père, qui avait un rendez-vous à la banque, avait été surpris à son retour, par les bonnes odeurs qui avaient envahi le salon.

Le serveur donne à chacun sa pizza, et nous nous précipitons tous les trois sur notre repas. Erwan est le premier à faire une pause. Il en profite pour nous servir un verre de Lambrusco, et pour engager la conversation.

– Alors, qu'est-ce que tu as pensé de ton après-midi, Arthur ?

– C'était génial. J'ai pas osé vous le dire avant, j'avais peur d'avoir l'air bête, mais c'était la première fois que je faisais de l'accrobranche.

– En tout cas, ça ne s'est pas vu. Tu as été incroyable, n'est-ce pas Kieran ?

Celui-ci me fait un grand sourire et replonge immédiatement la tête dans son assiette. Je réalise alors que je viens de découvrir une chose sur lui que je m'empresse de partager avec son père.

– Erwan, je crois que je viens de trouver la seule chose qui arrive à clouer le bec à ton fils. La nourriture !

Ma remarque le fait sourire, sous le regard faussement courroucé de son fils.

– Chais pas ma aute, che parle pas la bouje peine.

Cette fois nous éclatons tous les trois de rire.

– Merci à tous les deux, cette journée était vraiment géniale. Franchement, la tyrolienne au-dessus de l'océan, j'avais jamais rien fait d'aussi grandiose.

– C'est moi qui te remercie. Je crois que Kieran a trouvé un ami, et ça n'a pas de prix.

Je regarde mon camarade et je lui fais un clin d'œil qu'il me rend immédiatement.

Pour la première fois de ma vie, je me sens comme un adolescent normal, et je m'imagine quelques instants quelle aurait pu être ma vie, avec un père comme Erwan. Même si je me doute qu'il ne doit pas être simple d'avoir un papa militaire, et même si Kieran ne le voit pas souvent, au moins on sent qu'il y a une vraie complicité entre eux. Moi, le seul adulte avec qui je n'aie jamais été complice, c'était le chauffeur qu'avait mon père lorsque je suis entré au collège. C'est lui qui m'amenait à l'école et qui venait me chercher, et lorsqu'on rentrait, on discutait pendant tout le trajet de nos journées respectives. Les jours où mon père était à une réunion qui devait durer, il prenait le temps de s'arrêter dans une petite boulangerie pour prendre une tarte au citron pour lui, et un éclair au chocolat pour moi. Malheureusement, un an après, mon père était nommé dans un autre département me privant ainsi de la seule relation positive que je n'ai jamais entretenu avec un adulte. Ce gros con n'a jamais pensé qu'à lui.

– Ça va Arthur ? Tu as l'air soucieux.

Mon ami avait enfin terminé son repas, et je ne m'étais pas aperçu qu'il m'observait sans doute depuis déjà quelques secondes.

– Oui, ça va... c'est juste que... non, laisse tomber.

Est-ce que je peux vraiment me plaindre à Kieran de la relation que j'ai avec mes parents, alors qu'ils sont tous les deux vivants et que lui n'a plus que son père ?

– Non, dis-moi s'il y a un souci.

– OK, je me lance. Est-ce que je peux vous demander une faveur ?

Ils me regardent, tous les deux intrigués, et se contentent d'acquiescer d'un même signe de tête.

– Voilà, ce week-end n'est pas encore fini, mais les moments qu'on a passés tous les trois me manquent déjà. Je voulais savoir, si éventuellement, on pourrait refaire quelque chose avant la fin de l'année scolaire... enfin je ne veux pas m'imposer... C'est juste au cas où...

– Pour être honnête avec toi Arthur, je ne sais pas si ça sera possible avant juillet. Mais par contre, je te promets une chose, si tu es d'accord et bien sûr si mon fils l'est aussi, c'est qu'on t'amène en vacances avec nous cet été.

Je n'arrive pas à répondre. Les mots restent coincés dans ma gorge et je sens que mes yeux commencent à s'embuer. Décidément, depuis quelques semaines je me découvre sentimental.

À l'inverse d'hier, c'est Kieran qui tend son bras au milieu de la table pour attraper ma main et la serrer tout en prenant la parole.

– Ouahou ! Ça serait trop génial ! Moi je suis partant.

Je retrouve enfin l'usage de mon cerveau et je réussis à y construire une pensée cohérente, avant de la livrer à mes hôtes.

– Je ne m'attendais pas à ça, mais si c'est possible ça serait vraiment génial.

Erwan nous ressert un peu de vin et lève son verre.

– He bien ! trinquons à nos futures vacances !

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