Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait plus songé à son prénom maudit, cependant ce n’est pas celui-ci qui l’affectait, c’était la question du jeune commandant. Cela lui avait donné bien des heures de réflexions durant lesquelles elle ne vit pas le temps passer.

Il lui avait fait prendre conscience d’une chose qui, jusqu’à ce jour n’avait jamais affecté Lilith. Au couvent, comme au monastère, personne n’utilisait de noms puisque tous avaient renoncé à leur famille pour celle de Dieu. Dès lors chacun n’employait plus que son prénom monastique. C’est la raison pour laquelle Lilith n’avait jamais accordé d’importance à cela. Elle n’avait qu’un prénom, comme tous les autres.

Le nom de famille lui semblait une chose lointaine et abstraite qui n’entrait pas dans la vie du couvent. Il était une famille, pour ceux qui y étaient acceptés. Avoir un nom y était donc inutile. Pourtant, le militaire venait de lui faire prendre conscience d’une chose, qui ne l’avait jamais effleurée. Tous les religieux avaient un nom de famille avant d’embrasser la religion. Elle le savait pour avoir assisté aux cérémonies d’intronisation. C’est seulement à ce moment qu’ils abandonnaient leur nom pour intégrer la famille du Seigneur. Elle, n’en avait pas. Elle n’en avait jamais eu.

Après cette première prise de conscience, une seconde vérité s’imposa à elle. Douloureuse et violente. Elle n’était pas nouvelle, mais trop concrète, trop réelle à la lumière de cet angle neuf.

« Je n’ai pas de nom, car je n’ai pas de famille. Je n’ai pas de nom, car je n’ai pas de père »