Message bien trop long pour vos vies trépidantes.

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Pendant que j’essaie de reprendre ma vie en main, de recoller les morceaux de moi que j’ai égarés depuis l’adolescence, j’ai gardé conscience.
Mes yeux, mon cœur ne se sont pas figés sur mon nombril. Et même si ma voix est étouffée par le fait de n’être personne, je n’ai pas envie de la fermer.
Je fais des efforts pour me construire un avenir un peu meilleur. Et pourtant, j’ai honte.
J’ai honte d’être un homme.
J’ai honte de mon pays.
J’ai honte de mon continent.
J’ai honte de la société à laquelle j’appartiens.
J’ai honte du monde dans lequel je vis.
Oh, qu’ils sont beaux, les discours des commémorations ! L’importance de l’Histoire, des souvenirs, pour ne pas refaire les mêmes erreurs…
Et ce sont ces mêmes bouches, pleines de mots creux, qui attisent les extrémismes, qui fustigent, amalgament, manipulent.
Le conflit est omniprésent — dans les infos comme dans le divertissement. Ça fait vendre, ça dope à la dopamine, mais surtout :
ça nous divise,
ça nous oppose,
ça nous endort,
ça nous affaiblit.
À tel point que nos petites idées, nos petites valeurs deviennent des vérités uniques.
Et ceux qui ne pensent pas comme nous doivent se taire. Par n’importe quel moyen.
La guerre ne nous touche plus. On peut voir mourir des enfants entre deux vidéos de chats quand on scrolle.
Les politiciens mentent effrontément, on le sait tous, et on ne fait rien.
Ils préfèrent laisser crever les plus faibles, surtout si ça permet d’éviter de trop chatouiller les plus puissants, les plus riches.
D'ailleurs les égos démesurés deviennent des idoles, des modèles à suivre.
Et moi, dans tout ça ?
Je suis sous traitement, suivi psychologiquement, parce que je ne trouve pas ma place.
Mais dans un monde pareil, des gars comme moi, on sert à quoi ? À devenir fous ? À finir par se faire sauter le caisson ?
Je me convaincs qu’après chaque nuit vient l’aube… mais quand je regarde autour de moi, quand je comprends comment fonctionne ce système…
dois-je vraiment attendre que la lumière revienne sur toute cette merde ?
Ce n’est pas du pessimisme de dire qu’on est foutus.
Qu’on a tout détruit.
Qu’on est le cancer de l’innocence, de la raison, de la nature.
Notre cruauté s’insinue dans nos silences, dans notre confort. Et c’est exactement ce qu’on attend de nous.
Alors si vous pensez qu’il n’y a rien à dire, rien à faire, vous participez.
Venez pas me parler de votre colère parce que y’a grève à l’aéroport et que vous risquez de perdre deux jours dans un cinq étoiles situé au milieu de gens qui n’ont pas le tiers de vos moyens.
Venez pas me parler de démocratie quand la majorité des gens sont des connards égoïstes.
Venez pas me parler de justice sociale, de féminisme, ou même d’humanisme, quand tolérance et liberté d’expression ne servent plus qu’à vomir des saloperies.
Venez pas me faire la leçon sur comment je dois mener ma vie alors que la société fonce droit dans le mur.
Venez pas me dire que vous n’avez pas de temps pour vous, alors que vous n’en donnez à personne d’autre.
Alors continuons.
Taisons-nous.
Fabriquons des armes.
Défendons la puissance.
Laissons mourir les enfants déjà traumatisés.
Divisons-nous par la foi, la politique, la couleur de peau, le genre ou ce qu’on en fait.
Laissons les riches se branler dans l’espace pendant que d’autres crèvent de faim.
Courons après le luxe, la surconsommation. Achetons notre petit lopin de terre pour faire comme tout le monde.
Entrons dans le moule occidental.
Et laissons couler les bateaux de ceux qui rêvent de nous rejoindre.
Parce que nos ignobles petites vies, nos privilèges de naissance, sont à nous.
Et rien qu’à nous.
Qui suis-je pour écrire tout ça ?
Personne.
Un fou parmi d'autres.
Et c’est précisément ce qui me rend légitime.
Car ce ne sont pas les fous qu’il faut craindre.
Ce sont ceux qui dirigent sans conscience, et ceux qui suivent sans réfléchir.
Ceci est un message bien trop long, écrit sous Xanax et CBD, après une séance de Tai Chi.
Il n’a rien d’impulsif.
C’est juste un débordement.
Un constat insupportable.
Je ne vous remercie pas.

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