Lourdes. La nuit. Le silence

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Emma ne s'endormait jamais la première. Elle épiait dans chaque susurrement, chaque soupir, les rires et les pleurs, témoins du monde intime de ses frères et soeurs. Lorsque tous s'étaient enfin endormis, elle s'octroyait un moment de solitude, luxe d'un quotidien qui exigeait plus d'actions que de rêveries. Au loin, elle fixait les points lumineux que la ville reflétait par milliers. À chaque fois, ce spectacle l'apaisait. Quoi de mieux qu'une fenêtre sur la nuit pour changer de point de vue en livrant ses angoisses à sa noirceur gloutonne ?

Lourdes. La nuit. Le silence

Louis,

Il est presque trois heures du matin et je n'arrive pas à fermer l'œil. Je ne sais pas comment on peut trouver le sommeil dans un palace. Je n'aurais pu imaginer qu'une pluie d'événements aussi surprenants puisse m'atteindre un jour.

La nuit est magnifique. J'ai ouvert les rideaux pour observer ses lueurs, comme autrefois lorsque je veillais sur mes frères et soeurs.

Je ne saurai sans doute demain te rapporter toute l'excitation et le trouble qui m'animent à cette heure tardive. Ces mots trouveront peut-être une issue à leur sort incertain.

J'éprouve ce soir une joie de vivre bien plus folle que lorsque ma vie n'était menacée d'aucun péril.

La maladie, la solitude et la mort... J'ai pourtant du mal à concevoir que ce qui nous condamne nous rapproche avec autant de force. Quelle ironie de trouver à tes côtés, cette complicité qui a toujours fait défaut à ma vie amoureuse !

De quoi m'interroger sur la nature des sentiments qui nous lient. Je dois te faire aveu : lorsque tu prononces le prénom de Pierre, j'ai l'impression de disparaitre à tes yeux et le mal que je ressens alors, me rend d'un égoïsme qui me désole.

La nuit est ivre de la noirceur de nos âmes, provocante comme jamais.

Elle convoque mes pensées sur le terrain des sentiments. Le cœur croit sans doute que tous les coups sont permis car, ce matin, j'ai espéré secrètement que Pierre ne revienne jamais. J'ignore comment une telle idée a pu traverser mon esprit ni comment j'ai pu souhaiter ce qui te ferait le plus souffrir en ce monde. Me pardonneras-tu ?

La nuit est hypnotique. J'écoute le souffle cadencé de ta respiration. Je t'entends me dire : « Aucune femme ne m'a jamais attiré. Tu es la première et tu seras la seule à partager ma chambre ».

La première et la seule. À ces mots, mon cœur bat au rythme de mes pensées : une relation unique a-t-elle quelque chose à craindre d'une concurrente ?

La question est désarmante, tu ne trouves pas ?

Il est bientôt quatre heures, l'heure idéale pour s'endormir dans un palace.

Tendrement à toi.

Emma

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