Le temps d'un cigare

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Alors que vous êtes plus nombreux de jour en jour à me demander quelle est ma relation avec les cigares, à quel point ils me définissent, je me suis décidé à répondre à vos attentes.

Alors, tout d’abord, je veux m’adresser à ceux qui ne sont pas de ceux-là : même si vous n’êtes pas vraiment intéressé, je vous invite malgré tout à m’écouter pour une minute. Non pas pour vous inciter à fumer un cigare, là n’est pas mon intention. Mais pour le simple fait que vous puissiez apprendre quelque chose. Et que, ayant appris, la prochaine fois que vous rencontrerez quelqu’un qui fume le cigare, vous puissiez approcher la chose avec un peu plus de clarté sur ce qui se déroule.

Donc commençons par qu’est-ce qu’un cigare ?

La plupart pensent qu’il s’agit juste d’une énorme et gigantesque cigarette.

Ce n’est pas le cas. Pour tout vous dire, on ne pourrait pas être plus loin de la vérité. Une cigarette, vous pourrez regarder, contiennent plus de deux cent ingrédients. Le cigare, lui, est un produit très ancien qui a été dans les parages depuis plusieurs siècles. Il s’agit juste de tabac. De feuilles de tabac qui ont été assemblées, et je parle là des vrais cigares roulés à la main, à l’aide de pectine de fruit utilisée comme colle. Rien de plus que cela ; des feuilles de tabac, de la pectine de fruit, et un travail consciencieux à la main.

Les choses que j’aime, celles qui m’interpellent à propos du cigare, c’est qu’en créer un, cela prend du temps.

Pour certains d’entre eux, entre le moment où les graines sont plantées, sont arrosées et poussent dans le sol, sont récoltées, séchées et soignées, que le tabac soit assemblé en un cigare, le cigare lui-même soit soigné… Ce processus peut prendre cinq à six ans. Cinq à six années jusqu’à ce qu’il vienne à se trouver entre nos mains. Il ne s’agit pas d’un usine quelque part qui en imprime par centaines à la chaîne. J’aime le fait qu’il y a des artisans, des spécialistes, j’ose dire des artistes, qui sélectionnent les feuilles de tabac pour leur qualité, avant de les assembler de leurs mains.

Et de la même manière, une fois le cigare en notre possession, il y a une correcte façon de l’allumer, de l’apprécier afin d’en trouver sa valeur réelle.

De nos jours, je ne prends plus la peine d’emprunter l’autoroute ou le périphérique. Au lieu d’y passer une heure, j’en préfère trois dans les petites routes qui passent de villages en villages et au milieu des champs.

Dans un monde où il faut marcher d’un pas rapide, aller du bureau au supermarché, utiliser un micro-onde et une machine à café, j’aime à savoir que le cigare existe.

Alors que tous semblent si pressés, conduits si vite, le cigare, lui, est fait de contemplation. Il s’agit juste de s’asseoir et de faire les choses bien.

Le goût du tabac, par le sol et le climat qui l’a vu naître, dépend du pays dans lequel il a poussé. Il en est de même pour les spécialistes du café d'ailleurs. L’un trouve sa joie dans les particularités et les nuances des grains de différents pays. La chose est la même pour le cigare.

De plus, une pousse de tabac possède trois niveau de feuilles. Du premier plus proche du sol au troisième plus proche du ciel. Le second entre les deux. Et le parfum du tabac peut dépendre selon sa position. D’a quel point la pousse a pu grandir et approcher la maturation.

Les nuances sont si vastes qu’il est impossible, comme une cigarette, de tirer un cigare du paquet, le glisser entre nos lèvres, l’allumer et le consommer comme une routine, comme un rien. Le tout en une trentaine de secondes avant de foncer à nouveau sur le chemin d’une vie effrénée.

Aussi, il y a peu de gens qui fument réellement le cigare en suivant ses règles. Et j’aime cela. Je n’aime pas faire ce que les autres font, et je vais admettre que lorsque la société se lève et s’indigne pour dire cela est mal, cela me donne au contraire envie de m’intéresser à cette chose.

Mais, outre tout cela, l’acte de fumer le cigare est une chose qu’il faut contempler. Qui mérite notre attention. Il doit s’apprécier car lui faut qu'il se consumme à un rythme très spécifique, les feuilles intérieures et extérieures doivent brûler en même temps afin qu’il libère toute sa saveur.

Le cigare implique de prendre son temps pour lui, et toute la vie ralentit autour de cette relation.

L’homme doit apprendre à ralentir. A redevenir capable de penser réellement l'instant et de se poser. Il doit sortir de la meute et contempler le monde à nouveau. Et le cigare est capable de le pousser à cela.

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